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tome 1, Chapitre 13 « Nos pas dans l'inconnu » tome 1, Chapitre 13

Les murs se mirent à suinter du sang. Une odeur âcre et repoussante emplit d’un coup la pièce. La température chuta, et l’épouvante gagna tous les cœurs.

« Fuyez, fuyez ! », hurla Mickaël, mais seule Glydis l’entendait.

Elle était tombée en catatonie, les yeux révulsés, le corps secoué de spasmes.

« Ils sont là, ils sont là… », ne cessait-elle de marmonner.

Vanya et Syphax hurlèrent. Des ombres monstrueuses et menaçantes apparurent le long des murs.

Mû par la force que seuls la peur et le désespoir peuvent donner, Tancrède mit Glydis sur son épaule gauche, grimpa les marches de l’escalier amovible et, de l’autre épaule, donna des coups à la trappe qui, bien sûr, s’était refermée.

Des griffes s’emparèrent des cheveux de Vanya, et elle gesticula comme une folle pour s’en défaire, Syphax observant la scène, les yeux exorbités.

Enfin, la trappe céda.

« Montez, vite ! », hurla Tancrède.

Les autres ne se le firent pas dire deux fois. Bientôt, tous étaient de retour au rez-de-chaussée.

Là, les choses ne s’améliorèrent pas, que du contraire. Des murs continuait de dégouliner une substance visqueuse et nauséabonde. Des murmures résonnèrent, des voix caverneuses dont l’écho se répercutait partout. L’escalier menant à l’étage craqua, et une silhouette fantomatique, esquissant une créature terrifiante, descendit vers eux.

Heureusement, la porte d’entrée de la maison était restée ouverte. En quelques secondes, le groupe fut dehors.

Lorsqu’ils estimèrent s’être suffisamment éloigné, ils s’arrêtèrent et reprirent leur souffle.

Tancrède posa Glydis par terre. Il semblait au bout de sa vie.

Elle reprit ses esprits, se redressa promptement et comprit immédiatement ce qu’il venait de se passer. Elle regarda Tancrède à moitié mort à côté d’elle, suffoquant comme un asthmatique qui aurait oublié son traitement.

« Non », dit-elle, « tu ne m’as quand même pas portée pour sortir de la maison ? Si ? »

« Bien sûr qu’il l’a fait », dit Vanya de sa voix juvénile.

« Heureusement que tu ne pèses pas lourd », dit Tancrède en soufflant. « D’ailleurs, il faudra penser à manger de temps en temps. »

« Malheureusement, ce n’est pas ici que ça risque d’arriver. », répondit-elle amusée. « Merci en tous cas. »

« Quelqu’un comprend ce qui s’est passé ? », demanda Syphax.

Les criaillements des spectres s’amenuisèrent petit à petit, comme des flammes qui s’éteignent.

« Ce sont les gens qui vivaient ici. Ou plutôt leurs ressentiments envers ceux qui ont détruit leur monde. », affirma Glydis.

« Mais nous n’avons rien fait ! », s’insurgea Syphax.

« Comment sais-tu ça ? », demanda Tancrède, redevenu totalement maître de lui-même.

« C’est Mickaël qui me l’a dit. J’entends sa voix dans ma tête. »

« Donc, tu es vraiment medium. Les autorités ont eu raison de t’arrêter », dit Vanya en souriant dans sa voix.

« Ou tu es vraiment barjo. », persiffla Syphax.

Glydis choisit d’ignorer cette remarque. S’adressant à Vanya : « Ce n’est pour ça que j’ai été incarcérée, tu le sais très bien. »

Après un silence gêné, elle ajouta : « Et non, je ne suis pas medium, je fais semblant. Du moins, je le pensais… »

« Et Mickaël, pourquoi il n’est pas méchant ? », demanda innocemment Syphax.

