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tome 1, Chapitre 1 « Désespoir » tome 1, Chapitre 1

Elle était là, assise par terre, enchaînée à un poteau planté à même le sol. Sa chaîne, longue d'à peine un mètre, ne lui permettait que peu de mouvements. Ses cheveux crasseux, son corps couvert de boue, maigre à faire peur et ses guenilles révélaient un manque flagrant d'attention. Malgré cet absence notable d’entretien, son regard d'un bleu pur gardait une lueur farouche de liberté.

Il était pressé, allant à un rendez-vous avec son avocat pour son divorce. La tête emplie de chagrin et de soucis, il marchait vite, regardant droit devant lui sans prêter attention à son environnement. Il s’engagea sur la place, maugréant contre ces forains qui se mettaient n'importe où, cette foule qui l'empêchait d'avancer. Ralentit, il commença à regarder autours de lui ; une grande roue, des manèges en tout genre, des jeux, des marchants et une exposition de monstre. Il fut intrigué par cette dernière attraction et, estimant avoir le temps d'y jeter un œil avant son rendez-vous, se dirigea vers les enclos. Il passa devant des siamoises, des géants et des nains, des hommes complètement déformés et des femmes monstrueuses. Fasciné, il n'arrivait pas à décrocher son regard de ces êtres difformes et étranges. Il se rendait compte qu'une telle foire de nos jours était complètement ubuesque et se posa la question des droits de l'homme et de la morale. Puis son regard tomba sur la fillette. Choqué, il s'arrêta pour de bon. Sentant sa présence, elle leva vers elle son regard bleu profond et lui sourit.

Une gitane sortit de sa roulotte et vint vers lui. Elle prit la parole avant même qu'il puisse lancer la moindre protestation.

- Que fais-tu là mon beau? Ce n'est pas un endroit pour quelqu'un comme toi.

- Vous n'avez pas le droit d'attacher ainsi cette enfant! C'est interdit par...

- Oh, je vois qu'elle t'intéresse. Es-tu prêt à la prendre?

Avant qu'il ne puisse réagir, elle lui prit fermement la main et se pencha dessus. Elle la parcourut rapidement du doigt avant de la relâcher.

- Tu es prêt à la prendre. Cependant tu devras en pendre grand soin, elle est unique.

- Mais je ne peux la prendre ! Je...

La fillette planta ses yeux dans les siens et, troublé, il ne pu continuer. La gitane sourit en le regardant.

- Elle semble t'avoir adopté gadjo, elle est donc à toi. Mais souviens-toi d'en prendre grand soin !

A peine détachée, l'enfant se jeta dans ses bras en lui souriant. Lorsqu'il releva les yeux, la gitane avait disparut.

Soupirant, il regarda la fillette en se demandant ce qu'il pourrait bien en faire. Pour commencer, la ramener chez lui et la laver et l'habiller convenablement. Ensuite la déposer dans un endroit adapter. Après tout il n'a jamais demandé à la récupérer. Et puis avec cette histoire de divorce, ça serait malvenue de se présenter avec une enfant.

Il appela donc donc avocat pour annuler le rendez-vous et rentra chez lui rapidement. En chemin il essaye de parler avec l'enfant, lui posant des questions mais elle se contentait de le regarder en souriant. Il en déduisit qu'elle était muette et jura dans sa barbe. En plus de récupérer une gamine, il fallait qu'elle soit muette en plus.

Arrivé dans son appartement, il déshabilla l'enfant et lui fit prendre un bon bain pour enlever la crasse qui la recouvrait. Pas une fois l'enfant ne se départit de son sourire et toujours elle le regardait de ses grands yeux bleus. Troublé, l'homme la sécha rapidement et l'habilla d'anciens vêtements de sa fille.

- Bon, ils sont un peu grand mais ça fera l'affaire pour le moment. Et puis tu es beaucoup plus jolie comme ça. Je vais faire à manger, tu dois être affamée !

