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tome 1, Chapitre 28 « Marley » tome 1, Chapitre 28

Je déambule dans les rues désertes de Lutz, je suis perdu, c’est la première fois qu’une chose si forte m’arrive. J’ai l’impression d’avoir été capable de montrer des images de mon passé à Peter en le touchant, comme si mes pouvoirs évoluaient. Le gros problème est que je n’ai pas réussi à maîtriser mes émotions, j’espère que le souvenir de nos adieux a été brouillé dans sa tête aussi, car s’il se rend compte de qui je suis vraiment alors qu’il n’a pas retrouvé la mémoire, il est fort probable que je finisse avec une balle entre les deux yeux. Qu’adviendra-t-il si je meurs ; si Peter révèle tout à son père et qu’il me fait exécuter ? Je dois retourner à la Citadelle pour prévenir Barbas, mon frère, Lucius, et Sam de ce qu’il vient de se produire. Je me rends au passage secret du cimetière du « Corbeau borgne ». Après avoir vérifié que personne ne me suit, je m’engage dans le tunnel, puis je ressors à la lumière de la Citadelle quelques minutes plus tard.

— Marley est là !

Je suis entrée depuis moins de trente secondes et déjà mes amis accourent autour de moi.

— Marley, que fais-tu ici ? me demande Sam inquiet.

— J’étais sur le pont des âmes avec Peter, tout allait bien, il parlait à Mina Valentino et je ne sais pour quelle raison je l’ai embrassé.

— Tu l’as quoi ?! s’indigne mon petit frère.

— Je sais, je sais, toujours est-il qu’il s’est produit une chose très étrange, à l’instant où mes lèvres ont touché les siennes j’ai réussi, par je ne sais quel moyen, à lui transmettre des souvenirs que nous avions en commun.

— Impossible ! S’écrit Barbas. De tels dons ne peuvent exister !

— Barbas a raison, tu es peut-être une Corvinus, mais ce don même notre ancêtre ne l’a jamais eu, rétorque Sam

Folle de rage que personne ne daigne me croire, je saisis violemment le bras de Barbas et l’oblige à revivre le fiasco à l’usine de médicament, puis je lui montre notre dernier combat avec Peter à travers mes yeux. Sous le choc ce dernier s’éloigne de quelques pas afin que je ne puisse plus le toucher, il est pris de nausées.

— Pardonne-moi mon enfant, je retire tout ce que je viens de dire. Tu as effectivement un don prodigieux, dit-il en s’inclinant légèrement en signe d’excuse.

— C’est prodigieux ! me dit Sam

— Non, c’est tout le contraire, mes émotions ont pris le dessus et je lui ai montré par mégarde nos adieux…

— Et où est le problème ? demande Ryan

— Le jour de nos adieux, Peter m’a appelé par mon véritable nom ; Marley Corvinus. Je crois que j’ai réussi à stopper le souvenir avant qu’il ne prononce mon nom, mais je n’en suis pas sûr.

— Écoute ma chérie, me dit Sam. Tu vas retourner au Dôme, si Peter avait entendu la fin de ces paroles, tu serais déjà morte. Alors je pense que tu ne crains rien pour le moment.

Je regarde Sam, j’aimerais lui faire confiance et croire ce qu’il dit, mais j’ai terriblement peur, si jamais Peter savait tout alors je ne pourrais plus le sauver. Chip me tire sur la robe pour me parler, je me baisse à son niveau, elle met ses deux mains sur mon oreille comme pour me dire un secret.

— Marley, Peter est amoureux de toi, il s’en souviendra j’en suis sûr. On n’oublie jamais sa première amoureuse.

Ce qu’elle dit n’est pas absurde, loin de là. Si Peter avait perdu son âme il n’aurait pas hésité une seconde à me tuer sur le pont des âmes quand il en a eu l’occasion, pourtant il m’a laissé la vie sauve… J’embrasse chacun des membres du groupe au cas où, et je retourne au Dôme pour avoir le verdict.

