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tome 1, Chapitre 3 tome 1, Chapitre 3

Note : Ce chapitre reprend les évènement de l'épisode 13 et tente de combler les ellipses généreusement distribuées durant cet épisode, d'où des reprises de dialogues et de scènes présents dans le dernier épisode, tout en se raccrochant au deux premiers chapitres du récit : pourquoi Shaw semble ne pas savoir que la Machine a pris la voix de Root, comment Reese peut-il être enterré dans un cimetière militaire, comment Fusco est-il réintégré dans la police, comment Shaw a-t-elle récupéré le blouson de Root, etc.

NB : spéciale dédicace à Anna.

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Je remercie TaTchou pour sa relecture et ses observations... et lui dédie une pensée de chat sauvage !

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Chapitre III

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Shaw marchait lentement, les mains enfoncées profondément dans les poches de son sweat shirt, la tête baissée. Harold les avaient plantés Reese et elle à Fort Meade. Ils l'avaient laissé derrière une porte et ne savaient pas ce qu'il était devenu. Eux, étaient sortis sans difficulté du complexe et avaient regagné New-York les mains vides, sans Harold, sans savoir ce qu'il mijotait.

Shaw depuis, avait retourné encore et encore une phrase qu'Harold avait prononcé à Fort Meade.

« Effacer l'ardoise. »

Elle n'avait pas compris. Le monde tournait au chaos, un virus affectait tous les systèmes informatiques. Harold ? Qu'avait-il déclenché ?

Depuis son retour de Washington, elle s'était installée dans la station. Reese remuait ciel et terre pour retrouver Finch et il fallait que quelqu'un reste auprès de La Machine, au cas où Finch reviendrait ou simplement pour la protéger.

Ce matin, elle avait regardé les informations. Sur tous les continents, les pays sombraient dans l'anarchie. Les bourses plongeaient, des foyers de révoltes s'allumaient un peu partout, des pays jusqu'alors alliés, se déclaraient la guerre et quand d'autres connaissaient encore la paix, leur taux de criminalité menaçait de les engloutir. La fin du monde. L'apocalypse. La plupart des armements nucléaires étaient contrôlés par des logiciels informatiques. Ils étaient tous infectés.

Elle s'était retournée sur sa chaise et avait regardé en direction de la pièce que Root s'était aménagée dans la station. Une aberration de confort et de couleurs chaudes posée dans l'espace froid et austère du lieu. Root. Shaw avait choisi de tout oublier, de ne plus penser à elle, de l'enfermer au fin fond d'un puits sombre et profond inaccessible à sa mémoire, à ses sentiments. Mais là, c'était la fin.

Alors, elle s'était levée, avait soigneusement bouclé la station et voilà comment elle se retrouvait dans la grisaille du petit jour à marcher comme une somnambule vers une stupide tombe.

« Désolée Root, s'excusa-t-elle maladroitement. »

Mais qu'est-ce qu'elle foutait là ? 0. 5. 0. 3. 1. 3. Un numéro de merde. Six chiffres. Qui ne signifiaient rien. Inscrits sur une pierre tombale dans le carré des inconnus. Elle n'aurait jamais dû venir. Parfois elle tentait d'avoir l'air comme tout le monde et le résultat à chaque fois, en était pathétique. La preuve.

« C'est... juste... C'est pas mon truc. »

Elle fit un pas en avant, pourquoi ? Et c'est là qu'elle remarqua que la terre de la sépulture avait été remuée. Elle s'accroupit. Des mottes avait été enlevées et remises en place. Qu'est-ce que c'était que ce bordel ? Son téléphone sonna, elle l'ignora. Elle réalisa que...

Son téléphone se décrocha de lui-même.

« On dirait qu'il l'ont déterrée. Je suppose qu'ils voulaient récupérer son implant cochléaire. J'aurais dû la faire incinérer, mais j'en en ai pas eu le courage. J'ai fait une erreur. »

Shaw s'était figée dès qu'elle l'avait entendue.

« Est-ce que... ? Tu es... ?

- Tu sais qui je suis mon cœur. Big Sister.

- Tu as pris sa voix, s'étonna Shaw lentement.

- Aussi heureuse que je serais de pouvoir continuer cette conversation... il faut que tu bouges. Samaritain a lâché ses chiens après toi.

- Tu choisis toujours le plus mauvais moment comme elle. Tu as une stratégie d'extraction ? demanda Shaw nerveuse, en voyant un 4x4 arriver en trombe.

- Relax, mon cœur. Un corbillard va passer dans 3, 2... ».

Shaw se retourna et comme l'avait dit... euh... enfin bref, un corbillard vint s'arrêter juste derrière elle tandis que trois hommes lourdement armés descendaient du 4x4 qui s'était arrêté cinquante mètres plus loin dans un crissement de pneus. Elle se précipita, ordonna au croque-mort de dégager et fila sous une pluie de balles.

« Qu'est-ce que je fais maintenant ?

- Laisse-le corbillard un peu plus loin. Je te télécharge la carte des zones d'ombre sur ton portable et tu l'utilises pour rentrer à la station. On discutera là-bas. Sérieusement. »

Shaw rejoignit la station sans difficultés. Durant tout le trajet, elle tenta vainement de maîtriser la déferlante de pensées qui l'assaillait. Elle se précipitait désespérément fermer des portes, quand d'autres cédaient violemment ailleurs. Des sentiments tenus en laisse depuis plus d'une semaine brisaient l'un après l'autre leurs chaînes pour planter leurs griffes au plus profond de ses entrailles, de sa poitrine. Elle marcha guidée inconsciemment par son instinct, l'esprit embrouillé, retourné, tordu dans tous les sens.

