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tome 3, Chapitre 1 « DANS MON PARADIS » tome 3, Chapitre 1

Né Morin et mort Jenquet, je profite de mon dernier souffle pour quitter mon cadavre en attente de son état cadavérique. Aucun pleur pour pleurer ma mort, que du silence alors qu'une femme médecin annonce à haute voix l'heure exacte de mon décès. Je me trouve en présence de mon corps dans une chambre de l'hôpital régional de la Mauricie où mes amis Hocquet, Chiquita et Vénus viennent d'assister à ma mise à mort que j'ai moi-même commandée via l'aide médicale à mourir alors que j'étais sain d'esprit. Maintenant, je ne suis qu'un esprit, du moins je le pense. Mes amis en sont quittes pour quitter la chambre surchauffée alors que mon corps visitera une chambre froide. Personne ne s'occupe de moi. Où dois-je aller ? Je n'ai aucun mode d'emploi ni GPS pour me diriger. Ma vie est morte, vive ma mort ! J'étais né Morin, je suis mort sous le pseudo de Jenquet. Le serais-je toujours ?

Mes premiers pas posthumes

Un aide aux bénéficiaires vient ouvrir la fenêtre pour aérer la pièce. J'en profite pour m'en évader tout en prenant conscience de mon inconscience et du fait que je puisse voler en m'envolant. Cela m'aurait été utile lors de ma première sortie par une fenêtre quand j'avais 11 mois. La réception au sol aurait été moins douloureuse . Je constate rapidement que je ne suis pas seul. Des milliards et des milliards de tonnerre de Brest de molécules circulent dans l'air ambiant de la mésopause sans se soucier de ma présence. Je m'informe au premier rencontré qui me souhaite la bienvenue dans le monde de l'éternité. Il me confirme ma non-existence matérielle et humaine. Tout comme cette multitude, je viens au monde sous la forme d'une molécule d'air (78 % d'azote ; 21 % d'oxygène). Je suis donc un N2O2, ou un NONO. Peu de choses ont changé avec mon décès. De mon vivant on me traitait souvent de nono.

Note de l'auteur

Ne voulant pas prendre les lecteurs pour des nonos, vu qu'ils sont encore vivants, j'ai demandé au responsable de la mise en page de ne pas identifier les personnes décédées et agissants comme NONOS. On prend pour acquis qu'ils vivent tous leur mort dans la mésopause. De plus, vu qu'aucun lecteur ne m'a demandé de ne pas intervenir dans ce récit, je le ferai régulièrement afin de m'assurer que toi, lecteur toujours vivant, ne soit pas trop dépaysé.

Renseignements basiques

Je m'informe auprès de mes nouveaux compagnons informes s'il y a un code de vie à respecter pendant qu'on est mort. Aucune limite. On peut prendre nos airs comme on veut si nous avons connu une bonne vie. J'apprends aussi que je viens de vivre ma dernière transformation et que je vivrai sans vie pour l'éternité. Je vis donc mes premiers instants de l'éternité et c'est long l'éternité surtout vers la fin. Mais je ne dois pas m'éterniser sur ces pensées.

Mon guide Michelin me renseigne sur les loisirs qui m'attendent. Je peux demeurer au-dessus de la Terre et visionner la vie courante de mes ex-semblables mais sans intervenir dans leur quotidien. Je peux aussi rendre visite à toutes les molécules d'air qui ont déjà connu la vie terrestre et avoir d'interminables discussions avec elles. Une façon de rencontrer les êtres décédés, aimés ou non. Pas besoin de voyager dans le passé, tous les vivants décédés qui m'entourent étant eux-mêmes des NONOS.

Pendant que je m'initie à ma nouvelle non-vie, mon ex-corps entreprend son dernier voyage. Cela me fait drôle d'assister à sa disparition. L'absence de funérailles officielles confirme le respect de mes dernières volontés. Je vois mon cadavre, gisant dans une boîte de carton, pénétrer dans un antre chaleureux. Je sais qu'il se croit en enfer mais les feux qui le brûlent ne servent qu'à l'incinérer. Je m'informe à ce sujet. Non, l'enfer après la mort n'existe pas puisque la mort nous en délivre. C'est Sartre qui me le confirme en me disant que l'enfer c'est les autres. Quant au ciel, tous l'espère. Je cherche Dieu. Nietzche me dit que Dieu est mort. Ce dernier réplique que c'est Nietzche qui est mort. Je tiens ça mort.

Du coin de l'œil, j'aperçois mes amis qui visitent le notaire. Ils apprennent que j'étais le propriétaire de l'hôtel où nous logions et qu'ils en héritent à la condition de le transformer en refuge pour itinérants. Je prends conscience que moi aussi je suis devenu sans domicile fixe. Une molécule d'air qui vogue au gré des vents.