***

Je suis dans l’appartement, Will dort profondément et ne s’est pas inquiété de mon absence, il faut dire qu’il est habitué maintenant. Je me glisse dans mon lit et m’endors rapidement, mais ma nuit est plus qu’agitée : je déambule dans ce qui semble être les ruines d’un château médiéval, mon arc est dans mes mains et une flèche est déjà encochée. Un bruit assourdissant retentit derrière moi, aussi vive que l’éclair je bande mon arc en direction de ce vacarme. Logan et Alice se tiennent là juste derrière moi, ils sont beaux, ils me sourient.

— Bienvenue ma sœur, me dit Alice de sa petite voix.

— Qu’est-ce que…

— Si on m’avait dit un jour que tu deviendrais aussi forte, j’y aurais cru sans hésiter. Marley j’aurais tellement aimé pouvoir te rendre heureuse, avec une vie simple, dit Logan.

— Qu’est-ce que je fais ici ? Vous êtes mort…

— Oui, nos corps sont morts, mais dans ton esprit, dans ton cœur nous continuons de vivre à travers toi, dit Alice d’un ton rassurant et bienveillant.

Je suis tellement heureuse de les voir tous les deux bien que je sache que tout cela n’est qu’un rêve.

— Alice, que dois-je faire avec Peter ?

— Je ne peux pas te répondre clairement, mais je pense qu’il ne t’a pas totalement oublié sinon tu serais déjà morte, il doit y avoir un moyen de le faire revenir, mais toutes les réponses tu ne les trouveras pas à la surface, il faut que tu ailles chercher dans les entrailles du Dôme, au quartier des expériences.

— Tu crois qu’ils ont fait des expériences sur lui ?

— Marley, crois-tu à l’accident ? me demande Logan

— Non je n’y ai jamais cru.

— Alors, descends dans le gouffre et sauve-le ! Mais reste quand même sur tes gardes.

— Logan, dis-je en me mettant à pleurer. J’aurais dû te sauver, j’aurais dû vous sauver tous les deux. Je n’aurais pas dû vous laisser mourir.

Alors il se rapproche de moi et pose ses mains sur mes épaules.

— Tu ne dois te sentir coupable de rien. Tu as fait ce qu’il fallait faire, tu as fait énormément pour tous ces gens. Je devais mourir et Alice aussi, c’était écrit.

— Mais c’est tellement injuste !

— Oui, la vie est injuste, tu dois te battre, pour lui, pour qu’il revienne, pour qu’il t’aime à nouveau et pour qu’ensemble vous sauviez le pays, il n’y a qu’ensemble que vous y arriverez.

— N’oublie pas, les entrailles du Dôme… me répète Alice

Puis ils s’en vont main dans la main jusqu'à complètement disparaître en me laissant seule dans les décombres.

***

Je me réveille en sursaut, le soleil vient juste de se lever, Will prépare un peu de café, les couloirs sont encore sans bruit.

— Bonjour Will, j’ai une mission pour toi. J’ai comme le pressentiment que les réponses à nos questions se trouvent dans les sous-sols du Dôme, et je veux y pénétrer, tu crois que c’est possible ?

— Oui, j’ai étudié les plans du complexe et c’est possible, mais il faudra passer par les conduits d’aération et ne pas être visible, ils ont des détecteurs de mouvements et de chaleur.

— Alors il vaut mieux agir dans la journée ?

— Le matin pour être plus exact, les scientifiques prennent leur service, mais aucun dirigeant n’est présent et la garde de nuit est en effectif réduit.

— Tu pourrais me fabriquer un badge d’entrée ?

— Oui, un jeu d’enfant, mais ils vont te reconnaître…

— Les scientifiques sont des hommes et des femmes de l’ombre, ils ne montent jamais à la surface, ils ignorent qui est Mina Valentino.

Will surexcité par un peu d’action se met au travail pour me fabriquer un faux badge. Il sort du double fond de sa valise une petite machine semblable à une imprimante miniature, et en quelques minutes il me tend un badge flambant neuf. Je lui dépose un baiser sur la joue, enfile une jupe tailleur et un petit chemisier blanc puis sors de la chambre et me rends au rez-de-chaussée. Il ne faut surtout pas que je croise le président, ni même Peter, ce serait une catastrophe. J’arrive dans le grand hall et aperçois un scientifique en blouse, je le suis en espérant qu’il me conduise jusqu’au sous-sol. Il entre dans un ascenseur, je me glisse à l’intérieur avec lui.

