Alice m’a aidé à me préparer pour la grande soirée de ce soir, il faut dire que je ne suis pas très doué pour me déguiser en princesse. Avec Alice, toutes les imperfections y passent, même les plus discrètes comme ma pilosité quelque peu négligée. Elle m’a coiffé, maquillé et c’est même elle qui m’a appris à marcher avec des talons hauts. Je suis prête à en juger par le regard satisfait d’Alice.
— Voilà, tu es magnifique. dit-elle simplement
Je m’avance vers le miroir en pied qui se dresse devant moi et constate avec stupeur que la créature qui se tient en face de moi vient d’un autre monde ; Alice a transformé la fille banale que je suis en petit diamant étincelant. Elle a coiffé mes cheveux en énorme chignon pleins de tresses et de boucles, le trait de crayon et le fard qui ornent mes paupières font étrangement ressortir le vert de mes iris, Alice s’est même amusée à me faire une jolie bouche pulpeuse avec un rouge à lèvre très rouge. Je m’attarde maintenant sur cette robe que je porte, une longue robe de cocktail en soie, aussi noire que mon pelage de louve, le tissu est fendu jusqu’ à la cuisse laissant apparaître mes jambes fraîchement épilées et mes escarpins qui me font déjà mal aux pieds. Même si je me sens encore ridicule, je dois avouer que le résultat est assez bluffant. Alice aussi est merveilleuse, elle porte une robe de cocktail rouge, le tissu vaporeux qui lui tombe jusqu’aux pieds lui donne une prestance incomparable.
— Allez en scène ! me dit Alice en me prenant par la main.
Nous quittons la chambre pour attendre la limousine au pied de l’hôtel, mes jambes tremblent sous ma robe et je commence à avoir des sueurs froides.
— Marley, tout va bien ?
— Un peu angoissée c’est tout.
— C’est normal, tout se passera très bien.
Une longue limousine s’arrête devant nous et le chauffeur sort afin de nous ouvrir la porte.
— Mesdemoiselles, si vous voulez bien vous donner la peine.
Une fois à l’intérieur de la limousine je me décontracte un peu, le chauffeur ouvre sa fenêtre et nous salut avec un magnifique sourire.
— Bonsoir mesdames, je m’appelle Will, je serais votre chauffeur ce soir. Si vous avez le moindre problème, la moindre envie, prévenez-moi. Je m’occupe de tout !
— Merci monsieur, au Dôme je vous prie, dit Alice d’une voix détachée.
Notre promenade en limousine nous permet de découvrir certains monuments qui constituent Lutz ; nous passons devant la Fontaine de jouvence, réputée pour ses effets rajeunissants, puis devant le tombeau de Spelt, le fondateur de la ville et plein d’autres monuments historiques. Puis nous arrivons au Dôme, c’est un bâtiment formé de milliers de plaques de verre, le tout formant un énorme monument circulaire. Le site ne possède qu’une seule entrée et qu’une seule sortie, sauf bien sûr les passages secrets du président. Il y a des gardes à toutes les portes et on n’entre pas comme ça. Il faut une invitation ou présenter un titre de noblesse Bellãtrien. La voiture s’immobilise devant la grille et le chauffeur se présente au garde.
— Pardonnez-moi, mais vous ne pouvez pas entrer ici.
— Ces dames souhaiteraient se présenter au président.
— Avez-vous un carton d’invitation mesdames ? dit le casque noir en s’approchant de la fenêtre d’Alice.
— Certes non, mais ces passeports feront peut-être l’affaire ?
L’homme prend soin d’inspecter chaque millimètre de nos deux cartes puis, après deux minutes d’hésitation, il nous les rend et nous ouvre la porte en ajoutant « Tous les Bellãtriens sont les bienvenus au Dôme ». Nous entrons à présent dans l’arène, à première vue le cadre est magnifique ; jardin luxuriant, fontaines, bassins et toutes ces sculptures s’imposent à nous comme pour nous rappeler la suprématie des Bellãtriens et la volonté d’écraser les peuples inférieurs. Will se stationne devant l’entrée du Dôme et nous ouvre la porte, il en profite pour nous glisser sa carte en cas de besoin. Un garde en tenue de cérémonie nous escorte jusqu'à la salle de réception, les convives commencent à entrer et comme le veut la tradition, chaque invité est présenté au président. Devant nous un homme âgé d’une cinquantaine d’années et à son bras une jeune fille pas plus vieille que moi, vingt ans tout au plus, ils s’avancent et le casque noir à l’entrée annonce leur nom et leur rang. Ils descendent les escaliers et nous commençons à avancer vers la lumière en attendant d’être présentées.