Mon guide me guide au-dessus d'un nuage pour me montrer la file de gens qui attendent aux portes du ciel. Les premiers homos sapiens, dont Adam et Ève, y attendent depuis 300 000 ans. Les portes de la demeure éternelle demeurent toujours closes. Mais face à l'éternité, il s'agit d'une courte attente.

Note de l'auteur

Toutes les molécules d'air sont implicitement des NONOS et se reconnaissent entre elles, car elles ont conservé leur apparence physique. Une NONO fleur est facilement identifiable tout comme les NONOS provenant d'humains. Il se peut que vous ne croyiez pas à cette réalité mais qui peut apporter la preuve du contraire ?

Une visite au village

Je profite d'une page blanche dans mon agenda pour me promener au-dessus de mon ancien village, St-Jean-D'Épîles. Il semble vide. Je me rends à mon ancien domicile. Tous les villageois s'y trouvent. Tel que je l'ai demandé dans mon testament, on plante un érable argenté sous lequel mes cendres prennent place entre ses racines. Le maire y va d'un court discours, le curé d'un long sermon et Hocquet prend le tout en notes, immortalisant la scène par une photo qu'il publiera dans son journal. Chiquita et Vénus cachent leurs larmes, ce qui m'émeut. J'en profite pour leur souffler une brise chaleureuse sur la joue droite en signe de bise. Un premier avantage d'être une molécule d'air.

Je vois Chiquita d'un œil différent. Sa beauté me frappe. Elle en a perdu beaucoup. Il est vrai qu'elle vient de célébrer ses 45 ans. Elle attire moins les hommes surtout depuis qu'elle a fermé son bordel. Y-a-t-il cause à effet ? Probablement. Vénus vit le même phénomène. À moins que son attrait pour les Drags Queens influence sa vie sexuelle. Je me rends compte que je peux maintenant m'introduire dans leur chambre pour assister à leurs ébats intimes. Je me rends compte que cela n'a plus aucun intérêt pour moi. Je me déguise en courant d'air et me rends au journal La Dépêche. Mon ami Hocquet rédige un article sur le village et annonce que l'hôtel Le Repère sera transformé en refuge pour itinérants. Pourvu qu'il y fasse un grand ménage. En quittant la vie sans demander leur avis, j'ai oublié de faire le ménage de ma chambre. Tous mes écrits s'y trouvent même ceux que j'ai cachés dans une mallette brune bien camouflée sous mon lit.

Je me rends en pleine vitesse, ce qui est facile pour une molécule d'air, et je me présente au parc Champlain de Trois-Rivières. Je sais que ce parc héberge des itinérants. Je tournoie autour d'eux pour rafraîchir l'atmosphère et les inciter à quitter ce lieu. Je souffle sur un exemplaire de La Dépêche et l'envoie en direction d'un SDF. Il s'en couvre. J'espère qu'il sait lire et que ses yeux l'emmèneront sur l'article de Jenquet portant sur un refuge pour itinérants.

Je retourne aussitôt au village. Il faut que je demande à mes nouvelles amies les molécules d'eau d'humecter les feuilles de mon érable argenté sachant tous les efforts que mes cendres consacrent à sa croissance.

Chiquita, Vénus et Hocquet semblent avoir le plein contrôle de leur projet de refuge. J'en profite pour me réfugier dans la file d'attente du paradis. Je vais sûrement y rencontrer de vieilles connaissances. Par qui commencer ? En attendant de savoir où je m'en vais, je vais tenter de savoir d'où je viens. Je constate avec plaisir que mes recherches sont facilitées par des regroupements de NONOS sous forme de bulles d'air. Je joins la bulle contenant les molécules de mes proches et amis.

Rencontres ancestrales

J'ai assurément des ancêtres ancestraux devenus aussi NONOS que moi. Je remonte donc jusqu'au premier Morin connu par ma généalogie. André Morin. Je le retrouve au milieu de la file loin devant les portes du paradis. Il m'apprend qu'il est né en 1645 à Bazoges, à peine 300 ans avant moi. Il a épousé Marguerite Moreau qui avait 21 ans. Déjà, ces éléments généalogiques me font penser à Marilou une femme toujours pleine de vie que j'aurais aimé aimer, elle-même une Moreau. André est décédé à l'âge de 65 ans, ne laissant aucune fortune derrière lui, sinon 11 enfants. J'oublie un héritage dont je ne saurais que faire. Il me présente sa femme qui faisait partie des Filles du Roy. Elle m'apprend que ces dernières étaient des femmes célibataires dont le roi favorisait la migration en Nouvelle-France afin d'augmenter la population pour éviter de devenir un état américain (un projet toujours menaçant). Je prends le temps, vu que j'en ai beaucoup, pour saluer tous les NONOS de mon arbre généalogique qui font un tronc commun dans la file d'attente en attente du paradis. Contrairement à l'écrivain Camille Lesur, les portes du paradis ne sont pas fermées que le lundi.