— Pardon, je suis en retard, dis-je en courant.

— Aucun problème, mademoiselle. Vous êtes nouvelle ici ?

— C’est exact, je viens d’être engagée et je ne connais pas encore les locaux.

— Je me présente, je suis le docteur Stones, chargé des programmes de sécurité du Dôme. Où allez-vous, mademoiselle ?

— Sous-sol…

— Je m’en doute. (Le docteur me sourit, mon plan marche à la perfection) Dans quel département devez-vous aller ?

— Nouvelles expérimentations…

En entendant ces mots, le médecin devient blanc comme un linge.

— Ça ne va pas docteur ?

— Si si bien sûr, mais je trouve cela étrange que vous soyez affectée à cette unité alors que vous êtes si jeune. Une jeune fille comme vous ne devrait pas être obligée de voir toutes ces choses. Alors, laissez-moi vous donner un conseil, méfiez-vous des gens, une en particulier.

— Vous voulez parler de la fille du président ?

— Je ne devrais pas vous le dire, mais il faut que vous sachiez où vous mettez les pieds. Elle a fait croire à tout le monde, même au président que son frère a perdu la mémoire suite à son accident d’hélicoptère…

— Il a bien eu un accident non ?

— Oui, mais suite à cet accident, avec l’aide du Docteur Van Garden, Lilith a plongé le jeune homme dans le coma, puis elle lui a administré pendant trois mois des doses quotidiennes d’une nouvelle substance qui permet d’effacer la mémoire, ce sérum a été créé par ce même Docteur Van Garden.

Je n’en crois pas mes oreilles, il me livre tous les secrets dont j’ai besoin sans même que je les lui demande.

— Mais vous voulez que je vous dise le pire de l’histoire, c’est qu’ensuite elle a remodelé les souvenirs de son frère comme elle voulait.

— Comment a-t-elle fait ?

— Facile, racontez ce que vous voulez à un amnésique, même si ces histoires sont fausses, le malade pensera qu’il s’agit de la réalité, et pour conforter le malade dans son idée montrez-lui des vidéos truqués et le tour est joué ;

— Mais il doit bien y avoir une faille où…

— Oui, le produit est instable, il doit donc recevoir une dose quotidienne de produit pour que sa mémoire reste effacée. C’est sa femme qui lui administre les doses, Peter Anderson pense que c’est son traitement suite à l’accident, il ne se pose même plus la question.

Sa femme... Je savais que cette Fanny cachait bien son jeu, mais à ce point, sous ses airs de petite sainte elle est en réalité une perfide sorcière.

— Donc s’il arrêtait d’en prendre, sa mémoire reviendrait ?

— Oui…

— Alors il faut faire en sorte qu’il n’en prenne plus…

— Oui s’il n’en prenait plus sa mémoire reviendrait…mais il mourrait.

— Cela le tuerait ?! Mais comment cela pourrait-il le tuer ?

— Je ne peux rien dire à ce sujet-là. Vous en savez déjà trop. Bonne chance mademoiselle.

L’ascenseur s’arrête et le docteur quitte l’habitacle très rapidement. Je dois le faire parler, par tous les moyens.

— Docteur Stones attendez.

Je le suis dans les sous-sols du Dôme jusqu'à son bureau. Il est tout affolé, je ferme la porte derrière nous.

— Docteur dites-moi ce que vous savez.

— Je ne sais rien de plus…

— Vous mentez, docteur dites-moi la vérité, la vie de Peter Anderson est en danger. Vous devez m’en dire plus.

— Mais pourquoi êtes-vous tant intéressée par la vie de Peter Anderson ?

— J’ai été... engagée par quelqu’un pour lui sauver la vie, et si vous m’avez parlé de tout ce complot tout à l’heure c’est que vous êtes inquiet pour Peter vous aussi.

