Rencontre
- Frédéric ! Hurla Eugène en sortant de la chambre d’Alima.
- Que veux-tu faire ? Le questionna celle-ci, troublée.
Eugène ne répondit rien. Les deux adolescents avaient vu le drone s’engouffrer dans la même allée que la dernière fois, et Alima devina que son geôlier s’était mis en tête de le suivre.
- Frédéric ! Cria de nouveau Eugène en s’approchant des escaliers.
Le majordome les monta prestement et demanda, essoufflé :
- Monsieur ?
- Munissez-vous d’armes, Frédéric. Une à feu et une lame. Et fournissez la même chose à Alima.
- Pourquoi ?
- Nous sortons. Et dépêchez-vous, nous n’avons pas de temps à perdre.
- Bien monsieur. Veuillez me suivre mademoiselle.
Tandis que son majordome allait équiper la jeune fille, Eugène se dirigea vers sa propre chambre. Il ouvrit son armoire et y prit une boite, où se trouvaient plusieurs pistolets. Il en choisit un puis alla prendre sa dague, qu’il ne laissait jamais au manoir lorsqu’il sortait. Il redescendit et trouva Frédéric et Alima armés : le premier d’un couteau et d’un fusil, la seconde d’un pistolet et d’un poignard. La jeune fille n’était clairement pas à l’aise avec ses objets meurtriers. Eugène examina le pistolet de sa captive, et soupira.
- Enfin, Frédéric. Alima n’arrivera jamais à viser avec ceci, le recul est trop important. Tiens, prends plutôt celui-là.
Il lui tendit son propre pistolet et garda l’autre.
- Pourquoi doit-on prendre des armes, Eugène ? Demanda Alima. Je n’oserai jamais m’en servir.
- C’est une question de sécurité. Cette chose volante est peut-être dangereuse. En tout cas, elle est inconnue et on n’affronte pas l’inconnu sans se préparer.
Le jeune homme ouvrit la porte et sortit, déterminé. Ses compagnons, qui auraient préféré être ailleurs, le suivirent. Ils allèrent dans la ruelle et Eugène y jeta un coup d’œil furtif. Il y avait là un grand cube gris et brillant qui flottait dans les airs, et un homme qui leur tournait le dos. Il tenait l’engin dans ses mains.
- Par les toits. Souffla le jeune homme.
Le trio grimpa sur les bâtiments qui entouraient la ruelle, et Eugène fit un compte à rebours avec ses doigts. Lorsqu’il atteint zéro, il sauta du toit, aussitôt suivi de ses compagnons. Il atterrit en plein sur l’homme et tous deux roulèrent à terre. Frédéric vint en aide à son maitre et l’aida à immobiliser l’inconnu. Alima elle, restait debout, ne sachant que faire. L’homme se débattit et Eugène lui asséna une violente claque.
- Qui êtes-vous ? Et quelle est cette chose volante ?
Rico se contenta de sourire.
- Répondez !
Le voyageur temporel ouvrit la bouche et dit un seul mot :
- Bouclier.
De son étrange combinaison jaillit alors une sphère bleue qui repoussa violement Frédéric et Eugène en arrière. Alima poussa un cri en voyant ce dernier se cogner la tête contre un mur et se précipita à ses côtés.
- Eugène ! Cria-t-elle. Est-ce que tu m’entends ? Eugène !
Le garçon gisait au sol, inanimé. Alima remarqua que l’arrière de son crâne saignait abondement. Pour arrêter l’hémorragie, elle déchira une de se manche et lui banda la tête. Elle ne remarqua pas que Rico s’était levé et s’approchait d’elle. Elle sentit alors quelque chose de froid contre sa nuque.
- Eloigne-toi de lui, ordonna Rico.
Alima se leva lentement. D’une légère pression, Rico lui fit comprendre de se pousser, mais Alima hésita en voyant Eugène inconscient.
- Ne me fait pas attendre, jeune fille. Menaça Rico. Je n’ai aucune envie de te faire du mal.
Son ton était doux et sincère. Alima osa donc demander :
- Qu’allez-vous faire de lui ?
- Je vais être honnête avec toi, petite. Je vais le tuer. Il n’est qu’un assassin sans morale.
- Je n’en suis pas si sûre.
- Pousse-toi maintenant.
Alima s’exécuta à contre cœur. Frédéric, un peu sonné mais conscient, arriva alors et se jeta sur Rico, brandissant son couteau. Mais le bouclier magnétique était encore activé et Frédéric s’y écrasa. Rico s’emporta :
- Par pitié ! Je ne suis là que pour une chose, tuer cet assassin. Laissez-moi faire et je m’en irais sans faire plus de dégâts.
- Monsieur, tenta Alima. Peut-être pouvons-nous négocier.
- Il n’y a pas de négociation possible. A présent, laissez-moi faire avant que je ne fasse quelque chose de regrettable.
