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Shayn grimaça en pliant les doigts. Il termina d’étaler la crème fournie par Illyane et entoura sa main d’un bandage propre. Trevor, au commande du petit vaisseau, y jeta un coup et eut un rictus.

— Ce n’est pas très beau.

— Ce n’était que cinq-cents volts. Si j’avais pris la décharge directement, je serais un tas de poussière.

Le scientifique se pencha et rangea son matériel dans son sac. A travers la baie vitrée du petit engin, la planète autour de laquelle la station était en orbite paraissait immense. Il se concentra sur l’écran holographique qui ondulait au-dessus de la verrière. Une représentation schématique de l’espace proche y était affichée ; un courbe rouge indiquant leur trajectoire la traversait.

— On ne devrait pas tarder à le voir, murmura-t-il.

— Pourquoi tu ne me l’as pas dit ?

— Quoi ?

— Que tu étais blessé.

— Je n’avais pas le temps. J’étais un peu pressé.

— Je veux dire : après ?

Shayn soupira et se massa les tempes.

— Tu avais l’air pressé de rejoindre tes hommes et j’avais encore des choses à faire.

— Et tu voulais ruminer dans ton coin comme un animal blessé.

Shayn lui jeta un regard en coin. L’irritation face à l’air suffisant du commandant s’intensifia. Trevor avait le don de l’agacer prodigieusement, sans doute parce qu’il savait appuyer là où cela faisait mal. Il se sentait maladroit près de lui depuis la révélation. Il ne regrettait pas d’avoir tenter de mener à bien sa mission : l’artefact que la corporation avait volé était important pour les Universités Galactiques ; le Cosmologue savait qu’ils n’en feraient pas une bonne utilisation. Pourtant, il n’avait rien contre les hommes et femmes avec qui il avait travaillé pendant cinq ans. Et surtout pas Trevor.

— Tu me connais si bien, railla le scientifique, revêtant son armure de sarcasme encore une fois.

Une alerte sonore empêcha Trevor de répliquer. Un point lumineux grandit devant eux au fur et à mesure qu’ils s’approchaient.

— Mille kilomètres.

Trevor abaissa la puissance des moteurs principaux, utilisa les réacteurs de position pour faire faire demi-tour à la navette et surveilla attentivement les indicateurs.

Shayn activa sa tablette et essaya de se connecter au satellite.

— Ne le percute pas, fit-il remarquer distraitement.

Trevor grogna avec irritation, mais ne fit aucun commentaire. Le scientifique fronça les sourcils et émit un petit sifflement.

— Quoi ?

— C’est une technologie humaine…

— Qu’est-ce que tu racontes ? Nous sommes les premiers humains à venir ici …

— Le scan est très clair. Cela va nous simplifier le travail.

— On arrive sur lui.

— Agrippe-le, qu’on l’emmène avec nous faire un tour.

Trevor mit en route le bras articulé, qui descendit sous le ventre du vaisseau, il tapa une commande et l’ordinateur de bord le guida jusqu’au satellite qui flottait de manière synchrone avec eux, à vingt mille kilomètres heures. Une vibration sourd se réverbéra dans la carlingue.

Le commandant se laissa aller dans son fauteuil et lâche les commandes.

— C’est bon. On est en orbite.

Shayn grogna son acquiescement, concentré sur son écran.

— C’est bien du matériel humain, vieux d’une centaine d’années. Il parait en veille. Peut-être que …

— Tu crois que des colons se seraient installés sur la planète ?

Son compagnon haussa les épaules, concentré sur sa tâche. Trevor reporta son regard sur la planète, perle brune, verte et bleue qui remplissait l’horizon à plusieurs milliers de kilomètres de distance. Une sonnerie retentit et Shayn poussa un petit cri de victoire. D’un geste de la main droite, il déplaça une image de sa tablette sur l’écran holographique. L’une des caméras de la coque montra le satellite qui s’illuminait de leds colorées.

— Le générateur fonctionne toujours. C’est étrange ?

— Quoi ?

— On dirait que ce satellite a été désactivé.

— Il n’aurait pas dû tomber ?

— La stabilisation de l’orbite est un système automatique.

Shayn posa un regard stupéfait sur la planète, puis reporta son attention sur son interface. Trevor eut l’impression très claire qu’il venait de comprendre quelque chose.

