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tome 1, Chapitre 9 tome 1, Chapitre 9

Ælyonn passa une nuit épouvantable. Elle se réveilla plusieurs fois en larmes et trempée de sueur. Mais contrairement à ses nuits chaotiques à La Lupa, ici, elle avait des bribes de souvenirs de ses cauchemars. Certains lui refaisaient vivre l'attaque dans la forêt et la jeune fille se réveillait en frottant frénétiquement son visage pour enlever du sang imaginaire. Avec les autres, elle se réveillait en sursaut avec des images de désolation et des hurlements dans son esprit. Son épuisement général lui permettait de se rendormir assez rapidement mais pas profondément. Au lever du soleil, la Corataara ne pleurait plus de peur mais de fatigue. A bout de force, elle se mit en position fœtale sous sa couette et finalement, au calme et au chaud sous son abri de fortune, elle put enfin profiter de quelques heures de repos.

Ælyonn se réveilla frigorifiée en début d'après-midi. Elle prit une douche chaude qui n'arriva pas à la réchauffer. Après s'être habillée, elle descendit rejoindre ses parents. Des éclats de voix provenaient du salon. Au lieu d'y entrer, elle s'adossa au mur et écouta la conversation houleuse.

— Qui était au courant de votre itinéraire ? demanda la voix autoritaire de Viviane.

— Madame, ce sont des informations confidentielles, ce que je peux vous dire c’est qu’une enquête est en cours, répondit Valentin.

— Donc la fuite vient bien de l’entourage royal et non du Hadiqa, en conclut Viviane. C'était évident !

L’agent ne répondit pas et Ælyonn sentit son ventre se nouer en entendant l'accusation portée par sa mère.

— Pourquoi devrions-nous vous faire confiance ? Vous pourriez être un agent double du Réduve, après tout vous êtes au courant des faits et gestes de ma fille.

Ælyonn écarquilla les yeux sous le coup de la stupeur et s'empêcha de crier d'affolement. Sa peur lui hurlait que sa mère avait raison tandis que sa raison lui soufflait que c'était impossible. Ce fut Valentin qui la rassura sans le savoir.

— Si j’étais un membre du Réduve, votre fille serait morte dès notre première rencontre. Pour rappel, j’ai perdu des hommes et j’ai pris une balle en la protégeant, s'énerva-t-il.

— Ma fille vous a envoyé à l’hôpital avant de vous laisser le temps de lever le petit doigt, S'entêta Viviane avec une fierté certaine dans la voix. Quoi de mieux qu'une nouvelle confrontation pour évaluer ses capacités, après avoir été mis en échec une première fois ?

Valentin ne releva pas la remarque sur sa première rencontre avec Ælyonn, il s’était fait suffisamment charrier par l’ensemble de son service quand la nouvelle s’était répandue.

— Je ne suis pas sûre de vous suivre, madame Brémont.

— Seriez-vous un imbécile ? Remarquez, vous avez le regard intelligent d'un bœuf amoureux, lança-t-elle courroucée. Sachez que j'écraserai sous mon talon quiconque osera faire du mal à mon bébé !

Ælyonn entendit une porte s'ouvrir et reconnut la voix de son père.

— Ne faites pas attention, monsieur Velasquez, ma femme est un peu butée, vous avez une tête qui ne lui revient pas et elle est persuadée que vous êtes un danger pour notre fille. Ça lui passera, dès qu’elle aura trouvé une autre distraction, expliqua Henri.

— Mon instinct de mère me dit que cet homme n’est pas net, répliqua Viviane visiblement vexée.

— Ma tourterelle, je t’aime et je t’adore, tu es magnifique et brillante, mais s’il-te-plait, cesse de tourmenter ce pauvre homme, ce n’est pas parce qu’il a une tête d’ahuri qu’il est dangereux. Regarde ton frère !

— Il y a du vrai dans tes propos, reconnut son épouse, surtout quand tu dis que je suis brillante.