— C’est vrai, j’ai travaillé pour monsieur Peter quand il avait tout juste vingt ans et qu’il est revenu de son école, je le suivais médicalement, je le soignais quand il revenait de mission. Et puis il est tombé amoureux de cette femme et elle est partie. C’est ce qui a causé sa perte. J’imagine tomber juste si je disais que c’est cette femme qui vous emploie madame.

Alors Peter avait parlé de moi à son médecin, le docteur Stones connaît donc la liaison qui nous unit.

— Elle souhaite être discrète et si comme vous le dites Peter Anderson est comme votre fils alors vous aller me dire comment nous pouvons le sauver.

— Et si je vous avais menti sur mes relations avec Peter, si en fait je vous avais mené en bateau ?

— Alors vous auriez été stupide, car vous auriez provoqué votre propre mort.

La peur envahit son corps et il tremble comme une feuille. Le médecin, ferme la porte de son bureau, s’installe à son poste de travail et ouvre un fichier sur son ordinateur.

— Depuis le retour de Lilith, je savais qu’elle ferait n’importe quoi pour manipuler son frère, elle a toujours soupçonné qu’il n’était pas totalement dévoué aux Bellãtriens. Quand Van Garden a élaboré ce sérum, j’ai fait des recherches sur ce produit, il n’y a pas pire poison au monde et le seul antidote est de continuer de le prendre c’est pour cela que Peter n’a pas le choix. Mais ça, vous le savez déjà. C’est pour cela que j’ai poussé mes recherches pour trouver une alternative au produit. Il faut quelques mois de sevrage avant que le corps se consume, mais la destruction des organes internes est inévitable. Mes recherches ont abouti il y a quelques mois et j’ai réalisé que la seule substance susceptible de stopper les effets du poison se trouve dans le sang de Marley Corvinus. Les molécules contenues dans son sang permettent à tous les tissus de cicatriser à une vitesse impressionnante.

— Comment savez-vous cela ?

— Et bien, parce que dans le passé, j’ai étudié le sang d’Alexandra Corvinus ; la mère de Marley Corvinus. Tous mes travaux sont restés secrets bien entendu et Lilith n’est au courant de rien, vous imaginez bien.

Le docteur Stones est l’homme qui a étudié ma mère alors que je n’étais qu’un fœtus, et s’il n’avait pas caché ma véritable nature aux Bellãtriens je n’aurais jamais vu le jour.

— Marley Corvinus possède le sang le plus pur de toute sa lignée, ne me demandez pas pourquoi, mais elle est le fidèle clone féminin de son ancêtre Alexandre Corvinus. Cette faculté à cicatriser pourrait peut-être permettre de soigner le corps de Peter. Avec un échantillon de son sang je pourrais tenter de créer un anti poison, par contre il faudrait l’injecter directement dans le cœur de Peter si on veut espérer que cela marche, c’est la seule solution que j’ai trouvée.

— Et croyez-vous que Lilith pourrait se servir de ce sérum sur les prisonniers ?

— Possible, elle l’a déjà fait et les résultats sont les mêmes que sur Peter, si j’étais Marley Corvinus, je détruirais tout le laboratoire qui produit cette substance et neutraliserais son créateur le docteur Van Garden. Maintenant, vous devez partir, les espions de Lilith sont partout et j’ai peur que nous soyons écoutés.

— Non j’ai besoin de vous pour Peter.

— Vous avez besoin de Marley Corvinus et de son sang, je vous ai dit tout ce dont vous aviez besoin de savoir. Ramenez-moi son sang et je pourrais commencer à expérimenter un contrepoison. Mais, d’ici là, restez loin de ce laboratoire, où notre opération pourrait être vouée à l’échec.

— Il vous faudrait combien de temps ?

— Six mois environ, je ne peux pas prévoir moins.

— Alors vous devez commencer de suite.

Je m’assois sur son bureau et remonte la manche de mon pull.

— Mais qu’est-ce que vous faites ?

— Vous avez dit avoir besoin du sang de Marley Corvinus, prenez-le !

Le Docteur Stones reste sans voix, il prend son kit de prélèvement et me fait face.

— Vous êtes folle de venir ici, madame.

— Je sais, mais je ne pouvais pas laisser Peter ainsi et si je n’étais pas partie il n’aurait jamais perdu la mémoire.

