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tome 1, Chapitre 38 « Fragments d'âme » tome 1, Chapitre 38

Je préparai mes valises en veillant à ne pas toucher aux affaires de la véritable Catherine. Même s’il ne me restait plus rien, je ne parvenais plus à prendre possession de son identité. Mon cœur était vide, habité par une profonde solitude. La seule chose qu’il me restait à présent était le coven… et la perspective de retourner au Monde.

— Nous partons, Milady ?

Maddy pénétra dans la pièce.

— Il n’y a plus de Milady ou Lady Catherine qui tienne, soupirai-je.

— Mais vous êtes noble de naissance, Milady, insista la jeune fille.

— J’étais noble. J’ai été déchu de mes titres et mon mensonge me rend indigne de les porter à nouveau. Le masque est tombé, Maddy. Maintenant… je suis Élia, juste Élia. Je… je partirai au crépuscule. Pensez-vous pouvoir présenter votre démission d’ici là ?

La jeune fille ébaucha un sourire et répondit :

— Bien entendu… Élia.

Malgré cette familiarité nouvelle, elle s’inclina avec respect avant de quitter la pièce. Mes sanglots coulèrent de nouveau. J’étais plus monstrueuse encore que ma descendante, qui avait sciemment initié cette supercherie.

— Tu es sacrément rusée, pour une sorcière, lança une voix.

Je sursautai en reconnaissant la voix mielleuse de Laurent. Instinctivement, j’attrapai un projectile avant de sentir une main glacée se refermer autour de mon poignet.

— Lève seulement ton arme et je t’envoie valser à travers la fenêtre, menaça-t-il.

— Quant à toi, ôte tes sales pattes de mon bras ou j’alerte la maisonnée.

Il ébaucha un sourire et me relâcha.

— Que fais-tu ici ? repris-je.

Sans ménagement, il souleva une mèche de mes cheveux et la sentit. Perplexe, je reculai et le toisai avec mépris. De quel droit se permettait-il de me toucher ?

— Tu sens bon… cela ressemble à une odeur de pêche. J’adorais en manger lorsque j’étais encore humain. Dommage que ton aura me répugne, autrement, je me serais fait un plaisir de goûter à tes lèvres.

Je rougis face à sa proposition et tentai de masquer ma gêne. Pour ma part, le Caché ne dégageait aucune odeur. Je discernai seulement sa peau froide et dure comme le marbre, ainsi que ses traits figés dans la fleur de la jeunesse. Il était difficile de déterminer son âge exact. Il ne semblait ni adolescent, ni adulte.

Lorsque le Caché prit conscience que je le détaillai, ses lèvres fines esquissèrent un second rictus. Sa main calleuse caressa ma joue avec douceur et sensualité, telle une plume.

— Il paraît que tu étais fiancée avant de venir ici… dit-il. Quel gâchis ! Enfin, trêve de plaisanterie. Je suis venu vérifier une hypothèse, maintenant que je suis certain que cette salope de Raonaid n’acceptera pas ma proposition.

Avant que je n’eusse le temps de réagir, il resserra ses doigts de marbre autour de ma nuque, jusqu’à couper mon souffle. Mes bras tentèrent de frapper son visage, mais la force du monstre m’obligea à capituler. Une douleur lancinante envahit ma nuque, qui finit par craquer. Un râle s’échappa de mes lèvres et la panique implosa dans mon corps.

Une boule de lumière, aux teintes bleutées, jaillit de ma poitrine et fonça droit vers mon ennemi. Celui-ci fut propulsé en arrière et la boule se transforma en un halo qui laissa apparaître… une jeune femme similaire à moi. Cette dernière poussa un râle d’agonie et s’effondra telle une vulgaire poupée de chiffons sur le sol.

Laurent et moi échangeâmes un regard ahuri et nous précipitâmes vers le cadavre. Je compris, à ma grande stupeur, qu’il s’agissait d’une copie de moi-même. Les yeux bleus de mon sosie semblaient dépourvus de vie et des tâches violettes marquaient sa nuque. Je tapotai sa joue afin de lui faire reprendre conscience, mais il n’y avait rien à faire.

Elle était morte.

— Par la merde du Démon-Créateur, Catherine avait raison ! Ce salaud tient bel et bien à te maintenir en vie. Il t’a accordé sa protection, Lady Montgomery.

Lorsque je posai à nouveau mon regard sur mon double, celle-ci avait disparu.

— Qui… qui… est cette femme ? m’horrifiai-je.