Bon, je sais maintenant d'où je viens. Il reste à savoir où je m'en vais. Comme je suis libre comme l'air, je retourne prendre l'air à St-Jean-D'Épîles au moment même où deux itinérants visitent le village. Vont-ils trouver refuge chez Le Repère ? Ceux qui ont lu mes Mémoires d'Outre-Cendres le savent.

Je retourne dans la file menant au paradis, un geste dont je me suis habitué lors d'un séjour à Cuba. Je retrouve Marie-Paule, une tante bien-aimée qui a décidé de quitter cette Terre avant moi. Elle est décédée avant qu'un malsain virus l'attaque. Elle l'a échappé belle. Son grand cœur n'a pas suffi pour la maintenir en vie. Son rêve de vivre 100 ans s'est arrêté à un an de son échéance. De mon vivant, j'avais la tâche de perpétuer son souvenir. Elle vient de m'accueillir en son sein, du moins ce qu'il en reste vu sa condition moléculaire. Elle ne pensait sûrement pas se transformer en NONO suite à son séjour dans une belle urne qui occupa mon salon pendant quelques mois. Ses cendres vivent toujours dans un réceptacle en chêne qui repose dans un cimetière obscur et peu visité. Ma tante garde un bon souvenir de cet arbre qui lui a fourni son dernier domicile fixe. Leurs NONOS respectifs se rencontrent occasionnellement

Dernièrement, ce chêne, un non-être, confiait à ma tante : Mes racines remontent du plus profond de ma terre natale. Elles ont permis aux habitants de mon village de jouir de ma beauté pendant un siècle sans que je leur fasse ombrage quand ils profitaient de mon ombre pour se protéger. Issu d'un chêne majestueux, je suis devenu un simple matériau de construction. Je rêvais d'une deuxième vie luxueuse et devenir un meuble exceptionnel qui ferait le bonheur de son propriétaire. Je trônais dans la pièce principale de sa demeure comme un objet de contemplation pour tous ses visiteurs. Rêve déçu. Je viens de prendre la forme d'une simple urne funéraire, à peine décorée, destinée aux moins fortunés. Cela en dit long sur ma dernière pensionnaire Marie-Paule !

J'imagine que plusieurs personnes exigent que je me ferme la boîte mais pas question de me taire alors que je sais bien que demain, je me retrouverai six pieds sous terre. Je suis victime d'une erreur de fabrication. Mes malheurs de chêne s'enchaînent. Mon histoire risque même de désintéresser des lecteurs qui m'abandonneront avant la fin de celle-ci. Quel est l'intérêt de savoir que je viens de passer ma première nuit en compagnie des cendres de Marie ? Celles-ci compriment mes quatre côtés cherchant la meilleure position pour s'y sentir à l'aise. Aucun mot de bienvenue. Je pense qu'elle n'apprécie guère de se retrouver enfermée dans cette nouvelle demeure qui lui est inconnue et imposée. Pourtant, c'était son choix d'être incinérée. Elle a simplement oublié de choisir l'urne qui l'accueillerait. Un matin, on m'a recouvert d'une enveloppe de velours bleu royal. Je n'ai de royal que la couleur. On m'a promenée dans une vaste église où, à peine 29 personnes sont venues nous rendre hommage. Je n'ai pas eu droit d'être admirée comme d'autres urnes coûteuses, ornées de sculptures et brodées de dorures. Moi, on m'a cachée. Personne n'a souligné ma beauté, à juste titre. La cérémonie terminée, les convives se sont hâtés à la réception à laquelle je ne fus point invitée. Bientôt on se mettra en route pour m'abandonner à mon sort éternel. J'aurais donc aimé connaître le sort de ces belles urnes qui étaient offertes en vente dans le même catalogue que moi. Ma voisine de droite était en bois de rose et celle de gauche en cèdre. Il y en avait même en grès et d'autres en métal poli. Je les entendais rêver de la place qui les attendait, sûrement dans un magnifique crématorium où elles seraient admirées pendant de nombreuses années. Moi c'est le cimetière public qui m'attend.

Marie-Paule me donne sa version des faits. À peine mes cendres refroidies, on m'a confiée à une urne qui me sert de dernier refuge depuis des années. Pour moi, il ne s'agit pas d'une simple boîte mais d'une résidence permanente, un nouveau foyer, mon dernier. Je m'y sens bien, en sécurité et confortable. Cette urne est devenue ma nouvelle enveloppe corporelle. Grâce à elle, j'ai pu me rendre à mon service funéraire et partager une dernière fois la présence de mes amis et parents. Mise en terre, elle me protège délicatement. Quelle chance ! Je sais qu'elle est malheureuse et se déprécie, mais moi, j'aime cette urne, non pas pour sa beauté extérieure mais pour la chaleur qui émane de son for intérieur. Elle a été créée pour moi qui vais lui être fidèle jusqu'à ce que nous mêlions nos poussières. Nous n'avons rien à faire du regard d'autrui. Déjà une journée depuis notre rencontre. J'entends la terre qu'on jette sur nous. Notre vie commune entreprend son long périple.

