Est-ce que tu l'aimes ?

Qui donc avait posé cette hideuse question ? Les yeux grands ouverts ; l'obscurité avait dévoré toute l'humanité qui occupait encore la pièce. Par la fenêtre, c'était la nuit, noir, sans lune et sans visage ; face de cauchemar. A tâtons, les mains exploraient ce qui étaient nécessairement son lit ; sinon où aurait-elle dormi ? Sous ses doigts, c'était un tissu rêche, fibreux qui pique sa peau ; sa couverture. C'était trop peu. Elle frissonnait, sa chaleur lui manquait.

Un ricanement.

Elle dressa les oreilles, à l'affût du moindre souffle, du moindre soupir. Hélas, le rire s'était évanoui aussi vite qu'il s'en était venu. Ah… elle le détestait. Oui ! Elle l'abominait. Mais n'était-ce point un leurre ? Qu'avait-il dit à ce sujet ? Voici qu'elle oubliait. Rageuse, elle frappa du poing le vide et heurta le mur qui lui arracha un cri de douleur qu'elle étouffa en mordant avec force ses draps.

Pourquoi ne dis-tu rien ?

La voilà qui revenait la tourmenter avec ces questions sans queue ni tête et ses énigmes tout aussi obscures. Je t’abhorre voulait-elle hurler. Je te hais avec un « m » lui soufflait une autre part d'elle-même. Dans sa bouche, les peluches râpeuses du tissu lui collait à la langue, en même temps qu'elle répandait une douce et âcre saveur de poussière sèche. Bientôt, elle tousserait, cracherait, feulerait peut-être, comme ces matous galeux qui se débarrassaient de leurs poils au bord des routes. Au moins ne ressentait-elle plus la douloureuse morsure de ces mots.

Est-ce que tu l'aimes ?

Ambre hurlait.