Les larmes me montent aux yeux, le docteur Stones plante l’aiguille dans mon bras et remplit une poche de sang.

— Gardez ça secret Docteur.

— Faites-moi confiance.

— Je n’ai confiance en personne ici, mais je pense que si vous aviez voulu me doubler vous auriez déjà appuyé sur le bouton d’alerte rouge qui se trouve sous votre bureau. Alors je pense que nous servons la même cause, du moins pour ce qui est de sauver Peter.

Il récupère les échantillons et les glisse dans sa sacoche. Il ouvre la porte de son bureau vérifie qu’il n’y a personne dans le couloir et m’invite à quitter les lieux. Je sors du bureau et traverse les sous-sols pour retrouver l’ascenseur, en chemin je reconnais la voix de Fanny, la femme de Peter. Avec précaution je m’approche du bureau d’où provient la discussion.

— Je n’ai plus assez de traitement ! Vous devez en fabriquer encore !

— Mademoiselle Fanny, je ne peux pas relancer la production sans l’accord préalable de Madame Lilith.

— Alors, appelez-la, faites quelque chose où il mourra !

— Non ne vous inquiétez pas, il a encore plusieurs mois avant que le sevrage ne le tue.

— Mais il aura retrouvé la mémoire d’ici là !

— A vous de faire en sorte qu’il ne la retrouve pas, nous devons attendre que Lilith revienne de son voyage.

— Mais elle est partie ce matin ! Quand sera-t-elle de retour ?

— Dans six mois.

— Dans six mois ?! Non c’est bien trop long, je ne pourrais pas le tenir éloigné de son ex aussi longtemps !

— Ma chère enfant, vos histoires de cœur ne nous intéressent pas, tout ce que nous voulons c’est qu’il reste dévoué aux Bellãtriens. Si vous n’avez plus de question, sortez de mon laboratoire, j’ai encore beaucoup de travail.

Fanny sort du bureau très en colère, je la suis discrètement jusqu'à l’ascenseur, elle prend le premier et moi le deuxième. Je remonte dans l’appartement en prenant soin d’être le moins suspect possible, il faut que je réfléchisse à un plan, j’ai reçu trop d’informations en si peu de temps et il faut que j’analyse tout ça : Peter est sous l’emprise d’une sorte de drogue qui efface sa mémoire, s’il arrête de la prendre il retrouve la mémoire, mais il perd la vie, sauf si le docteur Stones réussi à fabriquer un anti poison à partir de mon sang. Tout est si compliqué, je dois lui faire recouvrer toute sa mémoire avant qu’il ne succombe.

***

Quelques jours ont passé depuis ma discussion avec le docteur Stones et je ne sais toujours pas comment aider Peter à retrouver la mémoire. De plus, sa femme ne le lâche pas d’une semelle, ça devient agaçant, il va falloir que je lui subtilise son mari et très vite. J’observe tous les jours Peter et sa femme, quand ils sont chez eux, quand ils se promènent…une chose est flagrante, Peter n’aime pas cette petite peste. J’ai pu remarquer également que les effets du sérum ont commencé à se dissiper, Peter se souvient de certains détails sur Mina et Rose Valentino, il le dit à sa femme, mais elle fait mine de ne pas l’entendre. Ce soir, j’espère bien libérer Peter des griffes de cette gamine arrogante. Je suis dans le grand chêne du jardin de Peter et attends une opportunité. Voilà deux heures que je suis perchée sur cette branche et mes fesses commencent à me faire mal. La chance me sourit enfin quand des éclats de voix résonnent, à travers la fenêtre de leur cuisine, j’entends Peter s’énerver. Ils se disputent à cause de ses souvenirs, semble-t-il, ainsi que de l’abandon de son poste. Fanny est hystérique, elle hurle et fait de grands gestes. Soudain, Peter sort de la maison en claquant la porte et s’en va près de l’arbre où je suis perché, il s’assied au pied et ferme les yeux. Je descends de mon perchoir et m’appuie contre le tronc comme si je venais d’arriver.

— Si on m’avait dit un jour que le grand Peter Anderson pouvait être malheureux, je ne l’aurais jamais cru.