Vivement à la rencontre de Marie-Christine, ma seule fille légitime i.e. de mon propre sperme. À peine deux ans que j'ai eu peine de la voir partir tout en restant dans son lit d'hôpital. Un cancer sans foi au foie l'a emportée dans le monde des molécules d'air. Je me souviens d'avoir déjà accouché sur papier le récit de sa mastectomie . Un des seins jumeau, héros de ce texte, lui appartenait. Des milliers d'yeux ont pu en lire l'extraction. Elle m'attend avec impatience, je le sens. En dépit du fait que sa mère était une Paradis, elle n'y croit pas. Je ne suis pas surpris de ne pas la retrouver dans la file vers la porte divine. Elle me reconnaît et accourt à ma rencontre à court de mots. Tout comme sa mère, elle m'a quittée sans dire un mot, vu mon absence. Elle est décédée la veille de ma visite afin de me pas me déranger inutilement. Je lui raconte que lors de son hommage funéraire, j'ai exigé qu'elle quitte la salle sous une salve d'applaudissements. Mais elle le sait. Elle y était, du moins sa NONO flottait au dessus de son urne. Nous faisons un petit détour pour saluer ses grands-parents et quelques oncles et tantes convertis en NONOS depuis plusieurs années.

On utilise une petite brise pour nous promener dans l'air mauricien, au dessus de quelques sentiers tortueux près du Lac-à-La-Tortue. On se rappelle des souvenirs de sa mère, toujours vivante mais sans souvenir depuis qu'elle partage sa vie avec l'Alzheimer. Ma fille unique a partagé son enfance avec deux frères et deux sœurs fournis gratuitement par ma deuxième femme et ma troisième conjointe. Adulte, elle a aussi connu deux autres rejetons de ma quatrième conjointe mais sans les considérer comme des demi-frères et demi-sœurs. De temps à autre elle va les visiter du haut des airs. Surveillant mes EX, elle se souvient des bons moments que nous avions ensemble, n'ayant jamais assisté aux échanges houleux que nous partagions entre conjoints. On se met d'accord sur le fait que j'ai rendu toutes mes conjointes heureuses que ce soit au moment où nous sommes rencontrés ou quand elles m'ont quitté. Il nous faut maintenant attendre leur décès pour que tous nos NONOS aient une rencontre de famille. Elle me félicite pour toutes mes enquêtes en tant que Jenquet et ne manque pas de me narguer comme auteur alors qu'aucun éditeur digne de ce nom n'ait osé me publier. Ce qui ne fut pas son cas ayant plusieurs publications à son crédit.

Ma vie avec Mozart

Notre échange est interrompu par l'arrivée inopinée de Mozart. Pas le musicien mais mon chat siamois décédé après ses neuf vies à mes côtés. Heureux de me retrouver, il aimerait sauter sur mes genoux mais impossible dans notre état moléculaire. Le grand avantage de notre état réside en notre capacité de communiquer par transmission de pensées. Mozart en profite pour me donner sa version de sa vie terrestre

Enfin ! Quel avantage d'être une NONO ! Je peux dévoiler à Jenquet tout ce que l'auteur m'a fait subir alors que je partageais la vie trépidante, de mon maître. Cet auteur impubliable aimerait donner sa version des choses. Pas question de lui fournir une porte de sortie. Ici, même la porte du paradis est close. L'auteur va-t-il finalement donner sa langue au chat ? J'espère qu'il n'a pas un chat dans la gorge. Moi Mozart, je vais vous dire la vérité, même si elle n'est pas toujours bonne à dire. Mon maître était jaloux de moi et il hésitait à me laisser parler parce que je connaissais des choses sur lui qu'il voulait garder secrètes. Mais il faut appeler un chat, un chat. Finie l'époque où c'est lui qui me dictait mes pensées. Ma condition de NONO me permet d'éliminer la peur de me jeter à l'eau. Ce n'est pas vrai qu'un chat échaudé craint l'eau froide. Tous les chats détestent l'eau. Je ne sais pas pourquoi on a inventé une telle expression. C'est vraiment de la bouillie pour les chats. Je profite de l'absence de notre auteur, qui n'a pas encore décidé de mourir, pour te révéler cher Jenquet, qu'il t'écrivait des histoires à dormir debout, cousues de fil blanc de bout en bout. Il fallait vraiment faire des efforts considérables pour ne pas en perdre le fil. De fils en aiguilles et de chats à chas, il t'a embobiné. Il enfilait les expressions l'une à la suite de l'autre, en file indienne. Parfois… euh souvent… ses histoires étaient décousues de fil blanc ce qui donnait du fil à retordre aux lecteurs de La Dépêche. Pardonne-lui, il ne savait ce pas ce qu'il faisait.

