— Alors tu vas me raconter ce qu’il s’est passé ?
— Rien de grave…
— Marley, tu pars avec lui et tout va bien, il revient seul et me demande si tu es rentrée. Puis Will me passe un coup de téléphone en m’expliquant qu’il t’a retrouvée. Comprends que je voudrais une explication.
Alors je lui explique toute l’histoire, cela me prend une bonne heure et à la fin de mon récit elle me regarde, me prend dans ses bras et m’embrasse sur le front.
— Marley, tu es comme ma sœur et j’ai eu si peur…
— Je suis là maintenant, ne t’inquiète pas.
— Ne me fais plus jamais de telles frayeurs !
— Promis, en revanche, je crois que Peter pourrait être utile en tant que rebelle.
— Laissons-le prouver qu’il hait les Bellãtriens autant que nous et qu’il en fait autant que ce qu’il dit, ensuite nous verrons si nous pouvons lui faire confiance.
Alice se glisse dans mon lit et nous nous endormons ensemble.
Il est midi quand j’ouvre les yeux, Alice est toujours auprès de moi et dort à poings fermés. Elle est si paisible contrairement à moi qui n’ai pas très bien dormi, les paroles de Peter ont résonné dans ma tête et je ne sais toujours pas si nous pouvons lui faire confiance, mais il semble honnête. Un appareil se met à vibrer au fond de la malle, je sais ce que c’est ! Le communicateur, la mission. Je me précipite dans la grosse valise et en sors toutes les robes jusqu’ à ce que je tombe sur le communicateur. J’appuie sur le bouton et l’hologramme de Sam apparaît.
— Bonjour Marley.
Alice se rapproche de l’appareil encore toute endormie.
— Bonjour Sam, dit-elle d’une voix ensommeillée.
— Pardon de vous réveiller mais j’ai des nouvelles pour vous les filles. J’ai prévenu les rebelles de Lutz et vous allez rencontrer notre agent infiltré, il vous conduira jusqu'à la Citadelle.
— La Citadelle ?
— Oui, c’est une forteresse imprenable construite par les pirates Galliens il y a des siècles de cela. Aujourd’hui, c’est le plus grand refuge de Gallia. Sur place vous ferez la connaissance des autres membres de l’équipe de sauvetage.
— Une équipe de sauvetage ?
— Oui, nous savons qu’un bateau chargé d’esclaves d’Iridia va accoster sur les quais de Lutz d’ici une semaine.
— Des esclaves ? Tu crois que mon père …
— Nous y avons pensé, c’est pour cela que tu dois y aller plus que quiconque. Vous devrez suivre les instructions des rebelles présents à la Citadelle, il n’est pas question que vous fassiez cavalier seul, c’est compris ?
— Oui Sam, mais quand allons-nous rencontrer l’agent ?
— Cette nuit, il vous attendra au pont des âmes et vous conduira jusqu'à la Citadelle, par contre Marley, tu devras transmuter devant lui afin qu’il voie que vous n’êtes pas des imposteurs.
— Non je ne peux pas transmuter sur commande et encore moins devant des gens, c’est répugnant quand je me transforme.
— Tu n’as pourtant pas le choix mon enfant, quand il vous aura reconnu vous passerez toute la semaine à la Citadelle afin de vous familiariser avec le groupe.
— Toute la semaine, mais Sam et notre couverture ? demande Alice
— Vous trouvez quelque chose à dire au président. Mais surtout, n’oubliez pas de masquer vos visages à chaque fois que vous sortirez dans les rues votre couverture doit rester intacte. Bon je dois vous laisser maintenant, prenez soin l’une de l’autre. À bientôt et bonne chance.
L’hologramme redevient silencieux et s’éteint. Alice et moi nous regardons un instant perplexe puis nous commençons à rassembler nos affaires utiles à cette mission ; couteaux, les armes à feu d’Alice, mon épée noire, mon arc, des explosifs et d’autres outils qui pourrons nous être utiles.
L’après-midi touche à sa fin quand quelqu’un frappe à la porte, je vais ouvrir et Peter se tient face à moi avec une mine déconfite.
— Bonjour Mina
— Bonjour, que voulez-vous ?
— Je voulais juste vous dire au revoir.
— Vous partez ?
— Oui, mes affaires m’obligent à quitter Lutz pour une semaine.
— Une semaine ? Et où allez-vous ?
