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Avoir une gueule adéquate.

Il est tard dans la nuit, la route est chiante, et je n'y vois pas grand chose car il pleut. Je prends bien soin d'éviter les grenouilles, et soudain un rond point, un képi, un geste de la main sans équivoque, je m'arrête.

A peine bonsoir en face, mais très poli.

-- La douane, Monsieur !

Tu parles, j'suis pas encore assez con, pour l'avoir pris pour le laitier...

-- Vous venez d'où ?

-- De chez un ami qui habite à quelques villages d’ici.

-- Et vous allez où ?

-- Je rentre chez moi, encore cinq kilomètres, et j’y serai.

-- Vous rentrez chez vous ?

-- Oui...

Envie de répondre, qu'est-ce que ça peut te foutre ?

-- Alors vous veniez de chez un ami, vous y faisiez quoi ?

-- Une lessive chez ce copain, dans le sac derrière sur la banquette.

-- Vous pouvez descendre, s'il vous plaît !

-- Bien entendu...

Et voilà "Képi" qui se glisse et s'installe à la place passager.

-- Vous faites quoi dans la vie ?

-- Je travaille dans l’artisanat d’art !

Et comme s'il avait tout vu sur ma gueule, la ballade commence.

Marlboro à moitié vide, on secoue, des fois qu'il en tombe pilule ou pétard. Second paquet, idem, sait-on jamais celui-là se sont des Royales, alors on gratte bien le fond et on vérifie si elles sont "mieux roulées".

Ensuite "Képi" déjà déçu, malaxe de ses "menottes" les deux sopalins crades, posés sur le tableau de bord, des fois que ce soit du buvard imbibé d'acide... Eh non ! J'ai simplement nettoyé le pare-brise avec l'un, et craché mes tripes dans des éternuements glaireux, deux minutes avant dans l'autre. Heureusement qu'il ne l'a pas snifé, pour voir s'il ne sentait pas le "shit"...

S'il savait le "bobo" dont je souffre, il foncerait se passer les mains à la flamme ou tout simplement aux chiottes, même s'il a de la chance que je sois guéri de mon hépatite, mais pas de ma gastro...

Puis vient la boîte à gants : sopalin, notice bagnole et cartes routières. Non, J'oublie : fond d'Extril qui aurait pu être un dérivé morphinique, mais n'est qu’un bain de bouche périmé... Hé oui, pour le "sexe" il faut quelques fois ça ! Et là sur l'autre siège une sorte de besace, mon sac. Voyons voir, peut-être que la chance est là...

Pas très poli tout ça, il pourrait demander la permission, j'espère ne pas y avoir oublié quelque chose de "trop gluant". Sensation désagréable de se faire éplucher ainsi. Et si moi je lui mettais tout de suite la main à la bite, il dirait quoi le "Képi" ? Hé oui, c'est profond et c'est le bordel, je me le dis chaque jour ! Heureusement sa torche l'aide à scruter.

-- Pas d'extasie ?

-- Non, ni pétard ni shit, ni extasie !

-- Et ces comprimés en vrac ?

-- Aspirine, enfin je crois, il doit y avoir l'emballage qui a dû péter !

Il en émiette un pour s'en assurer. Gros malin U.P.R devant Aspirine derrière !

Puis il ouvre mon agenda, et il lit certaines adresses au hasard, au lieu de me demander qui il veut joindre, je peux même lui filer une enveloppe... ou lui indiquer mon dernier bon coup, et les numéros de fax de mes meilleurs "dealer" !

Puis on tombe sur le pilulier "magique".

-- Lexomil ?

-- Oui Lexomil...

Bon plan lexo-bière... Un coup d’œil de ma part : mon sac est comme un sac de femme, oui mais quelle femme, une pute sûrement, capotes avec, Aspirine sans...

-- Vous fumez ?

-- Oui bien sûr que je fume !

-- Je veux dire herbe, shit ?

-- Non pas de shit, ou du moins pas d'ordinaire...

-- Ce truc, je crois que ça allait dans cette poche (loto et agenda) ?

-- Ca va, laissez !

Autre partie de mon sac et de ses mystères. Là, la torche intervient, eh oui c'est vaste chez moi... Espérons qu'il ne tombe pas sur du Bactrim ou des gélules d’antidépresseurs... En tout cas, l'emballage de mes capotes a lui aussi pété, y'en a partout. Heureusement que je n'ai pas de Poppers... Ce serait le pompon !

Il quitte enfin le siège de ma voiture, septique.

-- Vous pouvez vider vos poches sur le capot ?

-- Oui bien sûr, mais je crois qu'elles sont vides... Non, deux kleenex.

Il peut vérifier, et il vérifie... Pas terrible comme "peloteur" ! Je lui signale également, mes poches intérieures, vides elles aussi.

Pourquoi éprouve-t-il le besoin de me dire:

-- C'est bon, vous pouvez y aller...

Ce serait trop se fendre que de geindre un petit ? : "Je vous remercie Monsieur, de votre aimable participation, au revoir et bonne route". Moi je lui ai au moins dit "bonsoir Monsieur". C'est qui le gangster ? On peut me l'expliquer, au lieu de trouver toujours de bonnes excuses légales à cela...

