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Les Quatre de l'Ombre - Mystérieux mannequin
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tome 1, Chapitre 1 « 1ère partie - Le mannequin » tome 1, Chapitre 1

1

― Venez voir ! C’est trop bizarre !

La voix de Jimmy débordait d’une excitation qui nous était parfaitement inconnue. On aurait dit qu’il avait gagné à un jeu d’argent, tant il trépidait d’impatience !

Assise dans l’herbe au creux de ce petit fossé que nous avons l’habitude de fréquenter, je dus plaquer ma main contre mon front pour regarder mon acolyte, tant le soleil cognait. À côté de moi, Lucy et Matt jouaient à un Mikado improvisé avec des branches mortes sans lui prêter la moindre attention.

― De quoi tu parles ? le questionnai-je, intriguée par son comportement.

― Venez ! Je vais vous montrer !

Sur l'ample front de Jimmy pullulaient des petits boutons de chaleur qu'il ne pouvait s'empêcher de gratter. Par-dessus le marché, une odeur nauséabonde l'enrobait. La puberté commençait à s’en prendre à lui, et il le vivait plutôt mal. Heureusement, l’acné n'avait pas encore toqué à sa porte.

― Ça pue le traquenard à la Jimmy tout-risque, cette histoire ! s’exclama Lucy en décollant son regard du Mikado duquel Matt tentait d’extraire une branche.

― Non ! C’est pas des bêtises, je vous le promets !

Les yeux de notre camarade grossissaient. Son excitation était à son comble.

― Tu nous le promets vraiment ?

Je lui adressai mon regard le plus intransigeant.

― Oui !

― Montre-moi tes mains, lui ordonnai-je.

Il les tendit dans ma direction sans discuter. Il ne croisait pas les doigts. Il fait toujours cela lorsqu’il ment. Il me lança un regard insistant.

― D’accord, on te suit.

Sur ces paroles, je me levai avant de frotter mon pantalon.

― Je suis sûre qu’il en rajoute ! Si ça se trouve, c’est encore un dessin débile sur l’un des murs du couloir. Ce n’est pas le premier, et ce ne sera pas le dernier, grogna Lucy en tirant une branche de son jeu de fortune.

Dans notre établissement, les grands aiment dessiner des choses grotesques sur les murs du couloir afin de taquiner les professeurs ainsi que le personnel. Et comme la plupart des garçons, Jimmy se marre en les contemplant et n’hésite pas à en rajouter une couche afin de parfaire ces œuvres d’art !

― Tu te trompes. Ça n’a rien à voir ! Mais bon, si ça ne vous intéresse pas, tant pis pour vous, répliqua-t-il sur un ton hautain tout en détournant son regard de nous.

Lucy se tourna de nouveau vers lui avec un regard sévère.

― Bon, très bien ! Montre-nous. Mais attention ! Si c’est un truc débile, je te fais un tire-slip !

Les tire-slips, c’est la spécialité de Lucy. Pour son âge, elle est sacrément forte ! Bien plus que Jimmy. Lorsque ce dernier l’irrite trop, ma meilleure amie n’hésite pas à lui infliger ce supplice en guise de punition. Jimmy le cache par fierté, mais Lucy lui fiche la trouille ! Notre camarade leva sa main en signe de sincérité.

― Pas de problème.

Malgré tout, je pus distinguer une lueur d’appréhension dans son regard. Lucy se leva à son tour et s’étira sur la pointe des pieds. Je me tournai vers Matt qui demeurait silencieux.

― Tu viens, Matt ?

Aujourd’hui, notre ami semblait particulièrement morose. Il ne nous avait pas décroché un mot de la journée. Il me contempla avec une grise mine.

― J’ai pas envie d’être puni, articula-t-il d’une voix lasse.

Son teint était bien plus pâle que d’habitude, et de grosses poches trônaient sous ses yeux. Son état m’attristait beaucoup.

― T’inquiète pas ! Si c’est encore une ânerie, je le cogne ! lui assura Lucy en adressant un regard menaçant à Jimmy qui secoua négativement la tête avec un sourire tremblant.

Matt parut hésitant. Il examina pensivement le Mikado avant de prendre une grande inspiration.

― D’accord.

Il se leva, puis nous suivîmes notre acolyte qui nous conduisit dans le bâtiment.

Nous n’avons pas le droit de nous promener dans les couloirs pendant les récréations, mais comme beaucoup d’élèves, Jimmy désobéi souvent à cette règle. Seuls les surveillants les traversent pour faire des photocopies, ainsi que les professeurs pour transporter leurs documents dans la salle qui leur est réservée.

Nous passâmes devant le bureau de l’administration en nous assurant que personne ne nous observait à travers les nombreuses vitres qui donnaient vue sur le hall, avant de nous engager dans le long couloir qui mène aux casiers, ainsi qu’aux salles de colles. Je marchais en mesurant mes pas. À côté de moi, Lucy et Matt ne semblaient pas emballés. Bien qu’ils adorent Jimmy, ils ne peuvent lui faire confiance dans ce genre de situations. Tout comme moi. Il est bien trop fourbe pour qu’on avance les yeux bandés, guidés par ces instructions ! De chaque côté du couloir, les casiers de toutes les couleurs forment une grande fresque multicolore dont les agents de maintenance sont très fiers.

