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tome 1, Chapitre 3 tome 1, Chapitre 3

Ah les fameuses sorties nocturnes des bidasses en folie.

Beuverie, baston, pute… un peu l’équivalent des saloons dans les westerns.

Et bien ils avaient bons dos les cowboys des temps modernes. Car ce soir-là ils jouaient au… tenez-vous bien… trivial poursuit. Et en guise de saloon nous avions le foyer du fort.

J’entends déjà les biens pensants dire : « Au moins le trivial poursuit, c’est culturel. »

Franchement j’en doutais. Après tout ce n’était que des noms, des chiffres, et autres anecdotes balancés bêtement. Et si vous suivez un peu vous partagerez sûrement mon point de vue. Et le pire est que j’y jouais juste comme ça histoire de tuer le temps, à l’instar du beauf avachit devant la télé. D’ailleurs c’est justement ce que faisaient ceux n’étant pas à notre table.

Il existait bien quelques excuses : nos faibles moyens, le temps dégueulasse…et surtout notre flemme.

Après les distractions passons aux personnes.

Nous avions Jérôme comme responsable du foyer. Il n’était pas un véritable engagé chiant voir méprisant. Son contrat n’était que d’un an. Il fumait même des pets avec nous. C’est vous dire !

Nous (c’est-à-dire les appelés) étions tous présents à part évident Thomas, bien obligé de faire bande à part.

Même Vincent comptait parmi nous. La pluie l’empêchait de se balader en ville comme d’habitude.

« Voilà question sportive.»

« Au fait Simon ils te voulaient quoi les gendarmes ? »

L’auteur de cette interruption auparavant devant la télé, se nommait Tarek. Malgré ce que porte à croire cette entrée en matière plutôt brute, c’était un sacré baratineur.

« Comme pour Vincent et Thomas. J’ai fait mes classes avec ce Hamed, qui vient de déserter. Alors ils vérifient si je sais quelque chose. Quel est le prénom du plus douillet des judokas français ? »

« Je pensais que vue ton ancien boulot, ils attendaient un peu plus de toi. Je ne sais pas une théorie ou un truc dans le genre. »

Je certifie toujours que Tarek détenait un talent pour la parole. Simplement il me visait d’une manière indirecte.

« David. C’est vrai ils ne t’ont pas demandé si t’avais remarqué un détail, même de façon détournée ? Réfléchis bien. »

Et voici Didier l’arme involontaire de Tarek. Cet ancien étudiant en droit était sans doute pire que l’inculte de base ne lisant que les blagues de télé Z.

Il sortait toujours des propositions bateaux provenant d’un bouquin et complètement incongrues juste dans l’intention la ramener. Il vous donnait envie de brûler la première bibliothèque, qui passe.

En résumé il étalait sa culture de la manière la plus grossière, qui soit.

Et ma personne bénéficiait d’un petit bonus du fait que Didier était fan d’Agatha CHRISTIE.

Forcément à cause de ma précédente profession, il était à l’affut.

Donc Tarek me mettait cet emmerdeur dans les pattes.

Heureusement qu’au vue de notre nombre de parties précédentes, jouer n’exigeait pas beaucoup de concentration de notre part.

« Question cinéma : dans quel film Rudolf VALE..… »

« Le fils du cheikh. Il est resté le même temps que nous avec les gendarmes. Ça signifie bien qu’ils ne lui voulaient rien de spécial. »

Ce soutien inattendu du si silencieux Vincent reposait en plus sur un mensonge. Comment pouvait-il connaitre la durée de mon interrogatoire ? Seul Thomas devant passer après, m’avait attendu.

Je le mis sur le compte de notre fameuse affinité. En tous cas la remarque était nette et sans bavure.

Pourtant Tarek ne se démonta pas, et improvisa par une provocation.

« Quatre mois de service et il veut déjà rentrer chez papa-maman. Quel nul ce type.»

