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tome 1, Chapitre 39 « La Caravane des Damnés » tome 1, Chapitre 39

Journal de Juan et Don

Tu as vu Don, comme maman est gentille à présent. Oh oui ! Juan ! Elle nous écoute à présent et plus seulement de temps en temps. Elle nous écoute à présent et plus seulement de temps en temps. Surtout, elle ne crie pas lorsque nous faisons quelque chose qui lui aurait déplu. En même temps, elle ne peut plus. Quel dommage que nous ayons trop tiré sur sa langue ! C’était si amusant ! Oui ! C’est la dame en blanc qui nous a dit comment et c’est l’homme en noir qui nous a fait voir. Elle était toute rose avec un peu de blanc. La dame nous a dit que c’était une candidose. Cela sonnait comme un bonbon. Alors nous avons voulu goûter et nous nous sommes régalés. Mais on ne s’est pas arrêté en si bon chemin, n’est-ce pas Juan. Oh, non ! Don ! Comme maman était délicieuse. L’embêtant, c’était les phalanges. Elles croquaient sous les dents et mettaient des miettes partout dans la tente. Le moins bon, c’était le bas-ventre. Oui ! Mais c’est parce que nous n’avons pas fait comme nous l’avait dit la femme en blanc. Mais on a retenu la leçon et nous écoutons toujours les grands quand il faut. Hein Don ! Oh, oui ! Juan ! Surtout quand nous nous sommes occupés de sa tête et que nous l’avons enfouie dans le désert. Maintenant, qu’est-ce qu’elle est belle avec ses yeux de verre ! Oh, oui ! Ils sont de la couleur du désert.

Journal d’Adarra

Oh ! Comme mes paroles ont porté leurs fruits, et ils n’en sont que plus succulents. Comme je l’ai bercée, cajolée, câlinée de tous ces mots. Chaque soir, je m’en venais la voir, je lui apportais tout le réconfort qui lui était nécessaire et elle a fini par me l’avouer : la boîte la terrorisait, en même temps qu’elle la fascinait. Mais tu n’auras plus peur désormais. N’est-ce pas Estrella ? Allons ! Parle plus fort ! Je ne t’entends point ! Serais-tu devenue muette ?

Ah ! Le sais-tu ? Sans elle, je n’y serai point parvenu. Hélas, comment la remercier ? Je sais ! Seulement sera-t-elle d’accord ? Elle est si séduisante. Mon corps s’incendie chaque fois que je l’aperçois quelque part dans le camp. Je la veux pour moi ! Que dois-je faire ? Sera-ce là mon souhait ? En attendant, partage donc mon allégresse, au lieu de me maudire. Ah ! Bien sûr, j’oubliais. Me pardonneras-tu ? Non ! Évidemment, non ! Laisse-moi plutôt te contempler. Mais n’omet pas que c’est là ton entière faute, si tu n’es plus qu’une femme-tronc. Si tu m’avais écouté jusqu’au bout, je n’aurai pas eu besoin de te confier aux bons soins des jumeaux. Ceci dit, et je peux te l’avouer, à mon grand désarroi, tu n’avais vraiment que la peau sur les os.

Journal de Melina Marchi, la barde

« Il était une fois » tel est le commencement de toute histoire. « Il était une faim » tel est l’achèvement de cette histoire ; une histoire sans début ni faim, car personne ne saura où elle commence ni quand elle s’achèvera. À moins bien sûr, qu’il ne décide de mettre un terme à ce spectacle. Il ne le fera pas, car lui non plus ne connaît ni début ni fin ; seulement la faim, une faim qui jamais ne s’apaise, car il la veut éternelle. C’est cette faim qui le dévore de l’intérieur, qu’il apaise en vain, car il a toujours faim, même s’il feint. Cependant, c’est une chose à ne point dire, à ne point écrire, car cela ne veut pas finir et j’en paierai le prix ; ma plume se brise. En fait, je m’en acquitte déjà, pour autant que je demeure lucide. Est-ce là le véritable prix ? Faire de moi un témoin et complice du devenir de ces graines qu’il a semées depuis son arrivée.

À côté de moi, repose ma dague. Ce seront mes dernières paroles, car je les entends dehors, ils approchent…

Journal de Vincente Naldasio.

Mes compagnons… le sont-ils encore… seulement ? Je m’interroge. Ils m’en ont déjà pris un, mais ils ont préféré me laisser l’autre. Est-ce un mal pour un bien ? J’entrevois la faim. Aura-t-elle raison de moi ou est-ce moi qui aurais raison d’elle ? Bien sûr, tout cela sera vain, car, si j’en ai percé le dessein, je n’ai pu en deviner la fin (ou la faim?) Au moins acceptent-ils que je le contemple, lui, lui qui me nargue de ce sourire teinté de cruauté. Ils n’attendent de sa part qu’un geste et ce sera ensuite la curée. Mais il préfère prendre son temps, car je les sens qui détachent mes liens. Ils m’en ont encore pris et bientôt je ne pourrai plus m’y rendre, je ne pourrai qu’attendre… encore combien de temps ?

Journal de Julia Vanazio

Ô miroir ! Mon beau miroir ! Dis-moi encore une fois ! Que mérite un papa qui été méchant en me délaissant ?

Un châtiment, mon enfant, me souffle mon amant.

Ô miroir ! Mon beau miroir ! Remontre-moi le châtiment que l’on inflige au papa qui a été très méchant.

