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tome 1, Chapitre 2 tome 1, Chapitre 2

Le vent fouettait sa truffe et sa langue pendante. Il avait ignoré les appels qui l’enjoignaient à revenir. Peut-être que s’il fuyait assez vite, tout ce cauchemar ne deviendrait plus qu’un mauvais souvenir ? Haletant, Grimouche s’arrêta enfin. Le soleil brillait, presque au zénith. Pourtant, malgré cette chaleur, malgré sa course effrénée, Grimouche avait froid à l’intérieur. Désorienté, il huma l’air et observa autour de lui. Les lieux s’avéraient inconnus. À quel point s’était-il éloigné ? Les bruits de la ville lui parvenaient étouffés. Une légère brise ébouriffait ses poils et se faufilait entre les branches des arbres et buissons alentour dans un bruissement doux. Ce calme ambiant apaisa un peu Grimouche, qui se coucha dans l’herbe, harassé par ses mésaventures. Cette accalmie fut cependant de courte durée, car une vague de tristesse le submergea. Il posa sa tête sur ses pattes et gémit.

— Oh, un mignon petit chien !

La voix fluette le sortit de sa torpeur. De grands yeux l’observaient. C’était l’un de ces personnages étranges sans odeur qu’il croisait parfois. Celle-ci avait l’apparence d’un de ces mini-humains dont il se méfiait. Une fois, l’un d’entre eux avait osé lui tirer l’oreille ! Grimouche se souvenait encore de la douleur atroce provoquée par cet affront. Lui qui avait voulu se montrer aimable ! Heureusement, sa Denise avait réprimandé le vilain garnement. Denise… Elle lui manquait déjà tant ! Un nouveau couinement lui échappa. La petite fille s’accroupit devant lui. Elle tendit la main, mais Grimouche fit un bond en arrière.

— Tu peux me voir ? N’aie pas peur ! Je voulais juste te caresser. Des fois, les animaux deviennent moins tristes quand je les caresse, même s’ils ne me voient pas. Tu veux que j’essaie avec toi ?

Grimouche tremblait un peu. Pouvait-il faire confiance à cette drôle de petite humaine ? Son instinct lui soufflait que c’était le cas. Alors, il avança timidement le museau. La fillette lui sourit.

— T’es vraiment trop mignon ! Je m’appelle Luna. J’habite ici depuis très longtemps !

Lorsque la paume de la mini-humaine effleura la zone que Grimouche préférait qu’on lui gratte, entre les deux oreilles, une sensation bizarre l’envahit. Tous les bons moments passés avec sa Denise affluèrent dans un feu d’artifice teinté de bonheur. Quand elle lui achetait ses friandises préférées. La fois où elle avait pris soin de lui alors qu’il était très malade. Leur première rencontre, lorsqu’elle l’avait adopté. Il l’avait tout de suite adorée !

Brusquement, la magie s’éteignit. Luna avait retiré sa main. Ses traits s’étaient empreints d’une mélancolie inappropriée sur un si petit minois. Grimouche pencha la tête sur le côté, intrigué.

— Oh… Ta maîtresse aussi a été sa victime… J’espère qu’ils finiront enfin par le trouver, cet horrible assassin ! J’aurais bien voulu prendre soin de toi, mais je ne peux pas… enfin, tu comprends. Viens, suis-moi ! On va te trouver une nouvelle maison !

Sans attendre de réaction, Luna s’enfonça dans les bois. Grimouche hésita un instant, puis s’élança à sa suite, poussé par la curiosité.

Il trottinait derrière l’esprit, pâle silhouette qui se faufilait entre les herbes. La langue pendante, Grimouche s’efforçait de ne pas la perdre de vue. Pourtant, il trébuchait sur les racines et se faisait griffer par les ronces. De temps en temps, elle se retournait et lui lançait un sourire. Il lui répondait par un petit jappement. Alors, elle reprenait la route. Où donc la menait-elle ? Grimouche avait beau forcer sur ses petites pattes, il ne la rattrapait jamais.

Ils finirent par rejoindre l’orée de la forêt. Il s’arrêta près d’elle et contempla le panorama. Ils étaient de retour près de la ville. Grimouche renifla : une odeur de métal, de gaz et d’essence lui monta aux narines. Il éternua.

Un petit rire jaillit de la fillette, qui s’agenouilla près de lui et lui gratta le haut du crâne.

– Malheureusement, je ne peux pas continuer ; je ne peux pas trop m’éloigner de la forêt. Mais je sais que tu trouveras quelqu’un là-bas.

Grimouche lui jeta un regard peu convaincu.

— Tu verras, continua-t-elle. Mais sois prudent : il y a souvent des incursions dans ce quartier. C’est là où tu auras plus de chance de la rencontrer.

Grimouche lâcha un faible aboiement interrogateur. Mais la petite fille disparut en silence. Notre héros huma l’air, par réflexe, même s’il savait qu’elle n’avait aucune odeur, puis reporta le regard sur les bâtiments. Non, décidément, il n’avait vraiment pas envie d’aller là-bas. Pas de jolies petites rues pavées, encadrées de maisonnettes fleuries et de boutiques. Ici, les bâtiments étaient rectangulaires, assemblages de métal et de béton, et un labyrinthe de voies et de chemins, parfois encombrés de tas de caisses et d’autres déchets les reliaient les uns aux autres. Il regretta soudain la charmante rue où il habitait avant. Avant la disparition de Denise. Il s’allongea, le museau entre les pattes et poussa un immense soupir triste.


Texte publié par Feydra, 8 décembre 2025 à 20h43
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