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tome 1, Chapitre 2 « The men behind the Warlords - I » tome 1, Chapitre 2

C H A P T E R 1 - The men behind the Warlords

◢ PART - I ◣

Province de Raam – Mégapole d’Aram, Colisée d’Oram

La clameur, assourdissante, s’élevait de la foule en liesse. Elle enfla de plus belle lorsque l’annonce retentit :

— Sa Majesté, Le Grand Red !

Six ans que le roi n’avait pas daigné se présenter dans sa loge, au Colisée d’Oram ! La dernière fois remontait à son avènement au trône, à ses dix-neuf ans. Dans les rues d’Aram, on le disait trop occupé par des affaires hautement importantes, ne lui laissant nul loisir de se divertir. Il n’empêche que son absence dans les gradins était un grand sujet d’inquiétude.

Les Aramians avaient été habitués aux apparitions publiques de la famille royale à l’époque du roi Henri. Elles étaient perçues comme une implication de la monarchie à la vie du bas peuple. L’absentéisme de sa Majesté actuelle nuisait à sa popularité déjà rachitique. On spéculait beaucoup sur les raisons de cette désertion. Les tenanciers de ludus – ces écuries de gladiateurs –, avaient-ils mécontenté Le Grand Red ? Ce dernier était-il trop raffiné pour assister à ces spectacles brutaux ? On disait l’homme efféminé, sans doute une petite nature ne supportant pas la vue du sang.

Ceux qui avaient eu la grâce de rencontrer le roi Andy Rell étaient unanimes sur sa beauté troublante. Son allure féline oscillait entre masculinité et féminité, et le jeune homme jouait de cette ambigüité pour parvenir à ses fins. On disait qu’Andy savait séduire, charmer, mais à la manière d’un serpent ; car il vous étouffait de sa poigne constrictrice, une fois piégé entre ses anneaux.

Au-delà de cette sublime dangerosité, sa Majesté restait un spectacle pour les mirettes. Spectacle auquel assistaient les quelques vingt mille Aramians venus à ce énième tournoi de gladiateurs. En ce jour, nombreux voyaient Le Grand Red pour la première fois. Ils ne furent point les seuls à en avoir le souffle court.

Les dignitaires des loges sénatoriales quittèrent leur siège, le cœur battant. Rien n’avait présagé la venue du roi. Pourtant, ce n’était pas faute de savoir la propension sournoise de ce dernier à surprendre ses proches sujets. Il espérait sans doute les prendre sur le fait d’on ne savait quel délit… Ceux qui n’avaient pas leur conscience tranquille offraient un édifiant spectacle à leurs confrères. Il était dangereux de ne point maîtriser ses émotions en présence de ce régent versatile.

Le jeune homme s’avança dans sa loge en traversant la haie d’honneur que lui firent les prêtresses du Culte de Vestis. Jadis, ces femmes officiaient dès leur plus jeune âge dans l’un des temples de la Tour Blanche dédiée au quatuor divin Élémentaire. Par leurs prières, elles étaient censées apporter paix, fertilité et fécondité à tout le royaume. On assimilait Vestis à la Terre, déesse prévalant sur l’abondance, la prospérité, le faste et la beauté.

En accédant au pouvoir, Le Grand Red avait modifié les critères d’éligibilité des prêtresses. Leur pureté d’âme avait été reléguée aux archives au profit de leur physique envoutant. Quant à leur chasteté, elle appartenait désormais à l’histoire… Les membres de l’Ordre clérical avaient manifesté leur mécontentement. Jusqu’à ce qu’ils furent priés de prendre congé, sous peine d’y être contraint les pieds en avant.

Sa Majesté Red avait fait des Prêtresses Vestis une petite garnison de beauté qui l’accompagnait à chacune de ses sorties officielles. C’était impressionnant de voir ces seize belles femmes flanquer cette magnifique aberration de la nature qu’était Andy. Il savait se fondre parmi elles, aidé d’un travestissement parfait et d’une teinture de jais pour sa chevelure rousse sanguine.

S’il s’amusait à tromper l’assistance, le but premier de ce subterfuge était de décourager d’éventuels assassins. Les Prêtresses Vestis avaient été détournées de leur culte pour lui servir de doublures et d’espionnes. Armes redoutables, elles usaient de leurs charmes mystiques pour tirer les vers du nez des comploteurs.