— Les comtesses Mina et Rose Valentino d’Iridia !
Nous descendons les marches de marbre et bien que cela me déplaise, nous allons nous incliner devant le président ; c’est le protocole. Je suis assez surprise, cet homme est bien plus impressionnant à la télévision. Maintenant qu’il est devant moi, il semble avoir beaucoup moins de charisme, certes il a une stature très imposante et ses yeux noirs imposent la crainte, mais mis appart cela il reste un homme qui pourrait succomber sous mes crocs de louve, comme n’importe qui.
— Monsieur le président, permettez-nous de souhaiter un heureux anniversaire à votre fils, dit Alice
— Ma chère, réplique le président. Mon fils sera plus à même de vous répondre lui-même. Peter vient par ici, ces jeunes femmes souhaitent te parler.
Un homme d’environ vingt ans s’approche du président et nous regarde en souriant, il est grand, plutôt bien bâti, ses épaules sont carrées, ses muscles se dessinent à la perfection sous son costume, il possède de magnifiques yeux noisette, et les traits de son visage sont extrêmement fins, sans parler de son odeur qui est exquise, surtout comparée à celle du président qui ne sent que la vieille eau de Cologne.
— Heureux anniversaire monsieur, dit Alice en s’inclinant.
— Je vous remercie mesdames, veuillez m’excuser je dois aller saluer mes autres invités.
Nous nous inclinons à nouveau et il s’en va. Nous allons nous mêler à la foule afin de jauger les discussions de la soirée, mais surtout pour entrer pleinement dans nos personnages. Je ne suis vraiment pas à l’aise dans cet endroit, mais je sais que je n’ai pas le droit d’échouer, je dois réussir, pour ma famille, pour mon pays. En jetant plusieurs regards furtifs en direction de l’estrade présidentielle, il me semble que le président est intrigué de notre présence. Nous restons sagement assises à une table, une coupe de champagne à la main et nous observons les faits et gestes de tous les invités.
— Il faut que l’on soit plus convaincante ! me dit Alice dans l’oreille.
Effectivement, nous ne ressemblons pas du tout aux jeunes poupées de Lutz, elles sont toutes complètement dévergondées et sans retenue, elles rient toutes à gorge déployée et se moques ouvertement des esclaves du Sud. Nous devons entrer dans ces rôles-là si nous ne voulons pas que notre couverture tombe.
Je panique intérieurement quand j’aperçois le président se rapprocher de notre table.
— La fête n’est pas à votre goût mesdames ?
— Si, bien sûr Monsieur le préside, répond Alice, mais nous avons fait un tel chemin que nous sommes un peu fatiguées, voilà tout.
— Voilà donc la réponse à la question que je me pose depuis votre arrivée mesdames.
— Plaît-il ?
— Je suis le président de ce pays et je donne des réceptions très régulièrement, toutes les jeunes filles de bonne famille sont conviées, mais, j’ai beau fouiller dans ma mémoire, il ne me semble pas vous avoir déjà vu dans notre belle ville.
Alice semble perdre pied et ne sait plus quoi répondre au président face à cet interrogatoire. Je prends alors le relais.
— Mais où sont passé nos manières, Monsieur le président je me présente Mina Valentino et voici ma sœur jumelle Rose, nous venons d’arriver à Lutz. Notre avons laisser notre pauvre père en Iridia, il nous a envoyé dans votre ville afin d’y apprendre la vie dans la Ville lumière.
— Iridia dites-vous ? Mais que diable deux demoiselles si jeunes font sans leur père en Gallia ?
— Nous aurions souhaité qu’il vienne avec nous, mais le pauvre est tombé gravement malade et n’a pu nous accompagner.
— Mais je ne comprends pas, pourquoi ne pas être resté auprès de votre père ?
— L’Iridia n’est pas notre pays Monsieur le président, nous sommes nées à Lutz, mais, notre pauvre mère est morte en nous donnant le jour, notre père a dû fuir les rebelles pour nous garder à l’abri du danger, il nous a emmenés en Iridia en espérant une vie meilleure. Aujourd’hui, vous avez rétabli l’ordre dans le pays et notre père voulait que nous revenions en Gallia pour trouver un époux et apprendre les joies de la vie à Lutz.
— Et bien, c’est une histoire très troublante que vous me racontez là mademoiselle Valentino, mais qui malheureusement est arrivée à bien trop de nos compatriotes. Sachez que votre père a bien fait de vous envoyer dans votre pays natal, mais je soutiens que deux femmes aussi jeunes que votre sœur et vous ne devraient pas se promener seule dans les rues de la ville, les rebelles sont sans pitié avec les femmes de votre rang.
