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10. L’évasion

La porte s’ouvrit à la volée, juste derrière nous. Mon intervention semblait avoir redonné du courage et un peu de vigueur à mon inconnu en détresse. Assez pour qu'il lançât un coup de pied bien placé dans le vantail afin de ralentir nos adversaires. Pas de temps à perdre ! Je le tirai de plus belle.

Arpentant les couloirs au hasard, j’essayais de me souvenir de l’endroit d’où je venais. Seul l’effet de surprise avait pu me permettre cette folie. Conserver cette légère avance représentait notre salut. Une autre porte s’ouvrit brusquement sur ma droite, m’obligeant à faire un écart.

Cette issue n’existait pas quelques secondes auparavant !

Tandis que je me hâtai pour poursuivre mon chemin, un bras puissant m’attrapa et me tira violemment vers l’intérieur, m’arrachant un cri de surprise. Mon compagnon d’évasion lâcha un juron, attiré avec moi. Le battant se referma et c’est avec stupeur que nous découvrîmes la personne qui avait stoppé notre course folle. Pétrifiée, je jaugeai l’étrange personnage. J’avais reconnu sa voix à travers en espionnant leur conversation. Dans quel camp est-il ?

Le Guide à la longue barbe nous observait, nous intimant le silence par une mimique, pressant son index sur ses lèvres. Il posa son autre main sur le mur et se concentra intensément. Derrière la parois, les ordres fusaient :

– Vous deux, par là ! On vérifie l’autre côté !

Des bruits précipités de pas, de nouvelles injonctions, puis le silence s’installa.

Pourquoi n’ont-ils pas essayé d’ouvrir cette porte ?

Le Guide nous incita à le suivre, son doigt toujours appuyé sur sa bouche. J’hésitai, jetant un regard à celui que je venais de tirer d'un bien mauvais pas. Il acquiesça de la tête. Alors, nous reprîmes silencieusement notre route vers l’inconnu, derrière celui qui nous avait menés en ce lieu terrifiant.

Le jeune homme tourna son visage vers moi et je lui souris. Je ne regrettais pas le moins du monde de l’avoir sorti de cette impasse. Qui sait ce qui lui serait arrivé, autrement ? De toute façon, je ne comptais pas rester prisonnière de ce château indéfiniment.

Cependant, le doute planait quant aux intentions de notre éclaireur. Pourquoi le Guide avait-il décidé de nous aider, finalement ? Par sympathie à l’égard de celle qu’ils avaient nommé l’Esprit ? Il n’avait pourtant pas émis d’avis lors de la discussion.

Qui sait comment il réagirait en sachant que je les ai épiés ?

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Depuis combien de temps marchions-nous ? J’avais l’impression de cheminer depuis une éternité. De toute façon, rien ne pouvait être pire que ce qui m’aurait attendu sans l’intervention de mon héroïne.

Comment m’a-t-elle retrouvé ? Pourquoi a-t-elle pris autant de risques pour m’aider ?

Ces questions me brûlaient les lèvres, mais le Guide n’ayant toujours pas ouvert la conversation, je me gardais bien de les poser. Exténué, je commençais à m’impatienter quand enfin notre Guide ouvrit la bouche :

– Nous y sommes.

Surprise, la jeune femme heurta le Guide qui s’était brusquement arrêté.

– P… Pardon… balbutia-t-elle, de manière presque inaudible.

Je pris les devants :

– C'est-à-dire… nous y sommes ?

Aucun indice n’indiquait de réels changements dans notre situation. L’obscurité régnait toujours, malgré une étrange luminescence du sol qui nous permettait de voir où on mettait les pieds.

– Ah, suis-je bête ! s’esclaffa le Guide.

Et nous fûmes éblouis par une lumière soudaine. Lorsque mes yeux s’accommodèrent, je les écarquillai. Devant nous s’étendait le paysage féerique d’une clairière caressée doucement par les rayons dorés du soleil au milieu d’une éblouissante forêt touffue. Il ne manque plus que la licorne et ce sera le comble !…

Soudain notre guide tourna la tête vers le tunnel duquel on arrivait.

– Fichtre ! Ils ont déjà compris… Ça a été plus rapide que ce que j’avais prévu, marmonna-t-il en tripotant nerveusement sa longue barbe.

De qui parle-t-il ?

– Il va falloir faire vite, je n’ai pas le temps de vous accompagner.

– Que se passe-t-il ?

– Pas l’temps de vous expliquer, faut que j’aille gagner du temps. Vous allez courir aussi vite que vous le pourrez en suivant à la lettre mes instructions…

Malgré mes difficultés à suivre ses explications, je n’osai pas l’interrompre. Je ne tenais pas à retourner devant mes bourreaux…