— Si je vous dérange n’hésitez pas à me le dire ! Lança Valentin à bout de patience.

— C’est bien de le remarquer, vous progressez, répondit sarcastiquement Viviane.

— Ma femme est délicieusement impitoyable, c’est ce qui fait son charme, c’est quand elle se montre un peu trop aimable qu’il faut s’inquiéter.

— Et pour votre fille ? Dois-je m’inquiéter parce qu’elle est devenue presque polie ?

Monsieur Brémont rit.

— Non, Ælyonn vous apprécie à sa manière, ne vous inquiétez pas.

Ælyonn en avait assez entendu. Valentin ne faisait pas le poids face à sa mère. Quant à son père, malgré sa courtoisie, il est était facile de comprendre que Valentin était indésirable au Carré. Ælyonn fut étonnée par son envie de le secourir. Elle soupira et entra dans le salon.

— Ah ! Tu es réveillée ! Nous t’avons laissé dormir, tu étais si fatiguée hier, l’accueillit Viviane en la serrant dans ses bras. Par Terre et Ciel ! Tu es glacée ! Je vais sonner pour que l'on apporte du thé, continua-t-elle en enveloppant sa fille avec un plaid qui couvrait un fauteuil.

— Qu'est-ce qu'il se passe ? demanda la jeune fille.

— Rien, répondit Valentin, nous attendons monsieur de Sabolin qui ne devrait pas tarder et ta mère a proposé de me loger dans le chenil.

— Ah ! C'est vrai ! J'allais oublier ! S'exclama le père d'Ælyonn en fouillant dans les papiers qu'il tenait en main. Voilà, tenez, c'est pour vous. Votre présence auprès de ma fille n'est plus sollicitée sauf si elle quitte le domaine royal pour affaire personnelle, sourit Henri en lui remettant un papier.

— Pardon ? Sourcilla l'agent en saisissant le document pour le lire.

Monsieur de Sabolin fut annoncé. Le vieil homme aux cheveux blancs arriva en affichant toujours son doux sourire. Il salua la famille. Madame Brémont lui proposa un whisky qu’il accepta avec plaisir. Henri lui désigna un fauteuil à côté du canapé où était assise Ælyonn. Le secrétaire prit place et sortit de sa serviette en cuir une enveloppe qu’il tendit à la jeune fille.

— C’est votre invitation pour le bal des ambassadeurs qui se déroulera dans quinze jours au palais, mademoiselle.

— Je suis obligée d’y aller ?

— C’est un ordre de Son Altesse Royale, mademoiselle, ça sera l’occasion pour vous de rencontrer certaines personnalités politiques avec qui vous serez amenée à travailler.

— Nous y serons aussi, précisa son père, tu ne seras pas seule.

— Vu que je n’ai pas ...

— Vous ne pouvez pas faire ça ! s'enflamma Valentin en coupant court à la discussion.

— Quoi donc ? Demanda Benjamin surpris.

— Vous ne pouvez pas outrepasser des ordres signés de la main du roi ! Continua Valentin en brandissant le document que lui avait remis Henri.

Monsieur de Sabolin se leva et prit le papier. Il le parcourut rapidement et se rassit blême.

— Tout est en règle, affirma le jardinier. A l'heure actuelle, Sa Majesté devrait être avertie et l'ordonnance enregistrée.

— Henri... murmura Benjamin d'une voix blanche, c'est un acte de défiance envers le roi. Vous refusez sa protection ?

— Non ! Pas du tout ! Se défendit-il. J'applique simplement le protocole. Article quinze, alinéa un du code de l'intendance royale : Le roi ne peut entraver le fonctionnement de l'intendance royale ou aller à l'encontre des intérêts de l'intendance.

— Quelqu'un peut m'expliquer ? Demanda Ælyonn curieuse.

