Glossaire disponible dans le prologue
Cycle des Sphères
Année de la Huitième Sphère
Ronde du Reflux des Marées
Sima 4 - Évanée
Ella avançait parmi les ruines d’un ancien hôpital. Le manque d’entretien et les intempéries avaient ravagé l’endroit. La poussière et les feuilles s’infiltraient par les fenêtres brisées. Les affiches décollées étaient illisibles, les meubles renversés ou brisés. Difficile d’imaginer que ce lieu ait un jour accueilli des patients ou vu naître des enfants. Même le plafond menaçait de s’effondrer.
Chaque pas faisait craquer le sol, la faisant frissonner. Une étrange sensation de malaise l’envahissait. La lumière blafarde d’Évanée peinait à percer l’obscurité. Ella alluma sa lampe torche et suivit les panneaux effacés, guidée par la photo d’un plan prise dans le hall.
Elle se dirigea vers le service des soins palliatifs, là où la mort avait sans doute le plus marqué les murs. Elle grimpa un escalier étonnamment intact, bien que certaines marches soient à moitié brisées. L’ascension était risquée, mais elle ne ralentit pas. Elle devait s’assurer que l’objet qu’elle cherchait ne se cachait pas ici. Quitte à se blesser. En cas de besoin, elle pourrait toujours fuir sous une forme animale.
— J’ai mal… à l’aide… aidez-moi, j’ai mal… terriblement mal…
Une voix plaintive résonna alors qu’elle atteignait le deuxième étage. Elle s’arrêta, scrutant les alentours. Personne.
— Aide-moi… je suis tombée… j’ai mal…
Elle se dirigea prudemment vers un couloir. En se plaquant contre le mur, elle jeta un œil. Un esprit y errait, quémandant de l’aide pour une blessure invisible. Mais personne ne viendrait jamais.
Ella s’apprêta à faire demi-tour, puis s’arrêta. Si elle pouvait obtenir des informations, elle devait essayer.
— Qui… qui est là ? Vous venez m’aider ? J’ai si mal… je suis tombée…
— Je suis là pour t’aider.
Ella s’approcha lentement.
— Vous allez me soigner ?
— Non, je ne suis pas médecin. Mais je peux t’aider à quitter cet endroit.
— Je ne peux pas. Je suis blessée.
Elle s’arrêta à une distance sûre. Certains esprits pouvaient être dangereux, rongés par le ressentiment.
— Comment t’appelles-tu ?
— Liomina.
— Enchantée, Liomina. Je suis Ella Faureval.
— Toi aussi tu es blessée ?
Liomina la scruta, cherchant une blessure.
— Non. Je cherche quelque chose. Peut-être pourrais-tu m’aider ?
— Je ne peux pas… l’infirmière m’a dit qu’un médecin allait venir. Il arrive bientôt…
Sa voix vibrait d’un espoir fragile.
— Liomina, écoute-moi.
L’esprit se figea, attentif.
— Cet hôpital est abandonné depuis des Cycles. Aucun médecin ne viendra. Tu n’as plus ta place ici.
Des larmes silencieuses coulèrent sur le visage de Liomina.
— Tu n’es plus à Quenara. Tu fais partie de l’Éthéra maintenant.
L’esprit vacilla. La vérité s’insinuait doucement. Les murs autour d’elle se transformèrent, révélant leur état réel. Liomina hocha la tête, comprenant enfin qu’elle ne reviendrait pas parmi les vivants.
— Avant de partir pour Fénora, as-tu vu un miroir ancien, fissuré et imprégné de mort ?
Liomina resta silencieuse un moment.
— Non, rien de tel ici.
Ella ne put cacher sa déception. Elle avait espéré le trouver là, dans cet endroit chargé de souvenirs.
— Merci, Liomina.
— Sois en paix.
L’esprit ferma les yeux. Un léger sourire apparut sur son visage alors qu’une lumière douce l’enveloppait. Elle rejoignit Fénora.
Ella resta immobile, partagée entre la paix qu’elle avait offerte grâce à son pouvoir et la solitude qui l’envahissait. Son cœur était lourd. Suri était là, mais une distance persistait entre elles, un mur invisible qu’elle ne parvenait pas à franchir.
Ce vide en elle ne cessait de grandir. Elle le savait : il venait de sa malédiction. Pour qu’il cesse, elle devait le briser.
Elle reprit sa route à travers les décombres. En passant près des toilettes, un vieux miroir accroché de travers attira son regard. Elle y vit son reflet. Des mèches blanches parsemaient désormais ses cheveux violets. Elle les effleura, les larmes aux yeux.
Chaque interaction avec un esprit la rapprochait un peu plus de la fin. Sa magie avait un prix : sa vie.
Elle essuya ses larmes d’un geste vif. Elle connaissait les risques. Sa spécialité était un fardeau. C’est pour cela qu’elle s’était isolée, loin de Duléro, loin des esprits. Mais elle savait qu’un jour, elle devrait les rappeler. Et risquer sa vie.
Elle inspira profondément et quitta l’hôpital. Il était temps de chercher ailleurs. Le nord l’attendait, avec ses ruines anciennes qui, autrefois, servaient à préparer les morts avant leur enterrement.
Elle retira ses vêtements et se transforma en corbeau. Son sac entre les serres, elle s’envola. D’en haut, elle aperçut les îles, le bassin naturel, et Duléro, vaste et silencieuse. L’île principale, cœur battant de la ville, semblait paisible.
Ella survola les lieux, repéra les ruines d’un bâtiment et plongea. Elle se posa doucement, reprit sa forme humaine et fouilla les débris. Il ne restait que des pierres calcinées, du mobilier brisé, de la poussière.
Elle décida de se rendre dans un dernier endroit avant la tombée de Noxen : une mine à l’ouest, abandonnée depuis des Cycles à cause d’éboulements. Peut-être que le miroir s’y trouvait.
Elle inspecta chaque recoin, soulevant les pierres, fouillant les fissures. Rien. La nature avait tout recouvert.
Découragée, elle pensa au dernier lieu qu’elle redoutait le plus : le cimetière de Duléro. Rien qu’à y penser, son estomac se noua. Mais elle n’avait plus le choix.
La peur au ventre, elle s’envola de nouveau, prête à affronter le dernier vestige de cette quête.
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