MAUVAIS SOUVENIRS
Que de souffrances
Il y a longtemps, je me trouvais dans une salle d'hôpital, froide et impersonnelle. Ironiquement nommée salle d'urgence, tout s'y déroulait au ralenti. Même la patience s'impatientait. Je voyais les infirmières passer sans me voir, sans deviner mon état misérable, sans ressentir la panique que je cachais en fermant les yeux. L'odeur inhospitalière des couloirs envahissait mes narines et embrumait mon cerveau. Si, au moins, mon épouse avait pu se tenir à mes côtés. C'est dans un tel moment que j'avais besoin d'elle. Cela faisait plusieurs heures qu'on m'obligeait à tenir compagnie à cette chaise. Parfois je trichais. Je me levais péniblement, ankylosé et je marchais lentement ne faisant que les pas nécessaires pour ne pas me perdre dans cette salle des pas perdus. Et ce médecin qui ne venait pas. Il m'avait pourtant prévenu quelques mois auparavant. Ses prévisions s'avéraient justes. Il m'avait donné quelques mois à vivre en paix. Ma vie serait transformée. Finie ma liberté de mouvements. Je serais même contraint aux couches. Mes nuits seraient cauchemardesques. Le calendrier a retenu ce 4 novembre 1970 comme la fin de cette étape de ma vie. Il fallait me faire une raison. Une infirmière est enfin venue vers moi. Je me suis levé et l'ai suivie. Je suis entré, les jambes vacillantes, dans une salle surchauffée. Le verdict final est tombé au moment même où le bistouri accomplit son oeuvre. Je devins dès lors père pour la vie. C'est à cet instant que ma femme, enfin, est venue à mon secours : ses yeux étincelants et son sourire de nouvelle maman guérissant mon anxiété. Ma fille émit ses premiers pleurs et j'en fis autant. Un vrai conte de fée. Mais la sorcière n'en avait pas fini avec moi.
Cinquante-deux ans plus tard….. J'émerge d'une chambre d'hôpital en quittant ma fille. Je sens que je ne la reverrai plus. Ce matin, j'ai reçu un message laconique : "Mauvaise nouvelle, je suis à l'hôpital, on va me transférer aux soins palliatifs". J'accoure à son chevet en maudissant le cancer qui lui fait perdre son foie, moi qui n'ai plus la foi. Trois jours plus tard, ses souffrances disparaissent en même temps qu'elle. Les miennes commencent.
Chiquita sursauta en apprenant que j'avais eu une fille. Je ne lui en avais jamais parlé. Impossible pour moi de révéler ce pan de ma vie mais Chiquita a su délier ma langue lors d'une séance de massage assez olé-olé. Voilà pourquoi mes amis n'ont jamais rencontré ma fille.
Pas de fête aux Fêtes
J'ai voulu réfléchir face à un miroir pour constater que j'ai un œil qui diffère de l'autre, mais comment savoir lequel ? Je prends la résolution de ne plus jamais prendre de résolutions étant incapable de les tenir. J'ai aussi perdu toute influence. L'an dernier, j'avais souhaité à mes amis santé, bonheur et paix. Poutine en a profité pour lancer sa guerre, faisant le malheur de la planète pendant que la Covid s'introduisait dans le corps de mes amies. Finis les souhaits. Il faut que je termine mes décorations de Noël. Je viens d’entrer le sapin qui en profite pour dégager une bonne odeur des bois. Quelques boules avant que je pose mes guirlandes. J’admire mon œuvre au moment même où mes chats décident d’y apposer leurs pattes. Tout s’écrase. Je les enguirlande. Je remets le sapin debout et réinstalle les boules sauf une. Mes chats s’amusent avec la petite rouge. Je déteste le temps des Fêtes.
Le Jour de l'An constitue pour moi un jour à oublier dans mon calendrier. À quatre reprises ce jour m'a annoncé le départ d'une conjointe qui venait de compléter nos dix ans de vie commune pourtant sans trop d'embrouilles. Ce qui n'est pas commun. À chaque occasion, mes ex ont fait elles-mêmes leurs cartons, lustrant leur départ avec panache. Je les ai félicitées de me faciliter la tâche. Pas question qu'elles se morfondent en excuses. Je ne suis pas contre les excuses, je suis même prêt à en recevoir. Certains diraient qu'il vaut mieux s'en aller la tête basse que les pieds devant mais ils oublient ceux qui restent la tête haute et le cœur brisé.
