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Aurore arrêta son réveil matin et se leva. Elle se sentait en joie aujourd’hui. Un bon sommeil et un bon rêve, ça vous mettait de bonne humeur.

 

Généralement, elle ne se souvenait que très peu de ses rêves. Celui-ci faisait exception. A plus d’un titre. Elle le voyait encore clairement et en plus, elle ne se souvenait pas d’avoir déjà rêvé d’être une superhéroïne. D’habitude, ses rêves tournaient plutôt autour de ses amis, sa famille ou Toutoudoudou, son chien en peluche. Oui, le nom était ridicule, elle le savait, mais c’est qu’elle l’avait depuis toute petite. Elle l’avait nommé vers 2 au 3 ans. Maintenant, à 9 ans, elle était de toute façon trop habituée pour en changer.

 

Les yeux luttant encore pour s’ouvrir complètement, le corps encore enveloppé dans ce doux délassement des muscles après une nuit immobile, la petite blondinette enfila ses chaussons et descendit l’escalier. Elle tenait Toutoudoudou à bout de bras, comme s’il volait dans les airs. Elle entra dans la cuisine d’un saut en chantonnant :

 

- Tatadada ! Voilà Super Toutoudoudou, le superhéros des toutous !

 

Là, sa mère et son père prenaient déjà leurs petits déjeuners. Ils la regardèrent un instant avant de retourner à ce qu’ils faisaient.

 

- Bonjour ma chérie, bien dormi ?

 

Sa mère débordait toujours d’énergie, du matin au soir. Elle était toujours en train de faire quelque chose et avait toujours des centaines de projets en tête. Mais elle était toujours très occupée par son travail et n’avait pas beaucoup de temps pour s’occuper de quoi que ce soit d’autre. Là elle prenait son café en essuyant un coin un peu sale de la table tout en regardant les derniers messages de ses collègues sur son téléphone. On ne pouvait pas dire que l’entrée en fanfare de super Toutoudoudou l’avait particulièrement marquée.

 

- Coucou ma puce, viens me faire un câlin.

 

Son père était bien plus détendu. Il travaillait depuis la maison et s’épargnait donc pas mal de temps perdu et de stress. Cela dit quand il était occupé à son bureau, il ne fallait pas le déranger. C’était toujours très important au point que le moindre petit élément perturbateur ruinerait, selon lui, des heures de travail. Aurore ne devait pas le déranger non plus quand il faisait sa musculation qu’il prenait très au sérieux.

 

Aurore se dit que ses parents ressemblaient à des superhéros. Sa mère avait le pouvoir de se multiplier pour faire tout ce qu’elle avait à faire et son père avait presque la musculature des comics. Enfin, un peu. Presque un peu.

 

Et elle ? Ben elle avait le pouvoir de secourir des gens dans ses rêves. D’accord, ça aurait été mieux de les sauver dans la réalité mais, comme le disait sa grand-mère, il faut savoir se contenter de ce qu’on a. Sa grand-mère lui disait aussi souvent qu’en voyant ses parents, elle n’était pas étonnée qu’ils aient donné naissance à une vraie pile électrique comme Aurore.

 

La fillette embrassa sa mère, câlina son père et s’attaqua ensuite à ses tartines de miel et son bol de chocolat chaud. C’est qu’il en fallait de l’énergie pour faire une superhéroïne.

 

Le petit déjeuner avalé, Aurore remonta rapidement dans sa chambre, toujours en faisant voler le chien en peluche. Désormais complètement réveillée et pleine de vigueur, elle faisait foncer Toutoudoudou avec virages, loopings et en poussant son cri de héros « ouaf ouaf ouahou » ! Arrivée dans la chambre, Aurore lança la peluche sur son lit depuis la porte d’entrée pour un ultime vol solitaire. Puis elle s’habilla rapidement, non sans prendre des poses de superhéroïnes à chaque vêtement enfilé.

 

- T’es prête poussin ?

 

Son père l’attendait derrière la porte. La blondinette saisit son cartable et le rejoignit d’un bond.

 

Tous les jours, elle allait à l’école à pied avec son papa. Ce jour-là, cependant, elle courait pratiquement toujours devant lui.

 

- Hé ! Attends-moi un peu, ne cessait-il de lui répéter tout au long du chemin.

