Un monde sans fin s’étend à perte de vue, où l’horizon se fond dans une brume laiteuse. Les plaines ondulent comme une mer immobile, traversées par des vents doux qui murmurent des secrets anciens. Aucun mur, aucune limite, seulement l’infini qui respire. Le ciel, immense, change de couleur au fil des heures, peignant le monde d’ombres et de lumière. Des ruisseaux cristallins serpentent entre des vallées éternelles, nourrissant une nature paisible et pure.
Plus loin, des forêts profondes s’élèvent, baignées de lumière tamisée. Les arbres y chuchotent sous la caresse du vent, et les feuilles dansent, émeraudes et dorées, au rythme d’une vie éternelle.
Les ruisseaux chantent doucement entre les pierres, filant comme des rubans d’argent à travers la mousse et les fleurs sauvages. Ils se rejoignent pour former des rivières claires, dont les eaux transparentes reflètent le ciel et les cimes des arbres. Parfois calmes et paisibles, parfois fougueuses et vives, elles tracent leur chemin vers de vastes lacs aux reflets d’opale, où la brume du matin danse à la surface. Plus loin encore, ces eaux se fondent en de puissants fleuves, majestueux et lents, nourrissant la terre qu’ils traversent. Chaque courant, chaque vague, semble porter la mémoire du monde éternel qu’ils façonnent.
Au cœur d’une petite rivière, un halo de lumière naquit, vibrant d’une énergie ancienne et pure. L’eau s’illumina, se soulevant en spirales étincelantes, comme si la vie elle-même prenait forme. Peu à peu, la lumière se condensat, dessinant les contours d’un corps humain. Des filaments d’eau et d’or s’entrelacèrent pour tisser sa peau, son souffle, son regard. Lorsqu’il ouvrit les yeux, la rivière s’apaisa, redevenant claire et silencieuse, comme si rien ne s’était passé. L’homme, nu et émerveillé, contempla le monde autour de lui, conscient d’être né du murmure de la magie et de l’éclat des eaux.
Le jeune homme, à peine sorti de l’adolescence, demeura immobile, l’eau ruisselant encore sur sa nouvelle peau. Ses yeux, d’un éclat trouble, semblaient chercher dans le vide une image fugitive, un souvenir égaré. Son souffle se fit court, son visage se crispa, comme s’il reconnaissait soudain une voix lointaine, un passé effacé par la lumière. Autour de lui, la rivière chuchotait, emplie d’une étrange tendresse, tandis que les reflets du soleil dansaient sur ses traits. Il porta une main tremblante à son cœur, submergé par une émotion sans nom, entre douleur et émerveillement, la mémoire d’une existence qu’il avait vécue avant de mourir et de revenir à la vie a travers une réincarnation.
Il avait traversé les âges, renaissant encore et encore, à travers des lieux et des temps oubliés. Chaque vie laissait en lui une trace indélébile, gravée par la magie même qui le liait à l’éternité. Il portait en silence le poids de toutes ses existences.
Il nagea lentement vers la berge, l’eau froide lui serrant le corps. Ses mouvements étaient lourds, hésitants, mais il finit par trouver son rythme. Lorsqu’il atteignit la terre ferme, il se hissa laborieusement de l'eau. Il inspira profondément, sentant l’air frais sécher peu à peu sa peau tremblante.
Au bord de la rivière, le jeune homme laissa ses pensées dériver comme les reflets sur l’eau. Il connaissait la réincarnation, cette roue invisible qui ramène les âmes à la vie, mais il savait aussi que nul, en principe, ne se souvenait de ses existences passées. Pourtant, lui portait en lui une longue mémoire de ses nombreuses vies, un savoir à la fois précieux et accablant. Chaque visage, chaque voix, chaque perte revenait hanter son esprit comme un écho lointain. Il savait que cette conscience n’était pas un hasard, un artefact ancien, scellée au plus profond de son âme, lui permettait de se souvenir. Ce pouvoir, cet avantage qu’il avait, le condamnait à vivre sans jamais oublier, mais c'était aussi sa force. Il ferma les yeux, et pendant un instant, il crut sentir la main d’une vie passée se poser sur son épaule. Alors, un frisson parcourut son dos. Ce don, ou cette malédiction, faisait de lui un être entre deux mondes, à la fois ancien et nouveau, éternellement conscient de ce qu’il avait été, et de ce qu’il deviendrait encore.