Heureusement que j'ai des amies fidèles. Ce soir, on fête en grand. Je reçois Vénus, Chiquita et Hocquet au bistrot À la Pointe du Couteau. Malheureusement, Hermès ne brille pas par sa présence. Depuis son licenciement de la Dépêche on ne l'a pas revu. Sa sœur Vénus est inquiète.
Changement d'orientation pour Chiquita
Devant sa coiffeuse pour la centième fois, Chiquita réfléchit, tout comme son miroir. Fini le bordel et ses hommes à poil se dit-elle. Devenue anosmique suite à la Covid, je ne peux plus sentir leur présence. Le crâne poilu comme une boule de billard, Jenquet m'a lancé le défi de me muter en coiffeuse. Cette suggestion récente a germé pendant toute la nuit alors que j'avais vaincu un redoutable adversaire : Morphée.
Terminé le maquerellage pratiqué depuis mon adolescence. De toute façon, le poids des années et de mon corps me rendent moins attirante malgré mon teint d'albâtre et mes cheveux faussement blonds. Adieu mes yeux bleus grâce à mes lentilles cornéennes et retour à leur grisaille. Débarrassée de mes escarpins décolletés, je retrouve ma taille du réveil laissant découvrir mon mètre 57. Hors leur soutien-gorge, la seule attraction de mes seins est celle de la loi de Newton. Même les asperger de 10 centilitres d'eau glacée ne les ferait pas prendre de volume par turgescence.
Chiquita transforme donc La Poule Mouillée en un magnifique salon de coiffure pour hommes au nom évocateur : ''Au Raseur Rasé''. Elle se spécialisera dans les permanentes temporaires et à la coupe calvitie. Après un mois de transformations physiques, le local change d'âme. Une chaise hydraulique y a fait son lit au centre de la pièce bien éclairée par un fluorescent. Les lits ont été envoyés aux Disciples d'Emmaüs où ils furent accueillis par l'abbé Pierre, pas encore déchu. Pas de boisson pour les clients. Chiquita offrira du jus de légumes fait maison grâce à une centrifugeuse reconditionnée.
Grande ouverture ce mardi matin. Un premier client déboussolé s'y présente. Le curé du village, ignorant le changement de vocation de l'endroit, est bouleversé. Quelle excuse inventer pour se trouver en ce lieu ? Se fendant les cheveux en quatre, il se lance dans une diatribe sans queue ni tête. Il s'informe où se trouvent ces péripatéticiennes dont il venait régulièrement réconforter leur âme avec l'onction divine. Aucune réponse. Pas question pour Chiquita de révéler les adresses de ses ex-filles même à un futur saint. N'ayant pas le choix pour ne pas perdre la face, le curé tend sa tête aux bons soins de la coiffeuse. Chiquita s'initie dès lors à la coupe tonsure.
Quelques instants après le départ du membre du clergé, la porte du salon s'ouvre en ne faisant pas sonner la chevillette vu qu'il n'y en a pas encore. M. Labonté, maire du village et ancien client du bordel, rend visite à Chiquita afin de s'assurer qu'elle a bien affiché le permis municipal pour les rénovations. Il faut dire que le maire tient à cœur les finances de sa ville centenaire. Il en profite pour avertir la coiffeuse que son salon devra payer des taxes municipales alors que son bordel en était exempté. Une coupe de cheveux n'a pas la même importance pour le magistrat que les relations intimes dont il bénéficiait dans l'ancien commerce. Cependant, il tente d'obtenir une tonte gratuite mais refuse la coupe calvitie, spécialité du salon. Chiquita refuse et le taxe de profiteur.
