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LE CHEVALIER KAELAN : L’OMBRE DES SIÈCLES
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saison 1, Chapitre 5 « Un Destin Scellé : L'Échappatoire du Voyage » saison 1, Chapitre 5

Pendant qu'Alaric racontait ces légendes fantastiques, sa voix résonnant doucement dans le silence presque étouffant de la salle, Kaelan s'approchait lentement, presque sans le vouloir. La moiteur de la pièce, le parfum du vieux papier, la résonance des mots prononcés par Alaric, tout cela créait une intimité particulière. Kaelan sentait son cœur battre d'un rythme qui n'était plus celui de l'homme, mais d'une nouvelle entité, attirée par la seule flamme véritable qu'il percevait encore.

Dans la lueur de la pièce froide, les éclats des rayons du soleil reflétaient sur le visage d'Alaric et le rendaient attirant.

Le récit s'interrompit. Leurs regards se rencontrèrent.

Dans les yeux d'Alaric, il n'y avait pas de peur, seulement une compréhension et une profonde compassion. Kaelan ne put résister plus longtemps. Il prit le visage d'Alaric entre ses mains, et dans cette moiteur, dans ce silence lourd de secrets et de destins scellés, il lui vola un baiser langoureux. Un baiser chargé de désespoir, de tendresse, et de la promesse d'un amour impossible.

Kaelan s'écarta, ses yeux fixés sur ceux d'Alaric, le souffle court. L'éternité s'étalait devant lui, vide et glaciale.

Je suis désolé, mais je ne pouvais m’en empêché, Alaric !

Alaric ne fût pas étonné du geste de son ami.

"Notre amour, en plus d'être interdit, ne pourra durer dans le temps," se justifia Kaelan. Sa voix tremblante d'une émotion qu'il n'avait pas ressentie depuis des années. "Si je suis 'immortel', comme tu le dis, comment vivre sans toi ?"

Alaric ne recula pas. Il tendit une main pour caresser la joue de Kaelan, ses doigts effleurant la peau qui, il le savait, ne riderait jamais. Son regard bleu-nuit était empli d'une résolution nouvelle.

"Nous trouverons un moyen, Kaelan. Nous ne pouvons pas défier le temps, pas encore. Mais nous pouvons le contourner."

Il se pencha à son tour, sa voix se faisant un murmure urgent. "Le monde est vaste, Kaelan. Bien plus vaste que nos petits royaumes. Si nous ne pouvons pas vieillir ensemble ici, sous le regard inquisiteur des hommes, alors nous voyagerons. Nous irons chercher les réponses dans d'autres terres, d'autres cultures. Le livre 'Personæ' n'est qu'un début. Il doit exister d'autres textes, d'autres légendes, des sages qui connaissent des secrets oubliés. Nous pourrions trouver un moyen de partager ton fardeau, ou du moins de le comprendre."

Je t’aime Kaelan !

Il continua, les idées jaillissant avec rapidité. "Je pourrais organiser un grand voyage d'exploration et de diplomatie. Un long périple, ambitieux, pour étudier les coutumes des lointains royaumes, pour nouer des alliances ou chercher des connaissances perdues. Mon père, le Roi, a toujours souhaité étendre l'influence de Vandoria, et il ne refuserait pas une telle entreprise si elle est présentée avec les bonnes arguties. Ce serait une mission qui me tiendrait éloigné du royaume pendant des années, voire une décennie."

Alaric s'interrompit, son regard se faisant intense. "Et toi, Kaelan... tu serais mon émissaire personnel, mon conseiller, mon garde du corps. Un compagnon de voyage indispensable. Personne ne s'étonnerait que tu m'accompagnes. Et si le voyage se prolonge, si nous disparaissons pendant des décennies... pour le monde, nous serions des explorateurs perdus, des diplomates oubliés par l'histoire. Pour nous, ce serait un temps volé, un espace où notre amour, et ton secret, pourraient exister loin des yeux et des jugements."

L'idée germait, audacieuse et désespérée. Ce n'était pas une solution éternelle, mais un répit. Une échappatoire. Une façon de gagner du temps, de vivre les années que le destin leur refusait autrement, tout en cherchant un remède ou une explication à l'immortalité de Kaelan.

"Lorsque le temps serait venu de rentrer," conclut Alaric, "si nous ne devions jamais revenir, nos visages n'auraient pas changé. Nous pourrions alors simuler des maladies, des sorts, des séjours dans des terres avec lesquelles le temps s'écoule différemment. Les légendes que nous découvririons pourraient même nous donner de meilleures astuces pour masquer ton immortalité. Nous serions des fantômes de notre propre époque, mais ensemble."