Par leur biais, avait été révélée la tentative d’assassinat du roi, perpétrée par le prince Dorien avec la complicité de Sloan, son homme lige. Depuis sa fuite, une prime était promise à qui ramènerait son Altesse puînée au palais.

On avait appris à se méfier des prêtresses. Elles étaient cependant formées pour endormir défiances et vigilances. Pour sa facilité à revêtir l’identité de l’une d’elles, Le Grand Red n’en était que plus craint.

— Andy ?

Red dévisagea le hardi l’ayant apostrophé avec tant de familiarité. Malgré l’avertissement silencieux, le Grand Conseiller Jeffrey arbora un sourire charmeur.

— Que nous vaut l’honneur de votre si gracieuse présence, Majesté ?

— Jeff… Je vois que tu chauffais mon siège.

— Encore heureux ! Voilà plus de cinq ans qu’il se languit d’un royal fessier. Quelqu’un se devait de combler cette solitude.

La moue boudeuse de Red indiqua qu’il était plutôt de bonne humeur. Autrement, cette effronterie aurait sans doute valu à Jeff une remontrance. Ceci dit, seul un membre du Triumvirat pouvait se permettre un tel langage léger avec sa Majesté. Personne d’autre ne s’y risquait, à moins de vouloir écourter sa carrière, voire pire.

— Ma royale engeance s’ennuyait. Aussi a-t-elle décidé de mettre le nez dehors.

— Ainsi vêtu ? s’enquit Jeff, un brin consterné.

Aveugle à son sentiment, Red s’enthousiasma. Il tourna sur lui-même, et le vent joua dans les volants de sa tenue.

— Tu aimes ? Will l’a spécialement conçue pour moi. Il me fallait un prétexte pour l’inaugurer.

Vêtu d’un long caftan impérial de soie rouge corail brodé d’or, il avait marqué sa taille d’un large ceinturon de pierres précieuses. Le vêtement affinait sa silhouette déjà gracile et recouvrait uniquement son bras gauche d’une longue et large manche vaporeuse. De son épaule droite à son coude, de jolies circonvolutions d’un bracelet d’or blanc contrastaient avec son teint halé. Au sommet de son crâne, une broche en rubis empêchait le vent de totalement emmêler sa longue crinière.

Il aurait voulu passer pour la prima Vestis – la plus belle des prêtresses –, il ne s’y serait pas pris autrement. Jeff ravala un soupir d’impatience. Le peuple s’attendait à voir un roi ; pas une créature disant une ode à la féminité. Pourquoi Red bafouait-il l’importance de ces situations ?!

Rendre solennelle sa première apparition publique, devant autant de monde et depuis tant d’années, aurait été la moindre des choses. Au lieu de quoi, on devait sa présence à un prétexte pour déambuler dans ses nouveaux atours… Tant de frivolité était sidérante !

— Majesté, Will conçoit toujours des tenues « spécialement » pour vous, souligna Jeff, las de tant d’évidence. Le peuple attend que vous lanciez les jeux.

Avec curiosité, Red se rapprocha de la balustrade en marbre richement décorée de relief en stuc. Ses derniers souvenirs de l’arène remontaient au vivant de sa génitrice. Il traînait dans ses jupons à cause du refus d’intégration de ses frères. Damien, l’aîné, était tout le temps fourré avec Dorien. Les jumeaux Dilan et David l’excluaient de leur bulle. Et Père le reléguait à la suite de Mère parce qu’il n’était pas un fils que l’on exhibait au public.

Ce même public l’avait terrifié à l’époque. Il ne saurait dire si ç’avait été une phobie de la foule ou une peur de la hauteur. Aujourd’hui, il était roi en cette ruche, et sa mère n’était plus là pour le voir. Pour être fier de lui. « Tu verras, mon ange, disait-elle, ils t’aduleront ! »

Red leva les mains, incitant le peuple à élever la voix. La réponse fut immédiate. Mère avait eu raison et tort. Ce n’est pas moi qu’ils adulent, mais mon titre. Et probablement le souvenir de la reine à travers mon aspect physique. Il baissa les mains. La clameur s’étouffa, le cédant à un silence sourd. Tout sourire, il demanda tel un ventriloque :

— C’est quel discours, déjà ?