En la regardant manger, l'homme se demanda s'il allait vraiment abandonner la fillette. Il n'avait pas été un bon père pour ses enfants, jamais là et toujours obnubilé par son travail. Il ne s'était pas impliqué dans leur éducation ou dans la famille. L'argent, sa situation sociale et professionnelle passait avant tout. Il le regrettait maintenant que le divorce allait être prononcé. Il savait qu'il n'aurait que le strict minimum en droit. Et là, une deuxième chance lui était accordée. Allait-il une fois de plus tout gâcher, fuir ses responsabilités ? Et puis comment pourrait-il abandonner une enfant avec de si jolis yeux ? Non, il ne l'abandonnerait pas. Même si elle était muette, même si ce n'était pas la sienne. Il l'élèverait et lui donnerait tout l'amour qu'elle méritait. Il rattraperait ses erreurs. Voilà pourquoi elle était là, pour lui permettre de se racheter.

Sa décision prise, il parti l'après-midi même acheter tout ce qu'il fallait pour elle. Bien sûr elle était avec lui, il n'aurait pas pu la laisser seule. Il lui acheta des vêtements, des jouets, des meubles, de la décoration. Tout ce qui ferait son bonheur. Puis il rentrèrent et installèrent le tout dans la chambre d'amis. Satisfait de leur journée, il l'emmena manger au restaurant.

Pour la première fois depuis l'annonce du divorce, il dormit du sommeil du juste. Ses rêves n'étaient peuplés que de l'enfant et de ses yeux bleus. Il se réveilla de bonne humeur, frais et dispo pour une nouvelle journée. Il retrouva la fillette dans sa chambre, assise sur le lit et toujours souriante. Il la prit dans ses bras et l'embrassa tendrement sur la joue, heureux de la retrouver.

Les jours passaient tranquillement. Il était de plus en plus attaché à l'enfant, se répugnant à la laisser seul, voulant toujours être avec elle, à l'avoir sous les yeux. Mais ses obligations lui remirent les pieds sur terre. Il devait recontacter son avocat et assister au jugement de son divorce. Mais il ne pourrait pas emmener l'enfant avec lui. Déchiré, il dû se résoudre à la laisser seule l'après-midi du jugement.

Pendant toute la durée de l'affaire, il ne put la chasser de son esprit. Il revoyait toujours son sourire et son regard. Il se demandait ce qu'elle faisait si elle s'amusait ou si elle l'attendant derrière la porte. Le divorce fût prononcé à son désavantage. Il devrait une pension alimentaire et ne verrait ses enfants qu'une semaine sur deux. A l'évocation de ceux-ci il eut un sursaut ; comment allait-il gérer les rencontres ? Comment leur expliquer ? Et s'ils parlaient d'elle à leur mère ? Elle l'obligerait à l'abandonner aux services sociaux où elle serait malheureuse. Non, ça ne pouvait pas se passer comme ça ! Il fallait qu'il trouve une solution.

A peine le procès terminé, il se précipita chez lui pour retrouver sa fille. Elle était là assise dans le salon, un livre dans la main. Elle leva les yeux et lui sourit. Il se jeta sur elle, la prit dans ses bras et la serra contre lui.

- Jamais je ne les laisserais te prendre. Jamais je te le jure. Tu es ma fille, mon enfant chérie, jamais ils ne t'enlèveront à moi. Je t'en fais le serment.

La fillette sourit de plus belle et serra ses bras autours de son coup. Heureux il la serra encore plus fort et l'embrasse sur les cheveux, les joues. Dieu qu'il était bon de se sentir aimer !

Plus le temps passait et plus l'homme aimait l'enfant. Il ne pouvait plus se passer d'elle. Il l'emmenait partout, refusant de la laisser seule, même quelques minutes. Elle hantait ses pensées, ses rêves, sa vie. Tout tournait autours d'elle. Il refusait de voir ses enfants pour ne pas qu'ils l'a voient, de peur qu'ils ne disent à son ex-femme qu'il avait une fille et qu'elle l'en sépare. C'était sa fille, son enfant, et jamais il ne s'en séparerait, jamais.

