Le lendemain matin, à huit heures cinquante, la voiture déposa Feng et le PDG Zhang Heng devant le siège de la Fédération d’esport de Shanghai.
À peine eurent-ils franchi les barrières que des dizaines de journalistes se ruèrent vers eux, brandissant micros et appareils photo, tels des vautours affamés. Feng réprima un mouvement instinctif vers son couteau ; dans cette foule compacte, il aurait été facile de l’atteindre sans laisser de traces. Son regard vif balayait les environs, débusquant la moindre anomalie.
Les agents de sécurité, expérimentés, ouvrirent un passage jusqu’au bâtiment. Feng inspira lentement pour contenir la tension dans ses muscles.
Dans le hall d’entrée baigné de lumière, deux employés les accueillirent avec des sourires rigides avant de les escorter jusqu’à la salle de réunion, perchée au quarante-huitième étage.
Feng avait l'impression d'entrer dans une arène : chaque pas résonnait dans son esprit comme le compte à rebours d'un duel.
— Commençons, déclara un homme en désignant deux sièges.
Après les salutations d'usage, Feng et le PDG s'assirent.
Ils exposèrent les faits dans leurs moindres détails, ne laissant aucune place à l'interprétation. Lorsque la Fédération annonça que l’équipe Dragon ne serait pas sanctionnée pour les agissements isolés de Warren Fisher, Feng sentit une tension invisible se relâcher dans son dos. Elle savait que l'intervention de Shi Shu-Fang avait pesé lourd dans la balance, mais elle préféra taire cette pensée.
— Concernant le joueur Warren Fisher, nous souhaiterions connaître la sanction que vous envisagez, Liu Feng.
Feng jeta un coup d'œil au PDG Zhang Heng, cherchant son accord tacite. Lorsqu’il hocha doucement la tête, elle prit la parole avec calme.
— Warren est un très jeune joueur, dit-elle, la voix posée, mais ferme. Il manque d’expérience dans ce milieu, mais il possède un véritable talent. Je suis persuadée qu’il accomplira une belle carrière.
Elle parla avec sérieux et conviction, fière de défendre ce jeune homme prometteur.
— Après avoir analysé la situation, et longuement échangé avec lui, il m’apparaît que la meilleure solution est de le suspendre pour le reste de la saison.
— Pourquoi ne pas avoir opté pour une suspension temporaire, comme pour la victime, Sun Guiying ?
Feng décela dans le ton de l’interrogateur une tentative de la déstabiliser. Un sourire froid manqua d'effleurer ses lèvres. S'ils savaient seulement...
— Il est essentiel qu’il prenne conscience de la portée de ses actes, répondit-elle sans ciller. Une sanction trop légère ne lui laisserait pas le temps d'intégrer cette leçon.
Intérieurement, elle ressentit un pincement au cœur pour Warren : elle n'ignorait pas combien l’éloignement de la scène pouvait être douloureux pour un passionné.
— Avez-vous envisagé qu’il puisse abandonner sa carrière ?
— Oui, mais l’équipe le soutiendra. Il doit comprendre qu’il n’est plus seul.
Sa voix se teinta d’une chaleur discrète, presque imperceptible, mais bien réelle. Elle s’était attachée à Dragon, même si tôt ou tard elle devra les quitter.
— Il manquera un joueur pour les prochaines compétitions, en êtes-vous consciente ?
— Bien sûr, répliqua Feng, le regard droit.
— Nous allons délibérer. Veuillez patienter un instant.
Ils quittèrent la pièce.
— Vous pouvez être fière de vous, Liu Feng, la félicita Zhang Heng.
— Merci, répondit-elle avec un sourire contenu.
Ils revinrent quelques minutes plus tard, leurs visages lissés par des sourires polis que Feng jugea méprisants.
— Nous suivrons votre jugement, annonça la présidente de la Fédération.
Feng s'inclina, soulagée. L’incident était enfin clos.
Ils redescendirent dans le hall. Dehors, les journalistes semblaient prêts à les dévorer vivants.
