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tome 2, Chapitre 18 « La croisière » tome 2, Chapitre 18

Je n’arrive pas à fermer l’œil, ce voyage m’obsède bien trop. Je veux me trouver à bord de ce bateau, je veux être enfin seule avec Elya, en espérant que rien ne viendra troubler la tranquillité de notre voyage. Il n’y a pas de raison. Elya a normalement pris toutes les dispositions pour que nous ne soyons pas dérangés. Il veut que notre lune de miel soit parfaite et que nous puissions enfin consommer notre mariage. J’attends ce moment depuis tellement longtemps !

Je ne suis pourtant pas ce genre de fille à ne penser qu’à cela, mais mes sentiments pour Elya sont forts. Je veux être avec lui depuis que j’ai posé mes yeux sur lui et depuis cet instant, il s’est écoulé de nombreux mois. L’attente a été trop longue, j’arrive au terme de ma patience. Elle a des limites.

Finalement, je me tourne et me retourne dans le lit, en quête de sommeil, mais il se refuse à moi. Le pauvre Shou qui dort à mes côtés n’est pas vraiment heureux que je le dérange ainsi et grogne souvent en tentant de trouver une position confortable jusqu’à ce que les draps bougent la prochaine fois. Le temps me paraît long, insupportable, j’ai même l’impression d’avoir trop chaud. Il faut que je m’occupe en attendant le lendemain, je n’ai pas le choix, sinon je pense que je vais devenir folle.

Je me lève alors, saisis ma robe de chambre et m’en vêtis, puis arpente les couloirs du château jusqu’à la chambre de Toriel. J’hésite un long moment. Je voudrais entrer pour la réveiller et lui proposer un bain de minuit, mais je viens de penser à une chose : et si elle dormait avec Mélisandre ?

J’ouvre doucement la porte et passe ma tête par l’entre-bâillement. Je n’aperçois pas grand-chose de là où je me tiens, l’obscurité est épaisse, mais je crois entendre un ronflement, suivi d’un petit gémissement grave avant que les draps ne se froissent, signe d’une agitation dans le lit. Je pense que Mélisandre est là, je ne vais donc pas les déranger. Mais alors comment occuper le restant de ma nuit ? Si je m’aventure seule au-dehors et que je suis surprise, Elya en aura vent et me reprochera aussitôt d’avoir été imprudente. Et il n’aurait pas tout à fait tort, je ne peux pas me permettre ce genre de fantaisie. Plus maintenant. Elya est devenu magicien et moi je suis humaine, je pense que nous allons rapidement devenir des cibles de choix pour ceux qui veulent s’approprier le trône.

Je retourne donc dans ma chambre, contrainte d’attendre que le temps passe. Finalement, l’ennui finit par m’assommer et je m’endors enfin.

***

Il y a du monde sur le port. En vérité, une quantité de personnes. Les gens, ici, sont tellement nombreux qu’il est impossible de tous les compter. Se frayer un chemin parmi une foule aussi dense est plutôt compliqué et je me fais bousculer de toutes parts par des personnes de toutes les races. Certains sont de toute évidence des clients de la croisière, cela se remarque à leur style vestimentaire ; d’autres travaillent ici à n’en pas douter. Leurs vêtements, leur démarche et même leur langage les différencient assez facilement. L’odeur du poisson et de l’eau salée envahit le port tout entier. Les planches des quais sont humides. J’imaginais que l’endroit serait plus calme et plus propre étant donné qu’il accueille un des plus grands bateaux de croisière du monde, mais je me suis trompée.

Mon cœur bat fort dans ma poitrine, je suis émue car c’est enfin le jour que j’attendais avec tellement d’impatience, mais la foule, la chaleur, le bruit et l’odeur me font rapidement oublier ma joie. Je perds Elya des yeux, mais je continue malgré tout d’avancer dans l’espoir de tomber nez à nez avec lui. Je tiens mon gilet d’une main et la valise de l’autre, mais elle est lourde. Elya ne pouvait pas la porter pour moi, il est déjà encombré par la sienne et ma deuxième valise. Je ne comprends toujours pas pourquoi il n’a pas voulu être accompagné par ses hommes, ils auraient pu nous aider. Au moins pour le transport de nos bagages.