Note de l'auteur

Le paragraphe précédent n'étant pas de moi, je vous prie d'en excuser les propos mal à propos. Il n'existe aucune règle permettant à des personnages de roman de commenter, critiquer ou vilipender leur auteur. Ils n'ont pas ce droit d'auteur. C'est ainsi que si je commence une histoire en écrivant : Il était plusieurs fois, que je n'entende personne remettre mon titre en doute. Pourquoi commencer un récit par Il était une fois alors qu'on sait pertinemment bien que l'histoire se répète. Pour preuve : Si je dis «Il était une fois un auteur qui s'est fait divorcer un Premier de l'An», je pourrai vous affirmer, au nom de cet auteur que je connais depuis sa naissance, qu'il eut fallu dire : «Il était plusieurs fois». Ma propre vie ayant débuté un premier du mois, je sais par expérience, que débuter son existence un premier du mois n'est pas gage de réussite.

Mozart continue de se raconter. Dès ma naissance j'ai cru que mon destin était destiné à me rendre malheureux. Je suis né de père inconnu et d'une mère vidée de son lait et de sa fibre maternelle par de trop nombreux petits gloutons arrivés avant moi. Elle savait qu'elle m'abandonnerait avant même que je ne vois le jour, cette nuit là. Je suis parvenu à survivre en faisant de beaux yeux doux aux soignants qui m'ont soigné avec soin, me permettant de mettre de la chair sur mes os et de me rendre présentable à une famille d'accueil éventuelle.

Dès qu'il m'a vu, mon père adoptif fut frappé par ma fragilité. Un coup de foudre. Pas d'enfant à la maison, il voulait combler un vide dans son existence morne et sans but. Mes grands yeux bleus lui ont lancé une invitation qu'il n'a pu refuser. Selon mon certificat de naissance, Noël approchait. Je lui servis de cadeau. Son plus beau cadeau, jusqu'à présent. Comme il m'a aimé, me prenant dans ses mains, me cajolant et partageant même sa couche avec moi pour m'éviter la froideur de ma nouvelle vie. Quelle joie de me retrouver au paradis. Papa prenait soin de moi. Dès mon jeune âge ,il s'est assuré que je sois vacciné, dans une clinique privée, contre les maladies qui pourraient m'affecter. Puis, un jour, je suis retourné à cette clinique, mais mon père ne m'a pas ramené. Je devais subir quelques opérations pour mon bien-être et pour celui de ma famille. Était-ce le fait que j'avais atteint ma puberté ?

Seul dans ma chambre, j'avais peur. Je me sentais abandonné de nouveau. Le lendemain matin, une garde est venue me chercher. Le docteur, avec sa grande blouse blanche, m'a donné une piqûre. Je n'avais pas peur des aiguilles, je me souvenais d'elles quand elles m'avaient vacciné. Puis, je me suis retrouvé dans un trou noir de souvenirs. Quelques heures plus tard, revenant à moi, je ne pouvais plus me tenir debout sans que mes pieds me fassent mal. Mais le pire, c'est cette douleur au bas du corps. Mes testicules avaient disparues. Elles me manquaient. On ne m'avait jamais dit que j'avais un problème au niveau du sexe.

Le lendemain, mon père est venu me voir. J'étais content de le revoir. Je me suis fait tout doux, espérant qu'il me ramène à la maison. Avec la permission du docteur, il m'a pris délicatement dans ses bras et je suis revenu chez moi. On m'a tenu au secret le plus total sur mon séjour à la clinique. Quelques semaines plus tard, j'avais tout oublié de cette mésaventure. Je marchais avec assurance et mon sexe assurait sa fonction première : uriner.

Quelques années plus tard, en rencontrant une représentante du sexe opposé, j'ai rêvé d'une aventure sexuelle. Quand une chatte t'attire, il est dur de ne pas résister. Quelle excitation ! Ma première érection fut longue et jouissante. Je n'osais pas en parler à mon père. Je me gardais une petite gêne. Une chance que ma compagne était éduquée et qu'elle avait une expérience de la vie. En entendant ma voix, elle a compris qu'il y avait anguille sous roche. Elle a jeté un œil à mon sexe et après un bref examen elle a confirmé qu'on m'avait castré, sans mon consentement. À quoi sert une bourse vide ? J'en ai voulu à mon père d'avoir accepté qu'on m'inflige un tel châtiment. Dans quelle société étais-je tombé ? J'ai passé plusieurs années à me passer de relations sexuelles. On disait que le sexe visait à procréer. Je ne le pouvais pas. Mon père se privant de relations sexuelles, je me suis dit qu'il devait lui aussi être un eunuque. Cela expliquerait pourquoi il a désiré que je sois à son image. Il m'est arrivé souvent de demeurer couché dans mon lit, broyant du noir en regardant le noir de la télévision éteinte. J'avais l'impression qu'elle aussi me regardait tristement. Mon adolescence fut donc très chaste même si le désir persistait à meubler mon esprit. Je me souviens d'une journée où j'ai goûté du fruit défendu.