- Je m'appelle Darian !!!
Darian leva la tête vers le ciel, ses poumons brûlant, et il hurla son nom avec toute la force de son être. Ce cri fendit l’air, chargé de triomphe et de défi, résonnant comme une victoire sur le destin, célébrant la mémoire intacte de ses vies passées.
Darian inspira profondément, laissant retomber l’adrénaline de son cri. Ses yeux parcoururent la forêt dense autour de lui, scrutant chaque ombre, chaque mouvement parmi les troncs et les feuilles bruissantes. Le murmure de la rivière, apaisant quelques instants plus tôt, devint un bruit de fond angoissant à mesure que l'instinct de survie reprenait le dessus. Il porta la main à sa poitrine, sentant son cœur battre avec vigilance. Chaque racine, chaque pierre sur la berge pouvait cacher un danger ou une opportunité. Lentement, il se dirigea vers un terrain plus stable, muscles tendus, esprit alerte, prêt à réagir. Le monde, vaste et silencieux, lui rappelait que même dans la beauté et la tranquillité, le danger pouvait surgir à tout instant.
Le monde dans lequel Darian vivait n’avait rien d’un havre de paix. C’était une terre brute, indomptée, où la nature et le fort régnait sans partage. Les arbres y poussaient si hauts qu’ils cachaient le ciel, et les vents pouvaient charriaient tantôt des odeurs de sang ou de terre humide. Ici, l’humanité n’était qu’une poussière fragile. Des bêtes immenses rôdaient dans les bois, des créatures à la peau écailleuse, d'autres aux crocs d’ivoire, des animaux au regard jaune ou rouge, mais toutes affamé. Certaines chassent en silence, d’autres hurlent leur présence, savourant la peur avant le festin. La nuit, les ombres prennent vie, et les cris des mourants se mêlent aux hurlements des prédateurs. Dans la plupart de ses vies passées, Darian n’avait pas survécu plus d’un jour. Il se souvient de ses fins brutales, déchiré, traqué, terrifié avant même d’avoir trouvé de quoi s'abriter ou se défendre. La fragilité du corps humain était une vérité qu’il avait apprise dans la douleur. Pourtant, à chaque renaissance, quelque chose en lui persiste, une volonté farouche de comprendre ce monde et d’y trouver enfin sa place, ou au moins un instant de répit avant que les crocs de la terre ne se referment encore sur lui.
Après un long moment d’observation, Darian conclut qu’aucun danger immédiat ne rôdait autour de la rivière. Le silence de la forêt semblait naturel, seulement troublé par le chant des insectes et le murmure de l’eau. Restant sur ses gardes, il quitta la berge et se fraya un chemin entre les racines et les fougères, progressant vers une colline faiblement boisée qu’il avait aperçue plus loin. Chaque pas était mesuré, chaque craquement sous ses pieds l’alertait. La pente se dressait, couverte d’herbes hautes et de rochers moussus. Là-haut, il espérait apercevoir l’étendue du monde qui l’entourait, et peut-être, enfin, voir mieux où il venait de renaître.
