Pourquoi vous inscrire ?
«
»
tome 1, Chapitre 9 « La Main du Démon » tome 1, Chapitre 9

— Je l’ai prévenu que nous rentrions au plus vite… Je refuse de moisir ici plus longtemps que nécessaire.

— Es-tu certain que c’est ce que tu veux, Asaï ?

— De quoi parlez-vous ?

— Ce que tu as fait, tu es sûr que tu le souhaites vraiment ?

— Bien sûr ! Pour qui me prenez-vous ? Un faible ?!

Le cri arracha Daliah aux bras de Morphée. Elle se sentait faible et nauséeuse, son front était couvert d’une fine pellicule de sueur. C’était comme si elle se réveillait d’un affreux cauchemar. Elle sentait quelque chose de dur derrière son dos, et une douleur dans ses poignets, ses coudes, ses épaules et sa nuque. L’adolescente redressa lentement la tête en ouvrant péniblement les yeux. Elle vit deux silhouettes floues passer devant elle en faisant les cent pas, et un mouvement à côté d’elle attira son attention.

Elle se tourna légèrement, et lorsque sa vue eut repris en netteté, elle reconnut immédiatement la chevelure bleue d’Abyss. Il était presque livide, comme à deux doigts de vomir, mais il lui adressa un maigre sourire. Ses mains semblaient jointes dans son dos à l’aide d’une corde, et une autre l’attachait à un sapin derrière lui. En essayant de remuer les poignets, Daliah constata qu’il en était de même pour elle.

La nuit était déjà tombée depuis plusieurs heures, mais un feu de camp allumé à proximité les gardait au chaud. Une tente était dressée de l’autre côté. Ils étaient dans une petite clairière à l’abri des regards. Le sol était humide, signe qu’il avait plu durant les heures qu’elle avait passé assommée.

Elle reporta son attention sur les deux hommes qui continuaient de débattre à quelques mètres devant elle. L’un d’eux semblait avoir une bonne cinquantaine d’années, avec des cheveux noirs qui commençaient à grisonner sur les tempes, ainsi une moustache et une barbe poivre et sel. Son visage semblait soucieux, mais aussi assez ferme.

Face à lui se trouvait un jeune homme que l’apprentie reconnut immédiatement : leur client. Les traits de son visage étaient formellement identiques, mais ses cheveux étaient argentés et ses yeux avaient une intense couleur ambre.

— Tiens, tiens, les marmottes sont enfin réveillées… On va bientôt pouvoir partir…

— Ne devrais-tu pas prendre un peu de temps pour te reposer ? interrogea le plus âgé d’un ton raisonnable. Tu as passé la journée à voyager.

— Professeur Sawyer, avec tout le respect que je vous dois, je n’ai aucune envie de me reposer !! s’impatienta le cadet en hurlant à moitié. Les Arcanistes de la forteresse finiront par remarquer leur absence et partiront à leur recherche. Il faut mettre le plus de distance possible entre eux et nous.

Sawyer ? Ce serait son père ? Alors pourquoi l’appelle-t-il « professeur » ?

— Je vais vérifier qu’il n’y a rien dans les alentours, et si la voie est libre, on s’en va !

Le jeune homme s’éloigna dans la forêt, visiblement furieux, et disparut rapidement dans l’obscurité. Le quinquagénaire le regarda partir, avant de soupirer en secouant la tête.

Il partit quelques instants dans la tente de l’autre côté du feu, avant de revenir vers les deux apprentis, une de leur gourde dans la main. Il s’accroupit devant Abyss.

— Vous n’avez pas bu depuis plusieurs heures, souffla-t-il sans la moindre agressivité.

— Non merci, répliqua l’adolescent en le fixant avec méfiance.

L’homme le fixa un instant, avant de comprendre. Il lâcha un petit rire amusé.

— Je n’ai pas empoisonné votre eau, assura-t-il avec calme. Asaï ne se serait pas donné tout ce mal si c’était pour vous assassiner. S’il vous plaît, buvez un peu.

Le garçon finit par devoir admettre qu’il n’avait pas tort, et sa gorge était si sèche qu’il n’était pas contre un peu d’eau. Le professeur l’aida à boire, puis réitéra le geste pour Daliah. Il referma la gourde et la remit dans la tente, puis jeta un autre bout de bois dans le feu.

— C’est votre fils ? demanda finalement l’apprentie après quelques minutes de silence.

— Asaï ? Bien sûr que non, sourit le plus âgé en dissimulant un gloussement. Qu’est-ce qui vous a fait croire ça ?

