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tome 1, Chapitre 1 tome 1, Chapitre 1

Elle volait. Vraiment. Et haut. Très haut.

Au-dessous d’elle la ville, constellée des points jaunâtres clairsemés des appartements encore illuminés à cette heure tardive, étendait dans toutes les directions ses serpents de lumières blanches et orangées. Au-dessus d’elle, libérée des lumières factices de la cité, la multitude d’étoiles pouvait donner la pleine mesure de leurs éclats. A perte de vue, un ciel de lumière englobait l’insignifiante agglomération et ses champs noirs environnants.

Elle volait. Elle aimait se perdre ici, entre lumière et obscurité.

Le vent froid soufflait en continu sur son visage. Ça ne la gênait pas. Au contraire, la fraîcheur lui était agréable. Elle filait sur la brise glacée comme elle glisserait sur un lac gelé. Elle frissonnait parfois un peu. Ça n’avait pas d’importance. Le vent la comblait d’énergie. Ce froid, entre le ciel et la terre, ne pouvait rien contre un sentiment de liberté stimulant.

Elle volait contre le vent, avec le vent. Plongeant ou remontant. Parfois vite. Parfois plus doucement. Elle était un oiseau, une étoile filante, une goutte de pluie.

Mais soudain un cri.

Il venait d’en bas. De tout en bas dans la ville. D’un coin sombre.

Elle plongea. Elle s’amusait bien jusque là mais quelqu’un avait besoin d’aide. Elle n’allait pas l’ignorer. En s'approchant, elle put mieux se rendre compte de la situation. Un homme se tenait face à une femme dans une ruelle. Elle était tombée au sol et lui la menaçait d’un long couteau. Elle fonça, se retourna et atterrit avec un bruit sourd entre les deux, un genou et un poing au sol, soulevant un peu de poussière.

Elle faisait face à l’agresseur et ne voyait pas la réaction de la victime. Mais celle de l’homme était plutôt comique. Il était figé comme une statue, avec un air grandement étonné. Il avait du mal à comprendre ce qu’il venait de voir. La lumière d’un lointain réverbère se reflétait un peu sur son crâne dégarni comme s’il s’agissait de marbre. Sa bouche, au milieu d‘une barbe blonde broussailleuse, était entrouverte comme s’il était l’effigie d’un tribun d’antan prononçant un discours.

Elle se redressa sans qu’il ne fasse le moindre geste.

- Vous devriez partir !

Elle lui avait parlé d’une voix calme et ferme. Elle se tenait presque droite, les genoux, le dos et les bras légèrement fléchis. Elle montrait qu’elle était maîtresse de la situation, pleine de sang-froid, pondérée mais prête à agir si besoin.

L’homme n’en revenait toujours pas. D’où cette gamine était-elle tombée ? Et qu’est-ce qu’elle lui voulait ? Il y a quelques secondes à peine, il allait détrousser la jolie serveuse du restaurant du coin qui venait de finir son service et qui rentrait toujours seule. Et puis là … Cette fille tombait du ciel.

Son cerveau mit cette dernière information en suspens. Pour l’instant peu importait d’où elle était venue. Le fait est qu’elle était là, devant lui. Elle voulait visiblement l’empêcher d’empocher l’argent pour lequel il avait longuement attendu en embuscade toute la soirée. Et qu’est-ce qu’elle allait faire ? A bien y regarder, ce n’était qu’une adolescente. Une jeune adulte au mieux.

Et sa dégaine. Elle avait certes un tour de cou noir serré qui lui remontait jusque sous ses yeux bruns en amandes, mais elle n’avait rien de spécial à bien y regarder. Ses longs cheveux noirs étaient simplement attachés en queue de cheval. Elle ne portait qu’un gros hoodie noir et une sorte de pantalon cargo de la même couleur. Des baskets basses, également noires pour changer, complétaient donc une tenue des plus banales qui ne cachait pas vraiment qu’elle était, en réalité, plutôt frêle. Elle n’avait rien d’impressionnant.