— Amaranthe !

J’entends sa voix, mais je suis incapable de le voir. Je connais pourtant son visage par cœur, je pourrais le retrouver dans le noir, le reconnaître parmi des milliers de personnes, alors pourquoi est-ce que je ne le vois pas ?

Je sens un talon aiguille s’enfoncer dans mon pied et j’inspire profondément pour ne pas hurler de douleur. La jeune femme qui m’a marché dessus ne me présente pas d’excuse, elle n’a probablement pas remarqué qu’elle venait de piétiner quelqu’un. Je serre les dents et pince les lèvres en essayant de retrouver les sensations dans mon pied, mais les bousculades et les piétinements continuent de plus belle. Ce n’est pas ainsi que j’imaginais mon début de séjour, le pied bandé et incapable de pouvoir me déplacer, mais je n’ai quasiment plus de force dans mon pied.

Je m’obstine pourtant et je sens tout à coup une main me saisir le bras. Offusquée par un geste aussi déplacé, j’affiche un air courroucé et me tourne vers celui qui a osé être si familier avec moi. Ce n’est autre qu’Elya lui-même. Il n’a plus aucune valise dans les mains !

— Tu es lente, me dit-il.

— Où sont les bagages ?

— J’ai trouvé un porte-bagages, pose tout ici. Allez, viens !

Je pose ma valise sur les deux autres et Elya tire le chariot. Moi, je le suis de près pour ne plus le perdre. Lorsqu’il tourne la tête pour s’assurer que je suis toujours là et en vie, il remarque alors mon claudiquement et s’arrête, l’air inquiet.

— Tu es blessée ?

— Ce n’est rien. Avançons, j’ai hâte d’arriver !

Il acquiesce et nous avançons. Moi, je n’en reviens pas de ce que je vois. Le bateau qui est à quai est impressionnant par sa grandeur. Il est long et très haut. Il doit y avoir une dizaine d’étages, car je ne compte plus le nombre de vitres. J’imagine qu’il doit y avoir également de quoi s’occuper, du genre une piscine ou un spa, d’autres choses du genre.

Nous arrivons sur le pont. Lorsque je pose ma main sur la rambarde, je sens comme une douce vibration. Déjà la texture seule du bois suffit à me faire savoir que les places sur ce bateau sont extrêmement chères. Je n’en reviens toujours pas, c’est comme si je me trouvais dans un rêve merveilleux.

J’ai l’impression d’être une princesse, mais je suis mieux que ça. Désormais, je suis une reine.

À ce propos, j’imaginais que les gens se prosterneraient devant nous et nous laisseraient un passage, mais Elya a probablement dû tout organiser pour que notre arrivée soit discrète, et les gens sont trop nombreux et préoccupés ici pour se soucier de saluer leur roi. Ou peut-être s’agit-il simplement d’une des règles qui régit ce monde et ce n’est pas plus mal ainsi. Elya serait alors vu comme un roi modeste, j’apprécie.

Nous nous dirigeons vers la première porte et dès que nous la franchissons, un homme élégamment vêtu accourt pour s’occuper de nos bagages en nous assurant qu’il va nous les amener dans notre chambre. Elya se dirige vers la réception, probablement pour s’annoncer, mais moi je reste littéralement bouche bée par ce que je vois. L’endroit est tellement majestueux que j’en ai le souffle coupé.

Tout est boisé. Un bois brillant, lumineux, probablement rare et cher. Un bois foncé aussi. Les sols sont recouverts pas de grands tapis rouge sang brodés d’or. Des plantes et des statues ont été dispersées à des endroits stratégiques pour agrémenter le lieu. Des lustres pendent au plafond, ils fonctionnent avec les runes. Le couloir où nous sommes est haut de plafond, mais la salle d’après est juste infiniment plus haute. J’aperçois quelques tables vêtues de nappes blanches, il s’agit peut-être d’une salle à manger.