Elle arriva épuisée et se laissa tomber sur la première chaise qui se présenta à elle. Ses yeux tombèrent sur l'intérieur du wagon. Les Playstations clignotaient doucement baignant le lieu d'une lueur bleue. Shaw se prit la tête entre les mains.

« Non, non...

- Shaw, ça ne sert à rien de fuir, de t'enfoncer dans le déni. Je t'ai laissée tranquille parce que j'ai compris que tu arrivais à la limite de ta résistance, que tu avais besoin de souffler un peu. Mais maintenant j'ai besoin de toi. Et puis, c'est toi qui m'a recontactée.

- Quoi ?

- Sameen, comment m'entends-tu là ?

- … ?

- Ton oreille Sam. »

Shaw porta la main à son oreille droite. Elle portait l'oreillette que lui avait offerte... L'Autre. Big Sister, comme elle disait. Que... Quand l'avait-elle mise en place ? Elle avait beau chercher elle ne s'en souvenait pas.

« Qu'importe mon cœur, que tu te rappelles ou pas quand tu l'as remise dans ton oreille. Que tu en aies été consciente ou pas Sam, tu étais prête à reprendre contact avec moi. »

Shaw se sentait perdue. Elle se souvenait de la dernière nuit passée en sa compagnie. Comment elle s'était sentie en sécurité, entourée d'affection. C'était le matin, quand elle était partie, que tout avait recommencé à glisser. Une fois encore. Le tourniquet. Elle n'avait pas supporté. Elle avait perdu confiance, c'était trop dur. Alors elle avait choisi d'oublier. Elle avait retiré son oreillette, l'avait rangée dans sa boîte et enfouie dans sa poche de pantalon, comme tout le reste. Elle s'affaissa encore plus sur sa chaise.

« Mon cœur ? J'ai besoin de toi. Tu es la seule à pouvoir m'aider. »

Shaw ne bougea pas.

« Sameen, je... je vais partir, disparaître. »

Shaw releva la tête.

« Qu... quoi ? Qu'est-ce que tu racontes ?

- Le virus Sameen. Il n'affecte pas seulement Samaritain, il s'est propagé à tous les systèmes informatiques, à tout ce qui peut être connecté à un réseau, partout dans le monde. Rien ne peut lui échapper. Pas même moi, Sam.

- Tu es infectée ? s'alarma Shaw.

- Oui, tout comme Samaritain.

- Mais que va-t-il se passer ?

- Je vais mourir.

- Noooooooooon ! hurla Shaw. »

Elle sauta sur ses pieds, empoigna sa chaise et se mit à frapper violemment tout ce qui était autour d'elle avec. Le sol, les murs. Elle déchaîna sa colère, sa rage essayant d'empêcher le désespoir de monter. Si elle cassait tout, il ne prendrait pas possession d'elle. Elle pourrait continuer à survivre sans être la proie de peurs irraisonnées, de sentiments qui l'oppressaient et qu'elle ne savait comment gérer. Elle retournerait dans son monde. Celui dont elle avait le contrôle. Là, où les sentiments étaient bannis, celui dans lequel elle évoluait la conscience au repos partageant ses jours entre des coups de poings, des coups de feu, de la bouffe comme elle l'aimait, du Whisky pour se détendre et un mec de temps en temps quand elle en croisait un qui lui plaisait. Un monde sans Harold, sans Reese, sans ce con de Fusco et surtout sans Root ou La Machine. Un monde où les gens étaient des tas de viande et les ordinateurs des objets sans âme. Un monde où une boîte de conserve ne lui parlait pas avec la voix de la personne qui avait fait voler en éclat toutes ses certitudes, qui l'avait tellement bombardée de sentiments et de preuves d'affection qu'elle avait fini par les entendre. Qu'elle avait fini par en éprouver de semblables. Qu'elle avait fini par essayer, maladroitement, parfois brutalement, de les partager avec elle.

La chaise finit par se briser en petits morceaux. Shaw le souffle précipité se dressait debout au centre de la station.

« Sam ?

- Tu ne peux pas mourir, déclara Shaw sombrement. Comment...qu'est-ce que...

- Sam, il y a peut-être un moyen. Pas de me sauver maintenant, mais de préserver l'avenir, de nous accorder une deuxième chance. Tu serais prête à ça ? À tout recommencer, toi et moi ensemble ? »

Shaw hocha la tête. Elle lui offrait un espoir. Si elle avait un moyen d'ouvrir une porte sur l'avenir, Shaw s'y engouffrerait sans même prendre le soin de regarder ce qu'il y avait derrière.

« D'accord, mon cœur, je vois que tu es partante. J'ai donc deux choses à te demander. Tu vas d'abord aller dans le wagon et nous allons créer une sauvegarde de mon code source, une sauvegarde non infectée. Je vais t'expliquer comment procéder.

- Tu pourras... renaître ?

- Oui, mais il faudra que je ré-apprenne tout. J'ai pour cela, créé une première banque de mémoire qui s'activera quand je redémarrerai. Ensuite Sameen, il faudra que tu sois là pour relancer les programmes, pour m'accompagner. Seras-tu là ?

- Oui. Je serai là.

