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tome 2, Chapitre 11 « Le retour » tome 2, Chapitre 11

Le retour

Tous les jours qui s’écoulent depuis que je suis arrivée dans ce village, à Horizon, est une renaissance pour moi ainsi qu’un nouvel espoir, celui de voir arriver Elya. Je n’ai pas eu le temps de m’ennuyer en attendant et ce n’est pas plus mal. J’ai visité le village, Jack m’a permis de faire quelques emplettes, je me suis également essayée à la cuisine dolomeniane, j’ai appris à lire le dolomenian, j’ai fait quelques promenades à cheval… Et surtout, j’ai pu retrouver quelques empreintes de mon monde, des empreintes desquelles je me suis imprégnée et qui ont fait ressurgir d’anciens souvenirs. Ils ont été tout à la fois agréables et mauvais. Agréables dans le sens où je retrouvais quelque chose que j’avais perdu, mais mauvais dans le sens où ma vie n’a pas toujours été parfaite. C’est à ce moment-là que je me suis rendue compte d’une chose véritablement importante : cette vie-là, je n’en veux plus. C’est terminé. Je me suis battue et j’ai durement combattu pour acquérir des choses qui ne m’ont jamais été données pour des raisons obscures. Aujourd’hui, je suis acceptée malgré mes faiblesses et mes défauts et j’ai l’opportunité de changer, de transformer mes défauts en qualités et de créer un monde meilleur. Voilà quel est mon objectif aujourd’hui.

Aujourd’hui est une journée particulièrement belle. Il fait un peu froid et la température va continuer de baisser, m’a assuré Jack, mais le ciel est très beau. Il est bleu, parsemé de teintes orangées et rosées à quelques endroits, avec de longues traînées blanches. C’est sublime. Je souris et inspire profondément pour respirer l’odeur des fleurs qui m’entourent. Je suis dans un pré et je chevauche Céleste, un étalon d’un blanc très pur, une race exotique dans ce monde. Avec lui, je n’ai pas besoin de selle. Il me comprend, il sait ce que je veux, quand je le veux et où je le veux. Lui et moi, nous ne sommes plus qu’un. Avec lui, je me sens libre et complète et je n’avais plus ressenti un tel sentiment depuis ma rencontre avec Ysiel. Je sais désormais ce que je veux et de quoi je suis capable. Ysiel ne parviendra pas à m’arrêter en si bon chemin.

Céleste s’ébroue et s’arrête pour brouter tranquillement. Moi, j’écarte les bras et laisse la brise me caresser, s’engouffrer dans les manches vaporeuses de ma robe et caresser ma peau nue sous l’habit léger. En temps normal, dans mon monde, c’est une sensation que je n’aurais pas aimée. Là-bas, j’étais trop superficielle et trop matérialiste. Je m’accrochais à des valeurs inutiles et futiles. Maintenant, je redécouvre les choses sous un nouvel angle et je m’aperçois que chacun de ces deux mondes a des quantités de choses incroyables à nous offrir, mais nous sommes aveugles, nous n’en profitons pas assez et c’est bien dommage. Il y a tant de choses à savourer, déguster, profiter, voir, contempler, mais nous voulons toujours plus, toujours plus grand et toujours plus puissant. Si bien que nous ne voyons plus la beauté naturelle de ce monde si fantastique. Moi, j’ai l’incroyable chance de redécouvrir tout cela et cette fois, il est hors de question que j’en détourne le regard et rejette ce que le monde m’offre.

J’entends tout à coup un bruit de sabots et me tourne sur ma selle. Le petit garçon, Joré, celui qui s’occupe des animaux de Jack, vient à ma rencontre. C’est assez peu habituel de sa part et j’avoue que sa venue m’intrigue au plus haut point.

— Dame Amaranthe !

Il parle le dolomenian et c’est grâce à cela que je peux le comprendre. Céleste redresse la tête et se tourne alors que Joré s’arrête à ma hauteur.

— Dame Amaranthe, ils sont là ! Sire Elya et son armée sont enfin arrivés !