— En Arcadia, je dois régler des affaires avec mon école.
— Très bien alors bon voyage.
Je m’apprête à fermer la porte quand Peter la retient de son pied.
— Mina, vous ne dites rien ? Cela ne vous peine pas ?
— Monsieur vous m’avez demandé de ne plus vous adresser la parole et de vous oublier, et bien sachez que je pars moi aussi une semaine avec ma sœur chez des amis à Brame. Je vais essayer de vous pardonner pour les horreurs que vous avez dites, mais il n’est pas sûr que j’y parvienne.
— Vous partez ? Mais c’est dangereux.
— Monsieur, vous m’avez prouvé que les esclaves du Sud ne sont pas dangereux, maintenant bon voyage et amusez-vous bien.
Je claque la porte et entends ses pas qui s’éloignent. Je me laisse glisser le long de la porte et une sensation de tristesse m’envahit.
— Toi, tu es en train de tomber amoureuse.
Alice a assisté à notre échange et me regarde d’un air navré.
— Non pas du tout, ne dis pas de bêtises, moi amoureuse de cet homme. N’importe quoi.
— Je connais ce sentiment et je sais ce que tu ressens, il n’y a pas de mal. Tu ne trahis pas Logan en tombant de nouveau amoureuse, il n’aurait jamais voulu que tu restes accrochée à son fantôme.
Au fond de moi je sais qu’Alice a raison et que Logan voudrait que je vive et que j’aime à nouveau, mais suis-je prête ? Tous les gens autour de moi que j’aime meurent, et je ne veux pas qu’il arrive malheur à Peter Anderson, aussi étrange que cela puisse être.
Ce soir c’est la pleine lune et cela m’arrange, dans le journal de mon ancêtre il est dit que nous transmutons plus facilement les soirs de pleine lune. Alice et moi avons demandé à Will de nous conduire non loin du pont des âmes et de partir, en bon chauffeur Bellãtrien, Will n’en a pas demandé davantage et nous a laissés à l’endroit indiqué. À quelques rues de la nous nous changeons et troquons nos somptueuses robes contre nos bons vieux pantalons de chasse nos blousons et nos bottes de cuir, nous n’avons plus rien à voir avec Mina et Rose Valentino. Alice me fixe un masque de cuir noir sur le visage et fait de même pour elle. Quand nous arrivons au pont des âmes, un homme seul est accoudé à la rambarde, il fait volte-face et je constate que comme nous, il porte un masque. Nous nous approchons prudemment de cet homme, ma main est déjà sur le pommeau de mon épée.
— Joli clair de lune ! dit-il en riant
C’est lui, l’agent que nous devons persuader. Je regarde autour de moi pour m’assurer qu’il n’y a personne et comme s’il avait pu lire en moi il m’interrompt.
— Pas ici, suivez-moi.
Si c’est un piège, nous nous dirigeons droit dedans, mais nous n’avons pas le choix et je le suis. Il nous conduit dans une ruelle sombre, toute proche du pont des âmes. Je me concentre, il faut que je transmute sur commande et je ne l’ai jamais fait, je dois y arriver pour ma famille ! Je sens que l’animal en moi ne va pas tarder à vouloir sortir. Ça y est la douleur me prends, moins forte, mais toujours présente, je tombe à genoux pendant que mes os se brisent, que mes crocs apparaissent. Contrairement aux autres fois la transformation est bien plus rapide, en à peine une minute je déchire ma peau humaine et me change en la louve noire qui ne demandait qu’à sortir. L’homme semble vraiment dégoûté par ce qu’il vient de voir et Alice s’en rend compte.
— Tu voulais voir le loup, et bien tu es servi. Personne ne t’avait prévenue que ce n’était pas un spectacle pour les petites natures ?
— Pardonnez-moi je ne pensais pas que c’était si violent pour mademoiselle Corvinus.
Cette voix ? Je connais cette voix, je ne sais pas où j’ai bien pu l’entendre, mais je la connais. L’homme sans dire mot nous fait signe de le suivre, les rues de Lutz sont désertes et les patrouilles de casques noirs se font rares, c’est même étrange avec les derniers évènements. Nous traversons les pâtés de maisons et nous arrivons dans un vieux cimetière.
— Le cimetière du corbeau borgne, c’est là que se trouve l’entrée de la Citadelle.
