Les pupilles de Gray s'écarquillèrent de frayeur tandis qu'il se figeait sur place. À la salle du trône du domaine, il fit face à une scène qui lui paraissait surréaliste. Plusieurs zoras encerclaient le corps de Rutella, allongée sur un drap blanc tacheté de rouge à certains endroits. Sa large blessure au ventre avait été bandée. Hélas, soigner une plaie ne suffisait jamais pour ramener une personne décédée à la vie.
L'homme en noir ne voulait pas y croire. Il se disait que la souveraine était seulement inconsciente et qu'elle se réveillerait au bout de quelques heures. Malheureusement, en remarquant les visages attristés et les pleurs discrets des zoras présents, le soupçon d'espoir faisait place à la triste vérité : Rutella n'était plus de ce monde.
« Bon sang... Non... » pensa l'argenté qui n'arrivait pas à détourner son regard de la reine zora alors que de nombreux souvenirs défilaient dans sa tête. Des images qu'il aurait préféré oublier : le massacre de son village. Il revoyait les cadavres de l'entourage qu'il avait connu durant son enfance. Ses amis... Son père... Son jeune frère... Sa mère... En repensant à cette toute dernière, il avait l'impression de la voir à la place de Rutella. L'élu de Din se tint brusquement la tête, comme pris par un soudain malaise. Il commençait même à haleter et se sentait défaillir. Mais une main posée sur son épaule le fit revenir à lui. L'un des zoras environnants s'était approché, visiblement inquiet à son sujet.
« Vous vous sentez bien ? » demanda-t-il. Gray le regarda, étonné dans un premier temps, avant d'inspirer un bon coup et de hocher doucement la tête en guise d'acquiescement.
« Ça va. Merci... Où est votre princesse ? »
D'abord surpris par cette demande, l'être aquatique fit signe au jeune homme de le suivre en direction du couloir menant à la chambre d'Epon. Une fois devant la porte de cette dernière, le zora s'inclina de politesse avant de retourner à la salle du trône, laissant l'élu de Din seul. L'homme en noir, bien qu'appréhendant l'état dans lequel il retrouverait l'hybride, ne perdit pas de temps. Il frappa trois coups avant d'ouvrir la porte.
Comme il s'y attendait, Epon était assise sur son lit, l'air maussade. Des bandages recouvraient une partie de ses bras et de ses jambes. Link était également présent, installé sur le bord du matelas à eau et le visage grave. Mais une personne que l'argenté ne connaissait pas encore se trouvait parmi eux : Impa. Il ne s'attarda pas sur elle pour l'instant car il se préoccupait surtout de l'état de la princesse. Elle et les deux autres en sa compagnie remarquèrent à leur tour sa présence.
« Gray. » fit Link à sa vue en se relevant et en avançant de quelques pas en sa direction. Il semblait heureux de le revoir bien portant, et ce sentiment paraissait réciproque si on se fiait au léger sourire que l'autre lui adressait. Mais l'élu de Din s'approcha du lit de celle de Nayru. Les yeux attristés d'Epon se remplirent de larmes lorsque son regard croisa celui de Gray. Voir son amie ainsi fendait le cœur du plus grand, qui la prit doucement dans ses bras pour la serrer contre lui.
« Je suis désolé, Epon... Je suis vraiment désolé... »
Pendant que la demi-zora sanglotait silencieusement contre son épaule, des larmes se mirent à couler des yeux du jeune homme. Gray s'en voulait terriblement de ne pas avoir pu empêcher une telle catastrophe. Il culpabilisait de ne pas être resté avec Link et Epon pour empêcher un pareil massacre. Mais surtout, il se blâmait de ne pas avoir pu protéger son amie aux cheveux bleus des blessures physiques qu'elle avait reçues.
En songeant à ces dernières, l'argenté sécha rapidement ses larmes. Il se décolla doucement de la bleue, puis observa les tissus recouvrant ses bras. Doucement, il découvrit le bras gauche de l'hybride et vit avec horreur la présence de plusieurs traces de brûlures. La peau hâlée de la jeune fille n'était pas belle à voir à certains endroits.