Ce n’était pas particulièrement dirigé contre moi. Simplement le jour précédent Tarek m’avait déjà questionné sur l’interrogatoire juste pour passer le temps. Et j’avais vite éludé le sujet. Je craignais certaines dérives.

Vexé d’être défait dans son domaine de prédilection Tarek prenait sa revanche.

« Littérature : SAINT-EXUPERY... »

« Un mouton. Attend il faut voir ce qui lui est arrivé aussi. Une partie de pognon volé a été retrouvé dans son transistor. Donc on lui a tout mis sur le dos et muté à Malbousquet, vous savez le camp disciplinaire dans l’Arsenal. »

Je déviais là-dessus en parlant des tarés incontrôlables, qu’ils casaient là-dedans sans même un semblant de surveillance. A vrai dire c’était plus ou moins calculé. La perspective du job pour Manu me rendait moins passif.

« Comment tu sais çà ? »

« Philo : NIETZCHE… »

« Ce qui ne tue pas rien plus fort. »

« Quand un appelé vole on le fout là. Ce n’est pas dur à deviner. »

« Non, je veux dire pour Malbousquet, comment ça se passe, et tout çà. »

Connement coincé je parlais de Franck, un appelé croisé à Marseille lors de ma semaine de vigipirate en renfort aux douanes. On y reviendra.

Pendant ce temps-là Hervé séchait sur une question au sujet de la femme de Bruce WILLIS.

Soi-disant placé d’après lui à Malbousquet sous un prétexte fallacieux, le pauvre Franck s’était fait dépouillé au point de bloquer volontairement sa carte bleue. Puis à force d’insistance et d’un officier pas trop con, il en était réchappé.

Étant donné notre monde réduit, les confidences de Franck à mon adresse, passèrent pour une coïncidence même aux yeux de Tarek.

D’ailleurs il n’insista pas. Peut-être croyait-il que cette anecdote un peu glauque était la raison de mon esquive précédente. A moins que le grand Tarek soit à court d’argument ?

Et puis Guillaume lui prit le fanion de l’emmerdeur. Pourtant il ne correspondait pas tellement au profil. Il faisait plutôt dans le bon saint-maritain. Remarque c’est chiant aussi parfois.

A la différence que c’est involontaire. Ce qui est peut-être pire au final, puisqu’on ne peut même pas lui en vouloir.

« Pauvre gars. Et maintenant il est dans la nature traqué. Tu ne pourrais pas l’aider un peu ? »

« De quoi ? » M’exclamais-je en espérant qu’il ne voulait pas en venir là.

« Tu sais : essayer de le retrouver. »

« Stop, moi je faisais les FI-LA-TU-RES. Je ne vais pas me lancer dans une histoire à la con pour un mec que j’ai connu qu’un mois pendant mes classes. Sans parler des gendarmes. »

Voilà l’une des dérives que je craignais.

« Soit pas comme çà. Je suis sûr qu’on peut trouver des indices. » Ajouta Didier.

Décidément il n’en loupait pas une.

« Tu vis sur quelle planète toi ! » Balança à son tour Vincent. « On ne sait absolument rien, pas un putain de détail sur cette désertion. Et je ne crois pas que les gendarmes vont nous filer des infos. Alors on arrête les conneries. »

Ce fut plus le ton anormalement agressif que les arguments, qui conclut le sujet.

Un silence de mort suivit, puis Tarek se dévoua pour passer sur autre chose. La culpabilité je suppose.

En tous cas Vincent allait bien loin à l’égard d’un simple camarade de chambrée.

Pourtant l’attitude la plus surprenante n’était pas la sienne.

Pourquoi est-ce que je flippais ainsi ? Après tout personne n’était en mesure de m’obliger à enquêter.

On pouvait juste m’emmerder un peu là-dessus rien de plus.


Texte publié par Jules Famas, 3 novembre 2015 à 21h26
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