— Quelques subtilités administratives omises par le secrétariat privé de Léopold, expliqua son père. Pour te résumer cela, disons que même si le roi est le roi, je suis le plus haut fonctionnaire du palais. Mon rôle est de m'assurer du bon fonctionnement de l'ensemble de la maison royale. Des mesures proposées par Sa Majesté entrent en conflit avec différents règlements. Il est donc de mon devoir, de m'y opposer pour le bien de la Couronne. La présence de l'agent Velasquez auprès de toi au Carré fait partie des mesures que j'ai retoqué.

Monsieur de Sabolin secoua la tête avec déception.

— Voyons Henri ! La présence d'un garde armé au Carré n'est pas une menace pour le bon fonctionnement de la maison royale ! Vous vous appuyez sur des chartes qui ne sont plus appliquées depuis des années, voir des siècles ! S'indigna le secrétaire.

La famille ne répondit rien et un lourd silence tomba sur le salon. Benjamin était désemparé. Le document avait été murement réfléchi. Il ne s'agissait pas d'une réponse à l'attentat de la veille. Les Brémont avaient préparé de longue date le retour de la Corataara. Avec cette ordonnance, la famille de jardiniers bafouait l'autorité du roi et envenimait les relations entre leurs deux familles. Il devait immédiatement en informer le prince pour tenter une médiation. Ce fut la sonnerie du téléphone d'Henri qui le dira de ses pensées.

— Sa Majesté désir s'entretenir avec moi dans les plus brefs délais, annonça le jardinier en perdant toute son assurance.

— Je dois également retourné de toute urgence au palais, soupira Benjamin. Accompagnez-moi Valentin.

— Non ! S'opposa Viviane. Velasquez reste ici. Ælyonn et moi nous nous rendons en ville. Comme elle quitte le palais, elle doit être escortée. Sur ce point nous ne contestons pas la décision du roi.

Du moins pour l'instant, songea Benjamin en prenant congé de la famille. Malgré cela, il apprécia ce geste de bonne volonté de la part de Viviane. Ælyonn, de son côté était perplexe. Elle mourrait d'envie de lire cette fameuse ordonnance pour comprendre ce qui avait fait perdre son sourire au secrétaire du prince.

A peine une heure plus tard, Ælyonn découvrait la capitale. Elle regardait en silence les belles façades des maisons défiler. Puis, la voiture passa le fleuve Rize par un large pont en pierre orné de massifs lampadaires en fer forgé. Ils longèrent, le grand palais, l’ancien palais royal ouvert à la visite et qui ne servait que pour les grandes cérémonies et les réceptions des chefs d’états étrangers. La voiture se gara sur une large avenue où se trouvaient les boutiques des grands couturiers. Les Brémont et Velasquez passèrent des heures à courir d’un magasin à un autre et finalement, Ælyonn termina sa première journée à Mairelle dans le cabinet d'un psychiatre.

Enfoncée dans un fauteuil en cuir face à un thérapeute guindé et à l'étroit dans son costume gris, Ælyonn ne savait que dire. La seule phrase qui sortit de sa bouche fut : Hier, on m'a tiré dessus, j'ai vu des gens mourir et j'ai cru que j'allais mourir avant de plonger dans un long mutisme d'une demi-heure ponctué de sanglots qui s'échappaient de temps à autre de sa gorge. Malgré cette première séance plus que gênante pour la jeune fille, elle sortit du cabinet avec un autre rendez-vous pour le surlendemain.