— Quand il est venu à la forteresse, il s’est présenté sous le nom de Sawyer.

— Ah bon ? Eh bien, cela me flatte, mais je ne suis que son ensei…

Il ne termina même pas sa phrase, faisant un brusque bond en arrière, au moment où de petits rochers tombaient comme une pluie battante à l’endroit exact où il se tenait. Daliah leva la tête pour voir ce qui avait bien pu provoquer une douche de pierres.

Perchée sur un dernier rocher encore intact qui flottait dans les airs, se tenait une silhouette grande et mince, un Arcane bleu pâle brillant autour du poignet.

Immédiatement, elle sentit un poids se retirer de sa poitrine : un Maître était venu pour les sauver !

Bon, même si c’est Vallys…

Elle avait déjà vu son professeur utiliser les Arcanes, et elle en connaissait sa couleur caractéristique. D’un simple coup de pied, il projeta son roc en direction du quinquagénaire. Ce dernier l’esquiva à nouveau, avant qu’une ombre ne se jette sur lui pour le clouer contre un arbre, sa main serrée autour de sa gorge.

Cette fois, Daliah crut qu’elle allait pleurer de joie : Maître Lumenor était venu les chercher aussi !

Mais cette fois-ci, il ne semblait pas du tout sympathique ni même amical. Ce qui émanait de lui, c’était l’aura d’un combattant.

— Bon, qui est ce type ? interrogea Vallys en retournant sur la terre ferme.

Son collègue força Sawyer à se placer face au feu, dévoilant les traits de son visage. Et la réaction fut directe.

— VOUS ! s’exclama le noiraud avec un mélange de rage et une légère inquiétude.

— Recule !

Lumenor attrapa le col de son compagnon pour le tirer en arrière, au moment où une gerbe de flammes surgissait entre les deux belligérants. Leur adversaire avait un Arcane vert autour du poignet, et semblait tout aussi enclin qu’eux à se battre.

— Libère les enfants, souffla le blond à Vallys. Après, on se charge de lui !

Le concerné hocha la tête, et s’approcha de Daliah, qui était la plus proche. Il sortit un petit couteau de sa ceinture, et trancha rapidement ses liens.

— Partez d’ici, ordonna-t-il d’un ton vif en se précipitant vers Abyss pour le détacher à son tour. Fichez le camp, et courez sans vous retourner. Rentrez à la forteresse ! Traversez le bois derrière vous et reprenez la grande route.

— Mais… commença l’adolescent avant de se faire interrompre.

— Faites-le, nous vous rejoindrons quand nous en aurons terminé avec lui. Restez ensemble.

— Maître, il y a un deu…

— Pour l’amour du ciel, Abyss ! le coupa Vallys en le saisissant par les épaules. Pour une fois, obéissez.

Les deux adolescents hochèrent la tête, se levèrent, et après un dernier regard en arrière, ils partirent dans le bois derrière eux. Abyss attrapa la main de Daliah pour ne pas la perdre et ils coururent de longues minutes, entendant de temps en temps de grands craquements de branches derrière eux ou de petites explosions.

— Attends un peu… soupira la jeune fille en ralentissant pour s’arrêter un peu plus tard. Je ne me sens pas… super bien depuis mon réveil.

— Toi aussi ? s’étonna son ami. J’avais l’impression d’avoir fait un cauchemar horrible…

— C’est normal !

En voyant une botte à quelques dizaines de centimètres de la tête de l’adolescent, Daliah le tira en arrière. Ses doigts tracèrent un symbole rapide, avant de repousser le coup avec autant de violence qu’il n’était arrivé.

Asaï était revenu, et avait manifestement constaté leur fuite. Surpris par l’Arcane de l’apprentie, il ne se laissa pas déstabiliser pour autant et atterrit au sol quelques mètres plus loin.

— Le gaz que vous avez inhalé vous endort, mais provoque aussi chez certains de violents cauchemars. Mais il fallait bien ça pour t’attraper, petit démon !

— Si tu as un problème avec moi, rétorqua Abyss d’un ton glacial, ça valait bien la peine de nous mentir pour nous traîner ici ! Mon amie ne t’a rien demandé, mais il fallait que tu la mêles à ça.

— Détrompe-toi, je ne vous ai pas menti, et je comptais libérer ta petite amie dès que mon travail serait terminé.

— Je ne suis PAS sa petite amie ! protesta Daliah avec fureur. Qu’est-ce qui leur prend à tous ?!

— Comment ça, tu n’as pas menti ?