— Shayn, soupira Trevor.

Le scientifique l’ignora. Le commandant décida de le laisser tranquille pour l’instant. Il finirait bien par lui avouer ce qu’il avait découvert.

— Je réactive les systèmes. Je vais faire une mise à jour de son environnement et on devrait pouvoir l’utiliser.

Le silence s’étendit entre eux.

— On a exploré cette planète. On n’a rien trouvé à part de la végétation et des animaux ?

— On n’a pas visité grand-chose. Ce n’était pas le but de la mission. La corpo n’a jamais accepté d’écouter les plaintes des xenobiologistes à ce sujet.

— Le satellite a une centaine d’années, Trevor.

— Ok. Peut-être que des colons humains se sont installés ici, ou des pirates même. Mais clairement, il n’y a plus personne.

— Il devrait y avoir une trace. Un vaisseau capable d’arriver jusqu’ici depuis les plus proches systèmes habités serait extrêmement sophistiqué.

Une sonnerie retentit à nouveau. Shayn tapa une commande et redémarra le système.

— Quitte ou double, souffla-t-il.

Trevor resta silencieux, le regard perdu sur la planète sauvage. Il ne pouvait nier que la présence de cette technologie humaine ici l’intriguait. D’après les informations qu’on leur avait donné, c’était un système inhabité depuis des milliers d’années et seul le portail permettait d’y accéder.

— Il y a peut-être un portail sur la planète.

— Ceci n’explique pas la présence du satellite.

— On a bien fait venir notre navette en pièce détachée.

— Pas faux, répondit distraitement Shayn, le regard rivé sur sa tablette.

Sur l’écran holographique, les lumières du satellite se mirent à clignoter vivement, puis se stabilisèrent.

— Tout a l’air de fonctionner. La satellite a accroché le relais interplanétaire le plus proche. Et il capte notre relais à nous. On peut le lâcher.

— Bravo, génie, railla Trevor.

Un sourire en coin apparut sur le visage du scientifique. Le bras se détacha du satellite et se rétracta. Shayn essaya d’y connecter l’antenne de communication directionnelle de la navette. De longues minutes s’écoulèrent, puis des lignes de codes s’affichèrent sur l’écran, alors que le système de communication de la navette essayait de se connecter au réseau intergalactique.

— Génésys, ici le commandant Trévor, fit-il dans la radio. Vous me recevez ?

Des grésillements envahirent le cockpit. Des voix tentaient de surnager. Au bout de quelques secondes, elles se clarifièrent. Bien qu’encore déformée, la voix de Neal retentit dans les haut-parleurs.

— Il y a des parasites, mais nous vous recevons.

— ça a fonctionné ? fit Bernard.

Trevor regarda Shayn, qui leva le pouce.

— On est connecté au réseau intergalactique. Notre relais fonctionne bien ?

— Oui. Ça a l’air d’aller. Nous avons accès au Réseau.

Trevor sourit.

— Vous allez perdre le signal quand le satellite passera de l’autre côté de la planète, compléta Shayn. Les réponses aux requêtes prendront du temps étant donné le peu de bande passante de cette vieille chose. Synchronisez bien leurs deux orbites.

— Bien joué, répondit Bernard. Rentrez maintenant.

— ça va prendre un peu de temps pour quitter l’orbite.

— Faites attention.

Trevor se tourna face au poste de pilotage et se prépara à manœuvrer le vaisseau pour quitter l’orbite. Shayn était à nouveau plongé dans le contenu de sa tablette. Les sourcils froncés, il pinça les lèvres et relut un passage.

— C’est …, souffla-t-il. C’est dingue !

— Quoi ? lâcha Trevor pour la troisième fois.

Shayn leva ses yeux écarquillés sur son compagnon.

— J’ai accédé aux logs. Le satellite a été désactivé il y a cinq ans. A peu près quand on est arrivé sur la station.

Trevor n’eut pas le temps de répondre. Une alerte illumina l’écran holographique. Les lumières intérieure clignotèrent .

-- Qu'est-ce que ... ? lâcha Shayn , les yeux rivés sur son ordinateur.

-- euh ... Shayn... J'ai perdu le contrôle des commandes du vaisseau.