« Bordel de merde... pensa l'argenté en serrant les dents.
— Il s'est passé quelque chose d'assez étrange avec Epon. » intervint Link en se rapprochant d'eux dans l'intention de tout expliquer à Gray. Mais celui-ci le regarda, l'air sérieux.
« C'est le phénix bleu qui a provoqué ça, pas vrai ? » demanda-t-il au héros, à l'étonnement de celui-ci, d'Epon mais également d'Impa.
« Tu es au courant de cette légende ? » demanda la sheikah au concerné. En guise de réponse, l'élu de Din lui adressa un regard noir, montrant clairement de la méfiance à son égard.
« Qui es-tu ? » l'interrogea-t-il froidement. Cependant, en s'attardant sur le physique et les vêtements de la blanche, en particulier sur le symbole d'un œil larmoyant rouge figurant sur ceux-ci, Gray eut un choc. Ce symbole... Il l'avait déjà vu. Il le connaissait !
« Je me nomme Impa, répondit celle-ci en se disant que le scepticisme du jeune homme était légitime. Je suis sous les ordres de sa Majesté la Reine Zelda.
— Tiens donc... réagit son interlocuteur sur un ton sarcastique en se relevant du lit pour lui faire face. Et qu'est-ce qu'une sheikah fabrique aux services de cette chère reine après tout ce qui s'est passé ces dernières années ? »
À l'entente de ces mots, Link afficha un air surpris.
« Une sheikah ? répéta-t-il, un peu abasourdi. Je pensais que le peuple sheikah s'était éteint ! »
Un silence s'installa ensuite. Gray observait Impa avec austérité pendant que celle-ci s'étonnait un peu plus de son attitude. Mais la lancière poussa un léger soupir en croisant les bras.
« Je vois que tu es au courant pour mon peuple...
— Bien sûr que je suis au courant pour ton peuple, répondit Gray alors qu'une certaine colère montait en lui. C'est en partie à cause de vous si mon village natal a été rayé de la carte ! Ma famille, mes amis et tous les habitants ont été massacrés parce que des monstres voulaient votre mort ! Et ni vous, ni cette femme qui nous sert de souveraine suprême n'êtes venus voir ce qu'il était advenu de ce village les années qui ont suivi.
— Un village rayé de la carte... répéta Impa en détournant son regard. Tu es donc originaire d'Orkidië... »
De son côté, c'était à peine si Epon réagissait à cette conversation. Trop peinée par la perte de sa mère et de nombreux zoras, elle n'avait pas envie d'écouter ce genre de dispute en cet instant. Link, lui, sentait que la tension montait entre Gray et Impa. Et plus particulièrement du côté de l'humain qui serrait ses poings de frustration et de rage. Le blond ne comprenait pas totalement toute l'histoire au sujet d'Orkidië ou de la disparition des sheikahs. Mais selon lui, l'heure n'était pas aux règlements de compte. Il alla donc se placer devant Gray et posa ses mains sur les épaules du plus grand, avant de le regarder droit dans les yeux :
« Gray... Calme-toi s'il te plaît. Nous venons de vivre une terrible bataille qui a eu raison d'un bon nombre d'innocents. On ferait mieux de tous se soutenir au lieu de se créer des conflits entre alliés. »
L'argenté ne lâchait pas Impa du regard. Au fond, il savait que Link avait raison. D'ailleurs, perdre ainsi son sang-froid ne lui ressemblait pas. Mais en cet instant et suite à la récente tragédie ayant frappé le domaine, il ne pouvait pas s'en empêcher.
