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tome 1, Chapitre 5 tome 1, Chapitre 5

An 1694. Bristol, la propriété du Maître.

Le logement auquel avait fait allusion Catherine était en réalité une immense propriété. Edward mit quelques jours avant de comprendre de quel type de lieu il s'agissait. Toujours est-il que Maggie, soignée par Catherine et d'autres résidentes finit par guérir. Edward et sa mère disposaient d'un appartement à eux seuls dans ce grand complexe, à condition d'y apporter contribution.

Maggie était devenu la voyante de cette entreprise. Une activité illégale et dangereuse, mais moins que le travail de Catherine. Edward, lui était devenu le cuisinier de toute cette communauté, dirigée par un homme que tout le monde appelait ''Le Maître''.

Quatre années passèrent ainsi et Edward grandit. Il n'était plus un enfant. L'adolescent était plutôt grand pour son âge. Ses cheveux noirs de jais étaient toujours coupés au niveau de ses épaules, et il les attachait à l'arrière de sa nuque avec une lanière de cuire.

Mais les activités de l'adolescent ne se limitaient pas à la cuisine. Un jour, alors que le Maître avait demandé à Edward de lui apporter son repas directement dans son bureau, il s'était rendu compte que le garçon qu'il était encore pouvait lui être plus utile qu'il ne le pensait.

Le maître était assis devant une large table en ébène en compagnie de son comptable, Nigel. Ils étaient tous les deux plongés dans de gros registres, et entourés de pièces d'argent à compter. Par curiosité, Edward se pencha par dessus l'épaule de Nigel, et se rendit compte qu'une lettre manquait à l'un des mots qu'il venait de noter.

-C'est pas juste, ça, fit-il remarquer, désignant la page sur laquelle était inscrit une liste de biens.

Les deux hommes levèrent les yeux vers lui, le regardant avec curiosité.

-Qu'est-ce qui n'est pas juste ? demanda le maître.

-Il a oublié le ''t '' de ''cloths''.

Nigel reporta son attention sur ses notes, et instant plus tard glissa un ''t'' bancal à l'endroit où il aurait dû être inscrit.

-Tu sais écrire, gamin ? questionna le Maître.

-Oui, répondit Edward.

-Tu sais calculer ?

-Je me débrouille.

Le maître se tourna vers Nigel qui haussa les épaules.

-Je ne serais pas contre un peu d'aide, dit ce dernier.

Depuis ce jour-là, en plus de cuisinier et occasionnellement chasseur de rats, Edward était devenu aide-comptable.

Maggie disposait d'un lieu de travail un peu à l'écart des autres parties de la grande propriété. Il s'agissait d'une petite pièce tout au bord du bâtiment principal qui s'ouvrait sur la rue. Sa clientèle se composait principalement de jeunes femmes à la recherche soit du grand amour, soit d'un potentiel futur mari assez riche. Maggie leur offrait du rêve tout en instillant une part de doute en elles. De ce fait, elles revenaient souvent. La pièce dans laquelle elle passait la journée n'avait pas de fenêtre et n'était que faiblement éclairée. Des draps de couleurs chaudes couvraient les murs, des étagères chargées d'objets ésotériques donnaient un air mystique au lieu. Une table ronde, nappée de soie rouge et or sur laquelle trônait une incontournable boule de cristal, complétait ce décors. Maggie elle-même était vêtue de manière à correspondre à son rôle. Elle portait une robe gitane aux tons orangés, une multitude de bracelets d'or ornaient ses bras, des fils d'or étaient noués dans ses cheveux et de lourdes et longues boucles d'oreilles pendaient jusqu'à ses épaules. Elle portait au bout d'un ruban noir un médaillon sur lequel étaient gravés des signes à la signification inconnu.

Le plus important était d'être convaincante.

Edward, lui, trouvait sa mère très belle comme ça.

Mais il n'était pas bête, il savait qu'en travaillant pour le maître elle n'allait pas seulement prédire de faux avenirs aux jeunes gens en quête de richesse ou d'amour.

L'activité principale du domaine était tout autre. Et pour l'instant, Maggie était plutôt chanceuse de se contenter de jouer le rôle de ''Maria, la médium''. Malgré tout, ils disposaient en échange du travail rendu, d'un logement, d'un salaire, et d'une liberté absolue. S'ils voulaient partir, ils le pouvaient ; personne ne les retiendrait. Et cela faisait quatre ans qu'ils étaient ici.