Darian gravissait la colline, le souffle régulier, l’esprit en mouvement. Une pensée obsédante le poursuivait, jamais, de toutes ses vies passées, il ne s’était réincarné près d’un lieu familier. Les paysages changeaient toujours, comme si le destin s’amusait à le jeter, à chaque naissance, dans un lieu inconnu. Pourtant, la faune et la flore restaient les mêmes, les mêmes oiseaux aux cris rauques, les mêmes plantes aux senteurs amères, les mêmes bêtes sauvages dont il connaissait trop bien la morsure. Mais les lieux, eux, se renouvelaient sans cesse, indifférents à sa mémoire. Dans toutes ses existences, il n’avait jamais entendu parler d’un être réincarné qui aurait retrouvé les siens, ou les souvenirs de sa vie passée. Ce lien, entre les vies, semblait brisé pour toujours. En général, ceux qui renaissaient le faisait à proximité d’un hameau, d’un village ou d’une ville, c'était se qu'il avait appris de sont expérience. Il avait ouvert les yeux dans la solitude d’une rivière sauvage, a lui de trouver des traces humaines. Était-ce un hasard ou une intention ? il n'avait pas la réponse à cette question. S'il n’y avait personne autour, cela signifiait qu'il ne les voyait pas tout simplement. Et même s'il les trouvait rapidement la vie était tellement difficile et les ressources limitées que sauf rare exception il devrait se débrouiller seul dans un premier temps, face à un monde qui n’attendait que sa chute.
Arrivé au sommet de la colline, Darian s’arrêta un instant pour reprendre son souffle, et examina son environnement. Devant lui, un immense arbre dominait la cime, ses branches tendues vers le ciel. Sans hésiter, il entreprit de l’escalader, trouvant appui sur l’écorce rugueuse. Lorsqu’il atteignit les plus hautes branches, la forêt s’étendait à perte de vue, sauvage et silencieuse. Aucun signe de vie humaine, ni champ, ni sentier, ni toiture, ni lumière. Son cœur se serra, jusqu’à ce qu’au loin, bien au-delà de plusieurs collines, il aperçoive une mince colonne de fumée s’élevant vers le ciel. Son regard s’illumina. Là-bas, peut-être, se trouvait enfin une trace d’humanité, ou d’espoir.
Du haut de son perchoir, Darian observa longuement le paysage. La fumée, lointaine mais claire, semblait s’élever d’une vallée encaissée, entourée de collines boisées. Il mémorisa le relief avec attention, un ruisseau serpentait vers l’est, des affleurements rocheux marquaient une direction possible, et une large plaine s’ouvrait entre deux lignes d’arbres. Il devait avancer prudemment, éviter les zones marécageuses et les sous-bois trop denses où rôdaient souvent les prédateurs. Après un dernier regard vers la fumée, il descendit de l’arbre avec précaution et s’engagea dans la descente. Chaque pas était mesuré, calculé, dicté par une expérience née de trop nombreuses morts passées. Le sol humide glissait sous ses pieds nus, mais il maintenait son équilibre avec une précision instinctive. En contrebas, le murmure de la rivière lui servait de repère, guidant son chemin à travers la végétation. Par moments, il s’arrêtait pour écouter, guettant le moindre bruit suspect.
Un sifflement bref fendit l’air, le son familier, glaçant, d’une corde d’arc qui se détend. Darian n’eut pas le temps de réfléchir. Son corps réagit avant son esprit, se jetant de côté tandis qu’une flèche fusa à hauteur de sa tête, effleurant son oreille avant de se planter dans un tronc derrière lui. Le choc le fit chanceler, le cœur battant à tout rompre. Il se précipita en revenant sur ces pas, les sens en éveil. Il savait qu’on l’avait pris pour cible, mais l’ombre du tireur restait invisible parmi les arbres. Seule la direction approximative du tir se devinait, perdue dans la densité du feuillage. Le danger était immédiat, et mortel.
Darian bougé sans réfléchir, chaque muscle tendu par l’instinct de survie. En passant près du tronc, il arracha la flèche fichée dans l’écorce, la serrant comme une arme improvisée. Le souffle court, il dévala la pente en évitant les racines et les branches basses. Derrière lui, aucun bruit, mais le silence était encore plus inquiétant. Il changea brusquement de direction, plongeant vers un sous-bois plus dense, brouillant ainsi la trajectoire d’un éventuel second tir. Le sol devenait glissant, le feuillage l’aveuglait, mais il ne s’arrêta pas. Une seule pensée guidait sa course, survivre, encore une fois.

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