« Gray, l'interpella une nouvelle fois le héros, le forçant à le regarder. Fais-le pour Epon ! Elle n'a pas besoin de voir son ami s'embrouiller avec son mentor. Surtout pas maintenant ! »
À l'entente du mot mentor, Gray écarquilla les yeux en regardant à nouveau Impa. C'était donc elle, la fameuse sheikah dont lui avait parlé Epon ? Celle qui avait appris l'art du combat à la demi-zora ? Le jeune homme ne savait pas comment réagir devant cette révélation. Depuis la disparition d'Orkidië, il avait développé de l'antagonisme envers les sheikahs et la famille royale d'Hyrule. Mais d'un autre côté, si cette Impa était au service de Zelda, cela faisait d'elle une alliée en plus d'être une forme de soutien majeure pour Epon. Les traits de Gray s'adoucirent tandis qu'il détournait son regard de tous. Link la lâcha alors en souriant légèrement, content de voir que le plus grand l'avait écouté.
« Je tolère ta présence parce que tu fais partie de l'entourage proche d'Epon, informa toutefois l'homme en noir à l'adresse de la blanche. Mais n'espère pas recevoir un quelconque signe de gentillesse de ma part. »
Impa demeura silencieuse et observa Gray qui n'avait d'yeux que pour le sol carrelé en cet instant. Bien qu'elle trouvait le comportement du jeune homme injuste, elle pouvait comprendre la rancœur qui l'habitait. Après avoir perdu son entourage et vécu seul pendant une bonne dizaine d'années dans un village en ruines, comment ne pouvait-il pas en vouloir à ceux qui étaient, d'une manière ou d'une autre, responsables de tout cela ?
Tout à coup, la porte de la chambre s'ouvrit une nouvelle fois. Les regards du groupe se tournèrent vers Finiel et Gabriel qui venaient d'entrer, tous deux haletant légèrement.
« Finiel ? Gabriel ? » les appela Link.
Mais le zora se précipita vers Epon pour la prendre dans ses bras.
« Si tu savais comme je suis soulagé de te revoir en vie, Epon... murmura son garde personnel.
— Finiel... répliqua tristement la jeune fille. Maman... Elle...
— Je sais. » lui avoua le zora en la berçant doucement pour la réconforter. Gabriel observa cette étreinte d'un air peiné, avant de se tourner vers les autres :
« Finiel est venu nous chercher, Gray et moi. Je ne pensais pas retrouver le village zora dans un état pareil. Nos ennemis sont vraiment cruels... »
Link serra ses poings, énervé. Il n'avait vraiment pas vu cette attaque de la part de leurs ennemis venir de la sorte. Il aurait tant voulu empêcher cela ! Empêcher Rutella, ainsi que de nombreux zoras, hyliens et humains de mourir dans cette bataille ! Même le peuple de Midona, les twilis, étaient mêlés à cela. Il craignait vraiment le pire pour la princesse du Crépuscule, désormais.
Le regard du héros se tourna vers Epon qui sanglotait dans les bras de Finiel. Ce dernier pleurait également la disparition des siens. Link échangea ensuite un regard avec Impa. Sa surprise avait été grande en découvrant les origines de cette femme, ainsi que le lien l'unissant à Epon. Mais il était encore plus étonné par ce qu'avait raconté Gray au sujet du massacre d'Orkidië. Les yeux du blond se posèrent alors vers l'argenté qui semblait perdu dans ses pensées, le regard dévié de tout le monde. Gabriel s'approcha doucement de l'élu de Din en souriant légèrement. Mais celui-ci l'ignora et marcha brusquement en direction de la porte.
« Mon ange ? l'interpella le manieur de rapière d'un air surpris.
— J'ai... besoin de faire un tour, répliqua l'homme en noir d'une voix grave. Ne me suivez pas. »
Sans même laisser le temps à quiconque de répondre quoi que ce soit, il quitta la chambre, laissant derrière lui tous les autres, pantois.
« Qu'est-ce qui lui prend ? demanda Finiel.
— J'aimerais bien le savoir, moi aussi. » confia Gabriel en observant Link. Ce dernier poussa un soupir avant de partir à la suite de Gray. L'autre blond, plus qu'inquiet que jamais pour son ange, imita le héros en sortant de la pièce à son tour. Il ne restait plus qu'Epon, Finiel et Impa dans la chambre. La princesse aux cheveux bleus se décolla de son garde personnel et essuya ses larmes d'un revers de sa main. Ce ne fut qu'à ce moment que Finiel remarqua les brûlures sur son bras découvert.
