Dans une vaste forêt plongée dans l'obscurité, les arbres sont revêtus de formes lugubres. Certains d'entre eux vont jusqu'à arborer l'apparence d'êtres humains figés dans le temps.
Dans ce lieu, même la lune peine à trouver ses marque. Aucun rayon ne pénètre cette forêt. Il n'y a que ces champignons fluorescents violets qui parsèment abondamment le sol. Nul n'y pénètre, car la simple inhalation de ces champignons peut provoquer des hallucinations à tous ceux qui sont habitués à un air pur, loin de ces spores.
Là, une jeune fille célèbre ses dix-huit ans dans la solitude. Elle déambule, l'air absent. Elle traîne ses cheveux roux à terre comme un fardeau, tant leur longueur est colossale. Elle ne les a jamais coupés durant douze longues années.
Elle a été abandonnée par les siens dans cet endroit sordide, alors qu'elle n'était encore qu'une enfant de six ans. Elle était ce qu'il y avait de plus innocent dans leur royaume. Elle écoutait ses parents, comme si leurs paroles étaient un doux nectar dont elle avait besoin de s'abreuver constamment. Pourtant à leurs yeux, elle représentait déjà une menace.
Soudain, elle s'écroule à terre. Ses pieds se sont emmêlés aux plantes qui grouillent sur le sol. Durant sa chute, elle se cogne le front contre un arbuste rachitique. Des gloussements ignobles jaillissent de nulle part. Elle lève les yeux en direction du son et voit Hérine, la gardienne de ce lieu. Celle qui l'a recueilli pour en faire son animal de compagnie. Elle lui a promis la liberté à sa majorité. Mais ce n'est pas sans lui insufflé ses propres désirs de vengeance.
En échange de cette hospitalité, elle lui a « offert » un don que la jeune humaine considère comme une malédiction. Le jour de leur rencontre, la jeune Miki ravagée par la faim s'est mise à dévorer les champignons de la gardienne. Elle en fut rapidement châtiée.
Dorénavant, son bras gauche bouge indépendamment des autres membres. Parfois, des claquements de dents sinistres résonnent frénétiquement. Cette fois, il ne tarde pas à s'approcher dangereusement d'Hérine. Dévoilé par la lumière fluorescente des champignons, Miki dévisage ce qui se trouve au creux de sa paume. Elle décortique cette « chose », encore surprise de pouvoir cohabiter avec elle. Ce n'est qu'une bouche possédant des crocs acérés en arc de cercle qui sourit en permanence et une langue semblable à celle d'un être humain. La femme frappe sa création, puis elle recoiffe sa belle chevelure aux pointes ondulées d'un noir corbeau. Elle dirige ses yeux vers la jeune fille qui porte sur elle la marque de la gloutonnerie. Ce qu'elle nomme « gloutonnerie » n'est autre que le parasite voué à partager l'existence d'un être pourtant inférieur, mais qui lui est nécessaire pour survivre. Hérine observe longuement sa protégée s'en aller tout en se demandant si elle est prête à ce qui l'attend, là-bas.
Miki possède des yeux verts envoûtant, bien que son teint blafard et l'odeur qu'elle dégage soit semblable à celle d'un cadavre en décomposition. Elle ne connaît pas les règles d'hygiène du monde des humains. Elle ne sait plus rien, si ce n'est qu'il y a en elle un immense chagrin qui la consume.
Après s'être remis sur pieds, elle continue son ascension vers le monde extérieur. Cependant, elle ne peut s'empêcher de repenser aux actions de la gardienne, parfois si paradoxales. Cette femme, dont la sagesse n'a d'égale qu'à sa bizarrerie, lui a avoué la raison de sa présence dans cet enfer.
Sans aucune explication, elle a été damnée. Elle a été déshumanisée. Elle a tout perdu. Puis, elle a été nourrie de force. Elle était obligée de manger des humains par le biais de sa main. Car au final, la nourriture quel qu'elle soit, devient un liquide nourrissant pour son corps. Elle n'avait plus rien de la gamine turbulente, bruyante et pleurnicharde. Elle était devenue un animal de compagnie qui allait réaliser les désirs de vengeance d'Hérine et les siens par la même occasion.
Cette histoire l'a transformé. Auparavant, elle ne faisait que se plaindre nuit et jour. Elle réclamait de l'eau, de la nourriture, de l'amour, des sucreries et un confort quelconque. Lorsqu'elle était à bout de force, elle hurlait pendant des heures le prénom d'une certaine « Lala ». Durant tout ce temps, elle n'avait rien dit. En plein choc post-traumatique, elle a attendu que les sables du temps s'écoulent en sa faveur.