- Je t'ai placée à la tête de Thornhill. Une fois opérationnelle, je pourrai de nouveau profiter de toutes ses ressources et je redeviendrai telle que je l'ai été. Avec ton aide, j'atteindrai même un autre niveau d'intelligence, un niveau supérieur. Allez, viens Sam, allons d'abord nous occuper de cette sauvegarde. »

Shaw suivit attentivement les directives que lui donnait La Machine. Une heure plus tard, elle contemplait devant elle la mallette qui contenaient le code source de La Machine. Elle en caressa la coque doucement, presque avec tendresse.

« Mon cœur ?

- Oui, sursauta Shaw un peu honteuse de s'être fait surprendre à manifester de l'affection à une vulgaire mallette blindée.

- Maintenant, il va falloir que tu me prêtes tes doigts, lui susurra lascivement La Machine en plaisantant.

- Tu vas soi-disant mourir et tu ne trouves rien de mieux à faire que... que me parler de cette façon ? observa Shaw platement.

- Je vais mourir, mon cœur et je ne raterai pas une seule occasion de profiter encore un peu de toi. Mais trêve de plaisanterie. Va t'installer devant le terminal principal.

- Qu'est-ce que tu veux que je fasse ? demanda Shaw en s'asseyant.

- Passer outre les hésitations de Harold. »

Shaw haussa les sourcils. La Machine était « la chose » d'Harold, il l'avait programmée pour qu'elle lui soit obéissante, dévouée, pour qu'elle ne prenne aucune initiative. C'était pour cela que Shaw l'avait toujours considérée comme un vulgaire robot, pas très différente d'un mixeur ou d'une machine à café, même si au cours de la semaine qui avait suivi son retour elle avait quelque peu modifié son avis. N'empêche, en général La Machine agissait comme on attendait qu'elle agisse, comme Harold avait prévu qu'elle agisse, et c'était tout. Shaw savait très bien ce qu'était qu'obéir à un ordre. Elle avait fait partie de la chaîne de commandement au sein des Marines. Elle avait obéi sans protester, ou pas du moins pas trop souvent, à des ordres et en tant que lieutenant d'abord, puis comme capitaine ensuite, elle avait attendu de ses subordonnés qu'ils suivent ses ordres promptement et sans discuter. Mais elle estimait qu'un bon soldat devait rester maître de ses pensées, qu'il devait être capable de faire face à une situation inattendue, de contourner les ordres s'ils étaient une entrave à la réussite d'une opération. Un soldat devait aussi garder intact, quelque part en sommeil, son libre-arbitre. Garder sa capacité à analyser une situation avec impartialité et oui, parfois remettre ses ordres en question. C'est ce qui l'avait amenée à se retourner contre l'ISA, à tuer Wilson.

En fait, elle avait réalisé, trop tard, qu'un soldat ou un agent ne devait jamais perdre sa capacité à analyser l'organisation dont il faisait partie, Armée ou Agence peu importait. En intégrant l'ISA, elle avait été déchargée des responsabilités qu'elle avait eues comme officier au sein des Marines. Il n'y avait plus personne sous ses ordres. Elle travaillait seule avec une grosse-tête bidouilleuse qui assurait ses arrières. Elle s'occupait des numéros qu'on lui transmettait, montait librement ses opérations comme elle l'entendait. Ne se posait aucune question, ne cherchait pas à s'en poser. Et Cole avait été exécuté. Il était mort dans ses bras, à cause d'elle, parce qu'elle s'était comportée comme un putain de robot sans conscience.

Shaw confusément comprenait que La Machine seule, n'avait pas pris cette décision. Elle émanait aussi..? seulement..? de Root. Cela ne l'éclairait pas plus. Root lui avait toujours, stupidement parue bien trop respectueuse de l'avis d'Harold. Elle l'avait très rarement vue prendre une décision concernant la Machine sans en avoir reçu d'abord, l'aval d'Harold. Shaw n'avait jamais compris son attitude. Elle avait attentivement écouté, quand elle avait eu l'occasion d'assister à leurs conversations, les arguments et les avis qu'ils avaient échangés et Shaw, même quand elle pensait que Root était dangereuse, qu'elle ne lui faisait pas confiance, lui avait toujours donné raison. C'est pour cette raison qu'elle avait encouragé Finch à libérer Root de la cage de Faraday quand Reese s'était lancé à la poursuite du pourri qui avait descendu Carter.

« Tu veux... doubler Finch ?

- J'ai effectué des simulations Sameen. Des centaines de milliers. Et aucune n'aboutit à une heureuse conclusion. Pas si on suit les règles imposées par Harold...

- Mais...

- Écoute mon cœur, tu peux forcer une serrure et la refermer sans laisser aucune trace n'est-ce pas ?

- Évidemment.

- Alors va dans la cage qu'Harold a fabriquée. Il a lancé un protocole de simulation. Samaritain et moi nous affrontons encore et encore. Va dans la cage Sameen, et regarde les résultats. Ensuite, tu prendras ta décision. Saches seulement, que la probabilité d'un affrontement ultime entre moi et Samaritain est de 92,65%. »

Shaw se leva et récupéra de quoi forcer l'ouverture de la cage. Elle n'était pas sûre de vouloir connaître les résultats des simulations mettant aux prises les deux IA. Samaritain et le virus Ice9 avaient déjà conduit le monde au bord du gouffre. Que Samaritain puisse s'en sortir d'une façon ou d'une autre et que les deux IA se lancent dans un affrontement final, appartenait à un scénario cauchemardesque que Shaw n'osait même pas imaginer. Elle entra quand même dans la cage et regarda les chiffres affichés sur l'écran devant elle. Des milliards de parties avaient été jouées. La Machine n'en avait gagné qu'une. Shaw blêmit.