Il ouvre les yeux et me sourit tristement.

— Mina vous savez que si Fanny vous voit ici, elle nous égorgera tous les deux…

— Elle n’est pas obligée de nous voir, suivez-moi.

Je lui prends la main et le force à se lever, nous faisons quelques pas quand Fanny sort furieuse de sa maison et appelle Peter.

— Vite, cachez-vous !

Je plonge au sol dans les herbes hautes et l’entraîne avec moi, nous attendons que Fanny retourne chez elle et ferme la porte avant de nous lever.

— Peter, venez avec moi, vous avez besoin de vous changer les idées.

— Non Mina, je ne peux sortir du Dôme, le médecin a dit que j’étais trop faible.

— Faible de quoi ? Vous pouvez marcher ? Vous pouvez respirer ? Alors pas question que je vous laisse là et que j’aille m’amuser sans vous.

Peter commence déjà à s’affaiblir suite au sevrage du sérum, mais nous avons encore quelques mois devant nous. Je conduis Peter jusqu’au portail du Dôme, les casques noirs nous laissent passer sans problèmes et nous nous aventurons dans les rues de Lutz.

— Mina, je ne suis pas aimé des rebelles, vous le savez.

— Vous ne craignez rien, je suis là pour vous protéger. (Je lui jette un petit clin d’œil malicieux avant de passer mon bras sous le sien) Allez venez.

Nous nous promenons au clair de lune le long des quais de Lutz, puis nous nous asseyons au bord de la fontaine aux vœux.

— Peter, pourquoi votre femme ne m’aime pas ?

Je joue l’innocente pour qu’il me parle et qu’il travaille au mieux sa mémoire.

— Cela fait plusieurs jours que j’ai des flashs sur mon passé, certaines images sont encore floues, mais d’autres sont très nettes. Votre première venue au Dôme est très nette à présent. Je me souviens de la première fois où nous avons dansé ensemble, je me souviens de la sensation de votre main dans la mienne, votre sourire aussi radieux que celui d’aujourd’hui et vos yeux… Ces yeux qui hantent mes nuits. Je me suis souvenu de tout cela et Fanny n’a guère aimé. Elle pense que je vais l’abandonner et puis elle me reproche sans arrêt mon manque d’ambition au gouvernement. Mais elle ne comprend pas que je ne me sens pas à ma place ici.

— L’aimez-vous ?

— Je vous demande pardon ?

— Est-ce que vous aimez Fanny ?

— Elle est mon épouse, je la respecte et…

— Peter, vous avez déjà aimé ? Je veux dire un amour si fort que plus rien ne compte autour, un amour si passionnel que vous pourriez tuer pour l’autre ? Est-ce comme cela que vous aimez Fanny ?

— Oui j’ai déjà aimé comme vous dites, mais je ne me souviens plus à qui était destiné cet amour si fort. Concernant mon épouse, notre mariage a été arrangé, Lilith nous a présentés et quelques mois après nous étions mariés. Je ne peux aimer une femme qui n’en est pas une. Elle n’a que seize ans, c’est une enfant. Nous avons huit ans de différence et nous ne nous comprenons pas. J’aurais aimé trouver une femme qui soit du même tempérament que moi, une femme qui soit rebelle et qui ne se laisse jamais faire, une femme belle, libre et indépendante. Une femme comme …Marley Corvinus.

Ai-je bien entendu ce qu’il vient de dire ?

— Vous plaisantez Peter ?

— Non je suis sérieux, je sais que j’ai essayé de la tuer, je sais qu’elle mène les rebelles qui veulent la chute du gouvernement, mais je ne sais pas il y a quelque chose qui m’attire en elle, c’est cette force qu’elle a. À chaque fois que je l’ai combattue, elle était si déterminée et si arrogante avec moi, elle n’aurait pas hésité à mourir pour ses hommes. Je ne pourrais pas vous dire ce qui me plaît chez cette femme, mais elle m’intrigue, tout comme vous en fait.

— Je vous intrigue monsieur ?