Elle se dirige vers sa liberté, tandis qu'Hérine, perchée sur une branche, lui souhaite d'avoir un excellent dîner. Les yeux de cette entité déshumanisé se trémulent soudainement rien qu'à l'idée d'y être. Galvanisée par la haine, elle baigne dans l'extase. Elle fixe sa paume gauche et ils se sourient mutuellement. Elle et son acolyte. Tous deux animés par des buts distincts. L'un par la faim, l'autre par ses desseins.
Cet enfer avait débuté, car elle se faisait passer pour un garçon aux ordres de son père. Celui-ci détestait les filles. Il préférait avoir un digne successeur. Cette obsession pour la gent masculine, lui fit adopter un fils dans les années qui suivirent cette tragédie. Cette fillette indésirable était allègre quand elle allait jouer avec la princesse Lætitia en cachette, à la frontière de leurs royaumes respectifs. L'une provenait du Nord, l'autre du Sud. Leur amitié grandissait, mais Lætitia encore si naïve croyait qu'elle était un petit garçon à cause de ses cheveux courts et de ses habits. Elle en tomba éperdument amoureuse. Les problèmes commencèrent lorsqu'un baiser fut échangé. Lætitia le lui avait demandé, en toute insouciance et par curiosité. Elle avait vu ses parents s'embrasser et elle voulait connaître le goût que pouvait avoir un baiser. Peu de temps après, Miki fut rapidement bannie et exilée dans la forêt interdite, car son père était au courant de leurs rencontres. Il ne manquait jamais de la faire suivre, qu'importe le lieu où elle pouvait se rendre. Quant à Lætitia, on lui fit croire que ce garçon avec qui elle a tout partagé était Kaelan, le remplaçant de Miki.
Lorsqu'elle sort de ses pensées, elle regarde ses vêtements actuels. Elle est vêtue d'une robe à bretelle d'un blanc éclatant, offerte par sa bienfaitrice pour célébrer sa sortie dans le monde des humains. Pieds nus, elle empeste à des dizaines de mètres. Ses cheveux longs sont dressés comme des épis et de la mauvaise herbe qui ne cesse de croître. Bien qu'elle ne mesure qu'un mètre cinquante, elle file à une vitesse inhumaine grâce à ses petites jambes soudainement musclées. La distance qui sépare la forêt interdite du Royaume Aeris s'écourte à chaque seconde qui s'écoule. Les animaux qui se trouvent sur sa route sont balayés sur le côté par sa course ou simplement écrasés.
Lors de son avancée, elle observe le moindre détail qui l'entoure. Cette plaine sur laquelle elle se trouve semble sans fin. Parfois, des pentes relativement absurdes se présentent à elle, mais elle se contente de les arpenter sans aucune difficulté. Tout est identique, du vert kaki des plantes fanées jusqu'aux divers cratères. Elle est un nouveau-né tué puis ressuscité, sortant des abysses pour reprendre ce qui lui a été dérobé.
Le cerveau martelé par ses souvenirs qu'elle a délaissés dans son inconscient, elle s'élance dans une quête périlleuse. Elle n'arrive pas à croire aux mots de cette mégère. Cependant, elle sait qu'Hérine a sûrement raison. Son père l'a abandonné et il l'a peut-être même déjà remplacé.
Une autre chose la préoccupe : la faim. Cela fait soixante-douze heures qu'elle n'a pas mangé d'humains. Autant dire que son acolyte est impatient. Cet acte, pourtant répugnant, lui est nécessaire si elle veut avoir la force de combattre. En effet, il mange et elle en profite. Ses sens s'aiguisent et sa force dépasse l'entendement humain. Le plus étrange dans tout cela, c'est l'effet qu'il a sur son intellect et son physique. Lorsqu'elle consomme des êtres humains, son corps passe d'un simple cintre à une bombe qui ferait imploser n'importe quel homme. Des formes pulpeuses voient le jour, là où il n'y a presque rien. Ses seins grossissent tandis que ses fesses deviennent des collines saillantes. Quant à son intelligence, elle se façonne selon le nombre de cerveaux avalés. Elle en tire le meilleur comme le pire. Elle se farcit leurs souvenirs, mais elle n'en a plus rien à faire.