— Bon sang, Red, tu es pénible, murmura Jeff.

— Dépêche-toi de jouer les souffleurs, ma mâchoire s’expose à une crampe !

— Improvise. Ils n’en ont que faire, du moment que les jeux sont rapidement lancés.

— Parfait, j’ai en horreur les longs discours, reprit-il sa voix normale.

— Je te rassure, le peuple aussi.

— Avant cela, qui fait combattre ses gladiateurs aujourd’hui ? demanda Red à la volée.

On lui apprit que le réputé ludus Kanon les divertirait de ses meilleurs combattants. Il affrontait le ludus Gilano. Pas un chien ni un chat ignorait la rivalité de ces maitres gladiateurs. Fort de ces informations, le roi lança les jeux.

Pourtant, il aurait pu prendre son temps. Le spectacle qu’il offrait était captivant. Ses mèches sanguines, balayées par le vent, rappelaient à s’y méprendre la défunte reine. La grâce avec laquelle il les ramenait derrière une oreille, son autre main délicatement posée sur le marbre froid, les volants aériens de son sublime caftan, constituaient les ingrédients d’un philtre de charme subjuguant l’audience.

L’on voulait qu’avec ces manières si délicates, il soit le Tueur Écarlate… Le doute gagna bon nombre de cœurs qui voyaient leur souverain pour la première fois. Quel était la part de véracité de cette rumeur ? Malgré une voix masculine, à vue de nez on qualifiait difficilement cette curieuse beauté de « mâle ». Les bruits de bazar n’avaient-ils pas été inventés pour masquer la réalité au peuple ? Se pouvait-il qu’on ait affaire à une Grande Red ?!

Cela expliquerait bien des choses, comme tout ce mystère autour de sa personne. Maar n’autorisait pas le règne des femmes, le trône n’échoyait qu’aux hommes. Avait-on déguisé le fait que le roi Henri Rell ait eu une fille ? Après tout, Andy avait grandi au gynécée du palais de Rubis.

Chez ceux qui savaient de quoi il retournait régnait une certaine agitation. La noblesse, en proie à un malaise, était loin d’être fixée sur la véritable raison de la présence du roi. Jamais Red ne s’était mêlé à ses dignitaires auparavant. C’était une première.

Pour de nombreux sénateurs, il était un parfait étranger. Du jour au lendemain, il avait quitté le quartier résidentiel de la reine pour prendre la tête du royaume, à peine sorti de l’adolescence. Depuis six années, il restait inaccessible, telle une icône sur son trône. Au sommet des marches de marbre noir menant au siège royal, il observait l’Assemblée dont chaque membre était un pion sur son échiquier ou un insecte de son étude scientifique. Il défiait de ne pas devenir ce nuisible dont il se débarrasserait une fois lassé.

Il arrivait – bien trop souvent –, qu’il se présente à l’audience entièrement voilé de rouge. Certains fonctionnaires royaux récemment entrés en service ne l’avaient encore jamais vu à découvert. Quand lui prenait cette lubie, il était plus qu’avisé de ne pas le pousser à se découvrir le visage. Le responsable ne s’en remettait pas.

D’aucuns se demandaient parfois s’il ne se trouvait pas une Prêtresse Vestis en dessous. Parce qu’il pouvait rester immobile durant toute la durée des doléances, sans piper mot, se contentant de légers signes de tête à l’un des Triumvirs. À force, on avait le sentiment que Jeffrey, Jay et Korgan régnaient à sa place.

Loin des murs ayant des oreilles, il se disait que Le Grand Red n’était qu’un magnifique pantin utilisé en trompe l’œil par Jeffrey Scott, le plus sournois des Grands Conseillers. Pour preuve, ce dernier n’hésitait pas à s’arroger les sièges royaux en l’absence du concerné. Son charisme clouait des becs, et l’aura quasi royale du brun ténébreux ne dérangeait pas vraiment l’Assemblée. Cependant, Andy Rell restait subjuguant de mystère et effrayant sur bien des points.

Pour ne pas déroger à son énigme, Red prit donc part aux jeux. Il applaudit les gladiateurs méritants, se leva parfois pour les honorer, commenta telle une vieille commère repue de combats virils les prouesses des uns et la technicité des autres, et acheva de faire rougir les épouses de ses dignitaires par ses commentaires coquins sur le physique de dieux vivants des concurrents. Ce fut épique !