« Saintes déesses ! Mais qu'est-ce qui t'es arrivée ? demanda le soldat horrifié. Qui t'a fait ça ? »
Epon demeura silencieuse quelques secondes, le regard détourné, avant de répondre d'une voix monotone :
« Une saloperie qui se trouve en moi.
— Pardon ? s'étonna Finiel, qui ne comprenait pas.
— C'est à cause du phénix bleu, intervint Impa en se rapprochant des deux. Cette créature légendaire existe bel et bien et s'est visiblement réincarnée en Epon. Au moment où l'un de nos ennemis a assassiné Dame Rutella, ce phénix a commencé à se manifester, consumant peu à peu le corps d'Epon. Si Link ne l'avait pas arrêtée à temps, elle ne serait peut-être plus parmi nous au moment où nous parlons. »
Le zora était véritablement choqué par un tel récit. Dans un sens, tout cela expliquait l'émanation qu'il avait aperçue autour du corps de sa princesse la dernière fois où celle-ci méditait sous une chute d'eau. Mais il ne s'était pas attendu à ce que cette aura soit aussi dangereuse pour son corps. Malheureusement, ce qu'Epon ajouta ensuite l'ébranla définitivement :
« Cette sensation lorsque l'aura de ce phénix m'a enveloppée... C'était vraiment horrible... J'ai ressenti une douleur qu'aucun d'entre vous ne peut imaginer... »
La jeune hybride se recroquevilla sur elle-même, semblant trembler de peur.
« Tout mon corps me brûlait. J'avais l'impression d'être transpercée de partout... comme si on me torturait à l'infini. Mais le pire, c'était cette voix. Une voix si douce mais pourtant si glaciale, qui me répétait : laisse-moi me déchaîner. Sauf que je ne voulais pas que... que cette chose se déchaîne. Je n'arrivais plus à contrôler mes gestes et ma rage, même si je parvenais à retenir une partie de sa puissance...
— C'est la première fois qu'une telle chose t'arrive ? » questionna Finiel, complètement éberlué. L'hybride raconta qu'il lui était arrivé une chose similaire aux massifs des Pics Blancs lorsqu'elle affrontait Gilgamesh et ses acolytes, puis au village Cocorico lorsqu'Envy était apparu et avait gravement blessé Gray. Mais la sensation à ces moments n'était pas aussi terrible que celle ressentie suite à la mort de sa mère. Le garde zora ne savait pas quoi dire devant cette confidence. Il ne s'était pas attendu à ce que l'élue de Nayru se fasse posséder par cette créature légendaire qu'était le phénix bleu.
« Impa... appela alors Epon en la regardant. Si tu sais pour ce phénix en moi, tu dois être au courant pour ma marque divine, pas vrai ? »
La sheikah, toujours les bras croisés, ne répondit pas tout de suite. Bien qu'elle avait fait croire le contraire à son ancienne élève et à la famille de celle-ci, elle savait effectivement pour l'histoire tournant autour des marques divines, des élus maudits et de la déesse Lato. Mais elle pensait et espérait que toutes ces fables soient fausses. Hélas, elles étaient vraies, à l'instar de celle concernant le phénix bleu. À cause de cela, Epon se retrouvait avec un très lourd fardeau sur ses jeunes épaules. Pour le coup, Impa s'en voulait de n'avoir parlé de tout cela à personne.
« Zelda le sait aussi ? demanda la princesse des zoras.
— N'étant sûre de rien jusqu'à aujourd'hui, je ne lui en ai pas encore parlé.
— Et maintenant que tu sais que tout cela est vrai, tu comptes lui dire ? »
Son mentor réfléchit. Bien qu'Epon était une personne respectable et bienveillante, la marque de Nayru qu'elle portait faisait d'elle une ennemie du royaume. De plus, avec le phénix bleu en elle, même s'il s'agissait d'une créature ayant sauvé Hyrule autrefois, la demi-zora devenait une personne très puissante et dangereuse à cause de lui, aussi bien pour elle-même que pour son entourage. Ne rien révéler à Zelda, c'était prendre un risque de mettre la nation plus en danger qu'elle ne l'était déjà. Mais d'un autre côté, la sheikah ignorait comment la souveraine du royaume réagirait à l'annonce d'une telle révélation.
