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tome 1, Chapitre 9 « Partie 2 » tome 1, Chapitre 9

Je l’ai vu tellement de fois cette scène. Dans tous les téléfilms un peu nuls qui passent sur la première dans l’après-midi. Je les regardais à chaque fois, tous les dimanches quand j’allais voir ma grand-mère. Assise sur le canapé, l’odeur de café prenant mes narines, le petit gâteau en bouche alors qu’allongée sur le divan, j’observais les films de Noël ou les comédies romantiques, ou mieux, les comédies romantiques de Noël s’enchainer. Si je sortais de la douche, j’aurais lâché ma serviette de surprise, si j’étais en train de cuisiner, j’aurais fait tomber ma préparation au sol… comment réagir quand, face à soi, l’homme de sa vie réapparait ?

Clément est là sur le palier, s’essuyant les pieds sur mon tapi aux couleurs de mon groupe de musique préféré. Demandant s’il peut entrer, avec sa petite moue, son sourire gêné et son visage légèrement penché sur le côté. Le nombre de fois que je l’ai vu comme ça, c’est comme une excuse sans mots, pourtant, il y a une différence. Ce n’est pas comme lorsqu’il m’apportait mon café du matin et se trompait de tasse, ou lorsqu’il mangeait un croissant dans mon lit et qu’il en foutait partout… là, il semble vraiment s’en vouloir d’être là. De son nez s’échappent deux gros cotons, comme après un de ses combats…

« Tu t’es battue ? Entre, entre, je vais désinfecter tout ça !

— Ne t’en fais pas, Lars s’en est occupé.

Il entre pendant que je cours presque chercher de quoi le soigner. Lorsque j’entends le prénom de Lars, la trousse de premier secours m’échappe des mains et je me retrouve à quatre pattes en train de réenrouler un bandage. Clément se joint à moi et m’aide à ramasser le tout, nos regards se croisent, et lorsque j’aperçois le sourire qu’il tente de réprimer, impossible de ne pas exploser de rire.

— Tu as repris la boxe ? dis-je trop enthousiaste.

— Non, enfin, j’ai jamais vraiment arrêté, tu sais. J’ai juste fait un sparring, le gars était con, je l’ai mis KO.

— T’as mis KO quelqu’un, en sparring ?! T’es vraiment effrayant, tu sais ? »

Il pouffe légèrement puis, lorsque nous nous relevons, il me fait la bise. C’est vrai que…on ne s’embrasse plus lui et moi. C’est fini cette époque où, notre moyen de communication se faisait uniquement par les lèvres. Un baiser pour dévoiler le monde, un effleurement pour donner envie à l’autre, laisser nos lèvres se découvrir, suspendre le temps, ne serait-ce qu’un instant. En vouloir à ce garçon n’est pas difficile, irréprochable, il ne l’était pas. Mais sincère, impossible de lui retirer cela.

« Tu veux boire quelque chose ? Assieds-toi.

— Non, t’en fais pas. Je suis bien debout. Toi, tu veux que je te fasse un café ?

— Pour que tu le rates lamentablement ? Non merci. Dis-je avec un petit rire un peu bête.

Oh quelle cruche, il va se moquer de ton rire Louise. Pour ne pas entendre, ses traits d’humour que je ne connais que trop bien et, qui je dois bien l’avouer, me font toujours autant craquer, je m’éclipse, sors de la pièce, et verse un café dans ma tasse préféré.

— Laisse-moi deviner, la tasse petit chats ? dit-il depuis le couloir.

Je ne cherche pas à répondre, ma main tressaille. Comment me connait-il encore si bien ? Est-ce l’ami en lui qui se souvient, ou le petit copain ? D’où viens qu’il puisse encore me faire cet effet ?

— Je vois que tu continues le yoga ? T’arrives enfin à faire le Culcultasana ?

— C’est lui Kukutasana !

— Je sais, j’avais envie de te faire criser.

— Mais ? Ah ! Toi, vraiment ! »

Il me rend folle ! Toujours aussi malin à me faire tourner en bourrique. Je l’entends rire de l’autre bout de mon logis…ce son m’avait manqué.