Il devint paranoïaque, craignant qu'on lui enlève l'enfant. Il ne sortait plus, utilisant internet pour les courses. Il n'ouvrait les volets que quelques heures par jour. N'allant plus à son travail il fut licencié. Malgré tout l'homme dépensait sans compter pour la fillette, lui offrant des montagnes de jouets et de vêtements. Criblé de dettes, il prenait des crédits auprès de différentes institutions, allongeant toujours son déficit. Une pensée devint de plus en plus familière : il voulait la posséder, tout entière. Qu'elle soit entièrement à lui. Ce qui lui restait de conscience se révoltait à cette idée. Malgré tout elle persistait, devenant un peu plus forte chaque jour.

Un jour, des coups retentirent à la porte Il ordonna à l'enfant de ne pas faire de bruit. Il n'ouvra pas mais sa paranoïa grandit encore. Il dormait mal, ses rêves étant hantés d'assistantes sociales, de contrôleurs judiciaires, de ses enfants, de son ex-femmes. Et toujours ces yeux bleus, perçant, profond. Lorsqu'il se réveillait, en sueur et tremblant de peur, il trouvait fillette debout devant son lit, ses yeux braqués sur lui, son éternel sourire plaqué sur ses lèvres. Il la prenait dans ses bras, s'excusait du bruit qui l'avait réveillé et finissait la nuit avec elle, apaisé. Il finit par dormir toutes les nuits avec elle.

De plus en plus souvent des coups retentissaient. Une voix féminine lui ordonna d'ouvrir sous peine de défoncer sa porte. Il refusa, disant qu'il voulait rester seul. Le lendemain une autre voix retentit, lui disant qu'il allait être expulsé, que tout ce qu'il avait serait prit. Il paniqua, cloua la porte et monta voir sa fille, son enfant. Jamais ils ne la prendraient, jamais. Elle était la sienne, il la possédait. Il voulait la posséder, tout entière. Il entra en trombe dans la chambre de l'enfant. Elle tourna ses yeux vers lui et le regarda intensément. Dieu !, ses yeux, si profonds et si beaux. Ses yeux dont il rêvait chaque nuit. Dire qu'ils veulent lui enlever. Non, jamais !

Les yeux révulsés par la folie, il se jeta sur la fillette, la coucha sur son lit et lui arracha son pantalon. Il allait la posséder, entièrement, comme ça elle serait vraiment à lui. Il baissa son pantalon et la pénétra d'un coup. Le regard de l'enfant devint froid mais son sourire restait toujours plaqué sur son visage. Dans sa folie, l'homme poursuivit sa besogne. Elle passa ses mains dans son dos et lui planta ses ongles dans la peau. Tout son corps se métamorphosa. Ses ongles devinrent des griffes, ses jambes et ses bras s'allongèrent, son corps se couvrit d'écailles violettes et s'affina. Ses seins devinrent plus ronds, plus fermes. Une queue vint caresser l'entrejambe de l'homme. De sa bouche toujours souriante pointait deux canines, qu'elle planta dans le coup de l'homme, faisant jaillir le sang. Ses griffes s'enfoncèrent plus profondément dans son dos, traversant la peau, les muscles, les organes.

L'homme se rendit compte du changement, de la douleur, de la folie qui l'avait envahit. Il pleura, demandant pardon à la créature, s'excusant pour son comportement, pour sa folie, sa paranoïa. Il lui dit qu'il l'aimait, qu'elle était sa fille, sa protégée. Sans se départir de son sourire, la succube lui arracha le cœur et le dévora encore palpitant devant les yeux de l'homme. Elle se dégagea du cadavre, se leva gracieusement et regarda celui qui fut son maître pendant quelques semaines. Son contrat était remplis, elle devait partir. Elle sauta par la fenêtre, reprit son apparence d'enfant et retourna chez la gitane.


Texte publié par Aquila, 4 mai 2017 à 14h27
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