— Un morceau de ton âme, un fragment de toi qui a reçu la blessure à ta place pour t’empêcher de mourir.

— S’agit-il du… du don des morts ?

— Pas vraiment. Disons que le Démon-Créateur t’a accordé sa protection en attendant que tu le libères de sa malédiction. J’aurais aimé voir la réaction des villageois s’ils t’avaient traîné jusqu’au bûcher. Cette pâle copie aurait brûlée à ta place.

— Je préférerais posséder le don de tous vous détruire, rétorquai-je, plutôt que de survivre pour terminer mes jours dans cette forêt maudite.

— Tu peux acquérir ce pouvoir, minauda-t-il. Et bien plus encore, Élia Montgomery. Tu peux obtenir ce que tu veux de l’armée des morts et des Cachés.

— En respectant un pacte que vous avez trahi ?

— En demandant à cette armée de détruire toutes les protections magiques qui entourent les villages. Seuls les morts sont en mesure de rompre ce sortilège, car seul le Démon-Créateur peut détruire ce qu’il a créé.

— J’ai juré fidélité à Raonaid ! Elle a pris sa décision. Alors sors d’ici avant que je ne donne l’alerte.

— Tu es fidèle à Irène, rectifia-t-il. Raonaid t’a prise en traître, elle dirige son coven vers la mort et tu le sais autant que moi. Je t’offre une chance de survivre et de sauver les tiens… les occultes.

— Même si j’acceptais, les gardiens de la forêt nous empêcheraient de passer. Nous sommes pris au piège.

— Les gardiens de la forêt sont des morts dont l’âme a été condamnée à expier leurs péchés. Ils assassinent les intrus sur ordre de la Déesse. Si tu prends le contrôle de l’armée des morts, sorcière, alors ces cavaliers s’inclineront à tes pieds et obéiront à tes ordres.

— En quoi les Cachés nous seraient utiles si l’armée des morts peut tout détruire sur son passage ?

— Nous pourrions unir nos forces pour détruire notre ennemi commun.

— L’Antimonde ?

— Et leurs maudites créatures de l’enfer. Même avec cette armée de cadavres, les sorcières ne survivront pas au Fléau qui se propage. Seuls, les Cachés devront sans cesse se battre pour les repousser, jusqu’à ce que nos forces s’épuisent. Sans alliance, l’issue de cette lutte s’achèvera par la victoire de l’Antimonde.

— Pourquoi ne pas l’avoir précisé durant notre rencontre ?

— Parce que les sorcières ont refusé de nous écouter. Nous avons tenté de les contacter, mais personne n’a pris la menace au sérieux et elles nous ont rejetées du fait de notre nature… et de notre alimentation particulière. Mais vous, les occultes, nous comprenez.

— Lyra m’a dit que la brume avait envahi l’essentiel de ce monde. Est-ce vrai ?

— En effet, votre région est la dernière à survivre du fait des pierres magiques. Tout le reste du Demi-Monde est rongé par la brume ou par les miens, puisque nous résistons à ses effets.

Je lui tournai le dos, tentant de remettre de l’ordre dans mes pensées.

— Elle cernera bientôt ce village, renchérit Laurent. Même si les pierres l’empêchent encore de l’envahir, vous ne disposerez bientôt d’aucune ressource. Le fleuve qui alimente Endwoods et ses voisins sera bientôt intoxiqué.

— Dans ce cas, attendons que cela se produise. Loin de moi l’idée de protéger ces fanatiques, mais voir toute cette chair humaine dépérir sans laisser la possibilité de vous en nourrir me réjouit particulièrement.

— Tu ne comprends pas !

— Si, Laurent, je comprends. Tu as besoin de moi pour accomplir ta soif de conquête. Tu me demandes de vous offrir mon aide pour repousser les créatures de l’enfer et vous livrer l’Humanité en pâture !

— Une créature, rectifia-t-il. Le venin de la Juventus Babina nous dote d’une force égale à eux et il nous est facile de les affronter. Mais ces créatures ne sont rien face à celle que la brume menace d’apporter avec elle.

Face à mon air surpris, il ajouta :

— Les démons possèdent une hiérarchie. Le savais-tu ?

— Comme en Enfer ?

— Oui, sans nul doute. Leur société repose sur ce système. Contrairement à ce que les hommes pensent, les créatures de l’enfer sont très intelligentes. Elles disposent de leur propre langage, mais certaines sont capables de comprendre la langue commune.

— La langue commune ?

— La langue qui nous permet de nous comprendre, sorcière.

