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volume 1, Chapitre 5 « L'archet du stradivarius » volume 1, Chapitre 5

Merci à Memenne pour l'idée de l'objet

Défi du chaudron : bracelet/regret/bleu

⭐ ⭐ ⭐ ⭐

Philomène soupesa l’archet entre ses mains. Elle n’était pas particulièrement connaisseuse, mais elle ne pouvait nier qu’il était en mauvais état. D’après le diagramme qu’elle avait trouvé sur internet, il manquait des pièces essentielles. Sa mission ne consistait pas à essayer de réparer les objets qu’elle classait. Pourtant, elle répugnait à simplement jeter celui-ci.

La tige en bois de pernambouc, très rare au XXIe siècle, brillait encore d’un éclat brun rouge. Le crin s’effilochait et n’était plus tendu, puisque le mécanisme était endommagé. Elle se demanda à quel musicien ou quelle musicienne avait appartenu cet objet et prit une décision dans la seconde.

Elle emballa l’archet dans le tissu dans lequel elle l’avait trouvé, prit sa sacoche et quitta son bureau. Maintenant, il fallait trouver son patron.

Le hall de sa maison n’avait plus la même allure depuis qu’ils l’avaient vidé de tous les objets entassés depuis on ne savait quand. La plupart des livres avaient rejoint la bibliothèque, certains après un passage chez un relieur, et les objets avaient leur nouveau refuge dans le Cabinet de Curiosités. L’immense horloge qui trônait au centre d’un mur peint en bleu était maintenant bien visible.

Elle aperçut le chien de la maison — enfin le dragon-plante de la maison — qui voletait tranquillement. Dès qu’il la vit, il piqua vers elle et se posa sur son épaule, en frottant son crâne écailleux contre sa joue. Elle sourit et lui gratta la tête. Il mordilla le bracelet qu’elle portait, essayant de le lui ôter. Elle se défendit en riant.

— Pourrais-tu aller chercher Xavier ? finit-elle par demander. J’ai une demande à lui faire.

— Ce n’est pas la peine, retentit sa voix juste à côté d’elle.

Elle fit un bond et porta sa main à son cœur. L’animal, déséquilibré, s’éleva d’un coup d’aile et jeta un regard furibond au nouvel arrivant. Celui-ci eut un rictus penaud.

— Désolé.

Cet homme apparaissait ainsi de nulle part très régulièrement. Elle ne savait pas encore comment il faisait, mais c’était très déstabilisant.

— Vous partez ? demanda-t-il, en haussant un sourcil.

— Quoi ? Euh… non, non.

Elle défit l’emballage de l’archet et le lui montra.

— Je voulais demander votre approbation. Je connais un luthier dans le quartier nord de la ville et je pensais que je pouvais lui apporter cet archet pour qu’il le restaure.

L’expression de Xavier quand ses yeux se posèrent sur l’objet fit tressauter le cœur de la jeune femme. Elle lut sur son visage une profonde tristesse et beaucoup de regret. Pour quelle raison ? Était-ce un objet cher à son cœur ? Dans ce cas, pourquoi ne l’avait-il pas entretenu ? Et où était l’instrument auquel il appartenait ?

— J’ai brulé le violoncelle, lâcha-t-il d’une voix sourde.

Elle cligna des yeux, stupéfaite. Avait-il lu dans ses pensées ? Non, c’était impossible. Elle resta muette, tentant de reprendre ces esprits.

— Il faut croire que certains objets vous restent attachés même si on veut s’en débarrasser, murmura-t-il.

Alors qu’elle allait lui demander ce qu’il voulait dire par là, il se recomposa et lui dit fermement :

— Vous avez mon autorisation. Trouvez-lui une bonne place après.

— Très… Très bien, balbutia-t-elle.

Il lui offrit l’un de ses rares sourires et s’éloigna vers le premier étage, en compagnie de son animal.

* * * *

Objet : Archet

Origine : voir notice complète

N° d’identification : 0 - 435 - 761

Notice : cet archet appartient à un violoncelle, le Stradivarius Davidov, fabriqué en 1712. Il a été utilisé pendant plusieurs années par la violoncelliste anglaise Jacqueline Du Pré, morte en 1987, à 42 ans, des suites de complications dues à sa sclérose en plaques. L’instrument a été prêté depuis à de nombreux musiciens, mais on a perdu sa trace.

Sur le manche en bois de Pernambouc a été gravé le nom « Du Pré », en lettres rehaussées d’or.

L’instrument a été entièrement restauré par le maitre luthier Fennesc, avec les matières d’origine.

Notes personnelles de l’archiviste : j’ai fait fabriquer une vitrine d’assez grande taille pour le mettre à l’abri. La plupart du temps, l’archet est posé sur un piédestal en plein centre. De temps en temps — je n’ai pas encore pu établir une fréquence ou un déclencheur —, la silhouette argentée et brumeuse d’un violoncelle apparait, et l’archet bouge de lui-même, jouant différents morceaux selon le moment. C’est une fort belle musique, qui rend mes heures de travail très agréables. Depuis, j’écoute régulièrement des morceaux de Jacqueline Du Pré : elle était une artiste remarquable.

Une question me taraude : qui était-elle pour Xavier Wolfsong ? Et qu'avaient-ils vécu pour qu'il en garde un tel souvenir ?

Note de l’autrice : je n’ai pas de connaissances particulières sur cette musicienne, mais en faisant des recherches sur les violoncellistes, je suis tombée sur son histoire que j’ai trouvé touchante.


Texte publié par Feydra, 13 septembre 2025 à 13h58
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