La petite voix était contente que Cassandra l'ait enfin repérée. Elle la félicita chaudement. Ça montrait qu'elle n'avait pas parlé pour rien. La petite fille pourrait donc l'aider.
Car la petite voix avait un souci. Et pas des moindres. Pour attirer l'attention de la seule personne qui pouvait la secourir, elle avait provoqué ce mal de ventre.
Maman avait raison. Le petit ventre de Cassandra voulait vraiment lui dire quelque chose !
Cassandra, quant à elle, restait perplexe. Elle avait soutenu mordicus qu'un ventre ne parlait pas. Elle avait seulement mal au ventre, et puis c'est tout. Et là, elle lui tenait une conversation, pour de vrai ! Peut-être était-elle en train de rêver. Les paroles de maman lui étaient restées dans les oreilles et avaient trouvé un chemin jusqu'à ses rêves, sans doute...
Afin de s'en assurer, elle se pinça fortement.
– Aïe !
Une minute plus tard, maman était dans la chambre et lui demandait ce qui se passait.
– Rien, maman, répondit-elle, j'ai fait un cauchemar, c'est tout.
Lorsque maman fut repartie, Cassandra s'adressa à la petite voix.
– Ainsi, c'est vrai que le ventre parle ?
– Tu le vois bien ! En fait, je le fais tout le temps, mais tu n'y prêtes jamais attention. Alors, j'ai dû t'envoyer un joli mal de ventre pour que tu puisses m'écouter !
– C'est pas gentil de faire ça !
– Tu m'excuseras, mais je ne savais pas comment faire.
Se souvenant de ce que maman lui avait dit, Cassandra demanda à la petite voix :
– Bon, tu me dis ce que tu voulais me dire, avec ton mal au ventre ?
Encore une fois, la petite voix du ventre aurait aimé sourire. Elle voyait bien que sa « maîtresse » comprenait vite et bien. Alors, elle lui raconta tout.
Tout se passait bien jusque-là, mais un jour, il y eut un événement étrange. Une boule s'était formée dans le ventre. Au départ, ce n'était rien, pas grand-chose. Aussi, le ventre n'y prit pas garde. Il se dit que cette boule partirait dans les toilettes, avec le reste... Enfin, vous comprenez ce que je veux dire !
Mais le lendemain, la petite boule avait grossi. C'était comme des ronces emmêlées. Et chaque jour un peu plus. Jusqu'à ce qu'elle atteigne la taille d'un sac de nœuds, impossible à défaire. C'était la jalousie qui faisait son œuvre.
Elle rendait la petite fille maussade. Ça devenait monnaie courante que, en rentrant de l'école, ou même le matin, il y ait une grosse colère qui éclate. Comme ça. Pour un oui ou pour un non.
Des paroles mauvaises sortaient alors de la bouche de la demoiselle. « J'aime pas mon petit frère ! » Ou encore, « je voudrais une petite sœur à sa place ! » Et pour finir par un « t'es moche ! » ou un « personne ne m'écoute, personne ne veut jouer avec moi. »
En écoutant le récit de son ventre, Cassandra revivait les dernières semaines, passée à se sentir malheureuse. Et la voix le lui confirma. La jalousie, cette peste, lui avait volé son sourire intérieur ! Oui, la petite voix, le propre ventre de Cassandra, ne pouvait plus rire, ni simplement sourire.
Une larme coula sur la joue de Cassandra. Elle se sentait responsable des malheurs de son ventre.
– Je suis désolée, commença-t-elle. Mais c'est plus fort que moi !
– Je sais, la rassura la voix fluette. Et je ne t'en veux pas. Mais tu sais, tout le monde est malheureux dans cette histoire. Tout le monde, sauf la jalousie ! Elle, elle se régale et continue à grossir et à enfler. Peut-être peux-tu m'aider à nous guérir ?
Cassandra renifla et s'essuya sur la manche de sa chemise de nuit.
– Je veux bien, accepta-t-elle, mais je ne sais pas comment faire.
– C'est simple ! Il faut que tu ailles voir la grenouille. Elle saura t'aider. Elle est toujours de bons conseils.
– La grenouille ? S'étonna Cassandra. Mais... il n'y a pas de grenouille ici !
– Taratata ! Ferme les yeux, je t'y emmène...
Cassandra s'exécuta. D'habitude, elle avait beaucoup de mal à fermer les yeux quand maman lui demandait de le faire. Elle avait tellement peur qu'un monstre invisible ou qu'une sorcière ne vienne lui chatouiller les pieds. Et encore ! C'était là les plus sympathiques des hypothèses. La plus affreuse... Brrr ! N'en parlons pas !
Cette fois, Cassandra, concentrée sur son ventre, lui faisait entièrement confiance. Comment aurait-il pu en être autrement ? Il y avait là quelqu'un... enfin, quelque chose... qui lui parlait avec bienveillance, toujours près d'elle. Au plus près que jamais. C'était si étonnant, si merveilleux à la fois, qu'elle se laissa embarquer. De bonne grâce, elle ferma les yeux, le temps du voyage.
Quelle ne fut pas sa surprise, quand son ventre lui dit :
– Tu peux les ouvrir, maintenant !
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