Par prudence, j’ai gardé ma forme de louve juste au cas où il nous emmènerait dans un traquenard, il déplace une pierre tombale et nous découvrons l’entrée d’un passage secret. Il passe devant et nous descendons l’escalier qui s’enfonce dans la terre. Une fois en bas des marches, nous pénétrons dans ce qu’il semble être les souterrains de la ville. Nous longeons des murs étroits emplis d’une odeur cadavérique et de putréfaction.
— Quelle est cette odeur épouvantable ? demande Alice.
— Les Bellãtriens ont fait creuser des fosses communes non loin d’ici pour les esclaves qui meurent chaque jour.
— Ils ne sont pas incinérés ?
— Non, les Bellãtriens ne perdent pas de temps avec nos croyances. Venez, nous sommes presque arrivés.
Plus nous nous enfonçons dans les souterrains plus l’air y est lourd, au bout de quelques minutes nous arrivons enfin devant une énorme porte de bois. Notre guide frappe à la porte, une petite trappe s’ouvre au niveau de ses yeux et il échange quelques mots avec l’homme qui se trouve de l’autre côté. La porte s’ouvre finalement et nous suivons l’homme qui nous sert de guide. À ma grande surprise, nous entrons dans un véritable village souterrain, nous sommes sur ce qui semble être la Grand-Place. Plusieurs hommes armés se tiennent devant nous, Alice pose sa main sur ma tête comme pour me demander de ne pas bouger, mais je n’ai pas peur et je sais comment gagner leur confiance. Je m’approche d’eux, me concentre et entame ma transformation ; les crocs qui se rétractent, les os qui se brisent dans tout mon corps, ma peau qui se déchire et enfin mon visage humain qui réapparaît, sortant de cette peau de louve. Je me relève complètement épuisé et m’incline légèrement avant de vomir tout mon repas du soir.
— Marley Corvinus, à votre service, pardonnez cette entrée je ne suis pas encore très habile.
Au milieu des hommes l’un deux se met à applaudir lentement, les autres s’écartent et le laissent passer. L’homme s’avance vers nous, il est très impressionnant par sa carrure de colosse, ses yeux sont d’un bleu translucide, ses longs cheveux gris sont attachés en queue de cheval avec un long ruban rouge, il a le teint blafard, mais ne semble pas malade. Il porte les traditionnels vêtements des Capitaines Pirates Galliens, sa main droite est coupée et remplacée par une prothèse en bois. Il ne nous lâche pas des yeux et nous sourit.
— Tout l’honneur est pour nous Marley, ton oncle nous a annoncé ta venue et nous a vanté tes exploits.
— Mes exploits ? je demande avec interrogation.
— Oui, tout le monde sait comment tu as tenté de t’opposer à l’exécution de ton cher et tendre et comment tu as pris la vie de la chef de quartier de Marsilla après qu’elle ait insulté sa mémoire, fait envoyer ta famille aux travaux forcés et faits tuer la mère d’Alice. Tout le monde ici sait que toi et Alice êtes en mission d’infiltration depuis plusieurs semaines et que vous êtes rapprochés du président comme personne ne l’avait fait avant vous.
Je suis un peu embarrassée, je ne savais pas que mon oncle avait tant parlé de moi.
— Permets-moi de me présenter, je suis le capitaine Barbas Clain. Vous pouvez quitter vos masques ici, le danger s’arrête à cette porte.
Alice et moi nous regardons perplexe, mais après tout si Sam a confiance en cet homme, alors je lui fais confiance également. Nous ôtons toutes les deux nos masques et à ma grande surprise, notre guide à un mouvement de recul et semble perturbé. Barbas s’en rend compte et donne une tape dans l’épaule de cet homme resté masqué.
— Alors tu ne t’attendais pas à de telles beautés hein mon vieux !
— Je... non c’est vrai, pardonnez-moi je dois vous quitter quelques instants.
Il pousse le reste du groupe et s’enfuit dans le cœur de la Citadelle, il me bouscule légèrement en nous quittant si vite, et à cet instant je perçois son odeur, elle m’enivre à tel point que le reste de mes sens se brouillent et je suis tellement épuisé par ma transmutation que je n’arrive pas a faire le lien avec cette odeur.
— Pardonnez-le, il est assez instable, mais c’est un très bon élément, nous dit Barbas
— Pourquoi cache-t-il son visage ? dis-je
— Il est infiltré au Dôme tout comme vous et ne peut pas risquer de se faire démasquer.