Nous traversâmes l’intégralité du couloir avant de nous engager dans un autre bien plus sombre. Il est interdit aux élèves de se rendre dans ce dernier. D’après les dires des profs, les pièces qui le longent servent de débarras pour les vieux appareils défectueux.

― Qu’est-ce que tu fichais là ? le questionna Lucy dubitativement, me retirant au passage les mots de la bouche.

Jimmy tout-risque n’est pas qu’un fourbe farceur, c’est aussi un sombre magouilleur ! Bien des adultes et des élèves ont des soupçons quant à une possible implication de sa part dans des histoires sordides à base de sabotages en tout genre. Un an avant tout ça, le site du collège a été piraté, et toutes les données des professeurs ont été volées ! Jimmy n’est pas une flèche en classe, mais c’est un expert en informatique. Du moins, aux yeux des cancres du collège ! Fausses signatures parentales, réponses aux devoirs, lettres de dispense… S’il le voulait, il pourrait fonder un business autour de ses magouilles !

― Euh… ben, c’est un peu long à expliquer. On est bientôt arrivés.

Lucy l’attrapa par l’épaule, ce qui le fit bondir de surprise. Son visage se figea de terreur.

― Je te préviens, j’ai pas envie d’être mêlée à tes âneries ! le menaça-t-elle en le cramponnant fermement.

― C’est pas une bêtise, je te le jure ! balbutia notre acolyte sur un ton sincère.

Lucy le relâcha, puis nous nous remîmes en route.

Je ne me sentais pas à l’aise dans ce vieux couloir obscur. Contrairement au reste du bâtiment, cette aile-ci n’a pas été refaite à neuf. Les murs sont couverts d’une peinture jaune ringarde, et le sol d’un carrelage rouge à pois blancs. J’ignore qui a eu l’idée d’une décoration pareille, mais c’est tout bonnement hideux ! Le couloir était éclairé par la lumière du soleil qui traversait le vitrage de l’issue de secours qui trônait juste en face de nous. Cette dernière donne accès à un morceau de la cour qu’il nous est interdit de fréquenter, ainsi qu’à un petit portail qui mène au gymnase de l’établissement. Au bout du couloir, Jimmy se stoppa face à une pièce ouverte plongée dans le noir. Ça sentait vraiment le traquenard ! Je n’étais pas du tout rassurée. Notre guide nous contempla avec un large sourire et Lucy s’impatienta.

― Bon, alors ? On va pas attendre tout l’après-midi !

Jimmy fit un pas en arrière sans nous quitter des yeux et entra dans la pièce. Toujours en nous fixant avec son ineffaçable sourire, il appuya sur un interrupteur sur sa droite, puis une ampoule jaunâtre s’alluma au-dessus de lui.

― Ta-da ! lança-t-il en tendant les bras vers la gauche.

Nous orientâmes nos regards dans cette direction et découvrîmes un mannequin similaire à ceux qui trônent dans les magasins de vêtements. Blanc et entièrement nu, il se tenait droitement juste en face d’une armoire métallique dont le contenu (de la paperasse), gisait sur le sol. Ainsi, dans cette posture, on aurait dit que c’était lui qui avait fouillé à l’intérieur ! C’était à la fois drôle et terrifiant. Je n’aimais pas les mannequins. Leurs visages inexpressifs et dépourvus d’yeux me terrifiaient depuis que j'étais toute petite. Mais ce qui m’horrifiait le plus, c’était l’heure taille ! Généralement, ils sont gigantesques ! J’avais toujours l’impression qu’ils me regardaient du haut de leurs grandes guibolles de plastique. Celui-ci l’était, et sa présence m’intriguait.

― Depuis quand l’établissement possède un mannequin ? demanda Matt en s’approchant avec hésitation.

Lucy et moi entrâmes dans la pièce pour contempler ce géant de plus près. Matt tenta de remuer son bras, mais rien ne bougea. Il essaya ensuite de le secouer, mais le mannequin ne trembla même pas !

― Il est sacrément robuste... constata-t-il pensivement.

― Il a peut-être été conçu avec un plastique spécial, ou un truc du genre. supposai-je en le zieutant de haut en bas.

― Et depuis quand cette pièce est dans un tel bazar ? questionna Lucy qui s’était éloignée de nous.

Lorsque je me retournai, je découvris le chantier qui régnait dans le petit local. Des papiers jonchaient le sol, de vieux ordinateurs éventrés avaient été projetés çà et là, et des caisses remplies de composants électroniques avaient été vidées sur une grande table au centre de la pièce. Mes yeux s’écarquillèrent. Alors que je m’apprêtais à me tourner vers Jimmy afin de l'interroger sur l’origine de tout ce foutoir, je sentis une main se poser sur mon épaule droite. Cette main était entièrement blanche. Il s’agissait de celle du mannequin…


Texte publié par SamuelB, 4 octobre 2021 à 22h47
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