Pourtant les choses n'étaient pas toujours aussi simples qu'elles le paraissaient. Quand on vivait dans la maison du Maître, on se faisait reconnaître. Car cet homme, malgré ses activités illégales avait une certaine influence en ville. Tout le monde savait qui il était, ainsi qu'une bonne partie de ses employés. Alors quand Edward sortait des fois pour acheter du poisson sur le marché du port, il n'était pas rare de voir des passants le regarder avec mépris. Mais il s'y était habitué. Et puis, il avait vécu pire. Toutefois, certaines personnes ne se privaient pas pour aller plus loin.

-Eh ! C'est le gamin des putes ! avait-il déjà entendu.

Souvent de jeunes hommes traînant non loin du port l'insultaient et essayaient de le provoquer. Cependant, il parvenait toujours à garder son calme et les ignorait. Jusqu'au jour où les choses s'étaient sensiblement aggravées.

Injurier certaines personnes travaillant pour le Maître n'était presque jamais compliqué. Quand on savait avec lesquels on pouvait se permettre de telles grossièretés. Par contre, il valait mieux se garder de contrarier ses gardes du corps ou hommes de mains. Mais en général, les gens identifiaient ces derniers. Sinon, il n'était pas rare qu'un individu un peu trop téméraire ne disparaisse s'il s'était risqué à ce jeu.

Quelqu'un comme Edward, ne semblant avoir aucune importance pour qui que ce soit, et encore assez jeune pour qu'on le pense sans défense, était une cible de choix pour ceux qui n'avait pas encore insulter leur compte de moins que rien de la journée.

Ils étaient quatre, et très probablement tous un peu plus âgés que lui. Ils l'encerclaient alors qu'il tournait à l'angle d'une rue près du port. Il avait comprit à la seconde où il les avait aperçu qu'ils allaient lui causer des ennuis.

Au départ, il poursuivit son chemin comme si de rien n'était, tout en se rapprochant progressivement d'eux, espérant que finalement, ils ne décident de le laisser passer.

Malheureusement, deux d’entre eux se postèrent face à lui, lui barrant la route, et deux autres se mirent derrière lui. Il était bloqué, et allait être obligé de forcer le passage pour rentrer.

-Alors, c'est toi le gamin qui travaille pour Andrew Hill ? fit l'un d'entre eux.

Edward ne répondit pas et posa son panier de course par terre contre le mur d'une des maisons.

Il ne put empêcher un léger sourire d'élargir ses lèvres ; ils le traitaient de gamin, alors qu'il n'était plus jeune peut-être que d'un ou deux ans. Mais leur condition sociale plus avantageuse leur donnait l'impression qu'ils pouvaient l’infantiliser.

La vie d'Edward était devenue plus agréable les dernières années ; il mangeait à sa faim, ne se faisait pas battre, et avait des vêtements à sa taille qui n'étaient ni déchirés ni troués. Et par dessus tout, il était logé et payé.

Ceux qui l'avaient interpellé, par contre, portaient des vêtements de meilleurs factures, des vêtements propres qu'ils n'avaient que rarement porté. Leurs chaussures étaient en meilleur état, et leurs cheveux étaient attachés par des rubans de soie.

Pour eux, il n'était clairement qu'un individu né pour leur servir de souffre douleur, un simple faire valoir, il n'était nécessaire que pour qu'eux ne se sentent encore plus importants.

L'adolescent allait très probablement continuer à travailler pour un criminel le reste de sa vie, tandis qu'eux, seront engagés dans la marine en tant qu'officiers, si ce n'était pas déjà pas le cas.

-On t'a posé une question ! s'impatienta l'un des comparses.

Edward soupira. Il n'avait vraiment pas le temps pour ces bêtises. Il devait préparer un repas pour une vingtaine de personnes, arracher les mauvaises herbes dans le potager à l'arrière du complexe, aider Nigel à la comptabilité, vérifier ses pièges à ras, faire le ménage, et ainsi de suite. Son programme ne prévoyait pas de rencontre diplomatique désastreuse avec des héritiers trop imbus d'eux-mêmes.

-Oui, je travaille pour le Maître, répondit-il finalement.