« Désolé de passer à l’improviste, je retrouvais pas ton numéro et, pour tout t’avouer, je le cherchais pas vraiment, je savais juste plus trop quoi faire.

— C’est bon, ça va, t’es toujours le bienvenu.

— Pourtant, à la soirée de Tristan, on ne s’est pas parlé…

Je me penche et sirote le haut de ma tasse de café bien trop remplie. Toujours trop distraite par le doux son de sa voix, j’ai failli gorger ma nappe du précieux liquide noir. Un soupir, et me voilà à me diriger vers ce garçon qui encore aujourd’hui a bien trop d’emprise sur moi.

— Je sais, désolé. J’essaye de garder une certaine distance.

— J’ai vu que tu étais proche d’un garçon ce soir-là, j’ai pas trop osé venir.

A-t-il une pointe d’amertume dans la voix ? Ou est-ce moi qui la fantasme, espérant qu’il regrette notre relation passée ? Arrête de te prendre la tête avec ça Louise…

— C’était rien. Il a essayé de m’embrasser, mais, j’ai pas voulu. L’éternel célibataire, tout ça tout ça, il faut vraiment que j’adopte un chat. Et toi ?

— Autant mettre les pieds dans le plat…

Seigneur ? Est-ce que, ce dont j’ai toujours rêvée est en train de se produire ? Clément, reviens à moi ? Regrette-t-il aussi notre histoire ? Vient-il me dire qu’il s’en veut ? Qu’il aimerait m’embrasser, allons-nous enfin pouvoir de nouveau se côtoyer ? Vient-il me dire qu’il m’aime ?

— Elyna m’a envoyé une lettre d’excuse. »

Dissimuler ses émotions est toujours quelque chose de compliquer, en particulier lorsque, la source de chacune d’entres elles se trouvent face à soi. J’aimerais être capable d’aussi bien les dissimuler que ces femmes fatales. Être, un livre fermé, un journal intime, être insondable comme la fosse des Mariannes, être un puits où aucune émotion ne pourrait être récoltée. Que ces vitraux aux couleurs émeraudes ne soient plus le reflet d’une hypersensibilité qui m’érode. Arriver à faire taire ce clapet qui en laisse échapper une de trop. Devenir ce que tous les autres sont pour mes émeraudes : un mystère.

J’aimerais que ma colère, mon ressentiment, mon envie de meurtre tout simplement, disparaisse. Que l’on ne puisse pas la deviner par un simple coup d’œil. La tasse de café s’échappant de mes mains et se fracassant au sol dévoile tout ce que j’essaye de dissimuler sur mon visage. Pourquoi ? Pourquoi toujours ‘’Elle’’ qu’est-ce qu’elle a de plus ? Plus d’impact ? Je connais Clément depuis des années et jamais je n’ai eu le quart de cet impact ! Tout ce que j’ai eu c’est le quart des miettes de ce qu’elle lui a laissé après son passage ! Des miettes d’affections, d’amour, des bribes de rien.

Je ne mérite pas d’amour c’est ça ? On s’offre éperdument, on s’abandonne à l’autre et lui nous prend avant de partir ? Mes baisers, mes encouragements, tout ça, ne mérite pas d’être piétiné ! Peut-être ne m’aime-t-il pas, cela ne lui offre pourtant pas le droit de me rappeler qu’elle a toujours étais ce que je ne suis pas ! Qu’est-ce que cela peut bien faire qu’elle lui ait envoyé une lettre ? Cela ne retire en rien ce qu’elle a fait, ce qu’elle m’a fait à MOI ! Ce qu’elle m’a pris, ce dont elle m’a privée ! Cette fille est un poison ! Je ne peux pas mettre ma haine de côté encore une fois…

« Que voulait-elle ? questionnent ma voix faiblarde, mes cheveux devant mon visage, seul moyen de dissimuler cet ouvrage trop facilement déchiffrable.


Texte publié par Charly, 19 avril 2023 à 09h38
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