— Je rentre chez moi pour rapporter quelque chose. Et ce quelque chose, c’est toi !

Un Arcane apparut à son poignet si vite qu’ils ne le virent même pas le tracer. Des flammes surgirent devant les deux apprentis, qui reculèrent rapidement pour les éviter.

— On fait quoi ? On se barre ou on l’affronte ? interrogea la jeune fille sans savoir quelle option serait la meilleure.

— C’est toi la responsable, donc tu décides, s’amusa Abyss en haussant les épaules, avant de croiser son regard noir qui lui retira toute envie de plaisanter. Peu importe ce que tu choisis, je te suis.

Ils étaient deux contre un, et ce type devait avoir l’âge de Trent, mais sans avoir sa musculature.

— On se le fait !

— OK boss !

Tous deux tracèrent un Arcane de leurs doigts, pour qu’ils s’enroulent autour de leur poignet. Asaï les fixa d’un regard méprisant.

— Très bien, alors on va régler ça !

Abyss fut le premier à l’attaquer, un Arcane de renforcement prêt à causer des ravages. Mais son coup de poing rencontra le vide, son adversaire l’ayant esquivé presque trop facilement. Daliah tenta à son tour de l’atteindre, bondissant sur lui, mais elle parvint tout juste à l’effleurer du bout de doigt au niveau de la joue. Et la peau d’Asaï s’ouvrit à l’endroit où elle le toucha. Un filet de sang s’en écoula. Il passa simplement son pouce sur la blessure pour l’essuyer, sans remarquer que le garçon aux cheveux bleus arrivait dans son dos.

Mais il devait s’y attendre, car lorsque Abyss le plaqua contre un arbre, retenant ses poignets, il ne sourcilla même pas.

— Fais attention !

Au moment où l’apprentie criait son avertissement, de nouvelles flammes manquèrent de brûler le visage de l’adolescent. Avec un juron, ce dernier s’écarta, sans comprendre d’où elles pouvaient provenir étant donné qu’il l’avait immobilisé.

Il trouva rapidement une réponse : un autre Arcane ambre entourait sa botte au niveau de la cheville.

Il a l’air d’utiliser les mêmes techniques que Sawyer… On est mal parti, il esquive très bien, et comment a-t-il réussi à contrôler un Arcane avec un pied ?!

Réutilisant son Arcane de découpe, la jeune fille repartit à l’assaut, espérant au moins le toucher à la jambe pour l’immobiliser et garantir leur fuite. Son ami l’attaqua en même temps, pour maximiser leurs chances de l’atteindre.

Mais une détonation, suivie d’une onde de choc, les propulsa en arrière. Daliah roula sur plusieurs mètres en arrière, son visage s’éraflant sur les aiguilles des sapins, et Abyss se heurta à un tronc derrière lui, retombant au sol.

— Daliah… haleta le garçon en essuyant une traînée de sang sur son front. On va devoir prendre de la hauteur…

— Hein ? répliqua la jeune fille en le fixant d’un air sceptique, se redressant sur les coudes.

— OK, je reformule… Amène-moi au septième ciel.

— NAN, MAIS TU CROIS QUE C’EST LE MOMENT DE DIRE DES CONNERIES PAREILLES ?! s’indigna l’apprentie en devenant rouge jusqu’aux oreilles.

— Décidément, vous êtes pathétiques, soupira Asaï en secouant la tête, bien que cette nouvelle semblait davantage l’enrager. Pourquoi est-ce qu’il te reconnaît et pas moi ? Tu ne te rends pas compte de la chance que tu as ! J’ai fait tout ce trajet pour tomber sur un faible comme toi ? Alors pourquoi… POURQUOI IL NE RECONNAÎT PAS MA VALEUR !

— On va voir… qui est le plus faible…

De deux doigts, Abyss traça un signe qui n’était pas familier à sa camarade. Mais lorsqu’elle vit le fil doré s’enrouler autour de tout son bras, elle écarquilla les yeux.

Quand est-ce qu’il a appris ça ?

Le bras de l’adolescent se teinta de noir, comme s’il était recouvert d’une sorte d’armure sombre longée par des fils d’or. Ses doigts laissèrent apparaître des griffes effrayantes longues de plusieurs centimètres.

— Viens te frotter au démon, connard ! lâcha Abyss, les yeux brillants de rage.

Leur adversaire ne semblait plus aussi confiant, ayant reconnu la technique. Sa mâchoire se crispa d’agacement, alors que le garçon s’approchait de lui à grande vitesse. Asaï bondit en l’air à l’aide d’un renforcement, et se maintint en hauteur grâce à ses flammes.