Cette bête infernale qu'elle possède est instable. Son corps n'arrive pas à garder l'équilibre à cause de la faim. Elle est recourbée, incapable de marcher dans le droit chemin. Elle se contente de suivre tous les passages sinueux semés de roches qui lui sont inconnues.
Elle est dans une zone qui lui est totalement inconnue. Elle aperçoit une lumière vive au loin. Lorsqu'elle cligne difficilement des yeux face à tant de lumière, elle se rend compte qu'elle est sur une petite colline qui surplombe la capitale. Miki, dont la vue semble accrue grâce au cadeau d'Hérine, admire la décoration composée de ballons orange dans lesquels se trouvent des lanternes. Les rues sont faites de pierres. Elles ont à chaque extrémité des tuyaux lumineux qui mènent directement à l'événement. Dans cette partie du monde, la lumière resplendit sans arrêt. Cependant, cette vivacité aveugle la sauvageonne tant habituée aux ténèbres.
Elle se laisse glisser de cette bosse rocailleuse tout en s'égratignant les genoux au passage. Elle se faufile discrètement pour écouter derrière ses murs épais. Ils entourent la ville lumineuse comme pour ne pas partager cette lueur réconfortante. Elle longe cette muraille, percevant le rire éclatant des enfants. Elle place son compagnon contre le roc où il y plante ses dents. Cela lui permet d'escalader pour atteindre l'autre côté à une rapidité déconcertante. Elle saute dans leur direction tel un fauve. Elle atterrit devant eux. Ils n'émettent aucun son. Elle ne semble pas leur faire peur. Ils s'approchent d'elle, intrigués et en admiration d'un tel saut.
Cependant, l'insouciance cause leur perte, car des miasmes émanent de la paume de Miki. Cette violente odeur les rebute. Le premier qui remarque l'abomination, est celui qui a pu le voir de très près. La taille de sa paume est suffisante pour lui sectionner la tête d'un seul coup et l'avaler cul sec. Son jeune corps, duquel ressort sa colonne vertébrale blanchâtre, s'effondre silencieusement. Les trois autres, la bouche entrouverte et les jambes chancelantes, ne fuient pas. Ils tentent de hurler, mais aucun bruit ne ressort de leur gorge tant ils sont effrayés. La taille de ce monstre ne cesse de s'accroître. Il ne lui faut que quelques secondes pour les décapiter d'un mouvement bref et précis puis de les ingurgiter en même temps. Mais, la voracité de ce compagnon auquel Miki est lié, pousse ce glouton à lécher jusqu'au sang qui a giclé sur le sol et le mur.
Lassée de ses caprices, elle le fracasse contre la muraille pour le calmer. Cependant, une fissure s'y fraye rapidement. Elle provoque l'effondrement de la barrière, incapable de jauger sa force actuelle. Le fracas attire les habitants. Miki s'enfuit sans plus attendre. La robe empourprée de leurs sangs encore frais, elle bondit de toit en toit vers son objectif. Certes, elle désire connaître la vérité, mais elle sait à quoi s'attendre. Une nouvelle silhouette se dessine au fil des sauts. Son corps semble prendre vie. Ses membres où il n'y a que de la peau se garnit, de la chair recouvre son corps dégarnit. Sa poitrine, ses fesses, ses cuisses, ses bras, rien n'y échappe. Ses cheveux, tantôt en piteux état, deviennent lisse et soyeux. Sa crinière s'envole au gré du vent. Son être, quant à lui, tangue dans une transe indicible, car elle ne sait même plus distinguer le bien du mal. Elle vient tout juste de s'emparer de la vie d'enfants innocents, tout comme son père l'a fait avec elle, et pourtant elle n'arrive pas à se dire que cela est « mal ».
Un pont sépare le village de l'immense château blanc. Une musique classique et soporifique résonne mêlée aux murmures des nobles. C'est une symphonie hypocrite.
Elle fixe sa paume qui ne sourit plus. Un rictus dérangeant et méprisant s'ancre sur son visage. Elle avance sur ce pont en pierre, aux arcs en ogives, tout en contemplant la grandeur de cette création. Elle découvre les inventions humaines, presque déçue de devoir se nourrir de ces faiseurs de merveille.
