Cette journée défile vite. Beaucoup trop vite. Alors que je désire en apprécier chaque minute, le temps s’amuse à s’égrainer sans que je ne puisse stopper sa course. Aujourd’hui, 13 février, marque mon dernier jour de travail avec Zayn. Comme une empotée, j’ai posé un jour de congé pour demain dans l’optique de préparer un repas surprise à Bastien, en omettant que ce serait le dernier jour de présence de mon ami. Je le regrette, j’aurais voulu gagner une journée supplémentaire avec mon cher collègue, néanmoins Zayn m’a priée de ne pas ôter mon RTT exprès pour lui. Cette décision l’aurait gêné et j’ai voulu respecter sa volonté. Pourtant, à mesure des heures qui s’écoulent à une vitesse normale, je maudis de ne pas avoir agi contre son gré. De plus, Bastien est d’humeur massacrante ces derniers jours et je ne pense pas que la perspective de manger mes fabuleuses pâtes carbonara l’adoucisse. De nombreux collègues d’autres services viennent voir Zayn et l’accaparent tout entier. Je désespère qu’on ne nous accorde pas un laps de temps tranquille ensemble, en souvenir de nos mois de travail à rire tous les deux de nos bêtises respectives. Et comme Zayn m’a avertie qu’il avait une course à effectuer après le boulot, je ne peux même pas compter sur notre trajet commun. Vers 16h30, j’entrevois enfin un créneau pour lui parler. Tandis qu’il se trouve dans notre salle d’archives attenante à notre bureau, je dégaine le paquet que je me suis évertuée à cacher dans mon meuble de rangement toute la journée.
— Zayn, l’appelé-je en me glissant dans la petite pièce, tu peux m’accorder une minute ?
— Tout ce que tu veux, accepte-t-il en se retournant vers moi.
Son corps tressaille quand il découvre mes bras chargés de cadeaux enrubannés de papiers multicolores. Son regard bleu océan, dont la profondeur m’a souvent subjuguée, brille d’un nouvel éclat.
— J’avais dit que je ne voulais rien, grogne-t-il gentiment en arborant malgré tout un sourire radieux.
— Depuis quand je t’écoute, petit morveux ? C’est moi la cheffe ici.
Je lui tire la langue, prouvant d’autant plus la stature bancale de ma position hiérarchique. Il s’esclaffant précisant :
— Plus pour longtemps.
À ces paroles, mon cœur subit un nouvel à-coup. Zayn a pourtant raison. Prendre conscience que tout va s’arrêter dans quelques minutes maintenant m’arrache quelques larmes, qui perlent toutes seules au coin de mes yeux. Heureusement que mon ami ouvre ses paquets et ne les distingue pas, trop absorbé. Je les essuie rapidement et me montre joyeuse malgré la tristesse qui m’étreint. Courageusement, je trouve la force de lui parler quand il découvre ses cadeaux.
— Le CD de Joe Dassin, j’explique, c’est en souvenir de notre dernier karaoké. Pour que tu n’oublies pas nos fous rires.
Pour que tu ne m’oublies pas, moi.
Mais je me retiens d’ajouter cette pensée. Je sais très bien que la distance nous éloignera malgré notre promesse de garder contact. Puis, je pointe le second présent.
— Et voici une box détente pour amoureux. J’espère que tu en profiteras bien avec ta chérie.
Je crois voir les mains de mon ami trembler quelques instants avant qu’il ne m’approche davantage.
— Merci énormément, Juliette. Ça me touche.
Il se baisse et dépose un baiser à moitié sur mon front, à moitié sur ma tempe gauche. Une décharge électrique me paralyse à ce contact. Tout mon corps frissonne, tandis que je lève la tête vers Zayn qui me dévisage avec une expression inconnue. Ses lèvres s’entrouvrent quand tout à coup, une voix s’élève depuis le bureau. Marine, la stagiaire d’à côté, me cherche. Elle débarque dans la pièce alors que Zayn et moi avons pris une distance respectable l’un de l’autre. Je parviens à peine à saisir ses questions, tant la douceur des lèvres de Zayn sur mon front s’imprime dans ma peau. Soudain, mon collègue nous salue :
— Bon, je vais devoir y aller, moi. Encore merci, Juliette, pour tes cadeaux. Je t’enverrai un message pour te raconter mes péripéties de déménagement. À demain, Marine.
Je lève ma main vers lui, bafouillant un au revoir auquel il me répond avec un grand sourire juste avant de s’éclipser. Marine n’attend pas et continue d’exposer son tracas. Je ne sais pas si mon explication la satisfait car au bout de quelques minutes, elle disparaît elle aussi en me remerciant. Je me retrouve subitement toute seule entre les étagères des archives. Je ne bouge pas, pétrifiée. Je ne comprends pas ce chamboulement qui m’envahit et me déstabilise avec force. Rien ne s’est déroulé comme je l’aurais voulu. Maintenant, Zayn est parti je ne le reverrai plus. À cette pensée, je m’effondre. Je m’assois par terre, les genoux repliés contre mon ventre et laisse déverser les larmes qui naissent dans mes yeux. Pourquoi suis-je donc si bouleversée ? Pourquoi mon cœur me fait-il autant souffrir ? Je devrais être contente pour mon ami, toutefois la douleur que je ressens au plus profond de moi m’en empêche. Tout à coup, j’entends des pas approcher. Je n’ai pas le temps ni le courage de me ressaisir quand je vois Zayn réapparaître dans l’encadrement de la porte. En me voyant assise par terre en train de pleurer, il se précipite vers moi. Il me prend dans ses bras lorsque je l’interroge :
— Pourquoi es-tu revenu ?
— Je ne sais pas, déclare-t-il. Et toi, pourquoi tu pleures ?
— Je ne sais pas non plus, rétorqué-je en tentant de reprendre mon souffle.
Mais tout en moi hurle le contraire, à tel point que je finis par m’écrier :
— Parce que tu vas me manquer, idiot ! Parce que je ne veux pas être séparée de toi. Parce que je ne sais pas pourquoi ça me déglingue autant que tu t’en ailles loin de moi.
Je voudrais en dire plus quand la bouche de Zayn recouvre la mienne. Je ressens sa fougue, malgré la délicatesse dont il fait preuve. Ses lèvres accaparent les miennes dans un flot de douceur auquel je réponds, avide. J’aime ce baiser, brûlant, passionné, j’aime son goût enivrant de mélange d’épices et de passion. Tout s’efface, je perds pied, je ne sais plus ce que ma raison me dicte, je ne veux plus rien ressentir d’autre. Hélas, notre baiser s’achève quand Zayn s’écarte légèrement.
— Je n’ai pas de copine, Juliette.
Son aveu claque dans l’air avant qu’il ne poursuive :
— J’ai donné ma démission car c’est trop dur pour moi de voir celle que j’aime en aimer un autre. Rester auprès d’elle est trop douloureux. J’ai trop mal, c’est insupportable. Seulement là, j’ai un énorme doute sur ses sentiments.
Son regard me transperce, tandis qu’il frôle ses doigts sur ma joue pour y déposer l’ébauche d’une caresse.
— J’ai besoin d’être sûr qu’elle soit heureuse sans moi, insiste-t-il dans un murmure.
Je me statufie, lisant la suite qui s’inscrit sur ses lèvres dont j’ai savouré l’empreinte il y a un instant. Déterminé, il décoche :
— Et que fait-on, maintenant ?
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