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tome 1, Chapitre 7 « Chapitre 7 » tome 1, Chapitre 7

Avec l’éveil, le corps de Darian avait changé, subtilement mais indéniablement. En allant vérifier son reflet, aperçu dans l’eau du ruisseau voisin, lui renvoya une image familière et pourtant différente, un mince anneau jaune bordait désormais son iris brun. Ce n’était qu’un dixième de la circonférence, mais la teinte vive, tirant sur le jaune tulipe, contrastait vivement avec le reste.

C'était le signe physique qu'il était un éveillé.

Ce signe distinctif, il le connaissait bien. Dans d’autres vies, il l’avait vu s’étendre lentement à mesure qu'il gagnait en puissance, jusqu’à recouvrir totalement l’iris pour former ce regard doré propre aux éveillés confirmés.

Ce changement n’était pas que cosmétique. Dès les premières heures, il sentit ses muscles répondre avec plus de vigueur, son souffle plus stable, ses réflexes plus précis. Une estimation rapide lui fit penser à un gain d’environ dix pour cent de sa force physique, assez pour renverser un adversaire plus massif ou bander un arc plus puissant sans fatigue.

Mais au-delà de la force brute, il sentait aussi une différence plus profonde, plus intime. Un mana pulsait désormais librement dans son corps, un courant chaud et vibrant, presque vivant. Il pouvait le percevoir, faiblement, comme une pulsation parallèle à celle de son cœur.

Ce n’était qu’un commencement, mais Darian le savait, ce petit fragment d’or dans son regard marquait le retour d’un pouvoir qu’il avait mis des vies entières à maîtriser.

La prochaine étape du chemin de Darian était claire dans son esprit, il devait renforcer son noyau.

L’éveil n’était qu’un escalier infini, pour le gravir complètement, il lui fallait que son noyau commence à produire de lui-même du mana. Ce stade marquait la véritable naissance d’un mage, le moment où l’énergie du monde fusionnait avec celle du corps.

Il devrait commencer par envoyer de l'énergie dans son noyau pour qu'il produise du mana. Il devait ensuite faire circuler ce mana dans tout son être, le laisser emplir ses artères, ses veines, ses muscles. Chaque passage, chaque pulsation renforçait sa chair, rendant son corps plus résistant, plus endurant. Les éveillés qui bâclé cette étape finissaient souvent déchirés de l’intérieur, incapables de supporter le flot d’énergie qu’ils invoquaient, et leurs ascensions s'arrêterait là.

Darian, lui, savait la patience nécessaire à ce travail. Il avait déjà vécu cette transformation maintes et maintes fois dans d’autres vies, la lente brûlure sous la peau, la sensation de chaleur diffuse qui s’étend jusqu’aux extrémités, puis la stabilité, quand le mana trouvait enfin sa place dans chaque fibre du corps.

C’était un long processus, mais il en maîtrisait les rouages.

Et cette fois, il avait bien l’intention d’aller plus loin que jamais.

Puiser directement dans ses propres forces, son énergie, pour alimenter son noyau ne ferait que l’épuiser. C’était la méthode la plus basique, celle de ceux qui n’avaient rien d’autre à leur disposition, lente, et pénible. Darian le savait mieux que quiconque, il l'avait pratiqué maintes fois. L’énergie qu’il générait ainsi se dissipait presque aussitôt, ne laissant derrière elle qu’une fatigue profonde et une douleur sourde dans le reste du corps.

Non, il avait une meilleure approche. Il continuerait d’utiliser la méthode qu’il maîtrisait déjà, canaliser l’énergie des noyaux. Leur puissance, même faible, se laissait absorber lentement, mais sans risquer d’endommager son propre corps. Cette méthode, il l’avait perfectionnée au fil de ses vies, un équilibre délicat entre concentration, contrôle et endurance.

Cependant, une chose était claire, son besoin en noyaux allait croître. Maintenant qu’il s'était éveillé, sa capacité a absorber l'énergie avait augmenté. Son noyau, plus actif, réclamait davantage d’énergie pour créer du mana. Ce qu’un seul noyau pouvait lui offrir auparavant ne serait plus qu’une goutte dans un océan de ces besoins.