— Je croyais que… vous parliez l’anglais.

— L’anglais ? Je ne connais aucune langue qui se nomme ainsi.

— Mais… les sons qui parviennent à mes oreilles sont similaires à l’anglais ! Que je sois capable de parler le langage des morts est une chose, mais la langue commune, non !

Une fois encore, mes pensées s’embrouillaient. Il était vrai que les similitudes entre les deux mondes manquaient d’explications, mais les mots lus depuis mon arrivée ici étaient de l’anglais. J’étais prête à en mettre ma main au feu.

— À la tête de cette hiérarchie se trouve un démon doué de pouvoirs puissants, révéla Laurent. Lorsque la brume l’emmènera ici… hum… j’imagine qu’il faut le voir pour le croire.

— De quels pouvoirs dispose-t-il ?

— Celui de permettre à l’Antimonde de détruire ce monde.

Son ton grave et sérieux n’augurait rien qui vaille. Ses iris argentées se durcirent et ses traits se fermèrent. Pour la première fois depuis notre rencontre, sa crainte était palpable.

— Les Cachés sont l’avenir de l’Humanité, déclara-t-il. Si nous ne battons pas contre ce qui arrive, nous disparaîtrons. Je sais que le virus de Jouvence grandit en toi. Tu pourrais changer les choses, ouvrir une voie jusqu’alors interdite aux sorcières. Songe à leur avenir et aux croyances que tu chéris depuis toujours, Élia Montgomery. Elles peuvent survivre grâce à toi… ou se noyer dans les aléas de l’Histoire.

***

Alors que le soleil commençait à se coucher, je plongeai mon âme dans un sommeil astral, non pour voyager comme j’avais l’habitude de faire, mais pour étudier le don accordé par le Démon-Créateur. Puisque la mort m’apparaissait dans cette autre réalité, je distinguai mon mystérieux double. Ce fragment de mon âme flottait dans les airs face à moi.

Ses traits étaient figés, si lisses que je l’aurais confondu avec une statue de cire. Aucune trace de blessure ne marquait sa chair. Elle se tenait droite et son regard semblait éteint. Si j’avais donné des coups contre sa peau, celle-ci aurait résonné de la même manière que l’on frappe à une porte. Elle était vide, telle une coquille sans âme.

Lorsque je me relevai, la silhouette avait disparu. Consciente que je ne pouvais rien faire de plus pour le moment, je m’allongeai en sentant la même chaleur que j’avais ressenti lors de notre excursion dans la forêt m’inonder.

Avec aisance, je quittai la maison Hamilton. Dans les rues, tout était désert et silencieux. Je m’aventurai dans la forêt, me laissant guider par mon instinct. Dans cette partie, le Fléau avait tout détruit. Les arbres étaient morts, seules quelques feuilles mortes virevoltaient encore au gré du vent. La flore pourrissait et des dizaines de cadavres d’animaux gisaient au sol. Autour de moi résonnaient des bruits de pas, appartenant aux créatures de l’enfer.

Au détour d’un bosquet, le même où les Patrouilleurs m’avaient découverte, une jeune femme attendait. Catherine. Une ombre voilait encore sa silhouette, pourtant, je la distinguais plus nettement que la dernière fois. Lorsque son regard se posa sur moi, elle resta immobile. Elle leva la main et un cromlech apparut autour de nous. Un trou avait été creusé.

Je voulus m’avancer pour découvrir ce qu’il y avait à l’intérieur, mais Catherine m’en empêcha.

Les symboles gravés sur les pierres s’illuminèrent et des murmures se répandirent autour de nous. Catherine fit à nouveau de grands gestes et dessina un symbole dans le vide.

Serpenté, il ressemblait à un chemin.

Elle murmura dans un souffle sépulcral : la Vallée fantôme, le cromlech se trouve là-bas. Le destin du Démon-Créateur est lié à un cromlech. Tu dois en apprendre plus sur le cercle de pierre et l’armée des morts. J’ai… J’ai besoin de toi, ne… ne m’abandonne pas s’il te plaît.

Mon corps me rappela ensuite à lui. Je me réveillai, non pas en sursaut, mais à nouveau pleine d’énergie. J’étais passé maître dans l’art de la pratique du voyage astral.

Voilà donc ma dernière destination avant de reprendre la route vers mon foyer. Le cromlech de mes premières visions, là où le destin des sorcières se jouerait probablement.

Mais comment se rendre là-bas en évitant le Fléau et les créatures de l’enfer ?