Le soir venu, Chiquita me raconte sa journée n'osant croire que sa nouvelle passion du rasage de crâne peut centupler son bonheur. Quelle surprise pour Chiquita à son réveil de recevoir un appel de la société canadienne du cancer lui offrant le poste très convoité de coiffeuse attitrée au défi des têtes rasées pour Leucan. Comme quoi se spécialiser dans la coupe calvitie peut combler de joie une fille de joie. La réputation de la spécialiste de la calvitie et de son salon s'internationalise depuis qu'elle utilise les réseaux sociaux dont le fameux X. Ce matin, tout le quartier est cerné et c'est les yeux cernés que la célèbre coiffeuse apprend que des agents secrets américains vérifient si son salon est dangereux puisqu'il contient plusieurs bombes aérosols. Après une inspection approfondie même dans le soutien-gorge de Chiquita, la porte du salon apporte une bouffée d'air frais et un client particulier…
Donald Trompe fait une entrée discrète entouré de six gardes du corps armés jusqu'aux dents. Connaissant les penchants concupiscents de Donald, Chiquita l'avertit avec un anglais sans accent qu'elle ne se prostitue plus. Ce dernier la rassure en lui disant, qu'à son âge, il ne couche plus avec les femmes même avec la sienne. Chiquita n'ose croire sur parole cet innocent. Il explique qu'il a choisi son salon sous deux conditions : Chiquita ne devra pas dévoiler son grand secret et surtout qu'il a besoin d'une coupe particulière. Chiquita lui rétorque qu'elle se spécialise dans les coupes pour les chauves ce qui n'est évidemment pas le présent cas. Donald exige alors que ses gardes du corps se voilent les yeux et se tournent. D'un geste théâtral, il enlève sa moumoute orange. J'ai besoin que tu prennes soin de ma calvitie en prenant garde à la blessure à mon oreille droite, de dire l'ex et futur président. Aussitôt dit, aussitôt rasé. Un autoportrait avec le crâne présidentiel s'impose. Elle promet à Donald que la photo ne se retrouvera pas sur Facebook. Bon, le lendemain, elle la publie sur Instagram et ce n'est pas Donald qui pourra lui reprocher de lui avoir menti. Mentir à ce protégé de Dieu n'est pas indécent.
La vie continue dans le village abritant nos amis. Profitant de sa solitude, du manque de moyens financiers et de projets concrets, Jenquet a opté pour une séance de lecture à balconville tout en sirotant quelques centilitres d'un bon rosé sans alcool. Il déplore l'absence de son ami Hermès dont il n'a plus de nouvelles depuis des mois.
De nombreux itinérants, chassés de la capitale pour le plaisir des visiteurs, occupent illégalement le parc municipal. Chiquita y voit l'occasion d'offrir ses services bénévolement pour une clientèle qui n'a pas les moyens de s'offrir une coupe calvitie. On voit ainsi apparaître sur la devanture de son salon de coiffure un avis fluorescent et attirant : Coupe gratuite pour tous les itinérants sobres. Il lui faut trois jours d'attente avant qu'un SDF tente une sortie de sa tente.
À jeun, mais titubant par habitude, un homme à la barbe longue et à une chevelure abondante datant de plusieurs mois offre sa tête à couper. Chiquita le reçoit par un bonjour bien senti et le SDF s'assoie en baissant la tête, cheveux dans le visage. Aucune parole n'émerge de sa bouche. Chiquita s'arme de ciseaux, tondeuse, peigne et patience. Trente minutes de labeur pour mettre la tête à nue et quinze de plus pour faire disparaître la barbe. Si la coiffeuse avait pris la peine de regarder dans le miroir, elle aurait eu la surprise de sa vie. Sans pilosité faciale et le crâne dégarni, un timide merci jaillit de la bouche d'Hermès. Chômeur et sans le sou depuis six mois suite à son départ involontaire de La Dépêche, le pauvre hère erre d'une ville à l'autre. Il raconte à son amie que, sans travail, il a dû abandonner le petit logement de sa sœur ne pouvant défrayer sa part.
Les trois premières semaines, de raconter Hermès, je fus hébergé chez un copain qui était parti à Paris pour découvrir les Jeux Olympiques. À son retour, j'ai découvert les joies du camping dans les jardins publics. Les policiers m'ont délogé dès le lendemain matin. Devenu ainsi sans logement, j'ai tenté de quitter la ville en faisant de l'auto-stop. La nuit venue, j'ai profité de la protection de grands arbres velus protégeant quelques pierres tombales dans un petit cimetière pour roupiller auprès d'un grand-père retourné en poussière. Il m'a raconté qu'à chaque semaine, sa femme, grand-mère depuis cent ans, venait le visiter et lui déclamer son amour. Ma nuit se poursuivit alors que je rêvais… à mon futur : je me voyais en 2052 sous la férule du président Cramord, le petit-fils de Donald. Des pensées négatives m'envahirent alors que mon œil droit tentait d'émerger de son sommeil. Vivement, il me fallait jubjoter pour terminer mon rêve sur des pensées positives. Le hasard et l'obligation de me rafraîchir m'ont alors conduit sur une grande plage infestée de touristes. Quelques ablutions me revigorèrent. Je me suis essuyé avec une serviette de plage rouge qui traînait sur le sable. Fraîchement rafraîchi, j'ai rencontré sur cette plage une jeune femme à qui j'ai confié ma célébrité légendaire et surfaite comme journaliste. Celle-ci m'a confié vouloir devenir célèbre mais qu'aucun comité de lecture ne daignait donner l'aval à ses œuvres. Elle ne voulait pas abandonner son rêve. Cette rencontre fut déterminante pour moi. J'ai alors décidé de reprendre ma vie en main et de revenir dans mon patelin. J'étais mal luné de cette vie d'itinérance où ma vie faisait du surplace. Mes amis me manquaient. En pleine nuit, à la lumière d'une petite lanterne rouge, je fis mon baluchon en route vers un domicile fixe. En cours de route, j'ai croisé un caniche qui sortait de chez la coiffeuse. Il m'a regardé d'un air joyeux alors que ma chevelure sale et hirsute me faisait honte. Je suis arrivé à St-Jean-D'Épîles il y a trois jours. Tout ce temps pour me décider à franchir la porte de ton salon. Je me croyais encore au bordel de ma sœur où j'étais persona non grata. On n'a pas encore pardonné mes propos violents à une des filles.