La marijuana

La police ne venait jamais enquêter chez toi, me dit Mozart. Ton statut de détective privé te mettait à l'abri de sa visite, vu que tes dossiers étaient remplis de filatures de policiers en visite chez leur maîtresse. Tu pouvais donc te permettre quelques entorses à la loi surtout que tu avais une entorse permanente au genou gauche. Au Québec, la marijuana était légale ce qui te permettait de cultiver dans ton salon quatre plants de pot dans des pots de 20 cm. Ce qui n'excédait que de quatre plants la limite permise. On avait le droit de posséder des pots, mais pas d'y cultiver le pot. En plus de décorer et de parfumer le salon, ces plants t'offraient un nouveau médicament. Celui-ci ne soignait aucune maladie précise, d'où son efficacité. Évidemment, tu n'en consommais que pour ton bien-être personnel ce qui te permettait de relaxer. De plus, tu n'en offrais jamais aux suspects que tu voulais mettre en garde à vue. Ce n'était pas le temps de les relaxer.

Une fois, tu t'en souviens, tu t'es permis une visite dans la chambre à coucher d'une amie, ce qui t'a permis de constater qu'elle préférait un matelas beaucoup plus mou que le tien et tu as constaté qu'elle n'avait pas de mari ni de mari. Tu en as alors profité pour retourner chez toi retrouver ta mari. Quelle ne fut pas ta surprise, en arrivant, de me retrouver couché sur le dos sur ton sofa, miaulant à tue-tête, complètement gelé. Tu t'es approché lentement de moi afin de m'éviter un bad trip. Tu m'as demandé ce que j'avais fait de ma journée. Un grand sourire niais dans le visage, je t'ai raconté que j'étais devenu accro aux annonces publicitaires télévisées. Mais tu n'as pas compris mes miaulements. J'avais passé toute la journée à manger des feuilles de ta belle plante devant la fenêtre, tout en regardant la télévision. Tu as jeté un œil sur tes plants de marijuana ce qui t'a permis de constater mon degré d'intoxication. J'avais l'air si heureux que tu m'enviais. Tu as fumé un joint avec moi. Je t'ai raconté mon bad trip en te racontant qu'un ange était venu me dévoiler ce qui se passait quand on était mort. Il s'était faufilé entre deux annonces télévisées me confiant que notre âme s'élevait dans le ciel pendant qu'on faisait des cendres de notre corps. Si notre âme ne rencontrait pas de nuages, ni heurtait de satellites, elle se perdrait dans l'espace, l'espace de quelques années. Une âme qui montait au ciel avec un temps couvert, revenait sur Terre en pluie ou en neige. Et quand il y avait une tempête avec beaucoup de vent, l'âme prenait l'allure d'un vampire. Toi, tu croyais qu'à notre mort on se réincarnait. C'est tellement vrai que tu t'es mis bénéficiaire de ton assurance-vie.

Puis je suis descendu de mon nuage hallucinatoire. Maintenant, on sait tous les deux que les anges n'existent pas.

Mon quartier d'enfance

Je profite de ma vie en Nonoserie pour m'installer dans un courant d'air me menant directement à mon quartier d'enfance. Peut-être que je pourrais y rencontrer mes amis d'enfance maintenant décédés.

Je me souviens de tous ces gens parce qu'à chaque jour, je les côtoyais, j'entrais dans leur maison, je connaissais tous les membres de la famille et j'étais en sécurité sachant qu'ils pouvaient tous me protéger. Je n'avais qu'à cogner à leur porte et on m'accueillait. Mais ça ne pouvait pas durer. Quand ma mère a décidé que je poursuivrais mes études au séminaire, j'ai perdu tous ces amis. Plus tard, j'ai dû quitter mon quartier pour étudier.