Ca fait vraiment chier, alors je démarre, je roule en évitant les grenouilles, et râle un bon coup.

Rentré chez moi, je retrouve avec joie mes six chats qui m’attendent près de la cheminée, où je m’empresse d’allumer un petit feu, et après leur avoir fait un câlin, je me roule un joint pépère et bien mérité, et prends un Lexo... Puis je me demande tout de même, pourquoi il ne m'a pas mis en garde contre mon suicide annoncé à la clope, que me "deal" son Képi supérieur, ainsi que de la possibilité de me "shooter" avec ma dose de Lexo ?

Bizarre, cette double face de la légalité... J'espère qu'il ne tardera pas trop à se laver les mains, surtout s'il est fumeur, car la gastro, çà saute sur tout ce qui bouge... Douanier est un métier dangereux, face aux microbes, qui eux n'ont pas de frontière, et adorent se faire tripoter...

Puis une autre fois...

En traversant un parc.

Un soir, devant dîner dans un troquet, avec un copain, je gare ma voiture le long d'un parc Parisien, pour profiter un peu de du soleil couchant sur celui-ci, en le traversant…

Tout est verdoyant, et je m’arrête un instant pour admirer les cygnes sur le bord du lac.

Enfin, le square traversé, je me dirige vers le petit resto prévu, et y retrouve mon ami, présent à une table depuis un petit moment.

Nous passons ensemble un bout de soirée très agréable à refaire le monde comme d’habitude...

Et nous-nous séparons plus tard, en se promettant de re-dîner à nouveau, bientôt tous les deux.

La fin de la soirée est très agréable, car il a fait un temps superbe toute la journée. Un quart de lune éclaire le ciel, et même en bras de chemise, on se sent vraiment bien… Je dois retraverser le jardin pour reprendre ma voiture et rentrer chez moi.

Ce square, je le sais, même tard en soirée, est un endroit réputé pour la flânerie nocturne, les essaies musicaux de certains, mais également pour de la drague gay, qui n’y vas pas par quatre chemins…

Ce soir-là, n’étant pas dans ce trip-là, je me dépêche de remonter la pente de ce jardin, en évinçant de nombreuses propositions non équivoques…

Enfin près de ma voiture, ouvrant mon coffre pour reprendre mon blouson, soudain une voiture de police dérape près de moi, et quatre flics me tombent dessus brutalement, et me demandent ce que je fais là ? Je leur réponds que je m’apprête à rentrer chez moi, après une soirée passée au resto. Et comme ils m’ont vu sortir du square, et que ma réponse ne semble pas leur convenir, en "ni une ni deux" ils me chopent et me forcent brutalement à monter avec eux dans leur voiture, et démarrent en trombe, sirène à l’appui, prenant l’avenue qui descend le long du jardin…

Je leur dis qu’ils sont fous de rouler si vite, et leur demande de ralentir, sans obtenir la moindre réponse. Et après un virage sur les chapeaux de roues, la voiture entre dans le square, où stupéfait je constate qu’il y a, où ils se garent, déjà deux voitures de police, les pompiers et le SAMU…

Violemment, ils me sortent de la voiture, et me forcent avec eux à gravir un léger escalier, où effrayé j’aperçois le corps d’un homme allongé baignant dans son sang… Là ils me chopent par le col, et me forcent à approcher mon visage du pauvre type allongé… Je suis si près de lui que je sens sa chaleur, et quant il tourne sa tête vers moi, son regard bleu profond, mais hagard me glace, surtout avec les flics qui le questionnent avec des "c’est lui… est-ce-que c’est lui ?"...

Dans ma tête, tout fout le camps, le gars semble perdre connaissance, et je tremble à l’idée que dans son brouillard il réponde "oui"… Dans un dernier effort, il me re dévisage, d’un léger mouvement de la tête et murmure dans un souffle "non c’est pas lui"…

Les policiers me redressent, sans la moindre excuse pour leur rudesse, et redescendus avec moi, plus bas près de leur voiture, rédigent un procès verbal, et me disent de me présenter, dès le lendemain matin à huit heures, au bureau de leur commissariat, comme suspect numéro un…

Ils ne m’ont même pas raccompagné à ma voiture, que j’ai dû rejoindre à pied, complètement bouleversé par cette fin de soirée si bien commencée, et qui se terminait presque allongé sur un homme qui venait de se faire poignarder...

Le lendemain, présent au commissariat à l’heure convenue, je fût soumis à un interrogatoire intensif assez désagréable... Lorsqu’il se termina, j’ai demandé des nouvelles de ce garçon, on me dit "qu’après des soins intensifs, il était tiré d’affaire". Cela me rassura, et je me permis de poser la question "suis-je toujours le suspect numéro un ?". La réponse fût "Non… et vous pouvez disposer !".

Se rendait-il compte au juste de ce que ses collègues m’avaient fait vivre ? Je ne le pense pas, et je suis persuadé qu’il s’en fout !

Alors depuis, je me méfie de "l’eau qui dort", car si par hasard elle se mettait à bouillir, on pourrait d’aventure perdre bien plus, que ce que l’on imagine !

FIN.


Texte publié par Ecirtap Namdot, 29 avril 2025 à 00h49
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