À peine ces paroles prononcées, tout ne devient plus qu’un rêve, la réalité se détache totalement de moi et tout me semble tout à coup lointain : les sons, les voix et même les paysages. Je ne me rends plus vraiment compte de ce qui se passe, ni de ma chevauchée à travers champ ni de mon approche du camp. Elya n’avait aucune raison de s’arrêter là, il aurait très bien pu tracer son chemin, mais Jack a probablement dû trouver un moyen pour l’obliger à faire halte, comme il me l’avait promis. Il a d’énormes ressources et c’est un atout précieux. Je pense qu’il va nous être d’une très grande utilité dans les jours à venir.

Lorsque j’arrive aux abords de la première rangée de tentes blanches, j’appelle Elya, j’interroge des soldats, mais tous me répondent la même chose : il est parti avec un autre humain. Jack l’a probablement conduit chez lui et l’attaque aura sûrement lieu ce soir. Je ne dois pas m’en mêler au risque de compromettre la mission, même si ce n’est pas l’envie qui m’en manque.

Je rebrousse donc chemin pour me rendre jusque chez Jack et je confie mon cheval à Joré. Lorsque j’entre dans la cuisine, Jack est là, en compagnie d’Elya. Quand je fais mon entrée, tous les deux tournent la tête vers moi et je me sens rougir, mais ce n’est pas pour autant que je détourne mon regard d’Elya.

— Elya, tu es de retour ! je m’exclame, ravie.

Si ça ne tenait qu’à moi, je me serais déjà jetée dans ses bras pour l’embrasser, mais il est fiancé à Ysiel et il est encore sous l’influence du sirop.

— Amaranthe ? Mais que faites-vous ici ?

Je me tourne vers Jack et le regard éloquent qu’il me lance veut tout signifier. Je ne peux pas lui raconter la vérité au risque de l’alerter concernant nos intentions à Jack et moi.

— Hé bien, je voulais visiter un peu le pays étant donné que je suis libre de toute obligation.

— Vous êtes censée être sous la protection de Septuna !

— Ah oui ? Tu veux peut-être dire comme Edgard ? J’ai bien vu de quelle manière il était traité et je n’ai pas envie de finir comme lui, à moisir dans une cellule en attendant que le temps passe tranquillement !

— Amaranthe ! Vous représentez un danger pour le royaume tout entier alors ce n’est sûrement pas votre égoïsme qui va y changer quoi que ce soit. Vous retournerez à Septuna, quoi qu’il en coûte.

— Ne vous attendez pas à ce que je capitule aussi vite.

— Non, je ne m’y attends pas. Depuis le début vous attirez les problèmes et les ennuis sur vous et vous me donnez du fil à retordre avec votre comportement puéril. Je n’espère plus rien de vous, de toute manière.

Les larmes me montent aux yeux. Je sais qu’il dit tout ça sous l’influence du sirop, mais ça n’en reste pas moins blessant.

— Depuis que vous avez rencontré Ysiel, vous êtes devenu ingrat, méchant, cruel, froid et distant. Vous êtes devenu une pourriture et le pire, c’est que vous ne vous en rendez même pas compte !

— Amaranthe, vous devriez peut-être monter vous coucher, vous semblez épuisée.

Ça, c’était une intervention désespérée de Jack qui voit la situation se dégrader de secondes en secondes et je saisis l’occasion pour quitter la pièce d’un pas furieux et gravir les escaliers en produisant le plus de bruit possible pour faire clairement comprendre à Elya ma colère. J’espère qu’il l’a bien sentie et qu’il va un tant soit peu réfléchir à la situation, mais j’en doute très sérieusement.

Je me jette sur le lit et laisse mes larmes couler en ressassant inlassablement les paroles d’Elya. Jamais je n’aurais pensé qu’il puisse me dire un jour des paroles aussi cruelles. Le pire étant qu’il a recommencé à me vouvoyer comme si je n’avais jamais rien représenté à ses yeux, comme si notre amour n’avait jamais existé. J’espère que les effets du sirop vont rapidement se dissiper afin que je puisse retrouver le Elya que j’ai connu et qui m’a charmée. Celui qui m’a aimée, celui qui a voulu protéger notre amour, celui qui venait à mon secours. Il me manque terriblement.