-Le Maître ? Pourquoi l'appelez-vous tous comme ça ?

-Qu'est-ce que tu crois, dit un autre ; ils ne valent pas plus que des esclaves, c'est pour ça qu'ils l'appellent ''Maître''.

-Nous l'appelons ''Maître'' aussi bien que des fois, nous l'appelons ''patron'', leur expliqua calmement Edward. Nous ne sommes pas des esclaves ; nous pouvons partir quand nous voulons. Nous sommes ses employés.

-Ses employés ? Tous ceux qui travaillent pour lui sont soit des putes, soit des assassins à sa solde, railla le premier.

-Oui, confirma un de ses amis. Et toi ? Lequel des deux es-tu ?

Edward retint un rire. Il savait qu'ils essayaient de le provoquer, mais ce genre de remarques ne l'atteignait plus depuis longtemps.

Les quatre jeunes homme eux par contre, rigolaient moqueusement. Ils ne s'attendaient pas à ce qu'il réponde.

-Oh, dit-il pensivement, un peu des deux.

Ils se turent interrompant leurs rires, et le regardèrent avec de gros yeux.

-Tu veux dire … commença l'un d'entre eux, que tu es …

-Un assassin, compléta un autre abasourdi.

Cette fois Edward leur montra clairement son sourire. Il ne saurait dire, exactement s'ils étaient apeurés ou émerveillés. Leur vie, jusqu'ici, avaient été bien plus tranquille que la sienne, et ils ne se rendaient sans-doute même pas assez compte des dangers qui pouvaient les guetter. Ils étaient persuadés qu'il y allait toujours y avoir quelqu'un pour les sauver si jamais ils devaient se retrouver dans une situation périlleuse.

-N'importe quoi ! s'exclama le seule membre du groupe qui n'avait pas encore prit la parole. Vous ne voyez pas qu'il se fout complètement de nous !

Edward remarqua que celui-ci était légèrement différent des trois autres jeunes hommes. Ces vêtements étaient plus simples ; ils semblaient être fabriqués pour offrir du confort plutôt que pour faire étalage d'une certaine richesse. Ses cheveux blonds étaient coupés courts, et contrairement aux autres, qui cherchaient à s'amuser, il semblait s'ennuyer.

-Bon, sinon, s'impatienta Edward, vous me laissez passer ?

-Non, fit le premier, probablement le leader et le membre le plus âgé de ce petit groupe. Des parasites comme toi, il y en a trop. On ne peut pas vous laisser circuler aussi facilement.

-Oh ! s'exclama Edward comme s'il venait de comprendre quelque chose. Vous êtes donc là pour aider les honnêtes gens !

-La simple vue d'un individu de ton espèce est dérangeante ! cracha le meneur.

-Ah, je suis désolée d'exister, fit Edward toujours aussi peu sérieusement. Et maintenant quoi ? Est-ce qu'on va rester ici dans cette rue à se regarder sans bouger jusqu'à la fin des temps ?

Trois membres du groupe ricanèrent.

-N'espère pas échapper à ta sentence aussi facilement, reprit l’aîné.

-Une sentence ? Quoi, vous êtes juges aussi ?

-Ah ! Il m’énerve ! s’exclama l'un des autres.

Ce dernier se précipita vers l'adolescent, dévoilant un lourd marteau en fer qu'il cachait dans son dos.

Edward écarquilla les yeux avant d'esquiver. Il se retrouva dos à dos avec son agresseur dont l'arme fendit le vide. Ils se retournèrent tous les deux, se faisant face à nouveau.

Pour l'instant, Edward avait de la chance que les trois acolytes n'attaquent pas non plus. À quatre contre un, il avait très peu de chances de s'en sortir.

-Sérieusement, vous ne voulez pas juste laisser tomber ? demanda-t-il.

Le jeune homme au marteau grogna en attaquant à nouveau. Edward resta dans sa trajectoire jusqu'au dernier moment avant de s'écarter. À cause de l'élan qu'il avait prit, son adversaire trébucha et se rattrapa de justesse en prenant appuis sur le mur d'une maison attenante.

-Arrête de fuir, marmonna-t-il, et bats-toi !

-Je suis non armé, lui rappela Edward, et vous êtes quatre.

-Tu m'énerve Jonathan ; tu ne sais pas te battre ! râla l'un des amis de son adversaire.