Kaelan écouta, une lueur nouvelle dans ses yeux. L'idée de vivre dans l'ombre, de disparaître du monde pour vivre leur amour et percer le mystère de son existence, était vertigineuse. C'était un départ précipité, une fuite masquée en grand voyage.

Le baiser. Il résonnait encore sur les lèvres de Kaelan, un écho doux et amer à la fois. La proposition d'Alaric, cette idée folle d'un voyage éternel, allumait une flamme d'espoir dans le cœur vide du chevalier. Mais le temps pressait. La lumière déclinante de l'après-midi filtrait à peine à travers les lucarnes poussiéreuses, et chaque instant passé dans ce sanctuaire des secrets était un risque.

Ils se remirent à la tâche, les doigts fébriles, tournant les pages jaunies du "Personæ". Les récits se succédaient, contes d'homme-bêtes, de femmes aux dons étranges, d'ombres traversant les siècles sans laisser de traces. L'excitation grandissait, une tension palpable remplissant l'espace entre eux.

Puis, au milieu du volume, le doigt d'Alaric s'arrêta. Une page blanche. Une seconde. Sur cette troisième page immaculée, des mots étaient calligraphiés en un latin ancien, l'encre délavée par le temps, mais toujours lisible : Vita tua aeterna et utilis sit

Alaric inspira brusquement, oubliant presque leur baiser volé, la main tremblante. "C'est là !" s'exclama-t-il, ses yeux rivés sur les mots. "Je me souviens de ça ! C'est ce que je cherchais. C'est... c'est une bénédiction, une malédiction. Une prophétie."

Kaelan se pencha, son regard d'immortel fixant les caractères latins. "Que cela signifie-t-il ?" demanda-t-il, le cœur battant d'un espoir nouveau, étrange.

Alaric releva les yeux vers lui, un mélange de fascination et de gravité.

"Cela veut dire : 'Que ta vie soit éternelle et utile.'" Il marqua une pause, le poids des mots s'installant dans la pièce. "La légende, celle que ce livre ne fait qu'effleurer en quelques paragraphes dispersés plus loin, parle d'âmes touchées par des forces primordiales, souvent par le feu du ciel ou l'eau de la terre, devenant immuables. Mais cette immortalité n'est pas un don gratuit. Elle vient avec une condition, une sorte de dessein. Une vie qui ne doit pas seulement durer, mais servir un but."

Il tourna quelques pages encore, trouvant les paragraphes qu'il cherchait. "Ces âmes, les 'Immuables', comme ce texte les nomme parfois, sont censées être les gardiens d'un certain équilibre, des observateurs, parfois des guides. Et si elles s'écartent de ce 'but utile', si elles se complaisent dans la futilité, l'indolence ou la destruction, l'éternité devient un tourment. Le temps se tord, les souvenirs se brouillent, la raison s'effiloche. C'est une forme de folie lente, une dissolution de l'âme."

Kaelan sentit un froid bien plus profond que celui de la tombe l'envahir. L'immortalité avait un prix, une clause de service. Et la perspective d'une folie éternelle, lente et inévitable, était mille fois pire que n'importe quelle mort.

"Alors, il ne s'agit pas seulement de vivre," murmura Kaelan, "mais de justifier cette vie. De lui donner un sens."

La découverte de cette inscription et de sa signification change radicalement la perception de Kaelan sur son immortalité. Ce n'est plus uniquement une solitude, mais une quête.

Alaric écouta les réflexions de Kaelan, ses yeux posés sur les mots anciens du "Personæ". La révélation de la condition des "Immuables" – l'obligation de trouver un but, de servir, sous peine de folie éternelle – ne le découragea pas. Au contraire, elle semblait donner une structure, un sens à l'effrayante immortalité de Kaelan. Pour Alaric, esprit pragmatique et curieux, c'était une contrepartie logique, presque bienvenue. Si l'éternité avait une fonction, alors elle n'était plus une aberration stérile mais un outil puissant.

"C'est une voie," dit Alaric, sa voix emplie d'une résolution tranquille. "Non pas une malédiction sans fin, mais un chemin à suivre. Que ta vie soit éternelle et utile. Cela résonne avec une vérité plus profonde que toutes les homélies des prêtres. Si tu es destiné à vivre sans fin, Kaelan, alors tu es aussi destiné à une grandeur qui dépasse nos simples existences mortelles."