Deux gardes en armures munis d'une hallebarde croisent son regard. D'abord envoûtés par la beauté qu'elle dégage, ils se mettent à ricaner en se vantant de la chance qu'ils ont de tomber sur elle, mais l'un d'eux remarque le sang sur sa robe. Aussitôt, il prévient ses camarades qui pointent leur arme vers elle, d'un air menaçant. Soudain, l'entité dans sa main atrophie sa paume pour prendre plus d'ampleur. Lorsqu'elle parvient à ses fins sous le regard tétanisé des gardes, elle en avale deux d'un seul coup. Peu après, l'acolyte rejette leurs armures broyées, suivit d'un rôt vulgaire. Le second, plus lâche, se rue jusqu'à la salle où se déroule un bal. Il commet l'erreur de laisser la porte ouverte, trop occupé à hurler aux invités de prendre la fuite.
Tous les regards, peu convaincus, convergent vers lui avant de se diriger vers l'individu qui se trouve à l'entrée. Cette robe teintée de sang attire aussitôt leur attention. L'acolyte quant à lui, il baigne dans la même substance. Il effectue un autre rot grossier avant de ricaner discrètement. Les yeux de Miki survolent la salle rapidement à la recherche de sa famille. Kaelan, qui dansait plus tôt avec sa dulcinée, s'est arrêté net pour lancer un regard anxieux à ses parents. Ils sont assis sur un trône adjacent à d'autres souverains. Ils reconnaissent immédiatement qui est cette jeune fille à cause de sa couleur de cheveux, propre à leur famille de sang royal.
Médusé et terrorisé de la voir en ces lieux, son père se met à crier les mêmes phrases que le garde. Il exige aux invités de prendre la fuite, car c'est un monstre de la forêt interdite. Personne ne semble le croire. Aucun de ses nobles trop potelés ne peut s'enfuir. Ils ne manqueraient pas de mourir d'un infarctus à la seconde marche menant à la sortie. De plus, ils ne semblent pas être suffisamment pour partir. Surtout pas sans avoir pu connaître le fin mot de cette histoire. Ils adorent les ragots et les anecdotes, ils ne manqueraient celle-là pour rien au monde.
Le bruit qu'il engendre de ces cris, remémore à Miki qu'il l'avait déjà traité de ce nom avant de la jeter dans cette pénombre. Elle remue les lèvres, cherchant les mots. Et d'une grimace montrant son dégoût pour lui, elle lui balbutie quelques mots difficilement.
— Je suis de retour, Papa.
Son père grossit ses yeux d'étonnement, réfutant toute liaison avec elle. Pourtant, elle coure dans sa direction pour lui faire une accolade. Elle émeut la foule qui en oublie jusqu'à son odeur fétide, son accoutrement hors d'usage, et jusqu'au sang qui la recouvre. Sous le choc d'une telle tendresse, il souhaite la repousser, mais il n'y arrive pas.
Le garde encore maître de ces esprits, s'approche vivement de Miki pour lui asséner un coup de poing au visage. Elle se fracasse contre le sol violemment.
— C'est une créature maudite, Majesté !
— Pourquoi m'as-tu abandonné dans le noir ? demande Miki, tristement.
— Je ne te connais pas créature de la nuit. Retourne d'où tu viens !
Elle est confuse par la complexité des sentiments qui la submerge. Elle regarde sa paume qui désire à tout prix dévorer des humains. Bien qu'elle puisse contrôler son acolyte, elle se rend compte qu'Hérine avait raison. Ils l'ont déjà effacé de leur vie. Elle n'est plus qu'une créature de la nuit. De ce fait, elle devait agir en tant que tel.
Dépitée, elle se relève, un sourire dédaigneux accroché à ses lèvres. Elle fixe soudainement Kaelan. Il possède également des cheveux roux, tout comme les siens, mais ils sont plus clairs. Ses cheveux mi-longs et bouclés sont toute sa fierté. Il possède la carrure parfaite du preux chevalier, prêt à dégainer son épée pour défendre la veuve et l'orphelin. Cependant, la longue chevelure noire cendré de la jeune fille qui se tient à ses côtés l'interpelle. Elle dirige son regard vers Miki. Les yeux azur de la demoiselle semblent lui faire un drôle d'effet. Une impression de déjà-vu provoque en elle un sentiment de malaise. Cependant, c'est sa taille d'un mètre soixante-quinze lui met la puce à l'oreille. Son « amie » était aussi plus grande qu'elle. Ce simple moment d'inattention suffit à l'acculer. Elle est maintenant encerclée par une horde de gardes.
— Lala ? balbutie Miki.
— (Ce surnom… C'est celui de mon enfance), pense la brune, sceptique.