« Je ne sais pas. Là, il est parti, je ne ressens plus sa présence. Qui dit qu’il n’est pas méchant en fin de compte ? »

« Je ne crois pas aux fantômes. », dit Tancrède. « Tout ce que nous venons de vivre est du cinéma. C’est le résultat d’effets spéciaux. Ton Mickaël est une illusion, un hologramme ou encore la projection d’une intelligence artificielle. Tout ceci fait partie du spectacle mis en place par la dégénérée. »

« Et la voix que j’entends dans ma tête ? »

« Qui me dit que c’est vrai ? »

Venant de Tancrède, ces dernières paroles blessèrent Glydis. Devant son air outré, et craignant de se prendre une gifle, Tancrède temporisa : « Ils t’ont, d’une manière ou d’une autre, conditionnée, peut-être droguée à ton insu. Je les crois capables de tout. »

« C’est comme tes visions. », répondit-elle sèchement. « Qui nous dit que tu n’inventes pas tout ? »

« Oui, qui vous le dit ? », lui lança-t-il avec morgue.

« Arrêtez tous les deux ! », intervint Vanya. « Ce n’est pas le moment de nous déchirer, car c’est précisément ce qu’ils veulent. »

« Tu as raison. », dit Tancrède. « Mettons-nous en route. »

Ce qu’ils firent.

Le soleil était énorme et répandait sa lumière funèbre et orangée à travers le dôme. Tout le paysage semblait embrasé.

Tancrède regarda la carte. Il paraissait s’y retrouver.

« Je pense qu’en passant par ici, nous atteindrons assez rapidement la première sphère. Si nous marchons d’un rythme soutenu toute la journée. »

« Que représentent ces lignes ? », demanda une Glydis adoucie.

« Je l’ignore. », répondit-il. « Nous le saurons quand nous y serons ».

Ils se rafraîchirent avec les lingettes que l’on avait bien voulu leur fournir. Heureusement, la chaleur était tout à fait supportable aujourd’hui.

Ils décidèrent de marcher à leur rythme, sans utiliser leurs chaussures psycho, nullement pressés d’arriver au-devant du danger.

Le paysage était très morne. Une plaine d’herbes sèches s’étendait devant eux, bordées par de douces collines ocres. Aucun autre bruit que celui du vent et de leurs pas. Les mines étaient graves.

Marmousette, que Syphax avait rebaptisé Fauve, s’était glissée à l’intérieur de la veste de Vanya. « Fauve. », dit-elle, « Pourquoi pas, ça lui va bien. »

« Donc toi, tu sais parler aux animaux ? », lui demanda Glydis. « Oui, ça fait partie de l’enseignement dispensé au Sanctuaire d’Ashoka. Enfin, parler, c’est beaucoup dire. Disons qu’il y a une forme de compréhension de part et d’autre. C’est tout à fait naturel pour nous. »

« Toi, Glydis, tu parles aux morts, et toi, Tancrède, tu vois les vies passées des gens en les touchant. », résumé Syphax.

« C’est exact. », répondit Tancrède.

« Et toi Syphax ? », demanda Vanya, « Quel est ton don ? »

Le visage du garçon s’assombrit.

« Et bien ? »

« Rien. Je n’en ai pas. Je ne suis qu’un gosse stupide, c’est tout. »

Les autres furent choqués par cette répartie. Plus personne ne dit mot pendant un long moment.

Le soir, ils bivouaquèrent près d’un petit bois dont les arbres paraissaient sains et encore bien verts. La zone radioactive n’était pas encore atteinte. La maison de Mickaël avait dû être détruite par le souffle de la météorite s’écrasant, pas par le champignon atomique. Et en effet, les végétaux semblaient avoir subi un vent très violent. Ils étaient tous penchés dans la même direction. Mais leurs racines, apparemment très solides, leur avaient évité une chute complète. Ces arbres restaient solidement arrimés au sol. Des insectes s’affairaient entre les troncs.

Avec le soleil couchant, les ombres s’allongèrent et fournirent une ambiance encore plus lugubre au décor. Aucun chant d’oiseau ne venait égayer la scène.

Soudain, des craquements se firent entendre. Réguliers, comme des bruits de pas.

« Encore des spectres ? », s’écria Syphax.

« Et non, petit, nous ne sommes pas des fantômes. »

Tous se retournèrent vers l’orée du bois, d’où avait surgie la voix masculine et méprisante.

