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tome 1, Chapitre 1 tome 1, Chapitre 1

Quand on pense aux vacances à la montagne, on imagine des pistes pour skier, des paysages magnifiques bleu et blanc, des soirées au coin du feu. Malheureusement, ici, seule cette dernière idée était vraie, et encore. Depuis mon arrivée au chalet, la neige tombait si fort que les propriétaires nous avaient interdit de sortir par précaution. Depuis plusieurs jours, mes journées consistaient donc à broyer du noir devant la cheminée. Ce matin, un brouhaha a attiré mon attention vers la porte. Le propriétaire, un homme de grande stature, s’activait près de la porte en bois. Etonnée, je me suis approchée mais l'homme a ouvert la porte et est sorti, disparaissant sous la tempête avant même que sa femme ne ferme la porte.

-Où est-il parti. Je croyais qu'il ne fallait pas sortir ?

-Nous avons bientôt épuisée les dernières bûches, il est parti en prendre.

J’ai pensé qu’il était vraiment téméraire de sortir par ce temps. Ou fou, au choix. Elle a tourné la tête vers la porte.

-Il n'empêche, même si cet endroit est habitué aux hivers difficiles, c'est la première fois en quarante-sept ans que je vois un blizzard pareil. Et il ne semble pas prêt de s'arrêter. Mais il faut juste garder patience.

Je n'ai rien ajouté. Il me suffisait de la regarder pour voir qu'elle était moins confiante qu'elle ne voulait paraître. En retournant vers ma chambre, j’ai croisé l’autre locataire, un Parisien, et son fils, qui devait avoir aux alentours de sept ans.

-Toujours pas d’amélioration là-dehors ?

Depuis la dizaine de jour que nous étions coincés ensemble, nous avions beaucoup parlé, puisque c’était la seule chose à faire. Même si je ne suis pas très ouverte, être dans la même galère que d’autres tissait des liens.

-Aucune en vue d’après la gérante. Son mari est sorti pour aller chercher du bois.

-Avec ce temps ? Il est fou.

J’ai haussé les épaules. Sans bois, nous serions sans chauffage car les lignes électriques avaient coupé depuis longtemps. Alors que je m’apprêtais à prendre congé, un craquement sinistre retentit comme si le toit était arraché du reste de la maison. Je suis retournée dans la pièce principale et j’ai vu la porte ouverte. La femme du propriétaire se tenait dans l’embrasure. Je me suis avancée jusqu’à elle et nous avons toutes les deux scruté l’extérieur à la recherche de la cause de ce bruit tandis que derrière nous, l’autre client s’efforçait de calmer son enfant et que mes parents arrivaient encore à moitié endormis. Puis elle s’est précipitée vers son mari dont la forme venait de se dessiner à travers la tempête. Une fois à l’intérieur, il nous a demandé de nous réunir dans le salon autour de l’âtre avant de prendre la parole.

-La réserve de bois est perdue. Avec les bourrasques, une grande quantité de neige s’est accumulée et a emporté le bois avec elle.

Un silence a accueilli sa phrase, uniquement troublé par le bruit des jouets du garçon, qui s’était enfin calmé, et par les rafales de vent qui faisaient fortement grincer les planches du toit. Mon père a pris la parole.

-Que devons-nous faire ? Sans bois, nous allons mourir de froid.

-Il est trop dangereux de sortir. Même en connaissant les environs, on n’y voit pas à trois pas là-dehors.

-Alors on va rester bloqué ici jusqu’à ce que le temps daigne s’améliorer ?

-Je crois que nous n’avons pas le choix.

La conversation s’est arrêtée sur cette note pessimiste et nous avons chacun rejoint nos chambre têtes baissées. Le temps ne s’est pas amélioré de la journée et c’est en frissonnant que j’ai souhaité une bonne nuit à mes parents. Cependant, une fois dans mon lit, le froid m’empêchait de trouver le sommeil. J’ai saisi mon téléphone et l’ai allumé pour prendre une pile de livres avant d’enfiler un pull en laine. Les craquements du plancher passaient inaperçus sous le bruit des rafales. Une fois arrivée dans la pièce principale, je me suis approchée du feu qui mourrait lentement dans l’âtre. Je l’ai fixé durant quelques instants, immobile, avant de détacher la couverture du premier livre et de la poser sur les braises. Pendant les premières secondes, rien ne s’est passé, puis l’un des coins s’est mis à rougeoyer. Lentement, j’ai ravivé le feu au prix de quelques feuilles puis je suis partie dans la cuisine pour trouver quelque chose qui apaiserait ma faim. J’ai découvert quelques morceaux de sucre, en ai plongé deux dans ma poche et ai grignoté le troisième en retournant m’emmitoufler dans ma couverture devant la cheminée. J’ai passé la nuit comme dans un état second, fixant les flammes et rajoutant par moment une feuille à brûler. J’ai dû cependant finir par m’endormir car, au matin, les braises étaient complètement éteintes. Mon corps était engourdi comme si j’avais passé la nuit dehors. Je me suis levée en frottant mes bras dans une maigre tentative pour me réchauffer et me suis redirigée vers ma chambre. Personne n’était encore levé. En ouvrant la porte, j’ai ressentis un grand frisson. La pièce était glaciale. J’ai alors pensé à ouvrir la porte de la chambre de mes parents afin que la chaleur se propage dans leur chambre. Heureusement, j’ai été assez silencieuse pour ne pas les réveiller car ils ne firent aucun bruit. C’est en sortant que je me suis rendue compte que mon père ronflait lorsqu’il dormait. Je suis rentrée à nouveau dans leur chambre et j’ai écouté en silence. Rien. J’ai voulu secouer mon père mais ma main s’est figé en touchant sa peau glacée. J’ai réussi à me déplacer pour m’approcher de ma mère, mais son corps aussi ne bougeait plus. J’ai fui leur chambre et presque défoncé la porte des propriétaires mais je suis restée immobile dans l’embrasure en voyant que leur peau avait viré au bleu. J’ai trouvé le même spectacle sinistre dans la troisième chambre. Mon corps s’est mis à trembler lorsque j’ai compris ma situation. J’étais toute seule à présent.


Texte publié par Ikazuchi, 2 janvier 2017 à 23h50
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