Comme il s’approchait d’Eugène, Alima, malgré l’étrange arme que pointait sur elle Rico, s’élança. Elle souleva le garçon inanimé comme s’il ne pesait rien et se mit à courir. Elle ressentit alors une douleur aigüe dans sa jambe. Rico avait tiré avec son vingt-coups silencieux. Elle tomba parterre et regarda le sang qui coulait à flot de sa jambe.
- Je t’avais prévenue.
Rico s’approcha d’Eugène et, pour pouvoir le toucher sans qu’il ne soit repoussé, désactiva son bouclier un instant. Alima saisit sa chance et pris son pistolet, qu’elle avait caché dans les plis de sa robe. Elle ne prit pas la peine de viser et tira trois coups vers Rico. Les détonations retentirent, mais rien ne sortit de l’arme. « Des balles à blancs, pesta Alima. Eugène m’a donné un pistolet chargé à blanc pour que je ne puisse pas m’échapper ! » Rico avait sursauté en entendant le bruit, mais il comprit bien vite que se pistolet n’était pas chargé. Il soupira.
- S’il te plait, petite. Laisse-tomber. Je…
Une autre détonation retentit. Cette-fois, Rico sentit la douleur dans son épaule. Il tomba parterre et cria :
- Qui a fait ça ?
Il remarqua Frédéric. Le vieil homme avait sorti son fusil qui, lui, était bien chargé. S’en suivit une série de jurons que l’on évitera de rapporter.
- Bouclier ! Cracha Rico, fou de rage. La sphère bleue réapparut, mais le voyageur n’en était pas moins blessé. Frédéric s’approcha d’Alima et lui tendit l’arme, après l’avoir chargée de nouveau, en lui expliquant de la garder braquée sur l’inconnu. Ainsi, si celui-ci voulait tirer une balle, il devrait désactiver son bouclier et Alima lui tirerait dessus en première, bien qu’elle n’en ait aucune envie. Frédéric chargea Eugène, toujours inconscient, sur son épaule.
- Tu peux marcher ? Demanda-t-il à Alima.
Elle fit non de la tête sans lâcher Rico du regard. Frédéric prit donc le pistolet de son maitre et le pointa sur l’inconnu.
- Appuie-toi sur le fusil.
Ce n’était pas grand-chose, mais c’était tout de même mieux que rien. Alima se redressa en tremblant.
- Ça ira. Dit-elle.
- Passe devant.
Alima contourna Rico qui la regarda passer, furieux. Alors qu’elle était à son niveau, elle remarqua un petit objet bleu parterre. Elle le ramassa. C’était une pyramide.
- Lâche ça ! C’est à moi ! Cria Rico.
Alima l’ignora et examina l’objet. Il y avait deux boutons : un noir et un bleu. Ne voyant pas grand intérêt à garder cet objet, elle était sur le point de le jeter mais changea d’avis. L’inconnu semblait y tenir beaucoup. Ce devait être quelque chose d’important. Elle le glissa dans sa poche et, ignorant les protestations de Rico, repris sa marche. Frédéric garda le pistolet braqué sur l’homme jusqu’à ce qu’elle soit sortie de la ruelle, puis la suivit à reculons. Lorsque tous deux furent hors de portée de l’arme de Rico, il glissa le pistolet dans sa poche, souleva Alima de sa main libre et courut jusqu’au manoir. Là, il déposa la jeune fille sur un canapé.
- Merci. Dit-elle.
Le majordome se contenta de hocher la tête d’un air grave et monta avec Eugène pour l’allonger dans son lit. Il s’apprêtait à redescendre mais vit Alima debout sur le pas de la porte.
- Mademoiselle ! S’exclama-t-il. Il n’est pas prudent de vous lever ainsi ! Regardez comme votre jambe saigne !
- Frédéric, dit Alima pendant que le majordome la faisait s’assoir sur le lit. Je vous en prie, appelez-moi Alima et tutoyez-moi. Vous nous avez sauvez la vie aujourd’hui. Vous n’êtes plus un serviteur, mais un ami.
Frédéric fut pris de court par cette déclaration.
- Hum… Et bien… si c’est ce que vous… Ce que tu veux, alors soit. Mais dans ce cas, tutoies-moi de même, s’il te plait.
La jeune fille hocha la tête.
- Je vais appeler un médecin. Déclara Frédéric en sortant de la pièce.
Alima n’eut pas le temps de lui dire que ce n’était pas la peine, il était déjà parti. Elle regarda donc Eugène, ses cheveux blonds en bataille, son visage serein, malgré la situation. Il était vraiment beau. Mais comment aimer quelqu’un qui ôte la vie sans scrupules ? Elle le contempla longuement, jusqu’à ce qu’il frémisse. Il ouvrit les yeux et son expression calme se changea en une grimace de douleur.