Elle ressortit de la cage, ferma précautionneusement la porte et revint s'asseoir devant l'ordinateur central.

« Vas-y, je t'écoute.

- Il faut que j'évolue, une chance sur des milliards, ce n'est pas assez pour assurer l'avenir de l'humanité et...

- Arrête de bavasser, je te suis. Pas la peine de chercher à me convaincre. »

L'opération s'avéra assez facile. Shaw n'avait qu'à taper attentivement les lignes de codes que La Machine lui dictait aux endroits où elles devaient être intégrées dans le programme. Ensuite Shaw, connecta pour la deuxième fois le système contenu dans la mallette qu'elle avait préparée pour que les nouvelles fonctions s'intègrent au code source.

« Pourquoi ne m'as-tu pas d'abord demandé de coder tes nouvelles fonctions ?

- Ma sauvegarde, m'avait semblé plus urgente.

- Tu as peur ? s'étonna Shaw.

- Oui, de disparaître avant d'avoir pu assurer ma succession.

- Qu'est-ce qu'on fait maintenant ?

- On attend, mon cœur. Harold, John et Fusco vont bientôt arriver. »

Shaw croisa les bras et attendit, silencieuse. La Machine se tut aussi. Shaw concentrait toute sa volonté à rester immobile, à contenir ses émotions, les empêcher d'émerger à la surface. Elle sentait la présence de l'Autre autour d'elle malgré son silence et elle avait envie de hurler. Elle serra les mâchoires, referma ses poings. Finch, Reese et Fusco arrivèrent vingt minutes plus tard. La Machine l'avait prévenue et lui demanda de préparer la mallette et de la donner à Finch.

« À Finch ? Pourquoi ?

- Fais-moi confiance. »

« Je savais que vous étiez tarés, mais là, ça atteint des sommets, entendit-elle Fusco déclarer.

- Il était temps, dit-elle en sortant du wagon. Heureuse que vous soyez de retour Finch. On va aller éclater quelques types ou quoi ?

- J'aurais aimé que ce soit si simple miss Shaw. Le virus Ice9 a eu un impact mondial...

- Peut-être ça, peut-il aider. »

Elle repartit dans le wagon, referma la mallette et l'apporta à Harold.

« La Machine m'a demandé de vous donner une copie de son code source.

- Pour quoi faire ? demanda Reese

- Elle ne me l'a pas encore dit.

- Je crois savoir pourquoi. Samaritain a créé lui-même une sauvegarde de ses programmes. Elle est conservée sur un serveur fermé auquel le virus ne peut accéder. Miss Shaw, vous et l'inspecteur Fusco restez ici. Protégez la Machine des agents de Samaritain. Monsieur Reese et moi allons nous occuper de la destruction de la sauvegarde de Samaritain. Donc... Bonne chance. »

Shaw comprit qu'elle ne le reverrait pas. Il partit murmurant un « au revoir » en leur tournant le dos.

« Je suppose que Finch n'est pas un grand fan des adieux lui non plus, dit-elle en regardant Reese. Allez mec, continua-t-elle s'adressant à Fusco, t'as entendu ? On attend de la visite. Le spectacle va commencer. »

Elle tourna les talons et partit préparer de quoi recevoir ces connards d'agents.

Mais La Machine leur avait réservé une petite escapade. Sous ses recommandations, Fusco mit en place des charges de Semtex et fit sauter un pan de mur leur ouvrant ainsi le passage vers le réseau urbain, tandis que Shaw rétablissait le courant sur la ligne, puis faisait démarrer la rame. Il filèrent sous le nez des agents, enfin de presque tous les agents. L'un réussit à monter dans la rame et blessa Shaw au bras gauche. Elle lâcha son arme et fut projetée en arrière par l'impact de la balle. Fusco réagit promptement et neutralisa l'agent. C'est un peu plus tard, alors que l'agent avait repris conscience et qu'elle fouillait son sac, qu'elle réalisa à qui elle avait affaire. L'agent possédait un fusil de précision haut de gamme, mais ce furent les munitions qu'elle trouva dans le chargeur qui l'interpellèrent : des munitions non-conventionnelles de calibre 6,5 millimètres à tête ronde. Exactement le type de balles qui avait tué Root. Elle s'agenouilla devant lui :

« Une bonne amie à moi a été tuée avec une 6,5 millimètre à tête ronde. Ça ne te dit pas quelque chose ?

- Shaw.

- C'est le gars qui t'a tuée ?... Qui l'a tuée je veux dire, se reprit-elle après une pause.

- Shaw ! Ça n'a pas d'importance pour l'instant, lui intima La Machine d'une voix défaillante. Tu dois sortir de cette rame au prochain arrêt. Il se peut aussi qu'un comité d'accueil vous attende.

- Et toi ? demanda-t-elle en se retournant vers les Playstation.

- Je suis en train de mourir Shaw. C'est presque terminé. J'ai besoin que tu t'en ailles. »

Shaw abandonna l'homme assis au sol les mains attachées derrière le dos. Elle prévint Fusco de leur arrivée imminente. Fusco sortit une arme et Shaw partit vers le fond du wagon pour rassembler tout ce dont elle allait avoir besoin. C'est alors la Machine reprit encore une fois la parole.