Septième ciel… lévitation !

Daliah traça son Arcane à une vitesse folle, et l’utilisa sur son ami pour le propulser à la même auteur que l’ennemi. Ce dernier écarquilla les yeux en voyant la main griffue, et ne put que se prendre le coup de plein fouet. La puissance de la frappe le renvoya vers le sol à toute vitesse et il s’y écrasa brutalement avant de glisser sur un mètre, complètement assommé.

L’adolescente fit redescendre son camarade à terre, et à peine le touchait-il que son Arcane disparaissait, lui rendant son bras ordinaire. Il perdit l’équilibre, et la jeune fille le rattrapa dans ses bras pour accompagner sa descente jusqu’au sol.

Un craquement se fit entendre, et la silhouette de Sawyer apparut dans l’ombre. Comprenant que cela impliquait peut-être que les Maîtres avaient perdu, Daliah sentit son cœur s’accélérer dans sa poitrine. Elle serra Abyss contre elle, bien décidée à ne pas le laisser entre leurs mains. Mais le professeur ne la regarda qu’une seconde, avant de s’approcher du corps inanimé d’Asaï. Il le prit dans ses bras et disparut aussi vite qu’il était venu.

— Daliah !

— Maître ! JE SUIS LÀ !

En entendant la voix de Lumenor, elle se sentit revivre pour la seconde fois de la soirée. Le blond apparut entre deux troncs et se précipita vers elle, suivit par Vallys.

— Grâce au ciel, vous voilà ! soupira l’enseignant en examinant les quelques petites égratignures sur son visage. Pas trop de mal ? Est-ce qu’Abyss a été…

— Il n’est pas assommé, il est épuisé. Il a utilisé… la Main du Démon pour terminer le combat.

— Quoi ?! Mais qui lui a appris une technique pareille ?

Lumenor tourna la tête vers son collègue, le regard menaçant. Ce dernier haussa un sourcil surpris.

— Eh ! Ce n’est pas moi, je ne lui aurais jamais appris un truc pareil ! protesta-t-il d’un air outré.

— Peu importe, nous discuterons de tout cela à la forteresse, déclara l’Arcaniste en voyant les traits tirés de son élève.

Il passa un bras dans le dos de la jeune fille, et l’autre sous ses genoux pour la porter dans ses bras.

— M-Maître, je ne suis pas sûre que ce soit nécessaire…

— Daliah, repose-toi. S’il te plaît. Tu prends Abyss ? demanda-t-il à Vallys.

— Bien sûr, laisse-moi le légume, ronchonna le noiraud en le hissant sur son dos.

Lumenor échangea un sourire complice avec son apprentie : il n’arrêtait jamais de râler.

 

— Asaï, réveille-toi.

L’intéressé peina à ouvrir les yeux. Tout son visage le lançait d’une douleur horrible. Cependant à sa surprise, il ne tomba pas sur les yeux verts du professeur Sawyer. Mais sur deux iris bleu sombre qui le fixaient avec froideur. Une légère brise agita les cheveux noirs de la personne qui lui parlait.

— Père, je suis déso…

Nivalith l’interrompit brutalement d’une gifle en plein visage, faisant repartir la souffrance de plus belle. Il sembla ensuite essayer de se calmer, et prit son menton pour le redresser.

— C’est de ma faute, je t’ai laissé entre les mains de Sawyer… j’aurais dû laisser ton éducation entre les mains de quelqu’un de plus compétent… C’est de ma faute si tu es aussi faible…

— Je ne vous décevrai plus, je vous le promets ! assura le jeune homme avec précipitation.

— Avant toute chose, tu as besoin d’un médecin.

Un sourire diabolique fleurit sur le visage de Nivalith.

Ce garçon, je l’aurai.


Texte publié par Elysio Anemo, 15 mai 2025 à 16h49
© tous droits réservés.
«
»
tome 1, Chapitre 9 « La Main du Démon » tome 1, Chapitre 9
LeConteur.fr Qui sommes-nous ? Nous contacter Statistiques
Découvrir
Romans & nouvelles
Fanfictions & oneshot
Poèmes
Foire aux questions
Présentation & Mentions légales
Conditions Générales d'Utilisation
Partenaires
Nous contacter
Espace professionnels
Un bug à signaler ?
3134 histoires publiées
1378 membres inscrits
Notre membre le plus récent est P'titpapyrus
LeConteur.fr 2013-2025 © Tous droits réservés