Une première rencontre réjouissante : ma première blonde. Les Tousignant nous ont servi de voisins durant quelques années pendant lesquelles je me suis imaginé être en amour sans savoir ce que cela signifiait. Elle se prénommait Renée (prénom qu'elle porte toujours, même sous sa forme moléculaire) et nous avons joué ensemble quotidiennement avant que l'école nous sépare. Comme la sienne se trouvait dans une autre ville, ses parents ont dû déménager. Si je m'en souvenais, ce serait sûrement parmi mes plus beaux souvenirs de petite enfance. Il faut dire que peu d'amis habitaient ma rue à cette époque. Le départ de Renée a coïncidé avec l'arrivée de plusieurs nouvelles familles comportant nombre d'enfants. Le quartier se peuplait. Je lui parle de ce temps béni où je la voyais dans ma soupe mais elle me rappelle qu' elle ne se rappelle pas de moi. Probablement que chez elle on ne mangeait pas de soupe. Grande déception pour moi qui croyais qu'elle avait été entichée par mes beaux cheveux blonds bouclés et mon torse d'athlète. Je quitte Renée et me tourne avec mon meilleur ami d'enfance, Jean Mongrain.

Peu de temps avant le départ de Renée, la famille Mongrain s'installe de l'autre côté de la rue en biais avec notre maison. Un nouvel ami s'ajoute à ma collection. Jean (quel beau prénom) et moi décidons de partager nos jeux et nos loisirs. Il m'a fait oublier Renée. Dès ce moment, j'ai appris que je pouvais oublier rapidement le départ de mes blondes. Il suffit de lui trouver quelqu'un pour la remplacer. Cette amitié a duré deux hivers. Ses parents ne devaient pas aimer la campagne puisqu'ils sont retournés en ville. Quand deux NONOS échangent leurs souvenirs hivernaux cela peut durer longtemps mais ce fut court. Elle ramène à mon esprit un événement malheureux alors que Jean avait noyé mon petit chien pendant qu'on était en train de peindre une porte avec de l'eau. Il a voulu laver le chien mais ce dernier n'a pas survécu au lavage. Il lui avait mis la tête dans le pot de peinture. Je ne pense pas qu'il va entrer au paradis si jamais la porte de ce dernier parvient à s'ouvrir. Je me retourne sur moi-même et heurte Jacques Rousseau un sempiternel voisin.

Cet ancien voisin de la rue Whitehead était devenu notre nouveau voisin sur la 7eAvenue. Monsieur Rousseau avait trois garçons, dont Jacques, qui, par la force de la naissance, avait mon âge. Il est évident que nous ne fûmes pas des compagnons de jeu dès le début. À l'âge de trois ans, nos parents ne nous laissaient pas sortir seuls pour aller jouer dans les champs. Mais plus on vieillissait, plus nos rencontres furent fréquentes et nos fréquentations quotidiennes. Ce fut mon plus grand ami jusqu'à l'âge de 16 ans. Jacques me reconnaît et me demande où j'étais passé pendant les 65 dernières années. Trop long à expliquer. Il est vrai que j'ai l'éternité devant moi mais mon agenda risque de se remplir de nouvelles rencontres. Je lui propose de lire mes Mémoires d'Outre-Cendres pour en apprendre plus sur ma vie. Heureusement, parce que tel que non prévu Jean Tessier se présente à moi.

Le départ de ma première fausse blonde m'a permis de jouer avec le nouvel occupant de la maison voisine. Les Tessier. J'étais content parce qu'il y avait deux enfants. Une fille qui ne m'intéressait pas. Elle était trop vieille. Sûrement huit ans. Mais son petit frère avait cinq ans, comme moi. Et surtout, il était plus petit que moi. Il l'a demeuré et fut surnommé Ti-Prout. Il fut le premier de mes amis à décéder d'une maladie rare à l'âge de 44 ans. Mme Tessier étant la plus grande amie et confidente de ma mère, elles ont pu se consoler de leurs maris respectifs qui buvaient et les battaient. Adolescent, j'ai pu apprécier la beauté de sa fille Claire. C'est elle qui m'a montré à danser. Mme Tessier, décédée à l'âge de 106 ans, vient me saluer. Elle vient à peine d'arriver. Je la quitte avant que son mari se présente. La famille Godin m'attend.

En 1950, on quitte la petite maison pour rejoindre le duplex construit par mon père. On va marcher sur la tête de la famille Godin. Mon père leur a loué le premier étage. De mémoire, six enfants tous plus vieux que moi y cohabitaient. Ils étaient assez vieux pour ne plus devoir aller faire des devoirs à l'école. Une exception, Lise, qui avait mon âge, ou presque. Elle ne viendra pas dans ma classe parce que c'est une fille et surtout parce qu'elle a un handicap : la trisomie. Dans mon temps on l'appelait la mongole. Alors on ne jouait pas ensemble. Sauf une fois où, profitant de l'abri de quelques arbustes dans le cimetière qui s'étend devant notre maison, elle m'a vu pisser puisqu'on ne pouvait entrer dans la maison quand maman faisait son lavage. Lise s'est rendu compte qu'il lui manquait un outil pour pisser aussi loin que moi. Curieux, j'ai vérifié. Effectivement, en plus d'être mongole, elle n'avait pas de pénis. Ce fut ma première découverte anatomique concernant le sexe adverse. Je cherche Lise mais en vain. Euh ! Pas vraiment cherché. En apercevant au loin les Boisvert, je me précipite pour retrouver leur fille Denise.