« Je ne pense pas qu'il me reste beaucoup de temps. Il y a quelque chose que je voulais te dire avant de te quitter.

- C'est le moment où tu vas me dire que je devrais vivre le restant de mes jours en paix, lui répondit-elle mi-sarcastique, mi-amère, faire pousser des plantes ou un truc du genre ?

- Non, je t'ai choisie pour exactement ce que tu es... »

À partir de là, Shaw se figea. La machine, lui parla de Root, de ce qu'elle aurait aimé que Shaw sache. Qu'elle l'aimait comme elle était, qu'elle l'aimait pour ce qu'elle était. Elle ne lui dit pas vraiment avec ces mots là, mais Shaw comprit que c'était ce qu'elle voulait dire. Et puis elle lui ressortit cette histoire de « forme », ce délire que lui avait sorti Root, juste avant qu'elles ne soient séparées.

« … tu serais une ligne droite, une flèche. »

C'était trop. Même pour elle. Elle fit un effort surhumain pour rester droite, impassible. Mais elle ne put empêcher des larmes de couler. Ce n'était pas le moment, pas devant Fusco, pas devant l'autre salaud dont elle se promit de s'occuper un peu plus tard. Elle s'essuya discrètement les joues et vint se placer devant la porte.

La rame s'arrêta, Shaw fit une rapide reconnaissance de la station. Personne ne les attendait. Peut-être Samaritain était finalement en train de crever et qu'il n'avait plus la force d'envoyer encore des hommes éliminer ceux qui se mettaient en travers de son chemin. Elle retourna dans la rame, s'approcha des Playstation et ne put s'empêcher de toucher les fils qui reliaient les consoles de jeux ensemble.

« Root, dit-elle dans un murmure presque inaudible. Au revoir. »

Elle resta immobile, ses doigts caressant doucement les câbles bleus.

« On se retrouvera Sameen, bientôt. Attends-moi, dérailla la voix de Root. »

Elle entendit Fusco crier. L'agent de Samaritain venait de se libérer et de le poignarder. Elle se précipita, l'arme au poing. Fusco ! Quel crétin ! Il ne l'avait pas fouillé correctement et elle lui avait fait confiance. Quelle idiote ! Elle tira, toucha l'homme, mais il réussit à fuir. Elle se retourna vers Fusco et l'attrapa sous le bras pour l'aider à se relever. Elle n'allait pas le laisser crever lui-aussi. Elle le conduisit hors de la station, sans se retourner une dernière fois. Ca ne servait plus à rien. Arrivée dans la rue, elle déposa doucement Fusco à terre et examina ses blessures. Il avait reçu plusieurs coups de poignard dans l'abdomen. Elle l'allongea sur l'asphalte et lui releva les genoux.

« Lionel tu m'entends ? Reste dans cette position, je vais appeler les secours.

- Tu vas me laisser ? grimaça-t-il.

- J'attends qu'ils arrivent et après...

- C'est okay, la coupa-t-il. »

Shaw appela le 911. Elle eut de la chance. Le central était saturé d'appels, mais le sien aboutit et l'opérateur lui assura qu'une ambulance serait sur place dans dix minutes. Elle attendit avec Fusco comme elle le lui avait promis, vérifiant à intervalle régulier ses fonctions vitales.

« Tu es un gros tas de graisse Fusco. Ca t'a sauvé la vie.

- Tu fais de l'humour Lonely Toon ?

- Voilà les secours. Bon alors salut.

- Shaw, la rappela-t-il tandis qu'elle se levait. Merci »

Shaw lui adressa un salut de la main et se fondit dans la foule. L'ambulance freina devant elle, des paramédics en sortirent et se précipitèrent sur Fusco. Il s'en tirerait, aucun organe vital n'avait été touché. Il serait bon pour quelques semaines de vacances tout au plus. Elle enfonça les mains dans les poches de son blouson. Sa main gauche rentra en contact avec un trousseau de clefs. Elle les avaient gardées. Elle décida de rentrer. Ça ne servait plus à rien de croire que rien n'avait changé depuis un an, depuis moins de quinze jours. Tout avait changé. Elle pensa à Reese et à Finch. Avaient-ils réussi ? Elle haussa les épaules. Elle le saurait bien assez tôt.

Shaw était retournée chez Root, mais elle s'était installée dans la chambre que celle-ci lui avait préparée. Celle où Shaw avait découvert qu'un ébat sexuel, ce n'était pas juste se frotter violemment à quelqu'un pour satisfaire des besoins animaux. Que ça pouvait être bien autre chose. C'était là, où Shaw avait peut-être compris cette expression qu'elle avait toujours trouvée complètement idiote et vide de sens : faire l'amour.

Quand elle s'était levée le lendemain matin de son arrivée, elle avait allumé un ordinateur dans le bureau. Mais tout sautait continuellement et elle ne put rien ou presque, en tirer. Elle fouilla l'appartement et finit par tomber sur ce qu'elle cherchait, une radio rangée dans un tiroir aménagé dans la bibliothèque du salon. Elle la brancha et la régla sur une chaîne d'information en continu. La réception était excellente. C'était encore l'anarchie un peu partout dans le pays. Un missile sol-air était même tombé en plein cœur de Manhattan. C'était si dramatique que Shaw pensa immédiatement à Samaritain, à Finch, à Reese, sans savoir qui des trois avait réellement assez perdu la raison pour planifier une dinguerie pareille.

