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tome 3, Chapitre 20 « Interlude - Questionnement » tome 3, Chapitre 20

L’enfant était assis au bord du rivage. Là-bas, encore plus loin que son imagination pouvait le porter, s’étendait la chose-ombre, la chose sombre. Les mains en coupe, il les tend devant lui, tandis que s’en échappent des papillons de sable.

— Pourquoi es-tu là ? murmuré-je.

Comme lui, je fixe l’horizon, mais je ne vois rien d’autre que les reflets abyssaux d’une nuit obscure et ténébreuse. Que peut-il ainsi contempler ? Innocent, il regarde les insectes voleter autour de lui, le touchant de leur trompe démesurée.

— Je croyais te l’avoir expliqué, me rétorque-t-il sans se retourner.

De l’index, il caresse le dos des étranges lépidoptères.

— C’est une synchronicité, un hasard bienheureux, rien de plus. Je cheminais et je l’ai aperçu, alors je m’en suis venu. Que cela est un sens pour toi m’est égal, pour moi, rien ne change.

L’un d’entre eux s’est posé sur sa tête et boit un peu des embruns qui perlent au bout de ses cheveux.

— J’habite le rêve, comme d’autres habitent la terre. Un jour, je partirai, mais le moment n’est pas encore venu, car ils ne m’ont pas encore trouvé ; comme moi, je ne les ai pas encore tous retrouvés.

Le papillon s’est envolé et a rejoint les autres. Attiré par les reflets sur la mer, je les aperçois qui luttent contre les vents, progressant de droite ou de gauche, heurtant d’invisibles obstacles. Et moi, les ai-je retrouvés, ou bien quelqu’un m’a-t-il retrouvé ? Quelle étrange révélation ! Sans mémoire, sans passé, sinon celui d’un nouveau-né déjà adulte, ma vie commence autour d’un dîner avec une demoiselle, au cœur évidé. Vampiresse malgré elle, je me suis mis à la sustenter alors même que cela était du rêve même qu’elle se nourrissait et non de ma chair, alors que je pensais le contraire. Soudain, l’une des créatures sablonneuses se pose sur mon cœur et tombe en poussière sur le sol nu. Dépité, je m’agenouille cependant que je remarque le minuscule éclat de métal ; la moitié d’une clé d’argent. À côté de moi, l’enfant n’a pas bougé d’un pouce.

— J’ai une dernière question.

— Pose-la ! Peut-être y répondre-je, me rétorque-t-il d’une voix pleine de malices.

— Ou peut-être que non… ajouté-je.

L’enfant éclate de rire, puis lance dans les airs une poignée de sable qui prend la forme d’un oiseau de proie.

— À la fin du conte, Stjörkug renonce à sa persona, alors il n’est ni tout à fait un homme ni tout à fait une ombre. Quel est le prix de son renoncement ?

Dans le ciel, le brouillard se lève et dévoile une lune pleine ; dans le lointain, un animal hurle ; un hurlement à vous glacer le sang.

— S’il n’eut partagé mon sang, il serait devenu l’une de ses créatures.


Texte publié par Diogene, 30 août 2020 à 09h36
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