Attristée par ce récit, Chiquita lui offre un jus fraîchement éjecté de sa centrifugeuse tout en lui conseillant d'aller voir Jenquet qui pourrait l'aider à se loger et lui trouver un emploi.
À peine Hermès sorti, une jeune femme entre au salon. Vénus !, de s'écrier Chiquita. Que fais-tu ici ? La nymphette au physique d'un adolescent, se jette dans les bras de son ex-maquerelle. J'en ai assez du travail du sexe. Je ne veux plus m'occuper d'aucun pénis turgescent commandé par un homme concupiscent. D'un air innocent et avec un accent de sincérité, elle offre à Chiquita de venir travailler dans son salon comme esthéticienne spécialisée dans l'épilation au rasoir et au fil. Mais pas question pour moi d'œuvrer comme Aphrodite : le torse nu. Ce serait indécent. Chiquita raconte à son amie Vénus le retour d'Hermès.
Revirements
Le soir venu, les quatre amis prennent un repas frugal. Vénus accueille de nouveau son frère sorti de l'itinérance et Chiquita a rejoint le rédacteur de La Dépêche lui suggérant de reprendre Hermès à son service. Une demande que ce dernier ne peut refuser s'il ne veut pas que ses anciennes visites au bordel soient révélées à la une de son journal. Une idée reprise au préalable par Francis Coppola pour son Don Corleone. Vénus, venue à la toute dernière heure dans le groupe, n'ose s'imposer. Elle est de nature réservée ce qu'elle avait réussi à cacher dans son ancien travail d'escorte.
Jenquet, à l'aube de ses 80 ans publie toujours ses mémoires profitant qu'il a encore toute sa mémoire, du moins le croit-il. Le rédacteur en chef de La Dépêche, M. Lecocq, a remis sa démission suite à un scandale sexuel appréhendé et un divorce certain. Sa femme, contrairement à Melania Trompe, n'accepterait pas ses infidélités répétées. Hocquet se voit confier le poste de rédacteur en chef du journal et son premier geste est de réembaucher Hermès aux chiens écrasés. Le salon Au Raseur Rasé comprend une clientèle internationale depuis que les quatre immigrants illégaux sud-américains que compte le village y trouvent refuge pour jouer aux échecs sans lassitude ni projets d'avenir. Finalement, Vénus attire les villageois qui refusent la coupe calvitie mais qui rêvent d'une épilation aux mains baladeuses de la jeune ex-prostituée.
L'été tire à sa fin. Les touristes reviennent à la maison obligeant des familles de fourmis à quitter leur garde-manger à queue leu-leu. La vie reprend à St-Jean-d'Épîles. La clientèle du Raseur Rasé connaît un regain de vie suite à un reportage dithyrambique de Hocquet. On se doute un peu que le passé de maquerelle avantage sa propriétaire puisque de nombreux ex-clients ont décidé de lui confier leur tête. Il serait injuste de les identifier car les épouses du chef pompier, du chef de police et du directeur d'école seraient mécontentes. Déjà que voir leur homme revenir à la maison sans pilosité crânienne sous leur couvre-chef sème le doute chez elles. On n'ose imaginer le tintamarre généré par les querelles domestiques qui en résulteraient.
On épile à St-Jean-D'Épîles
Un reportage de Hocquet souligne l'ajout du service d'esthétisme avec la venue de Vénus. On y précise qu'elle ne s'occupera que d'épilation au rasoir ou au fil à une clientèle masculine. Elle invite ses anciens clients du bordel à lui confier tous leurs membres poilus. Le patron de la compagnie Gilette en profite pour lui apporter son soutien en lui fournissant gratuitement des rasoirs Gilette Vénus en échange d'une épilation. Rita Baga, célèbre Drag Queen qu'on aurait pu voir dans la scène de la cène sur la Seine à peine saine lors des Jeux Olympiques, lui promet que ses amis lui confieront leur pilosité.