Cela n’a pas été sans peine, car papa avait peur de moi et de mon nouvel amant. Il le trouvait terrifiant, alors qu’avec moi il mentait effrontément. Heureusement, il y avait les jumeaux Don et Juan. Eux aussi ont puni leur papa. C’est Don qui m’a dit comment ! C’est Juan qui m’a montré comment ! C’est mon amant qui a mis au point le plan. D’abord, je me suis exercé sur son amante. À papa, à présent.

Journal d’Elisia Morelli

Enfin ! Enfin, je suis auprès de lui et tant pis pour le prix, puisque je suis avec lui. Je voulais juste goûter sa chair pour devenir elle et ainsi, pensais-je, je me serai rapproché de lui. Hélas, il n’en a pas été ainsi, car si le rituel de chair fut accompli, je n’en connaissais ni le prix ni la conduite. Seulement, elle m’avait promis, alors je l’ai suivie. Ai-je des regrets après qu’elle l’eut accompli ? Je l’ignore, je ne saurai dire. Les choses sont si différentes à présent et puis… il est là, lui, même si je ne peux le toucher, l’embrasser, ou le baiser. Il me fait chavirer et m’enivre, cela me suffit. Mon âme, mon esprit sont à lui. Quant à mon corps, c’est elle qui me l’a pris. Alors, suis-je malheureuse ou heureuse ? Je crains de ne jamais pouvoir le dire.

Adieu !

Journal de Armando Littore

Ah ! Voici que je me meurs. Cependant, comment aurais-je pu savoir ? J’avais si soif. Ce fut si enivrant, si profond ; une sensation qui vous creuse de l’intérieur et qui vous sape jusqu’à vos ultimes forces. Je devais me débrouiller par moi-même, me murmurait-elle en pointant son doigt vers la vieille qui encore se tenait debout la veille. Il en est d’autres comme toi dont je puis me séparer. Et, comme pour souffler la flamme de la jalousie qui ne manquait jamais de se rallumer dans mon âme, elle ajoutait toujours cette folle lueur d’espoir qui vous rendait esclave ; une minuscule goutte écarlate, insuffisante pour apaiser ma soif, non pour éteindre ma joie. Pour autant, devrais-je l’en blâmer ? Ne serait-ce point plutôt cette petite grue, car c’est elle qui, de par sa volonté et sa cupidité, m’a trompée ? À moins que ce ne soit cette maudite soif qui m’obscurcit le jugement. Que suis-je à présent, puisque je suis condamné à mourir ?

Journal d’Ettore Escaggieri

Qu’il en soit ainsi ! Nous avons agi et je les ai trahis. Trahis ? Non ! Car il m’était impossible de me défaire de ma promesse, de la promesse que je lui ai faite. Ce ne fut pas sans peine et je fus surpris de recevoir de l’aide de ces diables de jumeaux. Ils m’avaient assuré qu’ils me fourniraient de quoi procéder à la substitution. Je me souviens, j’avais ri bêtement, jusqu’à ce qu’ils reviennent avec, un sourire aux lèvres. Grimée et habillée, les autres n’y verront que du feu ; ils sont bien trop tourmentés pour s’en préoccuper. Dans leur état, il confondrait un vulgaire verre de cendre avec un diamant. Désormais, elle est entre mes mains et je pourfendrai quiconque oserait nous séparer, mon aimée.

Journal de Valerio Alvedi, dit la Chatte

Ai-je pêché ? Ne les ai-je point assez écoutés ? J’en doute. Pourtant, ils auraient tant de choses à m’apprendre. Comme j’aurais aimé qu’elle me garde auprès de lui, cependant qu’elle m’a assurément comblé tandis qu’il m’alui tant donné. Je ne peux leur en être que gréé de ce dont ils m’ont gratifié. Quand je plonge mes yeux dans les leurs, j’y lis d’infinis regrets ; j’étais si belle dans ma singularité. Nous faisons cela pour te préserver, pour t’offrir l’immortalité et l’irréalité, m’ont-ils soufflé alors qu’ils soutiraient la vie de mon être de chair. J’avoue, je n’ai ressenti aucune souffrance, peut-être un léger pincement, ainsi qu’ils me l’avaient promis. Mon frère t’apprécie et il ne saurait t’infliger une quelconque douleur, il en est incapable. Est-ce là un serment ? Oui, avait alors murmuré la voix douce et chantante. Et maintenant… où suis-je ? Qui suis-je ? Nul ne peut le dire ? Un grain de sable dans le désert des rêves, une étoile de neige dans le ciel ? Peut-être…

Journal de Enrico Tetano

Ah ! Comme j’aurai eu grand tort de ne point l’écouter, car, en échange, j’ai pu me débarrasser de tous ces mécréants. En effet, et elle m’en a apporté les preuves, c’était bien après mon trésor qu’ils en avaient. Tout est fini, ils ne viendront plus me hanter et m’inquiéter. Oh, non ! Ce ne sont pas eux les plus dangereux, mais les autres avec leurs yeux pleins d’innocence qui, en fait, dissimulent des regards d’aigrefins. Mais voici que je me prépare et affûte mes lames, mes larmes. Tu en auras besoin, m’a-t-elle mise en garde. La chose était inutile, car je ne l’ignorai pas ; il me suffit de contempler leurs visages. Ah ! Je savoure leurs intentions d’appropriation, de spoliation, de mon bien si difficilement acquis. Venez donc mes petits, je saurai vous soulager de tous vos maux ; bientôt. Je m’occupe de tout.

Est-ce tout ?

La femme au profil d’aigle acquiesça. On l’avait envoyée dans le désert à la recherche d’une caravane qui aurait dû arriver en ville, voilà une semaine, et elle s’en était retournée en possession de quelques carnets aux pages à demi arrachées et froissées.


Texte publié par Diogene, 14 juillet 2017 à 21h42
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