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tome 1, Chapitre 13 tome 1, Chapitre 13

Isabella ne se le fit pas dire deux fois, la main sur la nuque, elle s’avança jusque dans le salon-séjour-cuisine-chambre-salle d’eau de Simon. Elle put mesurer en un quart de sonde l’étendue de la vie de son frère. Cela la mit mal à l’aise. Et Simon le ressentit. Il l’attrapa par le bras et l’attira vers lui pour la serrer fort. Il respira jusqu’à son parfum. Il enfouit son visage dans ses cheveux. Cela lui faisait un bien fou de se retrouver enlacé de la sorte. Comme une communion retrouvée avec son être. Isabella ne put retenir des larmes.

Lui soulevant le menton, il chuchota :

— Je suis content de te voir, Isa.

Elle prit un mouchoir dans sa poche et s’essuya avec délicatesse avant de lui offrir son plus beau sourire. Son sourire mutin, celui de l’enfance.

— Tu m’avais promis… commença-t-elle.

— Et tu as bien fait de venir… Tu sais aussi bien que moi que je ne t’aurais pas appelée. Surtout pas après les bleus ramassés lors de notre dernière rencontre..

— alors, tu me l’offres, ce verre ?

Sa voix s’était ragaillardie. Elle soutint son regard, lèvres étirées en sourire de coin.

— Assieds-toi… Prends donc la chaise, j’irai sur le canapé… Tu veux quoi ? Un café ? Je te préviens, ce sera du soluble…

— Du café ? Pour qui me prends-tu ? Tu n’as rien de mieux ?

Simon la fixa, les sourcils en accents circonflexes.

— Du sky ? Du vin ? Tenta-t-il.

— Va pour du whisky…

— Dis donc ! À cette heure déjà ? Tu as un chauffeur ?

— Non… Mais quitte à être folle, autant l’être jusqu’au bout.

À cet instant, Isabella comprit qu’elle ne serait pas à l’heure pour le retour de son mari. Et elle s’en moquait éperdument. L’habit de petite bourgeoise était en train de craquer aux entournures. On voyait poindre la tête facétieuse aux cheveux de jais et aux pupilles noisette, certes, mais brillantes de vie.

Elle prit place sur le lit. Et tout en tapotant sur la place à côté d’elle, elle invita son hôte à venir la rejoindre. Simon ne se fit pas prier. Il lui offrit son verre, alors qu’il avait à la main une tasse.

— Tu n’as qu’un seul verre ou tu ne m’accompagnes pas ?

— Oh ! Répondit-il sur un ton dégagé, je n’ai que deux verres et c’est suffisant pour recevoir les ivrognes du coin. Mais là, je préfère le café.

Isabella se racla la gorge. Ses oreilles s’étaient radicalement mises à chauffer. Elle pensait le rejoindre sur son propre terrain et voilà qu’il la rabrouait. Elle avait honte, avec son whisky. Simon le décela rapidement.

— Ne t’inquiète pas… C’est seulement que j’ai trop bu ces derniers temps, j’essaie de ralentir la cadence.

Isabella posa pourtant son verre sur la petite table. En reprenant sa place auprès de Simon, elle lui avoua combien elle se sentait bien auprès de lui. Des tas d’émotions affluaient. Des souvenirs et des envies contradictoires. Elle savait ce qu’elle était en train de faire. Elle s’en voulait. Pour Gabriel. Pour Simon. Elle ne savait pas comment il allait réagir.

Elle lui prit la main et tout en baissant les yeux elle lui dit :

— Tu m’as beaucoup manqué. Qu’est-ce qui t’as pris de t’éloigner de moi ainsi ? C’est à cause de Caro ?

— Caro n’a rien à voir là-dedans. Ce n’est qu’une victime collatérale. Je la plains de m’avoir rencontré.

— Tu ne l’aimais pas ?

— L’aimer… Je ne sais même pas ce que ça veut dire. Disons que j’ai juste essayé, pour faire comme tout le monde. Mais l’aimer… Je ne sais pas.

— Alors tu ne m’aimais pas non plus ?

— Pourquoi tu dis ça ? S’étonna-t-il.

— Tu viens de dire que tu ne savais pas ce que veut dire le mot aimer…

— Oui, mais toi, c’est autre chose.

Simon prit sa sœur par les épaules. Il posa sa tête sur son épaule.

— Toi, tu es ma sœur, une partie de ma vie. On était toujours fourrés ensemble. Comment ne pas t’aimer.

— Moi, je t’aimais… avoua-t-elle, le visage en feu.

— Moi aussi, Isa. Comme ma sœur. Tu es, dans cette famille de dingues, ce que j’avais de plus précieux.