La famille Boisvert avait fait une entrée remarquable et remarquée parce qu'on avait lu dans le journal qu'elle venait de gagner une automobile lors du grand tirage de l'Exposition de Trois-Rivières. Trois filles et deux gars les accompagnaient. Je me suis rapidement pris d'amitié pour Jacques dans l'espoir que sa sœur Denise me remarque. Mon premier coup de cœur. Ma première déception. Je n'étais pas le seul gars qui avait les yeux sur elle, mais ses yeux à elle n'étaient pas sur moi. Aujourd'hui non plus. Sa MÈRE vient m'apprendre la triste vérité, Denise est toujours vivante. Il me faudra attendre avant de la revoir.

Un quartier qui a bercé mon adolescence d'illusions alors que j'errais d'aventures en aventures. Bien sûr, j'ai murmuré leurs noms. J'ai caressé leurs fronts et j'ai partagé leurs frissons, mais d'aventures en aventures, jamais je vous le jure, je ne me suis souvenu de leurs corps. Voilà ce que j'aurais chanté si j'avais été Serge Lama.

Mes aventures ont toujours été des mésaventures. Voilà pourquoi elles meublent mes oublis. J'étais un supernono de naissance. Mes trois premières aventures ont échoué avant même de sortir de mes pensées. Denise n'a jamais su que je la désirais, Nicole m'a fait éjaculer dans mon slip avant même que je sache ce qui se passait en moi et, une blind date d'un soir n'a pas vu qu'elle me plaisait à cause de sa cécité. Je n'ai pas insisté. Plus tard, j'ai eu beau insister auprès d'une épouse fidèle, elle est demeurée fidèle. Aujourd'hui, on m'aurait cité en justice pour du harcèlement. Une épouse infidèle a voulu se venger de son mari avec assurance, m'assurant que ce dernier vendait des assurances à l'extérieur de la ville. Coït interrompu. Je manquais d'assurance. Une de mes étudiants (adulte et consentante, je vous rassure) m'a attiré dans son lit à quelques reprises en pointant ses deux seins pigeonnants en ma direction et sous mes yeux avides de découvertes. Du moins jusqu'au moment où j'ai découvert qu'elle visait la maternité. Mon épouse n'aurait pas apprécié. Relation interrompue. Puis, quelques heures passées auprès de femmes esseulées, pour qui mon état d'ivresse faisait une cible facile. Pour sauver ma relation avec ma première femme, on a convenu d'une ouverture d'esprit et d'aventures partagées avec d'autres. Ce fut la fin des miennes et le début des siennes. Notre relation fut sauvée mais pas notre mariage. Je n'ai connu que trois autres aventures qui ne comptent pas en tant que telles puisqu'elles se sont terminées, soit par un mariage ou par du concubinage. Voilà les aventures

dont je ne voulais pas vous entretenir

Mélodie

Un beau vendredi où je venais de laver mon auto Mélodie. Oui, elle portait un nom. Elle était venue dans ma vie suite au décès prématuré de ma Honda Civic, lors d'un accident automobile. Je ne vous raconterai pas comment cela s'est déroulé, c'est trop commun.

- Il ne veut pas en faire la narration, parce qu'il a honte. Moi, Mélodie je vais vous dire ce qui s'est passé. Après avoir dépassé un cycliste qui roulait à vélo, il a frappé un camion stationné qui venait en sens inverse afin d'éviter un arbre qui voulait le frapper de plein front. Sa voiture a subi plusieurs dommages corporels. En sortant de sa voiture, il a prononcé quelques invectives à l'encontre de la conductrice du camion. Celle-ci semblait froissée, mais moins pourtant que la tôle de sa voiture. Un témoin, qui est arrivé sur les lieux de l'accident quelques minutes plus tard, a témoigné comme quoi il n'avait rien vu et rien entendu. Vous comprenez pourquoi il ne veut pas en parler.

Je viens de faire une visite éclair à St-Jean-D'Épîles pour voir Donald Trump revisiter sa coiffeuse Chiquita. Il menace le maire d'annexer son village ou de lui imposer des tarifs douaniers. Je suis heureux que ce dictateur ne fût pas assassiné lors de sa campagne électorale. Pas question qu'un tel NONO vienne tout contrôler dans l'au-delà.


Texte publié par Jenquet, 27 mai 2025 à 23h06
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tome 3, Chapitre 1 « DANS MON PARADIS » tome 3, Chapitre 1
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