***

— Vous souhaitez partir au cromlech de la Vallée fantôme ? s’étonna Maddy en attrapant ma valise. Mais… mais cet endroit est sûrement envahi par le Fléau, il… il nous sera impossible d’entamer ce voyage, nous risquerions de périr !

— Hors de question que vous m’accompagniez, Maddy ! Vous rentrerez chez vous dès que la lune sera favorable.

La jeune fille posa ses petites mains contre sa taille et me fusilla du regard.

— J’ai accepté de rentrer parce que je vous croyais assez entourée pour mener votre destin à bien. Mais il est hors de question de vous laisser aller dans cet endroit sans broncher ! Donc, je reste.

Je soupirai, consciente que c’était peine perdue. Maddy était plus têtue qu’une mule et se cacherais dans ma mallette si je refusais sa présence près de moi.

— Je dois y aller à tout prix. Le Démon-Créateur est déterminé à ce que je le libère de sa malédiction et sans l’armée des morts, il me sera impossible de rentrer chez moi.

— Comment pouvez-vous faire confiance à ces… monstres ? Qui vous assure que le Démon-Créateur et Laurent ne vous trahiront pas une fois votre part du marché remplie ?

— Je n’ai aucune garantie, admis-je à contrecœur. Du moins si je me présente à eux sans avoir assuré mes arrières au préalable.

Lorsque Maddy m’avait révélé la vérité sur ma descendance, il m’était apparu clairement que Catherine avait hérité de mes pouvoirs. Cela signifiait donc que l’un de ses ancêtres les avait éveillés. Et cet ancêtre serait moi. Peu importe quand naîtrait mon futur enfant, je refusais de me livrer en pâture à ces deux démons. Je devais éveiller mes pouvoirs et les contraindre à remplir leur part du marché.

— Catherine pourrait être sauvée, ajoutai-je. Les Cachés la détiennent dans un trou creusé, près du cercle de pierres.

— Vous espérez que Laurent la libérera une fois l’accord conclu ?

— Pourquoi pas ? Il a besoin de notre aide, sinon, il ne passerait pas son temps à minauder pour me persuader de combattre à ses côtés. Ce serait un bon compromis.

— Katharina les détestait. Elle pensait qu’on ne pouvait pas leur faire confiance et qu’ils se servaient de leurs alliés pour mieux les écraser ensuite.

— Vous partagez son point de vue, je suppose.

— Pas vous, Élia ?

— Je ne les apprécie guère, mais je crains que la situation ne nous laisse pas le choix. Le Demi-Monde a presque été détruit par l’Antimonde. Si les Cachés sont incapables de repousser les créatures de l’enfer à long terme, alors je crains qu’il ne faille revoir nos préjugés.

Je marquai une pause et ajoutai d’un ton las :

— Nous devons aspirer à survivre. Cette Déesse a créé et façonné ces trois mondes et je refuse de laisser des monstres les détruire. J’ai beaucoup trop perdu pour laisser une telle chose se produire.

— Même en détruisant l’Humanité ?

Je ravalai ma salive. La Déesse n’avait pas façonné ces trois mondes pour les voir s’entredéchirer. Pourtant, l’issue de cette guerre ne pouvait s’achever par la paix. Aucune religion ne nous sauverait. La peur nous rongeait et nous rendait faible.

Le monde idéal dont j’avais rêvé ne se bâtirait jamais.

— Après ce que j’ai fait à mes amis, j’imagine que détruire l’Humanité sera un jeu d’enfant, soupirai-je.

Je marquai une pause, et ajoutai :

— J’aurais dû me laisser traîner sur ce bûcher.

— Vous avez fait le nécessaire pour survivre. Cessez de vous en vouloir. Vous n’avez pas eu le choix et…

— Si, Maddy. J’ai eu le choix. Lorsque les juges ont ordonné l’arrestation des Mortagh… cela m’a procuré une joie sans nom. Le plaisir que j’ai éprouvé à ce moment-là… jamais je n’avais ressenti quelque chose d’aussi fort. La trahison de mes amis fut même secondaire.

Maddy se figea, conservant un visage de marbre pour ne pas dévoiler l’horreur qui dressait ses poils sur sa peau hâlée.

— Vous devez, dans ce cas, expier vos péchés. Si vous vous laissez aller, leur sacrifice aura été vain.

— Combien de sacrifices devrais-je faire pour comprendre enfin les tenants et aboutissants de ma présence ici ? Pauvre Catherine… elle… elle m’admirait tellement, alors que je ne vaux guère mieux que les Mortagh.