« Pour l'instant, je ne dirai rien, finit-elle par répondre. Mais tôt ou tard, Dame Zelda finira par l'apprendre. Et mieux vaut que ce soit de toi. »
Epon détourna son tristement regard, sous les yeux réellement inquiets de Finiel. Le zora avait beaucoup de mal à encaisser toute cette histoire d'un coup. Encore plus suite à la perte de Rutella.
Dans une section déserte du domaine zora, Gray venait de violemment frapper son poing contre un mur en serrant les dents. Après sa grande colère, c'était une profonde tristesse qui l'envahissait. L'élu de Din était à deux doigts de craquer. Les souvenirs d'Orkidië... L'attaque du domaine Zora... Rutella morte... Epon plus désespérée que jamais... Et maintenant cette sheikah qui sortait de nulle part... Cela faisait beaucoup en une journée pour l'argenté, dont les larmes perlaient à nouveau ses yeux bleus. Mais plutôt que de se laisser aller une fois de plus dans sa peine, Gray ferma les yeux en inspirant profondément à plusieurs reprises, pour tenter de se calmer.
« Gray... » retentit faiblement la voix de Link alors que celui-ci s'approchait de l'homme en noir avec Gabriel.
« Je vous avais pourtant demandé de ne pas me suivre ! rappela froidement l'élu de Din sans bouger de sa position.
— Mon ange, parla calmement Gabriel. Tu ne devrais pas te mettre dans un tel état. Je sais que c'est dur après tout ce qui s'est passé ici. Mais...
— Mais quoi ?! fit Gray en haussant le ton. Je devrais sourire en faisant comme si de rien n'était et en devenant pote avec ceux qui sont en partie responsables du massacre d'Orkidië ? Faire en sorte de réconforter tout le monde et leur redonner du courage pour affronter nos ennemis, en sachant pertinemment que nous n'avons pas la moindre chance face à eux ?! »
Il se retourna subitement pour faire face aux deux autres en serrant ses poings et ses dents, comme s'il était sur le point d'exploser.
« J'ai perdu ma famille et mon village lorsque j'étais gosse ! J'ai vécu dans la solitude depuis. Et lorsque je trouve enfin un nouvel entourage auquel m'attacher, c'est pour le perdre à nouveau, bordel ! Rutella est morte, comme beaucoup d'autres innocents avant elle ! Et Epon est dans un sale état à cause de ce putain de phénix ! Comment vous voulez que je ne me mette pas dans un état pareil après tout ça, surtout lorsqu'une sheikah au service de Zelda se pointe pile à ce moment ?! »
Ni Link, ni Gabriel ne s'était attendu à voir Gray dans un tel état. Lui, qui d'habitude était capable de garder son calme lorsqu'il le fallait, laissait éclater sa rage en ce jour. Mais une telle attitude était révélatrice de ce que l'homme en noir ressentait réellement : il avait terriblement souffert de la perte de sa famille et de son village. Et voir ce qu'il était advenu du domaine zora, c'était comme revivre ce funeste jour où il avait tout perdu. Link se rapprocha doucement de lui et posa sa main sur la joue de Gray, l'obligeant à le regarder :
« Je ne sais pas si je suis le mieux placé pour comprendre ce que tu ressens. Mais je n'ai pas besoin de l'être pour te dire que ni ta famille, ni Rutella, ni Epon auraient voulu te voir dans un tel état de souffrance et de désespoir. Et puis... »
Le regard de Link se tourna vers Gabriel derrière lui, faisant comprendre à l'argenté qu'il n'avait pas tout perdu le jour où Orkidië avait disparu, contrairement à ce qu'il disait. Gray observa à son tour son ami d'enfance, qui lui avait adressé un triste sourire.