— Même ici personne n’a jamais vu son visage ?
— Tout le monde le connaît ici, mais je ne sais pas ce qui lui prend.
Nous suivons Barbas qui semble être un personnage important dans la Citadelle, car tout le monde s’arrête à son passage pour le saluer d’un signe de main. Cet endroit est merveilleux, ce n’est pas seulement un refuge, mais il s’agit d’une ville entière construite sous terre, la place centrale est parsemée de pavé blanc, une magnifique fontaine trône au milieu de cette place, l’eau qui en jaillit est cristalline, autour de la place les premières maisons sont des petites chaumières en pierres assez rudimentaires, mais qui restent très belles néanmoins. Nous déambulons dans les galeries qui ressemblent plus à des rues, les maisons ici sont carrément sculptées et creusées dans la roche. Je regarde ce lieu avec beaucoup d’admiration.
— Nous avons optimisé toute la place que nous offrait ce lieu, dit Barbas. Il est vrai qu’il a fallu des centaines d’années pour arriver à ce résultat, mais je trouve que nous nous en sommes bien sorti.
— Cet endroit est merveilleux ! constate Alice. Vous pouvez être fier de ce que vous avez fait.
— Nous le sommes, mais les Bellãtriens aimeraient faire tomber cette ville secrète et je n’ose imaginer ce qu’il se passerait s’ils découvraient l’emplacement exact de la Citadelle.
— Ils ne la trouveront pas, nous nous battrons à vos côtés pour les en empêcher.
— Merci Marley, allons à la salle du conseil tout le monde doit nous attendre pour faire votre connaissance.
— Notre connaissance ? Mais…
Mais je ne peux terminer ma phrase à cause de ce que je vois. À force de nous enfoncer dans les profondeurs des souterrains, nous sommes arrivées face à une énorme rivière, le courant est presque inexistant et l’eau fumante est en ébullition. Coincé contre un rocher se dresse un gigantesque navire de pirate.
— Barbas, est-ce que c’est ...
— Oui jeune fille c’est mon navire, le « Morgan’s Queen » en l’honneur de feu ma femme.
— Que lui est-il arrivé ?
— Elle nous a quittés il y a bien longtemps, brûlée vive par ces chiens de Bellãtrien.
— Pardonnez-moi Barbas…
— Ne t’excuses pas mon enfant, tout le monde a le droit de savoir. Ma femme était une servante de la Lune (les servantes de la Lune sont des femmes qui ont jurés aux esprits de la nature et de la lune de protéger les plus faibles et d’utiliser le pouvoir pur des éléments afin de guérir les gens, en quelque sorte les servantes de la nature sont des guérisseuses), elle vendait sur le marché ses remèdes qu’elle confectionnait elle-même, mais tout le monde sait que les Bellãtriens ne croient qu’en leurs sciences. Alors ils ont accusé ma femme de trahison et l’on fait brûler afin qu’elle serve d’exemple. Ma fille et mon fils ont tout vu, ils étaient si jeunes. Voilà pourquoi depuis ce jour je m’emploie à aider les rebelles afin qu’un jour nous puissions prendre notre revanche sur ses monstres.
Barbas se tait alors et nous invite à monter sur le « Morgan’s Queen », nous entrons dans les anciens quartiers du capitaine, transformés aujourd’hui en salle du conseil. Barbas nous laisse nous asseoir et prend la parole.
— Marley, Alice, je vous présente les membres du conseil. Voici Ralph, Ted et Edward, ils sont frères j’ai placé toute ma confiance en eux.
— C’est un grand plaisir ? dit Ralph qui semble être le plus âgé des trois frères.
Barbas continue son tour de table ; une vieille femme qui n’a plus qu’un œil, un scientifique qui construit les armes pour les rebelles puis le dernier à nous être présenté n’est autre que Will, notre chauffeur. Il semble aussi surpris que nous.
— Will, mais que fais-tu ici ? demande Alice.
— Eh bien je pourrais vous poser la même question, bah ça alors si j’avais su que les deux sœurs Valentino étaient en fait Marley Corvinus et Alice Stuart.
— Je suis heureux que Marley et Alice connaissent déjà Will, ça sera plus simple pour la prochaine mission, dit Barbas.
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