— Amaranthe !

Elya me fait signe de le suivre et je lui emboîte le pas. Nous entrons dans la salle et lorsque je lève la tête, je m’aperçois que si la salle est si haute, c’est tout simplement car elle est composée de plusieurs étages. À ma gauche se tiennent des escaliers qui mènent au premier étage et le couloir longe entièrement les murs de la salle, un peu comme si nous nous trouvions dans un théâtre. D’ailleurs, c’est un peu le cas étant donné que le fond de la pièce est occupé par une grande scène. Les rideaux rouges sont fermés, mais j’imagine qu’il va y avoir des spectacles et des représentations ce soir.

Je ne sais pas combien il y a d’étages, mais ils sont nombreux, c’est incontestable. Malheureusement pour moi, nous sommes manifestement logés au dernier étage. Dommage qu’ils ne connaissent pas l’existence des ascenseurs. À ce sujet, comment nos bagages vont-ils être montés ? C’est une véritable torture de gravir toutes ces marches ! Comment ont-ils osé placer leur roi à cet étage ? Ça en serait presque insultant. L’effort m’épuise et faire souffrir un peu plus mon pied.

Elya s’immobilise enfin devant une porte et l’ouvre. Il s’efface pour me laisser entrer la première et là encore, je reste sans voix. J’imagine que ce doit être la suite royale. La chambre est somptueuse, tout de bois marbré, avec un vaste lit à baldaquin aux draps de soie, une cheminée, des tapis, une coiffeuse et probablement une salle d’eau, car j’aperçois une autre porte au fond de la pièce.

Cet endroit est un rêve. J’avance lentement sans savoir où poser mes yeux. Tout n’est que luxe et richesse. Je n’ai jamais apprécié me trouver dans ce genre de lieu, je les considérais toujours comme vides, froids, sombres, glauques… Mais là, tout est tellement différent. J’en perds mes mots et mes pensées se mélangent dans ma tête.

Ici, dans cette chambre, je sais que tous mes rêves seront réalisés.

Nos valises sont déjà là. Je m’avance et m’assois dans le lit. Je m’enfonce dans le matelas et la douceur des draps sous mes doigts me laisse émerveillée.

Elya referme la porte derrière lui et s’approche de moi d’un pas rapide. Je le vois s’agenouiller en face de moi. Étonnée, je me redresse.

— Elya ? Mais qu’est-ce que tu fais ?

Il retire ma chaussure et observe attentivement mon pied meurtri par tous les coups qu’il a reçus. Je ne me rendais pas compte à quel point la chose était importante, il est violacé. Le visage d’Elya se ferme. Il ne semble pas très content de savoir que sa femme a été aussi mal traitée.

— Je ne sais pas si je peux te soigner avec mes pouvoirs…

— Ne t’épuise pas inutilement. Un bandage fera amplement l’affaire.

— Je suis désolé pour ce désagrément, Amaranthe.

— Ce n’est pas de ta faute.

Il soulève mon pied entre ses deux mains et dépose un baiser délicat dessus. Un baiser qui m’arrache quelques frissons. Ses lèvres remontent lentement le long de ma jambe et je ne peux m’empêcher de hausser les sourcils, surprise. J’ignorais qu’il était si pressé, je pensais pourtant que nous ferions ça ce soir, après un dîner romantique, lorsque nos esprits seraient fatigués et que j’aurai l’impression de flotter dans un rêve tant tout ceci me paraît irréel. Depuis que j’ai débarqué dans ce monde, j’ai l’impression que je n’ai pas eu droit à un seul instant d’intimité avec Elya. À présent, nous avons tout un mois devant nous et même plus. Je crois que j’ai du mal à assimiler l’information.

Les lèvres d’Elya capturent les miennes et je réponds avec ardeur à son baiser. La sensation que me procure ce baiser me fait l’effet de centaines de papillons en plein effervescence dans mon ventre et une curieuse chaleur m’envahit. Je sens mes joues s’empourprer.