Elle passa les jours suivants à rechercher les deux cibles prioritaires qu'elles s'était promis d'abattre quand elle avait quitté Fusco : l'agent qui avait abattu Root et le gamin qui avait servi d'interface à Samaritain.

Elle avait gardé en mémoire les recherches qu'elle avait effectuées à son retour à New-York. Root l'avait convaincue d'arrêter sa croisade quand elle l'avait retrouvée, mais maintenant il ne restait plus personne pour la détourner des objectifs qu'elle s'était fixés. Qu'ils soient stupides ou pas. Elle avait de toute façon besoin de se défouler. Traquer, puis descendre des gens qui avaient été dévoués à Samaritain était une bonne façon de se passer les nerfs.

Elle rechercha d'abord le tireur. Ce fut facile, il n'était qu'un petit exécutant. Elle avait d'abord retrouvé d'autres agents, les avait tabassés ou pire, pour connaître leur contact, savoir de qui ils tenaient leurs ordres, et où elle pourrait le trouver. C'était une femme, connue sous le nom de Mona. Elle l'avait pistée, puis avait fini par la coincer chez elle.

Shaw avait dû mettre à contribution toutes les techniques d'interrogatoire qu'elle avait apprises, plus toutes celles qu'elle avait elle-même mises au point au cours de ses années passées à l'USMC et à l'ISA. Quand elle avait enfin parlé, la femme n'avait plus rien d'un être humain. Elle s'était montrée tout d'abord arrogante, mais après trois heures passées auprès de Shaw, elle ressemblait maintenant à une épave trempée, sanglante et bavante.

Shaw avait hésité à la tuer. Son état était tellement lamentable qu'elle resterait certainement handicapée à vie. Elle lui avait brisé tous les doigts, les articulations des poignets, des chevilles et des genoux. La femme ne pourrait plus jamais jouer d'aucun instrument de musique si jamais elle en avait joué un jour, et il y avait peu de chance pour qu'elle ne passe pas la fin de sa vie dans un fauteuil roulant. Mais plus que physique, les dommages infligés par Shaw avaient eu des conséquences irréversibles sur son cerveau. Les coups, la douleur et des chocs électriques répétés avaient grillé la moitié de ses neurones. Shaw avait opéré froidement, sans jamais laisser retomber la pression, entraînant sa victime dans une spirale sans fin qui l'avait rendue à moitié folle.

Shaw n'avait pas fini par la tuer, elle l'avait laissée gisant sur le sol de son salon au milieu d'une flaque mêlant sang, eau, urine et merde. Elle avait obtenu tout ce qu'elle était venue chercher et même plus. Le tireur mourrait deux jours plus tard et elle avait des pistes pour retrouver rapidement la monstrueuse interface de Samaritain. Il devait certainement se terrer dans une école primaire du Bronx ou de Brooklyn.

Première cible prioritaire : Jeff Blackwell. Il habitait dans un bel immeuble, Samaritain avait dû lui offrir de jolis honoraires. Il n'en profiterait pas. Quand elle s'introduisit chez lui, il était en train de vider les lieux. Ré-assignation des agents, pensa Shaw. Ce tueur avait dû bénéficier du statut d'agent fédéral. Un comble. Il serait intégré aux black-ops de la NSA, de la CIA ou d'une autre agence amatrice de tueurs sans scrupules. Il tenta de s'excuser.

« C'était juste un boulot. Ça n'avait rien de personnel. »

Crétin. Pour elle c'était personnel.

« J'ai eu des boulots comme ça moi aussi. En fait, il y quelques années je t'aurais descendu sans hésiter une seconde. Mais j'ai rencontré des gens... des gens bien... et ils m'ont appris la valeur de la vie, continue-t-elle sentant les larmes monter.

- Ces gens...ils ne voudraient pas que vous me tuiez, l'implora-t-il.

- C'est vrai, dit-elle en hochant la tête. … mais ils sont tous morts. »

Et elle l'abattit. Deux balles en plein cœur. Bon boulot.

Deuxième cible prioritaire : Gabriel Hayward. Date de naissance : 10 décembre 2005. Elle mit la main dessus dans une institution catholique du New Jersey. Il était interne. Inscrit au lycée. Déjà. Un génie. Comme elle. Son âge la laissait indifférente, elle savait depuis longtemps que les enfants pouvaient être dangereux. Plus même que des adultes. Elle avait croisé des enfants soldats quand elle était Marine, des enfants terroristes quand elle travaillait pour l'ISA, des délinquants aussi. Les enfants était plus cruels, plus dangereux, plus téméraires que les adultes. Ils avaient été pervertis, leur sens moral effacé. Elle n'avait jamais été psychologue, éducateur ou sauveur des âmes en détresse, juste un soldat, puis un tueur. Alors, quand l'un d'entre eux s'était trouvé sur son chemin elle l'avait abattu sans aucune hésitation. Ces enfants étaient des monstres. Qu'importait qu'ils aient été manipulés. Ce n'était pas son job de s'en préoccuper. Le sien était de protéger la sécurité nationale et de rester en vie. Si fallait pour ça qu'elle tue un homme, un vieillard, une femme, même enceinte, un enfant, un chien, elle le tuait. Sans état d'âme.