De retour au Carré, Ælyonn monta directement dans sa chambre pour défaire ses valises et ranger la montagne de vêtements et de chaussures que sa mère avait achetés. Tout ne lui plaisait pas, beaucoup de jupes ou de chemisiers étaient un peu trop stricts à son goût mais Viviane avait insisté, les jeans et les baskets n’étaient pas de rigueur au palais royal. Elle n’avait pas non plus aimé la ville : trop de bruit, pas assez de végétaux et l’odeur de la pollution l’avait faite grimacer. Toute la végétation était rachitique à ses yeux et trop domestiquée. Les plantes servaient uniquement de décoration, les arbustes étaient taillés au millimètre près. Dans une boutique, elle avait même noté que le vert des feuillages était artificiel. Elle trouvait ça écœurant et irrespectueux. C’était tellement différent de La Lupa où la nature était plus belle et luxuriante. Elle trouvait aussi l’architecture de la ville était trop classique, beaucoup de colonnades, beaucoup de symétrie. Elle n’arrivait à trouver de charme à la capitale, tout était carré et en perpendiculaire alors que Sikil était tout en courbe. Elle avait aussi remarqué la profusion des caméras de sécurité, même si elle arrivait un jour à se promener seule dans Mairelle, ça serait très facile de la suivre. La jeune fille rangea ses affaires sans entrain et descendit attendre le retour de son père. Celui-ci rentra peu après de son entrevue avec le roi et partit s'enfermer dans son bureau aussitôt arrivé.

— La dispute a été rude, commenta sa mère. Mais ne t'inquiète pas, le roi n'a pas encore gagné. Viens, je vais te montrer le bureau des Corataara.

La mère et la fille montèrent à l’étage, elles arrivèrent dans l’aile gauche de la demeure. Viviane sortit une clé et ouvrit une porte.

— Tient garde-la et veille à bien fermer la porte quand tu sors, lui conseilla-t-elle.

— Merci, maman, répondit-elle en prenant la clé.

Elles entrèrent dans une grande pièce lumineuse, toute en bois du sol au plafond. Les panneaux sculptés des murs arborés des motifs végétaux en relief. Certains avaient gardé des traces d'anciennes dorures. Au centre se dressait un grand bureau en bois plaqué d’ébène et décoré de fioritures en bronze doré. Derrière lui se trouvait une immense bibliothèque. Les murs étaient agrémentés de dessins de fleurs et de tableaux des précédentes Corataara. Il y avait aussi deux fauteuils et des tapis sur le plancher qui étaient passablement démodés.

— Voilà, rien n’a bougé depuis la mort d’Amandine, si tu veux aménager différemment, n’hésite pas.

— Je pourrais avoir un deuxième pouf comme celui qui est dans ma chambre, s’il-te-plait ?

— Ah oui, bien sûr, je vais m’en occuper. C’est ton cadeau d’anniversaire de notre part. A cause de cet incident à La Lupa, nous n’avons même pas fêté l’événement, déplora-t-elle. On fêtera ça dignement ce soir ! Bien je vais te laisser découvrir ton bureau. Là, tu as les placards où se trouvent les dossiers d’Amandine.

Elle lui désigna le mur en face de la porte-fenêtre avant de sortir. Ælyonn commença son exploration. Elle se précipita vers le mur et vit la poignée d’une porte dissimulée qui cachait un placard immense et rempli de dossiers, de feuilles, de cartons à dessin posés là sans aucune organisation apparente. Ælyonn prit le premier carton qui se trouvait à sa portée et l’ouvrit. Il contenait des aquarelles de fleurs et de feuilles. Sur chaque planche, il y avait un végétal normal et le même vu par une Corataara. Des petites notes manuscrites étaient griffonnées d’une main mal habile sur certaines planches. Elle délaissa le carton pour prendre un gros dossier. A l’intérieur, il y avait des cartes d’Aranthys, des rapports sur l’environnement ou des propositions de lois. Elle continua sa fouille et en une heure le placard fut vidé. La jeune fille était déçue, elle n’avait rien trouvé d’intéressant. Naïvement, elle s'attendait à trouver un manuel pour Corataara débutante ou un mode d'emploi de ses yeux, mais il n’y avait rien du tout. Elle était au bord des larmes quand on frappa à sa porte.

— Entrez, autorisa la jeune fille en essuyant ses yeux.

Un serviteur lui annonça qu’elle était attendue pour le dîner.

— Merci, euh… Quel est votre nom s’il-vous-plait ? demanda-t-elle.

— Martin, mademoiselle.

— Alors, merci Martin, je descends, sourit Ælyonn.

