Joseph-Arthur

Le 4 septembre est en marche depuis plus de six heures et Joseph-Arthur n'en a pas eu conscience. Il dormait. Dès son réveil, il se met à rattraper le temps perdu qu'il ne retrouvera jamais. Afin de suivre à la lettre (probablement la Zzz) les conseils de sa prof de chant, il s'étire en position du chat ce qui fait miauler de rire Mozart, son chat siamois. Il faut se mettre à quatre pattes dans son lit, les mains sous l'oreiller, les fesses nues en l'air et à l'air puis d'étirer les pieds vers le pied du lit. Un conseil de Mozart : SVP, ne faites pas cela à la maison, mon maître est un professionnel. Il reprend la position couchée afin de récupérer de tels efforts.

Pendant que la famille dort, il se hâte à préparer les lunchs pour les enfants avant qu'ils ne partent pour l'école en prenant soin d'éviter les aliments interdits comme le beurre d'arachides, les sandwichs au porc et les liqueurs douces. Les enfants vont encore se plaindre d'y retrouver des carottes et du fromage. Il n'y peut rien, l'école l'oblige à les nourrir sainement. Vivement, il prépare le petit déjeuner de sa femme avant qu'elle ne se rende au travail. Comme d'habitude, elle exige des œufs avec du bacon et de petites patates rôties. Elle l'a convaincu que cela l'aidait à avoir de l'énergie jusqu'au repas du midi. Pourtant, elle n'a qu'à se rendre au sous-sol depuis qu'elle est en télétravail. Les enfants vont sûrement encore brailler pour avoir des crêpes à avaler en trois minutes, soit le temps entre leur lever et le départ de l'autobus scolaire. Personne ne se lève. Que se passe-t-il ? Il va réveiller sa femme et ses enfants pour se faire traiter de nono. On est samedi, lui disent-ils en cœur et en colère. Finalement, il est déjà épuisé et sa journée est à peine entamée. Vivement un petit verre de remontant : du jus d'argouses bien suret. Cela a un effet immédiat. Il se réveille de nouveau. Il s'était rendormi. Tout ce qui peut se passer en rêve pendant dix minutes.

Un deuxième réveil l'amène devant le téléviseur qui lui fournit un résumé des nouvelles de la nuit où il ne s'est rien passé de notable, alors il ne note rien. Il profite du silence de la maison pour faire couler une douche bien chaude et, n'ayant rien d'autre à faire, il partage avec elle ses jets d'eau. Ce matin, il en émerge tout mouillé ce qui l'oblige à utiliser sa serviette de bain à défaut d'une serviette de douche. Mozart miaule dans son coin en le voyant humidifier son tapis de douche qui lui sert d'aire de repos. Sans perdre de temps, le maître dépose son corps sur son pèse-personne qui, contrairement à son nom, pèse une personne. Il poursuit son périple matinal et, malgré l'absence de ses verres, ses yeux lui signalent l'urgence de passer un peigne dans sa chevelure échevelée. Utilisant le miroir comme témoin, il demande au peigne de se donner la peine de passer à l'acte. Ce qu'il fait en compagnie de sa main droite, la plus adroite. Brossage de dents, du moins celles qui lui restent, gargarisme pour réveiller sa gorge profonde et le voilà presque prêt à entreprendre sa journée. OUPS ! La décence et son chat lui demandent de s'habiller, ce qu'il fait en multicouches : slip, bas, pantalon, souliers et chemise. Le voilà prêt à affronter sa journée. Un cas urgent l'appelle : Mozart lui crie de lui donner sa portion de croquettes. Il lui en donne deux par mégarde. Le chat les garde.

Il refait sa routine, mais cette fois de façon réelle et il constate, avec soulagement, que le seul petit déjeuner à préparer est le sien. Sa famille n'existait que dans son rêve. Un vrai petit déjeuner composé de deux rôties au miel lui redonne toute sa vigueur. Il prend alors courageusement la décision de faire un peu de nettoyage ce qui est dans la vie d'un homme vraiment du temps perdu. La décision prise,il décide que cela se passera demain. Et dire qu'il est déjà 8 h. La journée sera longue et belle avec un soleil illuminant le paysage mauricien. Même dans la réalité, on est samedi et c'est le temps de rejoindre Rosita à St-Roch-de-Mékinac comme à chaque samedi pour une randonnée pédestre dans les sentiers du lac Clair.

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