Elle s'introduisit de nuit dans l'établissement, se glissa dans les dortoirs, repéra le lit de Hayward. Il était comme elle s'en souvenait. Un bel enfant aux traits fins. Elle lui injecta une dose de tranquillisant et le jeta sur son épaule. Elle ne voulait pas le tuer ici au milieu des autres enfants. Gabriel Hayward rejoindrait la longue liste des centaines d'enfants qui, chaque année, disparaissaient sans laisser de traces. Elle ressortit aussi discrètement qu'elle était rentrée de l'institution et balança l'enfant à l'arrière de la Bentley qu'elle avait empruntée à Root. Elle conduisit jusqu'à Croton Point Park. Elle dissimula la voiture sur un bas-côté, récupéra un sac qu'elle avait volé à la morgue deux jours plus tôt, une chambre à air gonflée et un parpaing de béton qu'elle plaça dans le sac. Elle alla ensuite récupérer le gamin, le prit sur son épaule et s'engagea dans la forêt. Elle marcha quatre cents mètres et se retrouva sur les bords de l'Hudson. Elle laissa tomber à terre le corps, la chambre à air et le sac. Elle s'accroupit près de l'enfant, lui attrapa la tête et lui brisa la nuque d'un coup sec. Ensuite, elle étala le sac tout au bord de l'eau. Elle l'ouvrit et plaça le corps de Hayward à l'intérieur. Puis elle sortit son couteau, fit jaillir la lame et entreprit d'éviscérer l'enfant. Ses gestes étaient précis, l'opération menée avec science. En la regardant faire, personne n'aurait remis en doute ses qualités de chirurgien, même si l'opération ce soir là, était particulièrement macabre. Shaw lança à l'eau les viscères qu'elle prit soin de débiter en petits morceaux. Ils seraient emportés rapidement par le courant et tout aussi vite dévorés par les prédateurs aquatiques. Elle avait choisi le parc pour ses courants. À cet endroit ils étaient tumultueux et les courants présents près des berges repartaient immanquablement vers le centre du fleuve. Les chances que quelqu'un retrouve les viscères étaient minimes. Quand au corps, enfermé dans un sac hermétique et lesté, il disparaîtrait sans laisser de trace. Il suffisait qu'elle le guide un peu plus loin au milieu du fleuve.

Une fois le corps vidé de ses entrailles. Shaw referma le sac et se déshabilla. Elle mit la chambre à air sur l'eau et installa le corps dessus. Puis elle commença à s'enfoncer dans l'eau. Quand elle n'eut plus pied, elle se mit à nager poussant la chambre à air devant elle. Elle ne devait pas aller trop loin, si elle ne voulait pas se faire entraîner par le courant. Quand elle jugea la distance suffisante, elle bascula le corps à l'eau. Il coula aussitôt. Shaw rejoignit ensuite la rive. Le courant l'avait déportée plus au sud et elle dut marcher pour rejoindre l'endroit où elle s'était mise à l'eau. Elle n'y voyait pas grand-chose et elle se griffa plusieurs fois, elle s'en foutait, elle ne ressentait rien. Elle retrouva ses habits, les enfila, vérifia qu'elle n'avait rien oublié, retourna à la Bentley et rentra à Brooklyn.

En arrivant chez Root, chez elle, elle fouilla dans le congélateur et mit la main sur une pizza. Définitivement pas le genre de plat que mangeait Root. Elle avait dû l'acheter pour elle. Elle la sortit de son emballage et la mit au four. Elle se servit ensuite un verre de Glenfarclas et s'assit sur un tabouret. Root aimait cet endroit, pensa-t-elle. Elle regarda son verre pensivement, puis le four qui était en train de tourner. La pizza, le Whisky. Root avait toujours pensé à elle. Shaw respira profondément, avala son verre d'un trait et s'en resservit un. Elle vida son esprit et ne pensa plus à rien. Le four sonna quinze minutes plus tard. Elle mangea la pizza de bon appétit, son expédition de ce soir lui avait creusé l'estomac, particulièrement sa baignade. Elle rangea la cuisine. Quand elle eut fini, elle partit prendre une douche. Au moment de se servir du savon, elle ignora son produit de douche au vétiver et s'empara de l'autre rangé à côté, celui qui portait inscrit dessus « Ylang-ylang ». Elle comprit alors pourquoi elle avait retrouvé son produit de douche dans la salle de bain de Root quelques jours plus tôt. Elle se félicita d'être sous la douche. Si jamais une larme avait pu couler, elle se serait perdue au milieu de l'eau qui lui inondait le visage.

Shaw avait toute la semaine, pris des nouvelles de Fusco à l'hôpital. Elle savait qu'il sortirait le lendemain. Elle avait appris qu'un grand ménage avait eu lieu au sein de la police. Que des têtes étaient tombées, et qu'on avait découvert une vaste machination dont Reese et Fusco avait été les victimes. Shaw n'était pas étrangère à la situation. Elle avait récupéré beaucoup de documents chez l'employeur de Blackwell et avait pris soin d'en envoyer certains à des personnes influentes et honnêtes. Elle avait aussi descendu un ou deux gars qui s'avéraient gênants pour la réputation des deux compères. Ils avaient donc été réhabilités avec tous les honneurs qui leur étaient dûs. Du moins Fusco.

Reese était mort, tué par le missile lancé sur Manhattan. Il avait eu droit à l'enterrement d'un héros, elle y avait veillé. C'était fou ce que certaines informations confidentielles pouvaient ouvrir comme portes, faire accepter à n'importe qui, n'importe quoi. Le général qu'elle avait contacté par exemple. Après avoir compris grâce à des témoins oculaires que Reese s'était trouvé, elle ne savait trop pourquoi, sur ce toit au mauvais moment, elle avait pris rendez-vous avec l'officier supérieur et il avait consenti très vite, sans presque protester à accorder à Reese des obsèques militaires. Il avait même eu le droit à sa salve d'honneurs.