L’homme évita le regard de la jeune fille, même ici ses yeux impressionnaient mais moins qu’à La Lupa cependant. Ælyonn renonça à ranger le bazar qu'elle avait mis et descendit dîner.

Assis face au prince, Velasquez et Sabolin qui n'osaient ni bouger ni parler. Laurent fulminait contre la famille Brémont qui avait réussi à court-circuiter les volontés du roi.

— Ils ont osé affirmer que rien ne justifie une protection particulière autour de la nouvelle employée des jardins royaux ! Pire ! Ils insinuent qu'il y a ingérence dans les affaires privées du Grand Maître des Jardins ! Mon père est furieux à juste titre ! Tremblait-il de rage.

— Votre Altesse Royale, se risqua monsieur de Sabolin, les Brémont ont accepté la protection du roi. Velasquez a accompagné mademoiselle Ælyonn dans Mairelle.

— La Corataara est notre propriété ! Tempêta le prince sous le regard abasourdi de son secrétaire. Sa Majesté m'a chargé de devenir son chevalier et je mènerais à bien ma mission quoi qu'en disent ou pensent nos jardiniers !

Sabolin n'apprécia pas les paroles du jeune homme. Les enjeux et la pression qu'il subissait, lui faisait perdre le sens des réalités. La dernière chose dont avait besoin le palais c'était une guerre entre les Brémond et les Clamerin d'Espla. Entre le roi et la Corataara, le secrétaire ne savait plus de qui Laurent avait le plus peur.

— Nous allons poser des micros et des caméras au Carré et renforcer la surveillance des entrées du domaine. Rien de ce qui se passe dans cette maison ne doit m’échapper, décida Laurent. Cette ordonnance honteuse ne m'empêchera pas d'avoir un œil sur Ælyonn.

— Monsieur, n'est-ce pas excessif ? Demanda Sabolin en tentant de cacher son affolement. Si les mouchards sont découverts, nous aurons bien plus grave à gérer qu'une ordonnance du Grand Maître des Jardins. Les Brémond seraient en mesure de déstabiliser l'institution royale elle-même et donc de plonger le royaume dans une crise politique et institutionnelle.

— Raison de plus pour que cette opération soit une réussite. En priorité : les appartements de la Corataara, le salon, le bureau d'Henri et celui de Viviane. Cette femme est redoutable et je suis certain qu'elle a participé à cette ignominie. Ah ! Je veux pouvoir contrôler les mouchards qui seront posés au Carré depuis mon téléphone.

— Même dans sa chambre ? S’assura Velasquez qui prenait la parole pour la première fois.

— Absolument ! Mon boudoir servira de centre de contrôle, vous mettrez Guillemin à la tête de cette cellule. Il travaillera en roulement avec vous deux. La surveillance se fera vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

— Votre Altesse Royale, il va être difficile d'éloigner madame Brémont et sa fille, remarqua l’agent.

— Débrouillez-vous pour obtenir leur emploi du temps et prévenez-moi dès que c’est fait. Henri Brémont passe son temps dans son bureau de la jardinerie, nous n’avons pas à nous en inquiéter.

— Et le personnel de la maison ? Demanda monsieur de Sabolin.

Le prince réfléchit quelques instants.

— Ce sont des fonctionnaires royaux détachés au service des Brémont. Ils ne sont pas nombreux, ça ne devrait pas être compliqué. Organisez une réunion ou trouvez un autre moyen pour vider la demeure afin de poser les mouchards.

— Oui, Votre Altesse Royale, répondirent les deux hommes.

— Une dernière chose, je veux pour demain matin, les plans du Carré avec une proposition d'emplacement pour les mouchards, termina Laurent.

— Je m’en charge, proposa Valentin.

— Alors c’est tout pour ce soir, vous pouvez vous retirer Velasquez. Monsieur de Sabolin restez je vous prie.

Valentin se leva et après avoir salué le prince, il prit le chemin de la bibliothèque, pour demander à l’archiviste, une copie récente des plans du Carré tout en réfléchissant à un plan pour garder une avance sur le prince.

