Texte écrit dans le cadre de l'Avent des Conteurs
Défi du chaudron : 750 mots - Théière - Témérité - Noir
Objet : Théière
Origine : Chine
N° d’identification : O-145-563
Description : petite théière en argile de couleur noire. Très bon état de conservation.
Philomène examine l’objet d’un œil critique. Depuis qu’elle l'a sorti d’une petite caisse, elle ne cesse d’y penser. Il est très beau, parfaitement conservé. Elle a réussi à le dater de l’époque de la dynastie Yuan (aux alentours de l’an 1300).
Pourtant, ce n’est pas ce qui la déroute totalement. Non, ce qui la fascine et l’effraye en même temps, c’est la vapeur odorante qui en sort par intermittence. À certains moments de la journée, la pierre brillante est chaude au toucher. Une odeur de thé vert, de fleurs, d’agrumes ou d’épices envahit la pièce lors de ces moments-là.
Assis dans l’autre fauteuil, les bras croisés, Xavier la fixe avec un demi-sourire. Elle ne l’a jamais vu avec une expression aussi malicieuse. Elle ne sait pas si elle doit s’en inquiéter ou apprécier.
— Je t’assure que tu ne risques rien, répéta-t-il pour la troisième fois.
La jeune femme fronça le nez, dubitative.
— J’en suis moins certaine que toi. Dans les musées, habituellement, les théières antiques ne donnent pas l’impression qu’elles viennent d’être utilisées.
— Tu devrais savoir depuis le temps que ce cabinet de curiosités est très différent d’un banal musée.
Philomène jeta un coup d’œil sur l’archet qui flottait dans l’air, au milieu d’une haute vitrine. Il avait raison. Mais de là à goûter à un thé qui ne devrait pas exister !
— Je suis à peu près sûre que le thé ne se conserve pas sept cents ans, contra-t-elle, d’un ton boudeur.
Xavier se pencha vers elle, et poussa du doigt une belle tasse assortie à la théière. Puis, il huma la vapeur avec ostentation.
— Celui-ci promet d’être délicieux : thé vert, hibiscus et jasmin.
Son amie lui jeta un coup d’œil. Elle ne pouvait nier que le parfum était prometteur.
— Qui sait quelles impératrice, princesse ou courtisane a préparé ce thé ?
— Ou quel empereur, général ou prince ? rétorqua-t-elle.
Xavier soupira.
— Tu ne risques rien. J’en ai déjà bu et je t’assure que c’est un moment à vivre. Tu n’as pas eu peur des autres artefacts.
— Je ne suis pas si téméraire que j’accepte de m’empoisonner avec un breuvage venu de je ne sais où. Je ne suis qu’une humaine, au cas où tu l’aurais oublié !
L’agacement perçait dans la voix de Philomène. Depuis quelque temps, son patron s’immisçait sans arrêt dans son travail, lui faisant perdre son temps et sa concentration. Certes, elle appréciait ce retournement de situation, mais il semblait totalement dépourvu de limites parfois. Depuis qu’il avait revu la théière dans sa vitrine, cela ne faisait qu’empirer.
Il se rabattit dans son fauteuil, croisa les bras et arbora une expression boudeuse. L'irritation de la jeune fille fondit. Xavier avait toujours assuré sa sécurité, depuis qu’il avait été blessé pour la protéger quand elle avait surgi en plein milieu de son combat contre un monstre tentaculaire qui voulait traverser le portail sans autorisation.
Avant de changer d’avis, elle agrippa la poignée de la théière et versa la boisson dans sa tasse. Puis elle porta la tasse à ses lèvres et en but une gorgée. Le liquide chaud glissa le long de sa gorge dans une éclaboussure de sensations. Xavier la fixait en souriant. Autour d’eux, le cabinet disparut et elle se crut dans un jardin protégé par des murailles. Elle se tenait au bord d’une mare dans laquelle elle voyait d’énormes carpes orangées qui se glissaient sous les nénuphars. De hauts arbres la protégeaient de l’ardeur du soleil.
Puis la réalité reprit ses droits. Elle vacilla. Xavier la rattrapa.
— C’était…, balbutia-t-elle, les yeux écarquillés, une expression de béatitude peinte sur le visage.
— Je t’avais dit que ça en valait le coup, murmura-t-il.
Philomène posa les yeux sur la théière, qui ne fumait plus. Le liquide ambré avait disparu de la tasse. Elle en conçut une énorme déception.
— Juste une gorgée, expliqua le sorcier. Son effet est trop puissant, sinon.
Philomène se laissa guider dans le fauteuil. Elle resta silencieuse, le temps de reprendre son souffle.
— Et on ne peut voyager qu’en Chine ancienne ? finit-elle par demander.
Un sourire énigmatique étira les lèvres de Xavier.
— On peut visualiser des images liées à tous ceux qui ont préparé du thé dans cet objet, répondit-il.
L'archiviste ouvrit des yeux ronds, et porta un regard pensif sur la théière. Que de possibilités s’offraient à elle !

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