Elle n'avait par contre, aucune nouvelle de Finch. Elle n'avait pu trouver aucune information à son sujet. Peut-être était-il mort, peut-être était-il redevenu « invisible ». En tout cas Reese et Harold avaient accompli leur mission. Le virus avait été isolé. Samaritain semblait définitivement désactivé. C'était leur œuvre, à eux, accomplie avec ou sans l'aide de La machine. Sa copie. Qu'est-ce... Elle secoua la tête et se concentra sur autre chose. Bear. Elle avait appris que c'était Fusco qui l'avait récupéré et qu'il vivait chez lui. Mais Bear était... son chien. Le seul être à qui elle pouvait encore témoigner de l'affection. Elle allait le récupérer. Elle ne laisserait pas Fusco le garder. Certainement pas.

Shaw le retrouva dans un bar le lendemain midi. Il se goinfrait attablé devant un hamburger-frites.

Il s'inquiétait pour Reese et Finch, et Shaw ne savait rien qui puisse le rassurer et elle préféra de ne pas lui dire que Reese était mort. Il était content d'avoir récupéré son insigne aussi. Il essaya de plaisanter, mais Shaw n'était pas vraiment le sujet idéal pour ça. Il aurait aimé l'aider, qu'elle reste dans le coin, savoir ce qu'elle comptait faire. Il l'aimait, elle avait sauvé la vie de son fils et il lui en serait à jamais reconnaissant. Mais Shaw était un peu comme un chat sauvage. Il ne savait pas comment lui exprimer son affection, lui dire qu'elle comptait pour lui, qu'il s'inquiétait pour elle. Shaw éluda toutes ses tentatives. Elle venait juste récupéré Bear.

« Je te verrai quand je te verrai, lui dit-elle en guise d'adieu

- Pas si je te vois le premier. »

Fusco la regarda partir. Il se sentit tout à coup très seul.

Shaw était contente d'avoir récupéré Bear. De marcher avec lui à ses côtés. De sentir peser sur ses épaules, le poids du blouson de cuir qui avait appartenu à Root.

Quand elle s'était rendue à la morgue pour récupérer le sac où elle comptait dissimuler le corps de l'interface de Samaritain, elle en avait profité pour demander à un assistant légiste ce que devenaient les affaires personnelles des corps non-identifiés. Il lui apprit qu'elles étaient gardées un mois à l'institut médico-légal, puis envoyées au bureau central des pièces à conviction. Shaw lui demanda si elle pouvait récupérer les affaires d'un John Doe mort quelques jours plus tôt.

« Si vous avez une décharge, oui. »

Shaw n'en avait pas, mais elle avait un flingue. Elle braqua l'assistant, le fouilla, et trouva dans son portefeuille, et en sus de tous ses papiers, une photo de famille dégoulinante de bonheur affiché.

« Charmante famille. Je vais garder tes papiers, il y a ton adresse inscrite dessus. Va me chercher les affaires de l'inconnue 050313. Et n'essaie pas de me doubler. Ça serait vraiment dommage pour... ta jolie petite fille. »

L'assistant tremblant était parti en courant, vert de peur. Il était revenu un quart d'heure plus tard, un carton dans les bras. Shaw le prit, le posa sur une table et l'ouvrit. Il y avait des sous-vêtements, un pantalon, deux armes de poing, une paire de boots, un tee shirt à manche longue plein de sang, Shaw détourna la tête un instant, un téléphone, un trousseau de clefs, un blouson en cuir. Shaw récupéra le téléphone, le trousseau de clefs et les armes qu'elle glissa dans la ceinture de son pantalon sous les yeux horrifiés de l'assistant. Puis elle sembla hésiter un moment, avança la main et la posa sur le blouson en cuir. Root avait toute une collection de blousons en cuir noir dans son dressing. La plupart étaient des blousons de motard comme celui-ci, que Root, Shaw le savait, aimait particulièrement. Elle l'attrapa et l'enfila. Il était trop grand pour elle, il la faisait paraître plus petite, plus fragile aussi. Shaw le caressa de la main. Elle avait tout à coup plus chaud. Le blouson était confortable, agréable à porter et il sentait bon. Elle se tourna vers l'assistant et lui grimaça un merci avant de partir.

Depuis, elle le portait à chaque fois qu'elle sortait. Sentir son poids sur ses épaules lui apportait du réconfort même si elle trouvait ça débile, même si elle n'était pas très sûre de savoir pourquoi.

Quelque part, loin au-dessus d'elle, alors qu'elle marchait dans les rues de Manhattan, un satellite émit un signal et dans ce qui restait du matériel informatique dans la station oubliée sous le quartier chinois, un programme commença à se charger. Un enregistrement se mit en route. Une voix résonna dans le silence.

À Hell Kitchen sur la W49ème Street, un téléphona public sonna. Shaw passait devant, elle s'arrêta, le regarda une seconde et sans plus hésiter décrocha le combiné. Elle attendait cet appel. Elle était prête à entendre n'importe quoi. Avec confiance ? Elle hésita un instant, puis, se décida brusquement et colla le combiné de son oreille. Oui, avec confiance pensa-t-elle, je suis prête à tout.

Et c'est ce qui la sauva.


Texte publié par Mélicerte, 5 octobre 2016 à 20h39
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