Les notes s’élevaient avec enthousiasme dans les airs.

L’immense sapin brillait de mille feux, tel un phare dans l’obscurité. Il captait le regard hagard des vagabonds qui s’avançaient d’une démarche hypnotique. La file de marcheurs s’étirait bien au-delà de la place, se perdait dans les ombres de la nuit. D’autres arrivaient encore, en marées perpétuelles.

Légère comme le vent, elle dansait dans la brise du soir. La mélodie lui inspirait chaque mouvement, chaque courbe aérienne, au rythme des clochettes et des grelots d’argent.

Un air traditionnel fit naître un embryon de sourire dans les visages ternes des pèlerins à proximité du porche lumineux. Les feuilles de houx, lustrées et brillantes, renvoyaient l’éclat des guirlandes multicolores.

C’était d’abord la musique qui avait attiré les voyageurs. Les avait tirés de leur léthargie. Ils avaient traversé des vallées de tourment pour arriver jusqu’ici. Surmonté le froid et la grisaille. Dépassé leur quotidien morne. Leur procession, d’abord lente, se colorait d’excitation à l’approche du sapin et la foulée se faisait moins pesante. Leur allure s’harmonisait progressivement au rythme qu’elle partageait avec chaque pèlerin.

Au bout de leur périple, les visiteurs étaient surpris par les parfums oubliés, comme des secrets longtemps enfouis. L’enchantement apparaissait dans les regards. Puis, chacun, enveloppé de chaleur et de réconfort, pouvait enfin laisser derrière lui son manteau de morosité. Profiter des rires et de la joie d’être ensemble et de partager.

Elle virevoltait de plus belle, effleurant avec délicatesse chaque visiteur, caresse d’un vent d’hiver.

Et leur soufflait la mélodie de leur enfance. Jusqu’à ce qu’ils atteignent ce point, elle guidait leurs pas, dansant sans faiblir, invisible funambule en équilibre sur les souvenirs.

Elle était la mémoire des Noëls passés et ravivait la flamme en douceur, pour tous les Noëls à venir.