— Oui, mon père dit que vous êtes une grande dame, mais j’ai assez côtoyé les Bellãtriennes de votre âge ; elles sont sans cervelles, elles ne connaissent pas les rues de la ville vu qu’elles ne se déplacent jamais à pied, elles crachent leur venin sur tout le monde et elles ne grimpent pas aux arbres.

— Mais je ne grimpe pas aux arbres monsieur.

— Bien sûr que si, ce soir quand je me suis assis contre le chêne vous étiez dans ses branches. Et vous avez même mis quelques moreaux d’écorce sur votre jolie robe, dit-il en caressant l’étoffe de ma robe.

Peter me regarde avec un sourire moqueur, il est en train de redevenir le Peter doux que j’ai connu.

— Il est vrai que je ne suis pas comme toutes les dames de la cour, mais tout le monde a des secrets et les miens sont bien cachés. J’aimerais les garder secrets si cela ne vous ennuie pas.

Je me relève et nous repartons dans les rues illuminées de la ville, nous faisons une nouvelle halte près du meilleur glacier de la ville, là nous prenons une glace et j’aperçois Chip au loin qui fouine dans les sacs à main de deux Bellãtriennes. Je commande une crêpe au chocolat et me rapproche de Chip en lui faisant signe de s’approcher. Peter s’interroge et me regarde faire. L’enfant me reconnaît, mais reste très stoïque, comme si elle ne m’avait jamais vu, elle me regarde comme un enfant qui vient de se faire prendre lors d’une bêtise.

— Tu sais que le vol est sévèrement puni jeune fille.

Je lui tends la crêpe, elle me regarde avec de grands yeux ronds, à la Citadelle il n’y a que très rarement de friandises de ce genre.

— Mange et sauve-toi, et que je ne te reprenne pas à voler, sinon je préviendrai les autorités.

— Merci madame.

Elle fait une petite révérence ridicule, je lui lance un petit clin d’œil et Chip disparaît dans les ruelles. Peter revient vers moi complètement étonné.

— Vous avez donné à manger à cette enfant alors qu’elle volait ?

— Peter, vous devez regarder plus loin que le bout de votre nez. Cette enfant avait faim, c’est pour cela qu’elle volait. Qui a-t-il de pire que la faim. Je ne peux laisser un enfant mourir de faim.

Peter ferme les yeux et semble transpercé de l’intérieur. Il s’assied au sol et se tient la poitrine, je veux l’aider, mais il n’y a rien à faire, les souvenirs qui refont surface sont violents et il doit les surmonter seul. Il ouvre à nouveau les yeux et prend ma main pour se relever.

— Qu’avez-vous vu Peter ?

J’espère de tout mon cœur qu’il ne m’a pas vu à la citadelle, c’est trop tôt pour ce genre de souvenir.

— Un souvenir, un souvenir très violent, il y avait des gens allongés au sol, ils saignaient tous. Les enfants pleuraient, les femmes aidaient à soigner les blessés, moi j’étais au milieu de tous ces gens. Ils ressemblaient tous à des gens du Sud mais ils ne me haïssaient pas, ils m’aimaient. Comme si j’étais moi-même un rebelle. Mais je me sentais bien, les gens me remerciaient de les avoir libérés. Mina vous croyez que c’est possible ? Que j’ai été un jour dans l’autre camp ?

Peter se libère enfin ! Ses souvenirs refont surface et les plus beaux souvenirs d’autant plus.

— Tout est possible Peter, vous ne vous êtes jamais sentis à votre place au poste de général de l’armée noire, c’est peux être par ce que vous les avez combattus dans le passé. Vous aviez vos propres secrets, comme moi j’ai les miens.

— Mais si j’ai un jour été dans l’autre camp, pourquoi quand je la vois, je ressens le besoin de la tuer ?

— Vous savez l’esprit humain est malléable, après votre accident ont vous a sûrement conditionné pour que votre haine se porte sur Marley Corvinus.

— Possible, Mina vous ne devez parler de cela à personne. Promettez-moi. Si ma sœur apprenait cela, elle me tuerait.

— Je promets.

— Mais qui êtes-vous donc pour me protéger à ce point madame ? Un ange ?


Texte publié par Chipper2907, 18 juillet 2022 à 12h00
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