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Une dyade.

Tel était le terme juste pour définir ce lien si particulier qui les unissait : deux principes philosophiques qui se complètent réciproquement. Un yin et un yang, tous deux composés de blanc et de noir, s’opposant et se complétant à la fois.

Comment vivre et survivre à une telle rencontre lorsqu’il s'agit de deux corps vivants ? Comment assumer ce poids philosophique lorsque nous parlons de deux êtres physiquement constitués ?

Elle avait explicitement peur de souffrir et était intérieurement attirée par lui. Il avait une attirance clairement assumée mais une peur cachée tout au fond de ses entrailles. Elle était la nuit et lui le jour, à moins que ce ne soit l’inverse. Aucun de ces deux compagnons n’auraient pu vous dire qu’il avait la bonne réponse à cette affirmation.

Leur première rencontre fut brève. Elle était la pour une raison, lui pour une autre et ils échangèrent quelques regards et quelques piaillements qui leur permirent de se présenter succinctement. Puis elle s’en alla d’un côté et lui de l’autre.

Lors de leur deuxième rencontre, bien qu’il n’eût pas à s’exprimer plus que cela, ils convinrent de continuer à se revoir sans vraiment s’attendre à la tournure que prendraient les événements.

Les quelques mois qui suivirent, ils se découvrirent doucement - en termes de lenteur et de douceur - et se rapprochèrent jour après jour, centimètre par centimètre, jusqu’à ce que l’une comme l’autre commençât à douter sur le pourquoi de cette présence, de cette rencontre, tels deux animaux sauvages s’apprivoisant mutuellement. « C’est effrayant de se faire apprivoiser », se disaient-ils chacun de leur côté.

Elle avait peur et lui aussi, il était attiré et elle aussi.

Parfois, lorsqu’elle regardait les feuilles des arbres, il l'observait dans chacun de ses mouvements, dans chacune de ses respirations. Parfois c’était l’inverse. Il aimait bien son odeur mais il ne pouvait pas lui dire. Elle le sentit quelques fois mais ne le lui dit pas.

Un beau jour, à force de virevolter l'un autour de l’autre, ils décidèrent de se poser pour tenter de comprendre ensemble ce qu’il était en train de se passer, ce qu’ils étaient en train de vivre. Il lui exprima son attirance et elle lui exprima ses peurs et ses souffrances. Puis ce fut l’inverse, jusqu’à ce qu’une étreinte sincère et passionnée vînt anéantir le besoin de tout autre mode d’expression.

Ils restèrent là quelques temps, se connectant paisiblement l’une à l’autre, puis elle répartit de son côté et lui du sien.

Lors des quelques jours qui suivirent, il manifesta de manière plus prononcée son attirance et cela lui exacerba ces peurs ancestrales qui la tenaillaient. Elle lui fit comprendre que ce moment ne devait plus avoir lieu, que ce n’était justement pas le bon moment. Il pouvait tellement ressentir l’essence de ses émotions qu’il comprit instantanément qu’il devait respecter sa demande. Il tenta alors de se mettre en retrait, autant qu’il le pouvait car il avait lui-même ressenti beaucoup de sensations, de joie et de peurs.

Les jours passèrent longuement pour lui mais il préférait la savoir apaisée. C’était apaisée qu’elle était la plus belle.

Sept jours plus tard, il la rencontra de manière hasardeuse et vit qu’elle était triste. Cela le rendit triste aussi alors il lui demanda s’il pouvait être présent pour elle. Elle accepta.

Ils passèrent une journée d’une intense et libre connexion, défiant tout précepte de bêtes sauvages. Le plus beau résidait dans le fait qu’ils n’étaient pas non plus apprivoisés, juste libres et connectés au même instant. Ils restèrent enchevêtrés l’une à l’autre durant des heures et une sérénité précieuse vint témoigner de la dyade.

Mais tel le yin et le yang, la lumière devait faire place à la noirceur et l’intensité de l’événement fit place à une obscurité sans précédent. Il se revirent six jours plus tard, le temps qu’elle puisse émerger des abîmes qui la retenaient. Il avait eu mal pour elle durant ces six jours. Lorsqu’ils se retrouvèrent de nouveau, il était perdu et apeuré de lui faire mal et de la brusquer. Il ne savait pas vraiment quelle attitude adopter. Il la laissa alors reprendre le rythme qu’il avait perturbé et resta à bonne distance de toute imposition malvenue.

Le lendemain, il la retrouva et ils prirent conscience que lui devait s’envoler pour de nouveaux horizons avant que ce ne soit à elle d’en faire de même la semaine suivante et, telles deux proies prises en embuscade, ils s’enlacèrent et se bécotèrent passionnément comme s’il s’agissait d’un premier au revoir. Puis il partit et elle commença à découvrir ses nouveaux horizons.

A leurs retrouvailles, peurs et joies s’étaient équilibrées. Pour l’une comme pour l’autre. Ce juste et fragile équilibre en était d’autant plus effrayant. Tenir en équilibre est une tâche bien périlleuse.

Ils allaient se quitter ce soir et, sans vraiment vouloir le comprendre, ils laissèrent passer le temps comme s’il n’y avait rien d’autre à faire. Quelques regards, doux et forts à la fois telles leurs ultimes étreintes, leur permirent de certifier que tout cela avait bien eut lieu. Ce n’était pas un rêve d’oiseau.

Paisiblement posés sur une branche de bouleau, la mésange mâle observa la mésange femelle desserrer son étreinte et prendre son envol. Elle était belle quand elle était apaisée. Il l’espère heureuse et des yeux plein de vie.

Parfois la mésange mâle se pose encore patiemment sur la branche qu’ils ont occupé à deux, espérant la venue de la mésange femelle.

C’est un réflexe animal.


Texte publié par Vinzorama, 4 août 2022 à 15h01
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