 

Il finit par lui prendre la main pour qu’elle ne s’éloigne pas trop. Ce n’était pas bien grave. Elle se repassait le rêve de cette nuit dans la tête. C’était vraiment curieux qu’elle s’en souvienne aussi bien. D’ailleurs, au fur et à mesure qu’elle revoyait Crépuscule voler puis se battre, elle se demanda d’où lui était venue l’insulte particulièrement grossière qu’avait dite le voleur. Oh, des gros mots, elle en connaissait. Mais elle ne les utilisait pas. Enfin, pas trop. Et puis surtout pas des aussi vulgaires. Elle ne savait pas où elle avait bien pu entendre celui-là.

 

Devant la grille de l’école, son père réclama un bisou qu’elle lui donna de bonne grâce puis elle couru dans la cour pour rejoindre ses amies. Elle traversa la cour comme une flèche et s’arrêta devant Samira, Eliane et Pho toute excitée.

- Les filles, les filles, vous devinerez jamais de quoi j’ai rêvé cette nuit.

- Bonjour aussi, lui répondit Pho en rigolant.

- Ah oui … Salut. Bon, vous devinerez jamais.

- Ben si on peut pas deviner, pourquoi on essaierait, lui fit Samira.

- T’as pu rêver de trop choses, compléta Eliane.

- T’as rêvé de pizza ? Tenta Pho.

- Ah, non, s’exclama Eliane, un dragon ! T’aimes trop ça les dragons. J’suis sûre c’est un dragon.

- Un amoureux ? Essaya à son tour Samira avec un sourire taquin.

Aurore secouait négativement la tête à chaque fois mais les filles se résignèrent vite à ne pas pouvoir trouver de quoi il s’agissait.

- C’était trop cool, leur expliqua la blondinette. J’ai rêvé que j’étais une superhéroïne. Et j’ai battu un méchant. Et je volais.

Ses amies la regardèrent avec étonnement et un peu d’envie.

- Ah ouais, supercool en effet, admit Samira.

- J’aimerais trop être une superhéroïne, déclara Eliane. J’aurai bien des gens à taper.

- J’aimerai trop ça aussi, fit Pho. Enfin, être une superhéroïne. Pas taper des gens.

- Mais quand t’es une superhéroïne tu DOIS taper des gens, répondit Eliane. C’est le boulot qui veut ça.

- On peut peut-être quand même essayer de discuter avant, s’immisça Samira. Genre leur laisser la possibilité de se rendre.

- Ouais mais c’est moins drôle. T’as combattu quoi comme méchant dans ton rêve Aurore ?

- Oh ben c’était juste un voleur qui en voulait à une dame. Mais il avait un couteau.

- Et t’étais résistante aux lames ? Demanda Samira.

- J’sais pas. Il m’a pas touché, il a pas eu le temps. Mais l’autre truc cool, c’est que j’étais plus grande, genre une ado et tout. Et puis j’avais un super nom de superhéroïne. C’était Crépuscule.

Les filles acquiescèrent. Elles avaient déjà toutes rêvées ou imaginer comment elles seraient plus grandes. C’était cool, c’était indéniable.

- Par contre « Crépuscule », fit Samira dubitative, le nom est cool oui mais … « Aurore et Crépuscule », genre un superméchant va capter tout de suite que c’est toi.

- Ouais non mais … Aurore c’est courant comme prénom. Ça veut rien dire.

La discussion s’arrêta là pour le moment car la sonnerie de l’école retentit et elles partirent se mettre en rang devant la maîtresse. Samira et Eliane se mirent devant et Aurore se rangea avec Pho.

- En tout cas ça serait vraiment génial qu’il y ait une superhéroïne, lui fit cette dernière. Mon papa disait ce matin qu’il y avait eu une agression dans mon quartier cette nuit. Une femme qui est serveuse au restaurant deux rues plus loin de chez moi a failli se faire voler mais elle a réussi à s’en tirer. Il paraît que l’homme qui l’a attaqué avait un couteau aussi.

- Ah bon ?

Aurore fut interloquée. Une serveuse attaquée au couteau ? Ça alors, comme dans son rêve. Mais elle se rendit à l’évidence. Des restaurants et des serveuses, ce n’était pas ce qui manquait en ville. C’était une bête coïncidence. Mais de fait, elle était d’accord avec Pho. Quel dommage que Crépuscule n’existe pas pour de vrai.