« Je ne pensais pas que tu avais autant souffert pendant toutes ces années, confia le plus âgé des trois. Mais je me rends compte que cela fait sens avec ce que tu m'as raconté hier soir.
— Comment ça ? questionna Link, ne comprenant pas où Gabriel voulait en venir.
— Gray voyait Rutella et Epon comme une nouvelle famille. Bien avant le commencement de tous ces fâcheux événements, à force de se rendre au domaine zora durant toutes ces années pour les observer de loin, Gray avait fini par s'attacher à la famille royale zora. Il revoyait sa mère en Rutella et son jeune frère en Epon, en quelque sorte. Perdre Rutella, c'était comme perdre sa mère une seconde fois. »
Link comprenait mieux la réaction de Gray vis-à-vis de toute cette tragédie. Il savait à présent pourquoi ce jeune homme tenait autant à Epon et fut très touché par cette histoire. Néanmoins, un détail lui échappait :
« Pourquoi en vouloir autant à Zelda et aux sheikahs ? » demanda-t-il à Gray. Mais suite à une telle question, l'homme en noir se recula de Link avant de lui tourner le dos en croisant les bras.
« Mon ange ? l'interpella Gabriel.
— Les monstres qui ont attaqué Orkidië l'ont fait en pensant qu'il y avait encore des sheikahs vivant là-bas. Or, ce n'était pas le cas. Et une centaine d'innocents ont péri à cause de ça. Mais ce qui me rend dingue, c'est que la famille royale ne s'est même pas rendue sur les lieux du massacre, ne serait-ce que pour y déposer des fleurs en hommage aux victimes. »
Le jeune homme regarda ensuite ses deux amis, avant de continuer.
« J'ai enterré les cadavres de tous ceux qui ont perdu la vie, ce jour-là. Y compris ceux de ma mère, mon père et mon frère. J'ai nettoyé les marres et les taches de sang qui souillaient les ruelles et les maisons. J'aurais très bien pu quitter ce village pour aller vivre ailleurs, mais je ne pouvais pas me résoudre à abandonner l'endroit dans lequel j'ai grandi. J'ai pensé et espéré voir Orkidië renaître de ses cendres. Plus de dix années se sont écoulées et j'ai attendu tout ce temps. Mais rien. Les seuls êtres vivants qui osaient pénétrer dans les ruines de ce village étaient soit des monstres, soit des bandits. La famille royale n'est jamais venue et Orkidië est rapidement tombé dans l'oubli. »
Link demeurait bouche bée devant une telle histoire. Il ne s'était absolument pas attendu à cela. Quant à Gabriel, il avait détourné le regard, attristé en apprenant ce que son ange avait vécu pendant tout ce temps où ils avaient été séparés.
« Expliquez-moi comment je pourrais avoir du respect pour Zelda après ça. » termina l'élu de Din en détournant son regard des deux hommes. Link ne savait pas quoi répondre. Il était réellement désolé pour Gray et aurait voulu remonter le temps pour empêcher le massacre de son village natal. Mais il se demandait si Zelda était réellement celle à blâmer dans cette histoire. Gray en semblait convaincu mais Link avait des doutes à ce sujet.
« Je ne sais pas quoi te dire à propos de tout cela, avoua-t-il à l'homme en noir. Mais tu devrais prendre un moment pour discuter avec Epon. »
L'argenté afficha un air étonné.
« Ce que Gabriel vient de révéler au sujet de Rutella et d'Epon, je pense que tu devrais en parler à cette dernière. Elle vient de perdre sa mère et devient du coup orpheline. Je pense que savoir ce que tu ressens réellement pour elle lui ferait beaucoup de bien.
— Comme ça pourrait lui faire beaucoup de mal, contredit Gray sans le regarder. Tout dépend de la façon dont elle prendra une telle confession.
— Tu ne le sauras pas si tu ne lui dis pas. » affirma Gabriel. Mais alors qu'il venait d'achever sa phrase, le plus grand des blonds fut pris d'une soudaine migraine et se tint tout à coup le front en grimaçant de douleur.