Kaelan, le cœur allégé d'un poids qu'il ne savait pas avoir porté, sentit un frisson d'espoir le parcourir. L'idée de servir l'humanité, non pas selon les dogmes étroits et hypocrites de l'Église, mais selon une vérité plus pure, résonnait en lui. Redresser les torts, apporter un véritable changement là où les pouvoirs en place échouaient ou refusaient d'agir... C'était une mission qui donnait un sens à son existence prolongée. Et surtout, c'était une mission qu'il pourrait partager avec Alaric. La solitude glaciale de l'immortalité commençait à se dissiper, remplacée par la perspective d'une aventure à deux.

Ils prirent un moment pour apprécier cette nouvelle direction. Alaric avait 22 ans et Kaelan 25. En réfléchissant à leur espérance de vie commune, loin du secret, ils estimaient pouvoir vivre ensemble au moins pendant trente ou quarante ans. Un laps de temps immense, précieux, même si les maladies, fléaux constants de l'époque, pouvaient encore emporter Alaric. Mais c'était bien plus que ce que la vie leur aurait permis dans des circonstances normales. Le principal n'était pas la durée ultime, mais la certitude d'être à deux. Cette pensée, cette promesse tacite, était la plus douce des victoires.

Ils avaient d'ailleurs récemment entendu des rumeurs, venues des tavernes et des bouches des marchands itinérants, concernant un certain Uther Pendragon, roi dans d'autres contrées de la Britannia, et son très jeune fils, nommé Arthur. Une nouvelle génération se levait, des légendes prenaient forme. Kaelan et Alaric sentaient qu'ils évoluaient à l'aube de grandes choses, une époque que Kaelan, lui, traverserait peut-être entièrement.

La nuit tombait sur la Grande Bibliothèque, mais une nouvelle lumière brillait dans les yeux des deux hommes. Ils se mirent à l'œuvre, non plus à chercher des réponses sur l'immortalité de Kaelan, mais à élaborer le plan qui leur permettrait de la vivre ensemble.

Le projet devait être infaillible, capable de convaincre leurs familles et les cours respectives de la nécessité d'un tel engagement.

Alaric commença : "Mon père, est un homme ambitieux. Il rêve d'étendre notre influence, de nouer des liens commerciaux avec les cités lointaines au sud, et peut-être même les royaumes insulaires à l'ouest. Nous pourrions proposer une grande ambassade, une mission d'exploration et de diplomatie de grande envergure. Une expédition pour cartographier de nouvelles routes commerciales, sonder les intentions des royaumes voisins et ramener des connaissances précieuses."

Kaelan, l'esprit aiguisé par son immortalité, ajouta : "Et pour Eldoria, il faudrait un but qui serve leurs propres intérêts. Une recherche de reliques sacrées, peut-être, ou une tentative de convertir des terres païennes lointaines. Je pourrais être envoyé comme ton du garde d'honneur, mon prince, un émissaire de la piété eldorianaise, chargé de veiller sur ta sécurité et, officiellement, de rapporter les âmes errantes à la vraie foi."

Le plan se dessinait, complexe et audacieux. Ils devraient manipuler les ambitions de leurs rois respectifs, jouer sur leurs peurs et leurs désirs, pour obtenir la liberté de disparaître. La diplomatie serait leur arme, l'exploration leur prétexte, et la survie de leur amour et la quête du "Sens utile" de Kaelan leur véritable objectif.

« Comment Alaric et Kaelan vont-ils présenter leur projet à leurs rois respectifs, et quelles seront les réactions des cours d'Eldoria et de Vandoria face à cette proposition de long voyage ? »

La décision était prise. Le "Personæ" n'était plus un simple recueil de vieilles légendes ; il était devenu une carte, un guide pour leur avenir incertain, une promesse de compréhension dans un monde qu'ils ne pouvaient plus percevoir comme avant. Il était impensable de le laisser derrière eux, exposé aux regards inquisiteurs des prêtres qui, s'ils en comprenaient la véritable nature, le réduiraient en cendres sans hésiter.

Le vol fut d'une simplicité désarmante pour Kaelan. Il saisit le lourd volume, le glissa sous sa cape, sa masse ne pesant rien pour lui. Refermant la porte avec le même silence déroutant, il réapparut au côté d'Alaric, le livre caché comme s'il n'avait jamais bougé. Un rapide regard échangé, un hochement de tête imperceptible, et le secret était scellé. Le "Personæ" était à eux. Il serait leur recueil, leur carte des légendes et rumeurs que l'Église cherchait à enfouir.


Texte publié par Thigat, 12 juillet 2025 à 18h38
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