— Cessez de vous fustiger, Élia. Pour revenir à notre quête, je dois vous avouer quelque chose. Katharina savait que Laurent pouvait la capturer à tout moment. Alors pour éviter d’être torturée et de leur révéler trop d’informations, elle a fabriqué un élixir spécial. Il… il permet à celui qui le boit de sombrer dans un sommeil artificiel. Cette potion empêche également les Cachés de lui faire du mal, comme si un bouclier magique la protégeait.

— Que voulez-vous dire ?

— Tant qu’elle demeure sous l’influence de ce sortilège, elle ne peut pas mourir.

Un frisson parcourut mon échine. Être enterrée vivante était une mort atroce, mais rester consciente était plus terrible encore. Cela expliquait sans doute pourquoi les forces de ma jumelle s’amenuisaient à chaque nouvelle apparition.

— Elle est coincée entre les mondes des vivants et celui des morts, renchérit la jeune fille. C’est un fantôme prisonnier de son état, réduit au silence. Et vous seule pouvez entendre ses appels à l’aide.

— Et comment ce sortilège peut-il être rompu ? Suffit-il de la libérer du trou dans lequel ces monstres l’ont enterré ?

— Non, il faut un antidote spécial.

— Et où se trouve-t-il ?

— En ma possession. Enfin, jusqu’à la nuit de votre départ pour le coven. Laurent s’est introduit ici pour le récupérer.

Je… je sais que j’aurais dû partir à sa recherche et la sauver. Mais Laurent me terrifie, je… j’avais peur pour ma vie. Si j’avais été une sorcière, peut-être aurais-je trouvé le courage de l’affronter.

***

Je rejoignis le hall d’entrée, la mort dans l’âme. Le soleil allait bientôt se coucher. Maddy m’attendait, nos mallettes aux pieds et étreignait Cristina avec émotion. La cuisinière versa une larme et lui souhaita un bon voyage.

— Je n’oublierai jamais ce que vous avez fait pour moi, dis-je. Que le Seigneur vous bénisse, Cristina.

La cuisinière ouvrit ensuite la porte et je quittai la demeure sans me retourner. J’étais soulagée, heureuse d’enfin quitter cet endroit et inquiète face à l’avenir incertain qui nous guettait, même si la présence de Maddy me consolait.

Alors que nous franchissions le portail, un hennissement retentit. Je relevai la tête et découvris Malcolm, adossé contre une diligence. Un magnifique étalon, doué d’une flamboyante crinière noire, l’accompagnait.

— Du calme, Bourru, dit-il en le caressant.

J’arquai un sourcil, surprise par le nom de l’équidé.

— Vous l’avez nommé en fonction de votre personnalité ? ironisai-je.

Le Patrouilleur haussa les épaules d’un air indifférent. Sa longue chevelure brune était détachée et pour la première fois, je me surpris à le trouver séduisant, en dépit de ses traits fermés et son cynisme assumé. Je détestais Malcolm. Malgré son aide décisive dans mon procès, je le soupçonnais de m’avoir volontairement réintégré à Endwoods pour servir ses intérêts.

— Bourru me ressemble, confirma Malcolm. Il ne fait pas confiance à n’importe qui et ne se préoccupe guère d’être aimable. Dans un village comme celui-ci, c’est le meilleur comportement à adopter. Quoi que, les manipulatrices de votre espèce tirent aussi leur épingle du jeu.

Derrière le Patrouilleur se trouvait une diligence. Le cocher, un vieil homme à la barbe grisonnante, agitait ses genoux en signe d’impatience.

— J’ignorais que vous étiez cocher à vos heures perdues, dis-je. Que faites-vous ici ? Vous êtes venu chercher de nouvelles personnes à sacrifier ?

— Je suis venu vous escorter, Lady Montgomery, annonça-t-il. Lady Lyra souhaite vous héberger, vous et votre domestique, le temps que vous trouviez une solution.

— Elle est déjà trouvée. Maddy et moi quittons ce village. De plus, Lady Lyra m’a sommée de quitter la demeure de Lord Hamilton. Nous ne sommes plus les bienvenues ici.

Le cocher commença à s’éclaircir la gorge et à froncer les sourcils en direction du Patrouilleur. Malcolm lui lança une pièce pour le calmer, caressa de nouveau son cheval et répliqua :

— Archibald Deauclair nous attend au manoir. Lady Lyra l’a fait mander ici car elle souhaite nous parler. Elle a une annonce importante à nous faire.


Texte publié par Elia, 10 février 2018 à 23h59
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