C’est dans les larmes que je m’assoupis et la nuit s’écoule rapidement. C’est une nuit sans rêve.

Lorsque je me réveille au lendemain, je me souviens du retour d’Elya et je bondis hors de mon lit pour dévaler les escaliers et me rendre dans la cuisine, dans l’espoir que Jack soit déjà levé. Et il l’est effectivement.

— Alors ?

— La mission est un franc succès ! me dit-il en souriant. Toutes les bouteilles ont été détruites, même celles dissimulées un peu partout dans le camp. J’ai accompagné mes sbires et utilisé ma magie pour être certain qu’il ne reste plus aucune de ces maudites bouteilles.

J’en aurais presque pleuré et je sens un poids lourd s’envoler. Je me laisse alors choir sur une des chaises, heureuse, et Jack me sert un verre de jus d’orange.

— Je suis désolé pour la façon dont Elya vous a traitée la veille, dit-il.

— Ce n’est pas à vous de présenter des excuses et il était encore sous l’influence du sirop.

— J’ai peur que l’influence ne dure encore quelques jours avant de se dissiper et qu’elle n’agisse comme une drogue. Malheureusement, Elya veut vous emmener avec lui et il risque d’être exécrable et abominable. J’espère que vous avez des nerfs d’acier.

— Pas vraiment, mais j’ai de l’espoir.

Il me sourit et je bois une gorgée de jus d’orange. Après avoir mangé avec appétit, Jack m’accompagne jusqu’aux écuries pour m’aider à préparer Fidèle. Je lui offre les deux autres chevaux que j’ai apportés avec moi en guise de cadeau pour tout ce qu’il a fait pour moi.

À peine avons-nous terminé de seller Fidèle que je vois Elya et Mélisandre arriver en trombe, le regard furieux. Ça y est, le camp doit être sans-dessus sans-dessous, ils ont dû découvrir les dégâts.

— Jack, est-ce vous qui avez détruit les bouteilles de sirop ? vocifère-t-il.

Je me raidis, étonnée. Jamais je ne l’ai vu dans un tel état de colère et j’avoue que ça ne lui ressemble pas. Son comportement commence sérieusement à m’agacer.

— De quelles bouteilles de sirop parlez-vous ? demande innocemment Jack.

— Oh, vous le savez très bien. Et je suis prêt à parier que c’est pour cette raison-là que vous m’avez obligé à faire halte ! Ce que vous venez de commettre est odieux et je pourrais vous faire emprisonner pour cela.

Je m’interpose alors entre eux, furieuse, et le gifle violemment. Sous le choc, Elya pose sa main sur sa joue rouge et me dévisage avec haine et rage mêlées.

— Est-ce que vous avez des preuves de ce que vous avancez ? je crie tout à coup alors que Jack tente de m’écarter. Est-ce que vous jugez votre comportement digne de celui d’un roi ? Vous êtes sérieux en le menaçant de l’emprisonner pour un acte aussi petit alors que certains ont commis tellement pire ? Je vous déteste, Elya !

— Sire Elya !

— Je n’en n’ai rien à faire, vous n’êtes pas un roi à mes yeux, vous vous comportez comme le dernier des connards !

— Je connais votre langage, Amaranthe, ne croyez pas que j’ai cessé de l’étudier et vous venez d’insulter un roi. Mélisandre, menottez-la et mettez-la en cage. Nous partons dans une heure. Quant à vous, Jack, vous aurez rapidement de mes nouvelles.

Je me tourne vers Jack qui me lance un regard désespéré, mais je sais qu’il ne peut rien faire. Je sais que tout ça n’est dû qu’au sirop, alors je laisse Mélisandre me menotter et me conduire jusqu’à une cage. Le camp est rapidement levé et nous partons en direction de Septuna, sans plus attendre.

Voilà comment s’est fait le grand retour du roi Elya d’Hangest Hogfort.


Texte publié par Nephelem, 3 mai 2019 à 12h15
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