— Des rebelles à Lutz ? Monsieur le président c’est une mauvaise plaisanterie ?
— Hélas non ma chère, ils ne sont pas nombreux, mais ils troublent l’ordre public, nous les traquons sans relâche, mais la nuit les rues ne sont pas sûres.
Alors, les rebelles sont bien en activités sur la capitale, voilà pourquoi Sam savait qu’on y arriverait, il savait que les rebelles étaient déjà présents à Lutz.
— Alors mesdemoiselles si vous êtes ici pour trouver un bon parti, je doute que vous ailliez des difficultés à trouver, les gentilshommes ne manquent pas ici. Quoi qu’il en soit, deux jeunes femmes de votre rang ont droit à la protection du gouvernement Bellãtrien, aussi vous n’avez rien à craindre ici. (Le fils du président termine une valse et son père l’attrape par le bras) Ah Peter ! Mon fils, tu as pu faire la connaissance des Comtesses Valentino ?
Le fils Anderson nous regarde l’une après l’autre en nous souriant, ce doit être le genre d’homme à faire tourner la tête de n’importe quelles potiches Bellãtriennes, à coucher avec et à les jeter sans aucun scrupule.
— Oui père, mais ce fût trop bref et j’ai été très discourtois en me sauvant de la sorte. Je vais donc faire les présentations dans les règles. Mesdames, je me présente Peter Anderson.
Il continue de sourire, puis me prend la main et y dépose un baiser. Je me sens rougir légèrement sous mon fard, cet homme bien que détestable reste très séduisant et son odeur est divine, parfois je préférerais ne pas avoir cet odorat surdéveloppé. Sans que je m’en aperçoive Alice est emportée sur la piste de danse par un jeune homme, nous nous retrouvons ainsi seuls le fils du président et moi, le président Anderson est retourné s’asseoir sur son fauteuil.
— Mademoiselle, accepteriez-vous de danser ?
—Danser ? Je ne sais pas si je saurais.
— Allons donc une jeune femme de votre rang a forcément déjà dansé…
— En Iridia il y a très peu de bals…
— Mais ici vous êtes à Lutz, alors amusez-vous.
Le fils du président me prend par la main et m’entraîne au milieu de la piste de danse. L’orchestre joue une valse, une mélodie pure et envoûtante. Par chance, les cours de danse que l’on m’a donnés chez les rebelles ont porté leurs fruits, je ne me débrouille pas trop mal. Je suis très surprise par le sérieux qui règne sur ce parquet de danse, personne ne parle sur la piste, à croire que cela est interdit.
— Il est donc prohibé de parler pendant une valse monsieur ? Je demande amusée.
— Évidement que non, parlez tant qu’il vous plaira, mais sachez que bon nombre de femmes ici sont incapables de faire deux choses en même temps.
— Nous sommes donc des cas à part.
— Je le crains fort, mademoiselle Valentino, nous en sommes réduits à faire connaissance.
Je ne comprends pas, je devrais être dégoûtée de toucher la main de cet homme, je devrais avoir envie de vomir sachant qui est son père, mais son odeur m’enivre de plus en plus à mon grand désarroi et je prends même du plaisir à danser.
— Mademoiselle Valentino, vous venez de loin si j’ai bien compris…
— Certes
— Vous ne semblez pas beaucoup vous amuser ? Je me trompe ?
— Et bien, c’est que je ne suis pas habitué à tant de festivités… Marley improvise vite ! Depuis sa maladie, mon père ne travaille plus et nous n’avons plus beaucoup d’argent par conséquent nous ne pouvions jamais nous rendre dans les réceptions mondaines en Iridia.
— Alors, profitez de ces instants magiques que sont les fêtes de Lutz.
La musique s’arrête et le fils du président Anderson et moi quittons le parquet de danse, suivis des autres convives. Il dépose un baiser sur ma main et s’incline légèrement en me laissant au bras d’Alice, il se mêle à la foule d’invités et disparaît. Alice et moi nous retrouvons un instant seul.
— Je crois que tu ne laisses pas indifférent le fils de notre cher président.
— J’ai cru comprendre aussi, cela pourrait être une bonne chose tu ne crois pas ?
— De toute évidence
LeConteur.fr | Qui sommes-nous ? | Nous contacter | Statistiques |
Découvrir Romans & nouvelles Fanfictions & oneshot Poèmes |
Foire aux questions Présentation & Mentions légales Conditions Générales d'Utilisation Partenaires |
Nous contacter Espace professionnels Un bug à signaler ? |
2451 histoires publiées 1082 membres inscrits Notre membre le plus récent est Amecaïl |