« Gabriel ? s'inquiéta Link. Ça va ?
— Ça fait la deuxième fois que ça t'arrive, aujourd'hui ! rappela Gray en se rapprochant de son ami pour poser ses mains sur ses épaules. Qu'est-ce que tu as ? Et ne me fait pas croire que c'est à cause de nos recherches de ce matin ! »
L'homme à la longue chevelure dorée se contenta de sourire malgré la douleur. Link s'approcha de lui à son tour, dans l'intention de poser sa main contre le front de Gabriel afin de vérifier s'il avait de la fièvre. Mais ce fut à cet instant qu'il remarqua la grosse bosse sur le front du plus grand.
« Qu'est-ce que... ? fit Link en haussant les sourcils de stupéfaction. Comment tu t'es fait ça ?
— Juste une maladresse de ma part lorsque j'étais à la citadelle. Rien de grave...
— Gaby... murmura Gray, frustré que son ami ne lui dise pas d'où lui venait ces migraines.
— Ne t'en fais pas mon ange, je vais bien... » tenta de le rassurer le concerné, dont le sourire s'était agrandi. Face à son entêtement, Gray poussa un profond soupir. Link, lui, ne disait rien. Mais il soupçonnait Gabriel de leur cacher quelque chose. D'ailleurs, la bosse que celui-ci avait sur son front l'intriguait.
Dans sa chambre, alors qu'elle était encore en compagnie de Finiel et d'Impa, Epon eut un sursaut et se tourna vivement vers un point de la pièce, à l'étonnement des autres.
« Epon ? s'étonna Finiel. Qu'est-ce qu'il y a ?
— ... J'ai cru ressentir une énergie malfaisante à l'instant.
— Une énergie malfaisante ? réagit Impa en se mettant en garde alors qu'elle observait dans la même direction que l'hybride. Où est-elle ?
— Elle est partie... répliqua la demi-zora en se détendant légèrement. C'était instantané... Elle a disparu aussitôt que je l'ai ressentie. Peut-être que j'ai rêvé... »
Le zora et la sheikah s'échangèrent un regard dubitatif devant une telle réaction de sa part. Tous deux trouvaient étrange qu'elle puisse détecter une énergie malfaisante, même si c'était pendant une fraction de seconde, alors que toute menace semblait écartée du domaine zora pour le moment. Ils préférèrent se dire qu'Epon était encore sous l'effet de ses émotions, et que sa sensibilité aux énergies lui jouaient des tours à cause de cela.
Au palais du Crépuscule, Leviah se tenait debout sur le balcon d'une chambre. On pourrait croire qu'elle contemplait avec fascination les cieux obscurs de ce monde. En vérité, son regard était vide et perdu. Elle ne pensait à rien en particulier et aucune émotion n'était visible sur ses traits. Elle demeurait également silencieuse. Cette attitude contrastait avec la crise de pleurs qui s'était emparée d'elle lors de l'attaque menée sur le domaine Zora.
« Alors ma belle ! Tu prends l'air ? » retentit la voix d'Alvaro tandis qu'il s'était adossé au à l'encadrement de l'ouverture reliant la chambre au balcon. L'élue de Farore réagit à peine. À part baisser la tête, elle ne fit rien. Elle ne prononça aucun mot et son expression ne changea pas.
« À vrai dire, je peux comprendre que tu aies besoin de calme et de silence suite à ce qui s'est passé récemment, reprit le violet en affichant un rictus narquois. Après tout, ta santé mentale est très instable. Un peu de tranquillité te fait donc du bien. »
Tandis que la blonde semblait s'être murée dans son mutisme, son complice s'approcha pour se coller à elle par l'arrière et passer ses bras autour de sa taille.
« N'empêche, continua-t-il, c'était une belle bataille à laquelle nous avons assisté, au domaine zora. Ce mélange de peine et de colère dans les yeux de cette chère princesse était tout simplement somptueux ! Et cette aura qui l'enveloppait... majestueuse ! Oh, si seulement je pouvais serrer cette beauté dans mes bras comme je suis en train de le faire avec toi ! »
Mais alors que son regard s'assombrissait, il se décolla de la blonde qui ne bougeait pas d'un iota.