Tel que prévu dans le scénario, la reine des Drag Queen amène son corps à l'épilation. Vénus entreprend alors une carrière qui ne prendra fin que lorsque les hommes n'auront plus de poils. Voilà un métier où prime la sécurité d'emploi. Fidèle à son habitude, la future célèbre esthéticienne célèbre l'arrivée de ce premier client en lui demandant de se déshabiller. Ce dernier s'étend sur le dos après avoir enlevé un soutien gorge vide d'attributs. Il demande une épilation allant de sa pomme d'Adam jusqu'aux seins d'Ève. Pas question que ses profonds décolletés laissent entrevoir sa masculinité. Pendant que Vénus l'épile au fil de coton, le pauvre file un mauvais coton. Il raconte que ce matin, il a voulu se cuire un œuf mollet mais son ami l'a encerclé de ses bras dodus en voulant prendre son pied. L'œuf a trop cuit ce qui lui a fait une belle jambe. À ses dires, la partie de jambes en l'air qui s'ensuivit valait la peine, Venus peine à suivre le fil de ce dialogue à sens unique. Mais la devise du Raseur Rasé n'est-il pas : ''Vos secrets n'émergeront jamais de nos bouches'' ?
Terre d'accueil
Mon cher Hocquet,
Je prends le clavier pour t'écrire cette histoire que j'aimerais pouvoir lire dans ton journal. Notre communauté vient d'accueillir un immigrant vénézuélien, Luis Rodriguez, et il serait de bon ton d'en faire connaître l'histoire.
Un des amis de Luis a immigré clandestinement il y a un an au Québec. Il a constaté avec bonheur que St-Jean-d'Épîles accueille les immigrants sans racisme ni homophobie. Il a souvent invité son ami Luis, lui-même faisant partie des G parmi les LGBTQ+, à venir le rejoindre. Mais…
Luis est fiché par la police de Maracay dont l'unique priorité est la chasse aux gays avant celle des cartels de drogue jugés trop dangereux. On le soupçonne surtout du meurtre de sa mère décédée d'une mort naturelle avec deux aiguilles à tricot lui transperçant le cœur. Vivement un pays homophile ! L'Europe est attirante mais Luis n'y connaît personne. Il se rappelle alors de son ami Mauricio exilé clandestinement au Québec. Suite aux invitations répétées de son ami, il lui écrit un courrier dont j'ai obtenu copie.
Mon cher Mauricio, il y a des lunes que je n'ai pas eu de tes nouvelles mais quand tu as décidé de t'arracher à notre village pour rejoindre le Québec, tu semblais si heureux. Depuis que je suis jeune, je te voue une grande admiration. Tu te souviens du collier de perles que je t'avais donné, n'osant effleurer les sentiments que j'avais pour toi ? Te souviens-tu de ces moments où tu me laissais caresser tes longs cheveux caramel tenant à la main un bouquet de marguerites que je venais de t'offrir. Présentement, ma situation est désespérée. Les policiers me recherchent et je dois quitter précipitamment le pays. J'ai réussi à dérober la somme nécessaire pour te rejoindre. Si tout se déroule bien on se retrouvera bientôt.
Après avoir traversé la Colombie, le Panama, le Costa Rica, le Nicaragua, le Mexique et les États-Unis, Luis arriva dix-neuf heures plus tard à l'aéroport de Montréal. Mauricio l'y attendait ainsi que les agents de l'immigration qui acceptèrent sa demande d'asile en échange de quelques billets, évitant ainsi le chaos généré par l'afflux d'immigrants illégaux. Quatre heures plus tard, les copains arrivèrent à St-Jean-D'Épîles et furent accueillis par le maire et un comité de citoyens. Première opération : une visite chez la coiffeuse afin de débarrasser Luis de sa tignasse noire. Cet étranger, inconnu de Camus, a ainsi pris contact avec la coupe calvitie de Chiquita à qui il raconta la mort de sa mère assassinée par son fils unique après qu'il eut appris qu'elle était encore vierge. Chiquita lui avoua qu'elle-même possédait toujours sa virginité, particulièrement depuis qu'elle avait abandonné la prostitution. Évidemment, ces propos restèrent lettre morte vu que Luis ne parle pas encore français et que Chiquita no habla español.
Espérant que l'histoire de Luis trouvera écho dans La Dépêche.
Ton ami Jenquet
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