Pourquoi vous inscrire ?
«
»
Lecture

« Inspecteur !

— Quoi ?

— Severius Fâcheux s’est évadé.

— Oh ! L’emm… je venais de commencer mon sandwich au jambon persillé de chez Bougeoir.

— Avec des petits oignons ?

— Ceux-là mêmes ! »

Regardez ! Regardez les yeux de l’agent Bonhomme briller de béatitude culinaire.

« Il ne pouvait pas attendre, pour son évasion, celui-là ? fit Bravache, soudain de mauvaise humeur.

— Oui, inspecteur. Fâcheux mérite la potence pour ça ! Gâcher un sandwich de chez Bougeoir, tsss… »

Quelques instants plus tard, ils quittaient le commissariat.

« Expliquez-moi, Bonhomme, comment Fâcheux a réussi à se faire la belle, ici même, au commissariat ?

— Un moment de distraction de l’agent qui le surveillait. Apparemment, notre homme a une droite qui cogne dur, si vous voyez ce que je veux dire.

— L’a-t-on localisé ? Sait-on vers où il est parti ?

— Aucune idée ! On sait juste qu’il a récupéré son grimoire avant de partir ?

— Son grimoire ? Je parie qu’il rentre chez lui !

— Comment savez-vous ça ?

— Eh bien ! Il a son grimoire, il va vouloir rejoindre son petit laboratoire pour nous concocter quelque chose de pas gentil gentil. C’est une intuition, mais je veux bien échanger mon sandwich au jambon persillé et ses petits oignons contre votre pire déjeuner si j’ai tort.

— Et vous avez un plan ?

— Bien entendu ! Nous prenons le tram, et nous filons chez lui afin de l’appréhender pour la deuxième fois.

— On ne prévient pas les copains ?

— Pas le temps, l’oiseau risque de filer. »

Une demi-heure plus tard, ils abordaient le manoir de Fâcheux.

« On va entrer par l’arrière. Motus et discrétion !

— Comme à l’école de police, inspecteur. »

Des voisins scrupuleux auraient aperçu, à ce moment, deux ombres se glisser dans la propriété et contourner le bâtiment. Ces voisins auraient appelé la police. Rions de cette coïncidence. Car la police venait d’entrer par effraction dans le bâtiment. Bel exemple pour la jeunesse !

« On se sépare, dit Bravache. Je monte, et vous faites le bas. Prudence ! »

L’inspecteur se dirigea vers l’escalier, tandis que Bonhomme attaquait le salon. Un large canapé occupait tout un mur, plusieurs fauteuils lui faisant face. Une commode, une petite bibliothèque, des tableaux, des lampes, un salon tout ce qu’il y a de plus salon. Et puis, un phonographe, avec une collection impressionnante de disques. Bonhomme, mélomane, ne put s’empêcher d’y jeter un œil, et ce qu’il vit lui fit hausser un sourcil. Mais il fut interrompu par un bruit provenant de l’étage. Un bruit de lutte, avec des éclats de voix. L’inspecteur avait peut-être besoin d’aide ! Ni une ni deux, Bonhomme s’empara d’un disque et courut vers l’escalier. Un disque, mais pourquoi ? Ahaaa…

Il grimpa les marches quatre à quatre. Entre-temps, la lutte semblait terminée. Et quand il parvint dans le corridor, il vit que Fâcheux avait eu le dessus. L’homme tournait le dos à l’agent, et il menaçait le crâne de Bravache, étendu à terre, avec un chandelier qui aurait fracassé des têtes plus dures. Il allait frapper quand une voix menaçante retentit.

« Monsieur Fâcheux ! Si vous tenez à Abricot, arrêtez-vous. »

À ces mots, l’individu interpellé se figea net. Il se retourna lentement. Devant lui, un agent de police tenait un disque à deux mains. Et ces mains semblaient sur le point de briser le disque.

« Nooooooon !!! hurla Fâcheux.

Dans ses yeux, la haine et la peur se mêlaient. La haine envers celui qui osait poser les mains sur le disque, la peur que ces mains ne brisassent le disque. Une envie de meurtre électrisait tous ses muscles, mais il ne pouvait pas bouger. Devant l’horrible menace, il ne pouvait que céder, baisser les bras, et accepter son funeste destin. Bravache en profita pour se lever, encore groggy par un uppercut qu’il avait bien dégusté.

Au même instant, ils entendirent des pas, en bas. On criait “police !”, on montait les escaliers. Les copains arrivaient, car Bravache, évidemment, n’avait pas été le seul à supposer que Fâcheux se rendrait chez lui. L’énergumène fut promptement maîtrisé. Alors, Bravache fit signe à Bonhomme de le rejoindre.

« Vous pouvez m’expliquer ce qu’il s’est passé ?

— C’est simple, inspecteur. Vous avez remarqué les chaussettes de notre homme ?

— Ben, quoi, ses chaussettes ?

— Cette couleur ne vous dit rien ?

— Elle devrait ?

— C’est le signe de reconnaissance des Abricotiers, les fans inconditionnels d’Auguste Abricot, le contrebassiste de jazz. Ils portent tout le temps des chaussettes abricot. Ils vouent un véritable culte au musicien. Ils vont à tous ses concerts, ils le suivent en tournée, ils ont tous ses disques, qu’ils n’écoutent que très rarement, pour éviter de les abîmer. Quand j’ai vu les disques, en bas, je me suis dit qu’on avait peut-être affaire à un Abricotier. Et j’ai eu raison. Je savais que si je menaçais un disque, il se rendrait aussi sec.

— Oh ! Vous savez, Bonhomme, je feignais d’être KO. J’attendais le moment propice pour retourner la situation à mon avantage. Vous ne m’avez pas laissé le temps, c’est tout.

— Oui, inspecteur, c’est sûr, vous n’avez pas eu le temps.

Gros soupir de Bonhomme.


Texte publié par memenne, 1er septembre 2025 à 21h01
© tous droits réservés.
«
»
Lecture
LeConteur.fr Qui sommes-nous ? Nous contacter Statistiques
Découvrir
Romans & nouvelles
Fanfictions & oneshot
Poèmes
Foire aux questions
Présentation & Mentions légales
Conditions Générales d'Utilisation
Partenaires
Nous contacter
Espace professionnels
Un bug à signaler ?
3333 histoires publiées
1459 membres inscrits
Notre membre le plus récent est Bleu Paris Festival
LeConteur.fr 2013-2025 © Tous droits réservés