« Hélas, tu n'es pas elle. Tu n'as ni son tempérament, ni ce côté envoûtant qui me fait tant d'effets. Cela est fort dommage pour une beauté telle que toi. Malgré ta sympathie et ta docilité, tu n'es plus que l'ombre de toi-même. Une coquille vide malmenée par la malchance. »
Cependant, il l'attrapa par le poignet pour la faire vivement se retourner et lui adressa un sourire.
« Mais cela ne t'empêche pas de me satisfaire. Loin de là ! » affirma-t-il alors que sa main glissait le long des courbes de Leviah, jusqu'à remonter à son épaule. Il attrapa ensuite la brettelle de sa robe et la fit descendre légèrement pour dévoiler la peau de la jeune femme à ce niveau. Il y déposa ses lèvres, offrant plusieurs petits baisers à l'élue de Farore qui ne put s'empêcher de frissonner malgré son actuelle impassibilité.
« Tu aimes lorsque je t'embrasse de la sorte ? murmura Alvaro entre deux bises. Dans ce cas, que dirais-tu d'aller plus loin que ça ? »
Alors qu'il intensifiait son geste, il posa son autre main sur la seconde bretelle du vêtement de la blonde dans l'intention de la déshabiller encore plus. Seulement...
« Calme tes ardeurs, Alvaro ! » s'éleva la voix de Gilgamesh. Le violet interrompit sa manœuvre en esquissant un sourire à la fois sournois et gêné. Après avoir remis la robe de Leviah en place, il se retourna pour faire face au faucheur :
« On peut dire que tu as le don d'arriver au bon moment, mon cher !
— Et toi, tu es doué pour me dégoûter de jour en jour, déplora l'encapuchonné en croisant les bras d'un air blasé. Tel père tel fils, visiblement ! Aussi répugnants l'un que l'autre.
— À ce point ? rit presque le plus jeune. Pourtant, ça ne t'a pas empêché de t'associer à mon père, puis à moi pour tes plans.
— La seule raison pour laquelle je t'ai choisi en tant qu'allié c'est pour ton génie dans certains domaines qui m'intéressent particulièrement. Sans cette qualité, je t'aurais décapité sur place depuis bien longtemps, tant ta perversité et ta fourberie m'exaspèrent !
— Tu n'es définitivement pas marrant, Gilgamesh ! regretta Alvaro en haussant les épaules sans perdre son sourire. Mais soit ! Si tu ne veux pas me laisser avoir un moment d'intimité avec cette tendre Leviah, j'essaierai de m'abstenir. Par contre... »
Le sourire du violet s'élargit légèrement, prenant un air mesquin :
« J'ignore si je pourrais me retenir lorsque nous aurons enfin mis la main sur la petite Epon !
— Tu feras ce que tu veux de son cadavre, si ça te chante ! Mais j'ai d'abord besoin d'elle pour ce que tu sais déjà ! Je n'ai pas envie que tu la souilles avant.
— C'est ce qui s'appelle un beau gâchis que de tuer une si jolie sirène.
— Au lieu de raconter tes bêtises, j'ai besoin de ton expertise pour la suite de mon projet. Alors boucle-la, reste à ta place et contente-toi de faire ce que je te dis ! »
Le violet se contenta de soupirer de façon exagérée. Toutefois, il se doutait déjà du sort que le faucheur pouvait lui réserver, s'il ne lui obéissait pas. Désirant rester en vie, mais surtout curieux d'assister au déroulement des événements à venir, le jeune homme acquiesça et suivit l'élu de Lato qui sortait déjà de la chambre. Les deux laissèrent ainsi Leviah seule. La blonde n'avait pas bougé de sa position. Mais de légers tremblements semblaient parcourir son corps alors que son regard habituellement las s'était légèrement écarquillé de frayeur.
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