Il allait devoir chasser, et beaucoup. Trouver des proies dotées d’un noyau.

Ce monde, hostile, regorgeait d’êtres vivants plus ou moins puissants, et chacun d’eux représentait désormais pour Darian une source d’énergie potentielle.

Le soleil se levait à peine, peignant la forêt de teintes dorées et rosées. L’air frais du matin emplissait la cavité d’une brume légère. Darian attrapa son arc, glissa quelques flèches dans son carquois et se dirigea vers la sortie. Ses gestes étaient précis, silencieux. Il allait chasser.

Il quitta la cavité d’un pas silencieux, laissant derrière lui la Renardine toujours évanouie, solidement attachée. Le feu mourant projetait sur elle une lueur vacillante, tandis qu’il s’enfonçait entre les arbres.

Il connaissait désormais chaque recoin des environs, chaque sentier dissimulé sous les feuillages, chaque clairière traversée par un ruisseau discret. Ses nombreuses explorations lui avaient permis de dresser une carte mentale du territoire, précise et vivante. Les traces qu’il relevait à chaque sortie prouvaient que le gibier ne manquait pas, empreintes fraîches, restes de repas, griffures sur les troncs.

Il avait déjà croisé, sans vraiment le vouloir, un chevreuil qu’il avait abattu, et une horde de sangliers qu’il avait prudemment évitée. Mais aujourd’hui, il ne partait plus pour observer, il partait chasser. Son regard était plus affûté, son pas plus calculé.

Chaque mouvement respirait la maîtrise et la détermination. Il savait ce qu’il faisait, savait comment traquer sans être vu, comment lire le vent et anticiper les déplacements de ses proies. Il n’avait aucun doute sur ses capacités. Ce n’était pas la première fois qu’il affrontait la nature sauvage, et certainement pas la dernière.

Cette fois, il chasserait par choix, non par opportunité, et son but n’était pas la viande, mais l’énergie vitale que contenaient les noyaux.

Il trouva rapidement une piste fraîche, des empreintes légères, régulières, accompagnées de quelques brins d’herbe couchés. Sans hésiter, il la suivit, reconnaissant sans peine les traces d’un chevreuil. Après une petite heure de progression prudente, il aperçut enfin sa proie à l’orée d’un bois, broutant paisiblement sous la lumière tamisée du matin.

Darian se glissa entre les arbres, silencieux comme une ombre. Son souffle se fit lent, mesuré. Il banda son arc, visa avec précision et relâcha la corde. La flèche siffla à peine avant d’aller se ficher profondément dans le flanc de l’animal, qui s’écroula dans un sursaut étouffé. Sans perdre un instant, il s’approcha et acheva proprement la bête d’un coup de couteau bien placé.

Il ne s’attarda pas. La viande ne l’intéressait plus. Seul comptait le noyau, la perle blanche d’énergie qu’il extrayait avec un soin méticuleux, comme un bijou précieux. Une fois sa tâche terminée, il jeta un dernier regard au corps inerte du chevreuil, puis le chargea sur son dos.

Il marcha ensuite jusqu’à l’endroit où il avait abattu le Renardin, et y abandonna la carcasse. Peut-être les charognards viendraient-ils s’en nourrir. Pour lui, elle n’était plus qu’un réceptacle vidé de sa valeur.

Darian répéta la même opération encore trois fois au cours de la journée, traquant deux autres chevreuils et un jeune cerf. Chaque approche était calculée, silencieuse, chaque tir précis et rapide. Lorsqu’il se retrouva face au cerf, il hésita un instant. La taille de la bête et la puissance limitée de son arc le firent douter. Mais le jeune animal s’était rapproché sans le vouloir, réduisant la distance critique.

Il banda son arc, visa et décocha. La première flèche le toucha, mais le cerf malgré la douleur essaya de fuir. Mais Darian tira alors une seconde flèche avec sang-froid et précision. Cette fois, la bête s’effondra définitivement. La récolte de noyaux de la journée était excellente, quatre au total.