— Tu n’as pas compris Simon…

Le silence pesa un long moment. Simon venait de comprendre. A aucun instant, il n'aurait pu imaginer une telle énormité. Et pourtant, elle avait bien épousé son frère, leur « frère » à tous les deux.

Il se tourna vers elle perdu, interloqué, ne sachant que faire, que dire. Il resta ainsi prostré sur son canapé avant de se lever. Il déposa sa tasse sur l’évier qui lui servait tout à la fois pour la vaisselle comme pour sa toilette. Il alla chercher l'autre verre dans l’armoire et se servit une bonne dose de whisky. Il prit tout son temps pour le faire. Le temps de réfléchir. De se retourner intérieurement. Puis d’un coup sec, il avala la totalité du contenu. Ça lui brûla le gosier, mais ce n’était que peccadille en comparaison de l’émoi qui l’agitait. Isabella, elle, ne pipait mot. Elle avait avancé son pion. Elle jouait sa partition. Mais pour le moment, son adversaire tardait à lui donner la réplique.

Finalement, Simon revint vers elle.

— Comment peux-tu dire ça ? Murmura-t-il tout en lui caressant les cheveux.

Isabella fouilla dans son sac et en sortit une lettre.

— Tu te souviens de notre boîte de pandore, celle qu’on a déterrée dans le jardin ? Il y avait cette lettre. Je l’avais écrite alors que je n’avais que dix ans.

Elle lui tendit le bout de papier qui avait souffert de l’humidité ambiante. Simon le parcourut des yeux. Il la lut et la relut de longues minutes durant.

Isabella cassa le silence et enfonça le clou. Quitte à avoir lancé la machine, autant aller jusqu’au bout.

— Je n’avais que dix ans et déjà je te disais à quel point je t’aimais. Comme un frère, bien entendu. Mais il y avait déjà plus que ça. Dans mes rêves, c’est avec toi que je me mariais.

— C’est pour ça que tu es devenue madame Gabriel Bazin ? Trancha-t-il.

Il s’en étonna lui-même de son amertume. Il n'aurait su dire si elle relevait de la haine ou de la jalousie envers son frère. Isabella se sentit suffoquer. Mais elle persista. Elle se tourna vers Simon et s’en approcha dangereusement.

Simon, lui, avait besoin de temps pour avaler la pilule. Il ne pouvait, d’un coup de baguette magique, effacer tout pour jouer un nouveau rôle. Comme il la repoussa, Isabella prit son geste comme une fin de non-recevoir. Elle s’enfuit de cette pièce exiguë où elle venait de tout perdre. Elle était dévastée. Plus rien n’avait aucun sens, désormais. Elle ne savait même pas si elle pourrait reprendre sa vie d’avant.

Elle avait à peine passé la porte que Simon la rappela. Il était là, dans l’encadrement, la suppliant du regard. Avec sollicitude, il tendit la main pour la faire revenir. Et elle revint, le pas mal assuré et la peur au ventre.

Simon l’attira à nouveau vers lui et à nouveau, l’enlaça, la tête enfouie dans ses cheveux . Lorsqu’il releva les yeux, leurs lèvres se rencontrèrent. Alors, tout se passa très vite. Un feu les embrasa. Ils reculèrent, ainsi collés l’un à l’autre. La porte se referma dans un claquement sec. Et ils tombèrent sur le lit, qui n’était qu’à quelques pas de l’entrée.

D’un coup, l’ambiance se réchauffa. Il n’y avait plus de honte, plus de tristesse. En fait, il n’y avait plus rien. Rien qu’une chaleur animale qui les animait tous deux. Ils étaient. Ils ressentaient. Pas d'analyse, encore moins de paroles superflues. Juste la sensation des mains qui cherchaient la peau de l’autre.

Dans un concert de halètements, ils ôtèrent leurs vêtements à la hâte. Isabella avait imaginé cet instant plus romantique. Mais pour l’heure, rien d’autre n’avait d’importance que de le sentir en elle. Il n’y eut aucun préliminaire. Juste de la bestialité, dans le beau sens du terme. Ce côté inné des choses, sans rien autour.

Au moment d’entrer en elle, Simon capta son regard. Ils s’aimèrent ainsi les yeux dans les yeux, n’osant plus se parler. Les corps ruisselaient, les mains se mêlaient pour ensuite s’agripper à l’autre. Simon pétrissait le moindre recoin de peau tandis qu’Isabella plantait ses ongles dans son dos. Pris d’une telle frénésie de s’aimer et de se consommer, l’acte ne durant guère longtemps. Et très vite, la honte se mêla à la satisfaction et au bien-être.

Ils avaient franchi un cap, qu’ils n’auraient peut-être pas dû…


Texte publié par Migou, 28 avril 2014 à 13h17
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