Ils étaient maintenant deux à lui faire face ; l'un avec un marteau, l'autre avec une hachette.

Edward soupira. Ça allait être plus compliqué que prévu.

Ils l'attaquèrent en même temps en venant du même côté ce qui laissait à Edward largement la place pour esquiver à nouveau. Si des personnes comme eux rejoignaient la marine en tant qu'officier, c'est que cela ne devait pas être si compliqué d'être enrôlé. Mais les hommes de bonnes famille étaient souvent favorisés. Ils étaient officiers mais pas forcément des combattants.

Durant quelques minutes, aucun des deux ne parvint à toucher Edward ce qui les exaspéra. Il vit sur leurs visages la frustration qu'il provoquait en eux.

Finalement, le premier à avoir parlé se joint également à eux. Ce dernier dégaina un poignard.

« Oh, c'est pas vrai ! » se dit Edward. Cette fois, s'il s'en sortait, cela tiendrait du miracle.

Ils s’approchèrent tous les trois de lui ; et l'adolescent se rendit compte qu'en faisant cela, ils ne lui bloquaient plus le passage. Il ne restait plus qu'un obstacle à franchir pour qu'il puisse leur échapper.

D'un côté de la rue, il était face à trois agresseurs, de l'autre, il n'y en avait qu'un, qui pour l'instant n'avait pas bougé.

Normalement, le choix le plus logique serait de tenter sa chance en essayant de battre celui-ci. Mais s'il le faisait et qu'il n'était pas assez rapide, les trois rejoindrait le combat, et il se retrouverait en grand danger à ce moment-là. D'autant plus qu'il ne savait pas de quoi était capable ce jeune homme. Il ne savait pas non plus quelle arme il cachait. S'il avait face à lui déjà un marteau, une hachette et un poignard, qu'est-ce qu'il restait ? Une épée ? Un pistolet ?

En réalité, aucunes des deux options ne lui semblaient favorable à l'autre.

Finalement, la dernière solution revenait à se battre à un contre trois en espérant que le quatrième ne les rejoignent pas. Et il allait devoir être rapide.

Alors que cette fois, ces adversaires se rapprochaient plus lentement de lui, Edward lui, se mit à courir vers eux, se dirigeant droit sur celui avec la hachette, c'est celui qui lui semblait être le plus dangereux.

Le voyant foncer sur eux, les trois jeunes bourgeois hésitèrent, ce qui en fit arrêter un, et ralentir les deux autres. Edward en profita pour tenter d'empoigner le bras qui tenait la hachette. Mais les deux autres combattant les contournèrent et tentèrent de le toucher dans le dos, il lâcha le bras qu'il tenait, et se baissa. Le marteau et le poignard fendirent l'air sans le toucher. Mais la joue gauche du manieur de hache était maintenant éraflée.

-Tu vas me le payer ! gronda celui-ci en se précipitant seul vers Edward.

Alors que son adversaire tenta de lui porter un coup venant du haut, Edward mit ses bras en avant dans l'espoir d'arrêter le mouvement et de s'emparer de l'arme qu'il redoutait tant. L'arme descendait vers lui, sa tête était directement visée, il fit un léger pas sur le côté, l'arme le frôla, mais ne fit pas de dégâts. Il saisit à nouveau de toutes ses forces les poignets de son adversaire, les tordant.

Un grognement sortit de sa bouche, tant il y mettait d'effort. Il vit son adversaire serrer des dents en lui résistant. Il devait faire vite, les deux autres attaquaient déjà. Il fallait qu'il réussisse au moins, le plus rapidement possible, à en désarmer un.

Finalement, l'arme tomba à terre, Edward lâcha son adversaire qui serrait ses poignets blessés sur son ventre, et se saisi de l'arme. Il en utilisa le manche pour assommer son ancien propriétaire.

Son prochain adversaire le plus proche était celui avec le poignard, il l'esquiva en plongeant sur sa droite, et se mit à genou, il planta la partie tranchante de la petite hache dans la cuisse de ce dernier qui hurla de douleur. L'homme au marteau, lui en voyant avec quelle rapidité il avait défait ses amis, cessa son attaque, recula avant de se retourner et partit en courant.

Il n'en restait donc plus qu'un.


Texte publié par Daisy Lin T, 12 mai 2025 à 21h14
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