Ce ne serait pas la première fois que je le fais, mais avec Elya, tout est une première fois. Je me sens un peu timide, nerveuse et maladroite. Je ne sais pas comment m’y prendre de peur de le décevoir et peut-être doit-il le sentir, car il prend les devants. Il se redresse de toute sa hauteur et je suis contrainte de lever la tête pour voir son visage, avant qu’une ombre ne passe sur mon corps et qu’Elya s’approche, me forçant à m’allonger sur le lit. Là, sa bouche vient déposer quelques baisers au creux de ma gorge et je ferme les yeux pour savourer cet instant en imaginant ce qui va suivre. Et, Ô bon Dieu, que c’est délicieux !

***

J’enfile le collant. Je ne m’étais pas rendue compte du nombre de couches de vêtements que je portais jusqu’à maintenant, mais ça n’a pas dérangé Elya pour autant. Je ne sais pas trop comment expliquer mon état d’esprit à cet instant précis. La seule chose que je sais, c’est que je suis tout à la fois ébahie et ravie. Je me tourne alors vers Elya. Il est resté dans le lit, nu comme un ver. Seuls les draps couvrent son corps. Il me sourit et laisse promener ses doigts le long de ma colonne vertébrale. Je frissonne.

— Tu es absolument ravissante, me murmure-t-il.

— Non, c’est toi qui es ravissant. Tu es sculpté comme un dieu…

— Ah, aurais-tu eu l’occasion de rencontrer un dieu sans m’en avoir parlé, coquine ?

Un sourire se dessine sur mon visage, mais je préfère ne pas lui répondre. Je veux encore laisser défiler le film de nos ébats dans mon esprit. Et quand je pense que ce rêve va durer si longtemps, je n’en suis que plus heureuse ! Elya est enfin à moi, rien ni personne ne pourra se mettre au travers de notre chemin pour cette fois. Nous sommes seuls, livrés à nous-mêmes, entourés de quelques milliers de touristes, mais Elya a refusé la présence de ses sujets ou de ses soldats. Il a changé d’avis au dernier moment concernant ce détail. Notre voyage se déroule dans la plus grande intimité et le plus grand secret. C’est ce qui assure notre protection.

— J’ai soif, je dis tout à coup après m’être aperçue combien ma bouche est sèche.

— Je peux faire monter du champagne, si tu le souhaites.

— Non, j’ai envie de visiter le bateau !

— Comment ? Refuserais-tu de rester en compagnie de ton cher et tendre mari ? Alors qu’il te propose une journée de rêve ? Te crois-tu réellement capable de résister à ce corps de rêve, sculpté par la main d’un dieu ?

Je ne peux m’empêcher de m’esclaffer. Depuis que je suis dans ce monde, jamais je ne me suis sentie aussi heureuse, aussi légère, aussi libre que l’air.

Je me penche par-dessus Elya pour lui voler un baiser, mais j’en profite également pour laisser ma main se promener sur son torse. Sa peau est incroyablement douce.

— Oui. Je veux réserver cet instant pour ce soir.

Il affiche une moue boudeuse, mais je ne cède pas pour autant à son petit caprice. S’il pouvait lire mes pensées, je pense qu’il aurait très largement compris ma décision. Seulement, je crois qu’il ignore à quel point je l’aime réellement. J’ai besoin de cette pause pour prendre pleinement conscience de ce qui vient de se produire et réaliser que cela va encore arriver ce soir et dans les jours qui suivent. Et oui, je veux également visiter ce bateau qui promet de nombreuses surprises. Je veux réaliser la chance que j’ai. Maintenant, je comprends mieux pourquoi ce portail s’est présenté à moi. Il m’a offert une autre vie, une vie qui me correspond, me convient et me plaît. Je ne me suis jamais sentie aussi vivante !

— Allez, file donc petit papillon, mais évite de te perdre !

— Je demanderai mon chemin si ça arrive.

Il me lance un petit regard de reproche, mais je l’embrasse une fois de plus pour dissiper son mécontentement avant de quitter la chambre.


Texte publié par Nephelem, 3 mai 2019 à 12h23
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