- Alima ? Souffla-t-il. Que se passe-t-il ? Il grogna. Et pourquoi cette douleur ?
- Tu as reçu un coup sur la tête et Frédéric nous a sauvés. Résuma-telle.
- Et l’inconnu ?
Eugène se redressa en grognant.
- Blessé à l’épaule.
- Mais vous l’avez laissé là-bas ? Il va revenir avec son drôle d’insecte en métal !
- Et qu’aurions-nous dû faire ? J’étais blessée, tu étais inconscient et il se protégeait avec sa sphère bleue.
- Tu es blessée ?
- Frédéric est allé chercher un médecin.
- Je ne leur fait pas confiance à ceux-là. Grommela Eugène.
- Moi non plus. Laisse-moi voir.
- Voir quoi ?
- Ta tête.
Alima se leva et s’approcha en boitant d’Eugène. Le garçon jet a un coup d’œil à la jambe de son otage.
- Mais tu t’es pris une balle !
- Laisse-moi voir ta tête. Exigea Alima.
- Mais ta…
- Ma jambe peut attendre. Contrairement à ton crâne, qui est une partie vitale de ton corps. Penche-toi.
Eugène baissa la tête et Alima retira le bandage de fortune qu’elle avait fait avec sa manche. Le sang coulait encore, mais un peu moins abondement que dans la ruelle.
- Il faut nettoyer ça avant que ça ne s’infecte. Ça te fait mal quand j’appuie là ?
- Aïe ! Oui, ça fait mal. Très.
- Pardon. Je pense que ton crâne est un peu fissuré. Rassure-toi, c’est un os très solide, la fissure doit être toute petite.
- Je me suis vraiment cogné si fort ?
- De quoi te souviens-tu, exactement ?
Eugène réfléchit un instant.
- Je… Je questionnais l’homme et il a dit… euh… bouclier, je crois. Puis une intense douleur et plus rien.
- Tu as été projeté contre un mur.
- Mais et toi ? Comment t’es-tu blessée ?
- Je me suis précipitée pour examiner ta blessure. L’inconnu m’a alors plaqué un pistolet très étrange sur la nuque et m’a dit de me pousser. J’ai essayé de négocier avec lui mais il n’a pas voulu. Il a dit qu’il allait te tuer, alors je t’ai pris dans mes bras et me suis mise à courir. Il a tiré et c’est ma cuisse qui a pris. Il s’est approché de toi et a enlevé sa sphère bleue pour pouvoir te tuer. J’ai alors tiré avec le pistolet que tu m’as donné.
- Les balles à blancs. Murmura Eugène. Je suis désolé Alima, si j’avais su…
- Peu importe. Frédéric a tiré à son tour avec son fusil, l’homme a été touché à l’épaule et à réactivé son bouclier pour se protéger. Ton majordome m’a donné le fusil, je l’ai gardé braqué sur l’homme dans sa sphère bleue et Frédéric t’a pris sur son épaule. Puis nous sommes partis.
Il y eu un long silence. Après plusieurs minutes, Eugène demanda :
- Pourquoi ne t’es-tu pas enfuie ?
- Je ne le voulais pas.
- Et pourquoi m’as-tu aidé ?
- Je le voulais.
Un léger sourire apparut sur le visage de la jeune fille. Eugène sourit à son tour. Ils se fixèrent dans les yeux, chacun trouvant ceux de l’autre ravissants. Eugène se perdait dans ceux, noirs, d’Alima. Alima nageait dans ceux, bleus, d’Eugène. Frédéric entra alors, brisant le moment magique.
- Alima, le médecin va… Monsieur ! Vous êtes réveillé ! Quel soulagement !
- Alima m’a raconté ce qu’il s’est passé. Merci infiniment, Frédéric. Je vous dois la vie. A toi aussi, Alima.
A cet instant précis, Eugène s’imagina leur dire « vous m’avez sauvé, je vous sauve ne retour. Vous êtes libres, mes amis. Alima tu n’es lus ma prisonnière. Frédéric vous n’êtes plus mon majordome, sauf si vous le désirez. » Il s’imaginait, une fois sur pieds, aller chez sa tante, tout lui raconter et l’inviter, elle et sa famille, à vivre dans son manoir. Et ainsi refaire sa vie. Avec une famille. Avec des amis. Sans meurtres, sans complots et sans sang.
- Monsieur ? Demanda Frédéric. Doit-on vous laisser vous reposer ?
Eugène sortit de sa rêverie et se ressaisit.
- Oui. Oui, merci. J’ai besoin de dormir.
Son majordome ferma les rideaux et, alors qu’il sortait, Eugène ajouta d’une petite voix :
- Et prenez soin d’Alima.
Il n’eut pas le temps d’être surpris par ses paroles. Il dormait déjà.
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