— Je m’occupe d’eux, dit Zhang Heng. Prenez votre journée. Reposez-vous.
Feng s’inclina avec gratitude. À deux rues de là, elle retrouva Vitali et Arkadi, fidèles et vigilants.
— Vous avez remarqué des choses suspectes ? demanda-t-elle, la voix basse.
— Tout est calme, répondit Vitali.
À cet instant, un fourgon noir surgit dans leur champ de vision, provoquant un brusque raidissement des corps.
Les couteaux jaillirent, l’adrénaline inonda leurs veines jusqu'à ce que Feng aperçoive Shi Shu-Fang et lève la main pour apaiser ses hommes.
— Montez, ordonna-t-il.
À l’intérieur du véhicule, Feng restait sur ses gardes. Malgré leur alliance, elle n’accordait jamais une confiance aveugle. Son instinct ne l’avait jamais trahie.
Le trajet les mena au district de Xuhui, dans un quartier réputé pour sa dangerosité. L’air y semblait plus dense, plus lourd.
Feng observa les rues, les armes visibles à la ceinture des habitants, les regards défiants : ici, la loi du plus fort régnait. Elle sentit une étrange sensation l’envahir, mêlée de méfiance et d’excitation.
Le fourgon s'arrêta devant une porte rouge massive ornée de gravures anciennes.
Deux gardes inspectèrent un laissez-passer gravé d’une flamme. Feng, fascinée, nota mentalement ce symbole, même si elle n’osa pas le contempler trop longtemps.
Ils pénétrèrent dans une vaste cour intérieure.
Autour d'eux, des hommes et des femmes s’entraînaient durement.
Feng sentit son cœur battre plus vite, non de peur, mais d’admiration. Ce lieu était un sanctuaire de force et de discipline.
Elle capta la puissance brute qui se dégageait de ces murs rouges, de ces corps concentrés. Un étrange sentiment de familiarité l'envahit : ici, la survie était un art de vivre. Elle était à sa place.
Shi Shu-Fang les mena jusqu’au bâtiment principal : « Le Hall du Feu Ardent ».
Elle ralentit légèrement, savourant l’architecture, la beauté brute des lieux, la fierté palpable des occupants.
Lorsque les membres éminents de la Triade Huo apparurent, Feng et ses hommes s’inclinèrent profondément.
L’Ancien Shi Yue-Yan, sa femme Shi Wen, leur fils Shi Shen et son épouse Shi Wan leur firent face.
Feng sentit le poids du regard du Tak Khunn. Elle répondit avec respect, mais aussi avec cette étincelle farouche qui la caractérisait.
À l’invitation du vieil homme, elle dévoila son tatouage de la mafia Phénix. Une fierté discrète naquit en elle en constatant que Vitali et Arkadi l’imitaient avec une loyauté silencieuse.
Lorsque Shi Yue-Yan lui tendit la main, elle la saisit sans hésiter.
À cet instant, une promesse muette naquit entre eux.
— Liu Feng, vous pouvez compter sur mes hommes.
— Merci, répondit-elle en s'inclinant profondément.
Son cœur battait plus fort : elle venait de sceller un pacte capable de changer la destinée de la mafia Phénix.
Shi Wan s'approcha et lui remit une carte d’avocate. Feng la prit à deux mains, marquant son respect.
À leur départ, Arkadi l'interpella discrètement en russe.
— Mon contact veut me voir pour de la cocaïne.
Feng échangea un regard rapide avec Shi Shu-Fang, qui proposa aussitôt son aide.
Elle hocha la tête : elle n'avait pas confiance aveuglément, mais elle savait saisir une opportunité.
— Xenia, que vas-tu faire ? demanda Vitali, inquiet.
Feng esquissa un sourire froid.
— Déjeunez, intervint Shi Shu-Fang. Nous devons discuter affaires.
Elle devina sans peine l'inquiétude de ses hommes, mais son regard froid imposa le silence : aucune faiblesse ne devait être montrée ici.
Pas même entre eux.
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