L’entendre rire de la balourdise de quelques gladiateurs était très déstabilisant. Le rire cristallin du roi relevait du mythe pour les sénateurs, qui se demandaient ce qu’il avait bien pu boire pour se comporter ainsi. Lorsque le silence se fit soudain du côté de Red, Jeff s’en inquiéta.

— Majesté ?

— À qui sont ces gladiateurs ?

Dans l’arène, se tenaient cinq malabars, attendant leurs adversaires de pied ferme. Quatre guerriers géants encadraient un plus fluet, se démarquant par son physique nerveux et sa taille moyenne. Sa sveltesse n’empêchait nullement de distinguer le relief d’une belle musculature.

— Vous avez affaire à l’unité d’élite du ludus Kanon, Majesté, lui apprit Jeff.

— Je les veux, décréta-t-il.

— Mais…, gémit une voix, un niveau plus bas, que la clameur de la foule ne noya pas.

— Qui ai-je entendu ?

Le silence de mort des loges nobles trancha brusquement avec l’excitation du peuple. Red perdit patience.

— J’exige…

— Sa Majesté, Le Grand Red, a posé une question, asséna durement Jeff d’un air pourtant calme.

Mieux valait éviter que le couvercle de la bouilloire royale ne saute de colère.

— Eh bien…, se risqua un dignitaire, il y a foule ici, votre Majesté.

— Tu espères ne pas être désobligeant en me soulignant cette évidence ?

L’homme blêmit. Red soupira. Il n’obtiendrait pas sa réponse de cette façon.

— J’ai entendu une protestation. Enfin, une supplique. J’en déduis que le maitre du ludus Kanon est parmi nous. Qu’il se manifeste donc ! dit-il d’un ton encourageant.

Aujourd’hui, il était de bonne humeur. On pouvait desserrer les fesses et les lèvres.

— C’est moi… Majesté. Je suis Solomon Rozès, votre humble serviteur.

Sa femme retint son souffle et lui serra l’avant-bras, anxieuse. Red nota son geste.

— Après les jeux, me ferez-vous l’honneur d’une visite de votre ludus ?

— Tout l’honneur sera mien, votre Majesté, souffla Solomon.

Il ne sut s’il devait exprimer sa joie ou sa crainte d’avoir attiré l’attention de ladite Majesté. En général, il n’était pas de bon aloi qu’un dangereux prédateur s’intéresse à votre personne. Or Le Grand Red en était un. Surtout lorsqu’il vous regardait de ces yeux-là… Convoiteurs.

Les Rozès inspirèrent de la pitié, ce jour-là. Les autres dignitaires furent fort aise de n’avoir pas suscité l’intérêt de roi. Dans la majorité des cours, courtisans et courtisanes aspiraient à gagner les faveurs du monarque. Sa Majesté Andy tendait à rendre ce désir périlleux.

TBC - part 2


ANECDOTE/POINT HISTOIRE

Onomastique

Royaume : Maar - Capitale : Aram - Province nord : Raam. Ces trois noms ont une chose en commun : ce sont des anagrammes. Je voulais aussi que ça rentre dans la même "famille toponymique" qu'Oram. Aram/Oram... Certains n'en seront pas friands, mais c'est devenu une sorte de marque de fabrique de mes fictions.

Nationalité

Dans cet univers, la particule qui indique la nationalité est la même partout. Je rajoute la particule ian au nom propre, an lorsqu’il se termine par une voyelle autre que « a », auquel cas seul n est ajouté. Le féminin s’obtient avec un « e » sans doubler le « n ».

Ex : Maar = Maarian, Maariane /Nores = Noresian, Noresiane /Orsei = Orseian, Orseiane /Pizê = Pizêan, Pizêane / Lima = Liman, Limane.

Particularité :

Les noms terminant par « on » voit cette syllabe remplacée par « an »

Ex : Askheron = Askheran, Askherane.

Exceptions :

Sandres. Les habitants ne sont pas des "Sandresians", mais des Sandrians. Sandres me vient de « Cendres », et je me suis dit : tant qu’à faire, pourquoi pas mettre « Cendrillon » aussi ?


Texte publié par EPICE, 5 janvier 2017 à 01h47
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