Un groupe de trois individus émergea de la pénombre touffue. Ils étaient jeunes et arrogants. À leur tête, un individu de taille moyenne, les cheveux bruns et courts, l’air trop sûr de lui. À ses côtés venait un autre jeune homme, blond celui-ci, svelte comme les autres, et enfin un troisième individu, à la chevelure châtain mi-longue, une barbe naissante au menton. Ils paraissaient tous les trois du même âge, 25 ans tout au plus. Mais ce qui frappa nos héros, ce fut l’habit orange-flamme que ces hommes portaient. Comme une armure faite de cuir épais renforcé par des plaques de métal. Elle leur procurait une protection parfaite. À leur ceinture pendaient ce qui ressemblaient à des armes : une sorte de pistolet pour celui qui avait parlé, un couteau pour le blondinet, et un lasso pour le dernier.

« Qui êtes-vous ? », demanda Glydis, l’air apeuré. « Vous venez de la première sphère ? »

« Non, nous venons directement de Pleroma. Nous sommes envoyés par la Grande Adoratrice. », répondit celui qui était manifestement le chef.

« Vous nous avez donné du fil à retordre, mais enfin nous vous avons retrouvé. », continua le jeune homme blond. « Nous allons maintenant pouvoir nous acquitter de notre mission. », compléta le troisième.

« Quelle mission ? », demanda Tancrède, qui pressentait la réponse.

« Vous tuez ! », répondirent les trois soldats en chœur.

Celui à la chevelure plus longue dégaina son fouet et le délia à la vitesse de l’éclair en direction de Tancrède. La lanière vint dans un claquement s’enrouler autour de son gros cou.

« Mais avant, nous allons nous amuser un peu. », dit le soldat d’un air sadique.

Les compagnons de Tancrède voulurent intervenir mais le chef des soldats pointa sur eux son pistolet à laser.

« Un seul geste et vous ne serez plus de ce monde. »

Le lasso, de lui-même, resserrait son étreinte. Tancrède se mit à respirer bruyamment. Son visage vira petit à petit au violet.

« Arrêtez, arrêtez immédiatement ! », hurla Vanya.

« Ne t’inquiète pas, princesse. », dit le blond. « Ton tour viendra bientôt. D’ailleurs, j’ai bien envie de m’amuser avec toi. », dit-il avec un air abject en s’avançant vers elle et en tâtant le manche de son couteau.

Vanya se mit sur ses gardes mais elle n’eut pas le temps de réagir qu’un évènement inattendu se produisit.

Une gueule énorme hérissée de dents pointues était venue envelopper l’agresseur de Vanya. Le jeune homme disparaissait maintenant dans la bouche d’un monstre, une sorte de dinosaure, que personne n’avait vu ni entendu arriver.

Décontenance, les collègues de l’infortuné se retournèrent contre l’animal mais celui-ci avait déjà trouvé sa nouvelle proie : Syphax. Il s’avança vers l’adolescent, qu’il devait dominer de deux bons mètres. La créature était bipède, et chacun de ses pas laissait une empreinte profonde et large au sol. Ses deux membres postérieurs se terminaient par quatre doigts griffus, tendus en ce moment vers Syphax.

Syphax hurla.

Soudain, Vanya s’interposa entre le garçon et le monstre. Elle le regarda fixement.

« Ha ha », ricana le soldat en chef. « Apparemment, nous n’aurons pas besoin de nous salir les mains ! »

Sa joie fut de courte durée car le dinosaure s’était arrêté net devant Vanya. Il sembla hésiter puis il se retourna vers les deux soldats. Il en empoigna un dans chaque patte. Tancrède et les autres virent avec effroi les pauvres hommes hurlants se faire dévorer par la créature née du cauchemar. Repue, celle-ci s’en retourna et disparut dans le bois. Bientôt, le silence se fit à nouveau.

« Et bien ! », dit une Glydis tremblante, « on dirait que tu parles vraiment aux animaux, toi. », continua-t-elle à l’intention de Vanya.

« Qu’est…qu’est-ce que c’était que ça ??? », pleurait Syphax en tombant par terre.

« Sans doute un des mutants dont la rumeur fait état suite aux radiations. », dit Vanya, l’air solennel.

« Mais non, ce n’est pas possible ! », cria encore Syphax, toujours mort de peur. « Une bombe atomique, ça tue, ça ne transforme pas les bêtes en…ça. »

« Ça corrobore toutes les légendes qui courent sur la Réserve. », dit Tancrède. « Et ce qui me tracasse le plus, c’est que, pour une raison qui m’échappe, Sylgrid a décidé de nous éliminer… »


Texte publié par NiKolas45, 14 août 2025 à 14h40
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