Une fois toutes les carcasses abandonnées près de celles des proies précédentes, il récupéra rapidement quelques morceaux de viande fraîche sur le cerf, juste de quoi compléter ses réserves pour les prochains jours. Il ne s’attarda pas davantage, conscient que chaque minute passée dehors était un risque. Chargé de sa précieuse récolte et satisfait de son travail, il retourna à la cavité, prêt à poursuivre sa routine et ses exercices d’éveil dans la sécurité relative de son refuge.

Le principe de réunir les carcasses n’était pas anodin et répondait à une stratégie réfléchie. Le premier objectif était simple, éviter d’effrayer le reste du gibier. Si les cadavres restaient éparpillés dans la forêt, l’odeur et la vue de la mort rendraient les autres animaux plus méfiants, rendant chaque chasse plus difficile. En concentrant les corps à un seul endroit, Darian réduisait l’impact sur le reste de son territoire de chasse.

Le second but était plus subtil et stratégique, attirer les prédateurs vers ce point précis. Les charognards et autres carnivores viendraient naturellement se nourrir des carcasses, laissant le reste du territoire plus sûr pour le jeune chasseur. Cette concentration de prédateurs en un endroit lui permettait d’épargner le reste de la faune et de chasser à nouveau plus tard, avec moins de risques et plus d’efficacité.

Ainsi, ces tas de carcasses n’étaient pas seulement des restes inutiles, mais un outil de gestion du terrain, une manière pour Darian de contrôler l’environnement et de maximiser ses chances de réussite lors de ses futures chasses. Une discipline qui combinait observation, stratégie et prudence, propre aux chasseurs expérimentés.

Une fois de retour à la cavité, la fin de journée approchait, teintant le ciel d’un dégradé rouge et or.

Quand Darian entra, la Renardine redressa les oreilles, le regard empli d’une panique fébrile. Ses yeux dorés suivaient chacun de ses gestes, méfiants, presque suppliants. Le souvenir du halo de lumière semblait encore flotter dans son esprit, elle ignorait ce qu’il lui avait fait, seulement qu’une force étrangère avait traversé son corps avant qu’elle ne sombre dans l’inconscience. Ses muscles tendus trahissaient sa peur, mais aussi sa volonté de comprendre ce qu'il lui avait fait. Darian, calme, soutint son regard un instant sans un mot, conscient qu’elle avait toutes les raisons de le redouter.

Il relança le feu et fit griller quelques morceaux de viande prélevés sur le cerf. L’odeur de la chair rôtie emplit la grotte, chaude et réconfortante. Quand tout fut prêt, il détacha la Renardine pour qu’elle puisse, elle aussi, se nourrir.

Elle ne comprenait pas ce changement dans ses habitudes. Pourquoi l’avoir détachée pour manger alors que lui n’avait pas encore touché à son propre repas ? Jusqu’ici, il ne la libérait qu’après avoir mangé, jamais avant. Ce changement soudain dans la routine la troublait profondément, éveillant en elle un mélange de prudence et de méfiance.

Elle se leva lentement, prudente, son regard se posant sur lui. C’est alors qu’elle remarqua la teinte dorée qui commençait à envahir son iris. Ses pupilles se dilatèrent légèrement, elle comprenait ce que cela signifiait. Les éveillés étaient craints, respectés ou haïs selon les peuples, mais jamais pris à la légère. Son attitude changea aussitôt, les épaules basses, les oreilles légèrement rabattues, elle devint plus docile, plus silencieuse encore.

Darian, indifférent à cette réaction, mangea calmement, observant le feu danser entre les pierres.

Une fois le repas terminé, il lui fit signe de le suivre pour sa courte promenade du soir, toujours sous sa surveillance attentive.

- Allez, c'est l'heure de ta promenade. dit-il, la voix ferme.

- Tu parles notre langue ? demanda la Renardine surprise, méfiante.

- Oui, répondit-il. C’est pour ça que je t’ai gardée en vie jusqu’à présent… Pour apprendre de toi, grâce au sort de ce matin.

Darian la regarda calmement, un sourire énigmatique aux lèvres.


Texte publié par Le Marcheur Vert, 20 novembre 2025 à 11h51
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