De son côté, l’agresseur faisait facilement deux têtes de plus qu’elle et il était aussi deux fois plus large. Avec son couteau en plus, il ne voyait vraiment pas ce que pouvait faire l’importune. Et il reprit donc contenance.

- Qu’est-ce que tu fous là toi ? Dégage de mon chemin ! Ou bien peut-être que tu as aussi du fric sur toi ? Ça, ça m’intéresse.

Il s’avança d’un pas et tendit le bras pour saisir la fille. A la limite, il s’attendait à ce qu’elle soit agile et qu’elle essaie de l’esquiver. Peut-être même qu’elle y réussisse. Jamais il ne se serait attendu à entendre le craquement de son bras qu’elle venait de casser, le retournant d’une seule main.

- Ah, zut, j’y suis allé trop fort, désolée, fit-elle sérieusement embêtée à l’agresseur qui hurlait de douleur.

Mince de mince. Elle n’avait pas voulu lui faire mal comme ça. Il n’y avait pas besoin d’être aussi brutal pour l’arrêter après tout.

- Espèce de …

Il donna un coup de couteau tout en lui balançant une insulte vraiment grossière. Elle frappa de sa jambe. L’homme se retrouva projeté contre le mur de la ruelle. Il ne se releva pas. Aïe, aïe, aïe ! Il fallait vraiment qu’elle se contrôle. Elle aurait pu vraiment lui faire mal. Enfin, il était hors d’état de nuire, il était temps de s’occuper de sa victime.

La serveuse n’avait pas tout vu. Elle avait regardé autour d’elle mais n’avait pas vu d’échappatoire possible, la ruelle se finissant en impasse. Elle avait à nouveau posé son regard sur la fille et l’agresseur lorsque celui-ci avait hurlé de douleur et elle l’avait vu se faire projeter contre le mur. Elle en resta coite, sidérée.

Lorsque l’adolescente s’approcha, elle descendit son tour de cou pour sourire à la victime.

- Tout va bien ? Il ne vous a pas fait de mal ?

- Je vais bien, répondit-elle d’une voix trahissant encore sa stupéfaction. Je … Merci.

Elle prit la main de la jeune héroïne qui l’aida facilement à se relever.

- Pas de quoi, c’est normal. Vous devriez vous en aller et appeler la police au passage. Je vais rester là pour m’assurer qu’il ne se réveille pas et qu’il s’enfuit avant leur arrivée.

- Ah ? Euh … d’accord.

La serveuse n’avait en effet pas envie de rester dans cette ruelle où elle avait été traînée de force. Elle se dépêcha donc de partir mais, avant de tourner au coin de la rue, elle se retourna.

- Excusez-moi. Vous m’avez sauvé mais … je ne connais même pas votre nom.

- Appelez-moi Crépuscule.

L’adolescente se tenait face à la victime, les poings sur les hanches avec toujours un sourire aux lèvres. La serveuse sembla surprise puis se contenta de sourire à son tour avant de s’en aller pour de bon.

Quelques minutes plus tard, les sirènes des voitures de police retentirent et s'approchèrent rapidement. La jeune héroïne constata que le criminel était toujours assommé et elle décolla à nouveau dans les airs, pour éviter les questions gênantes.

Dans son lit, bien au chaud sous sa grosse couette, la petite Aurore ouvrit doucement les yeux. Son réveil laissait échapper une mélodie enfantine guillerette pour l’informer qu’il était bien temps de se lever. La fatigue du réveil la tenait encore mais elle eut un petit sourire. Elle voyait encore les étoiles, la ville et ses lumières. Le combat contre le méchant et le joli sourire de la femme secourue. Alors ça, ça, c’était un rêve super cool.


Texte publié par Darklord, 2 décembre 2025 à 17h01
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