Laurent se leva et se servit une tasse de rooïbos avant de revenir à son bureau. Il ouvrit un dossier et sans regarder son serviteur il commença.

— La balise l’a tracée toute la journée, Ælyonn se montre enfin un peu docile. A-t-elle utilisé ses nouveaux appareils ?

— Oui, monsieur, j’attends la copie de ses conversations téléphoniques, à première vue, elle a appelé vers La Lupa. Je vous apporterai tout.

— Non c’est inutile, prévenez-moi seulement si vous repérez quelque chose d’anormal. Vous donnerez à la Corataara les numéros importants : le mien, le vôtre, celui du préfet du palais, etc.

— Bien monsieur. Sabolin hésita un instant avant de poursuivre. Si je puis me permettre, monsieur, vous pourriez faire connaissance vous et mademoiselle Ælyonn dans un cadre moins formel que le palais de Brunville.

— Poursuivez.

— Ses frères rentrent après demain, elle sera moins méfiante si monsieur Antonin lui propose une soirée chez des amis à lui. Par exemple une soirée chez votre cousine, la princesse Clémence.

Laurent prit le temps de finir sa tasse de rooïbos avant de répondre.

— Très bien ! Vous vous chargerez de l'organisation de cette soirée en petit comité. La Corataara, ses frères, la princesse Clémence et vous ajouterez William Orsont et Madame Mancini à la liste des invités. Vous pouvez vous retirez ajouta-t-il avant que son secrétaire ne puisse émettre quelques réverses.

Le vieux serviteur était dépité par l’idée du prince, inviter monsieur Orsont était un choix audacieux, un peu trop même, le prince prenait le risque de braquer un peu plus la jeune fille. William Orsont était comme Antonin, un compagnon de débauche de l’héritier du royaume. Il tenait un club très select dans la capitale que Laurent fréquentait. Cet homme avait un talent inné pour appuyer là où ça faisait mal et d’en tirer avantage. Il avait mis à genoux bien des hommes puissants. Le prince devait compter sur son ami pour trouver les failles de la Corataara et les exploiter.

Madame Mancini quant à elle, tenait la plus luxueuse maison close de Mairelle, mais surtout son salon était couru par les plus brillants esprits de la capitale. Les dîners de la Mancini étaient réputés pour la qualité des invités. Scientifique, artiste, philosophe ou politicien, du moment que le convive montrait de l’esprit, il était admis au cénacle. Le roi désapprouvait les relations de son héritier et pourtant celui-ci avait décidé de présenter la Corataara à deux des plus sulfureuses personnalités de la capitale.

Une fois seul, Laurent se roula une cigarette de kaina avant de se replonger dans l’étude des données d’Ælyonn. Il parcourait les fichiers du disque dur de l’ordinateur avec 'agacement. Une grande part de ses données concernait la botanique, ce qui ne l’intéressait absolument pas. Il s’était arrêté sur les photos, mais là aussi la majorité était des photos de fleurs. Le reste concernait de soirées entre amis ou des concerts. Visiblement la Corataara ne fréquentait pas les gens de son milieu et ne sortait pas souvent dans le monde. Quant aux vidéos, ce n’étaient principalement que des séries ou des films de science-fiction. Là aussi ses goûts étaient à l’opposé de ceux de Laurent qui aimait les vieux films de suspens et les drames psychologiques. Il avait déjà fouillé le lecteur multimédia, une antiquité d’avant-guerre qui ne pouvait que plaire à des collectionneurs d’objets rétros. Elle aimait la musique qui invitait à boire et faire la fête, elle avait beaucoup de vieux groupes de rock, des musiques traditionnelles de son île et des musiques d’ambiance. Elle avait des goûts diamétralement opposés aux siens. Il referma avec dédain son ordinateur, absolument tout l'horripilait chez la Corataara, de son attitude à ses goûts musicaux.


Texte publié par Cilou, 12 janvier 2022 à 13h49
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