— Ne bouge plus, monstre !
À cause de l'intervention répétitive de ces boîtes en métal sur pattes, elle est furibonde. Un de ces hommes s'élance, la pointe la première. Elle saute vers lui puis elle prend appui sur son épaule. Alors qu'elle s'y maintient debout, le corps cambré, elle pousse un grognement digne d'une bête féroce. Ils voient finalement qui elle est vraiment, tous autant qu'ils sont.
Alors qu'elle bondit vers un autre garde, sa paume a pris la forme d'une épée à la lame faite de plusieurs rangées de dents. Celui qui lui a servi de perchoir est sa première victime. Elle le scinde en deux, d'un coup rapide.
D'un mouvement circulaire mené personnellement par son hôte, l'acolyte tranche tous ceux qui se trouvent autour d'elle dans un tourbillon sanglant. Les bustes s'écroulent vers la droite, tandis que les bas du corps encore debout forment des geysers de sang. Ils recouvrent la foule qui est maintenant en panique totale. Les verres de cristal qu'ils tiennent se brisent. Ils relâchent tout ce qu'ils peuvent tenir. La salle s'emplit de cris, tandis qu'ils s'empilent comme un tas de viande à la porte. Un ondinisme collectif s'étale sur leur tapis rouge. Marque de leur soumission à cette chose qui compte bien tous les tuer.
Miki se rue vers son père en bondissant d'un cadavre à un autre. Elle atterrit à la cime de son trône, duquel elle n'a jamais rien hérité, si ce n'est l'incompréhension d'avoir été rejeté à cause de son sexe.
Elle permet à son acolyte de reprendre sa forme normale, pendant qu'elle réfléchit à la manière dont elle veut le tuer. Elle perd patience, car son cerveau est actuellement victime de sa consommation excessive de chair humaine. Elle se décider à se jeter sur lui, incapable d'attendre plus longtemps. Elle l'attaque au flanc gauche et elle demande à son acolyte d'uniquement lui arracher la peau qui recouvre son ventre. Elle regarde son intérieur se vider, alors que son cœur à elle, se remplit de joie. Les dents lacèrent avec lenteur ce qu'il reste de lui, pour qu'il puisse profiter pleinement de la douleur.
Lorsqu'elle en termine avec lui, elle se rue vers sa génitrice qui essaye de s'enfuir. Elle lui agrippe la gorge de son autre main, car elle ne veut pas la tuer avant de contempler son regard et essayer d'y déceler de quelconques sentiments de remords. Cette femme inexistante n'a servi qu'à mettre au monde une princesse vouée à être renié. Tout comme ce Miki auparavant, cette femme n'a pas le courage de contester quoi que ce soit. Elle attend, tout simplement, que son tour arrive. Elle sait qu'aucun de ses mots ne pourra apaiser sa fille.
Le cou de sa génitrice est parfaitement agrippé par sa main droite. Sa fille le comprime avec haine, tandis que des larmes jaillissent en même temps de leurs yeux. Sa mère affiche un rictus satisfait, comme si sa mort était un soulagement. Elle dépose son corps inanimé sur le sol puis elle relève la tête pour observer le carnage qu'elle a pu engendrer, alors que son acolyte n'arrête pas d'émettre des rots.
Lors de cette agitation, Kaelan en a profité pour fuir sans sa bien-aimée. Alors que Miki est à sa recherche dans la foule, elle laisse son compagnon agir comme bon lui semble lors de son passage. Il dévore à sa guise tous ses porcs qui sont encore en train d'essayer de dévaler les escaliers. Lors de sa recherche, elle remarque que la jeune femme qui possède les mêmes traits que Lætitia a également pris la fuite.
Mais leur fuite est inutile et Miki ne le sait que trop bien. Ses sens lui permettent toujours de retrouver ses proies. C'est Hérine qui le lui a appris. La chasse fait partie intégrante de l'entraînement que doive passer les animaux qui ont pour maître une sorcière.
La salle, pourtant bondée avant son arrivée, ne compte plus que quelques ossements recrachés par excès de gloutonnerie. Il y a également des vêtements trop grands pour être dissous dans les sucs de sa cavité. Mais ça ne lui suffit toujours pas. Son acolyte a encore envie de manger.
Elle se tient sur le toit du château, courbée vers l'avant. Elle parvient à voir son demi-frère et les souverains dans leur carrosse. Elle se hâte de prendre appui sur le balcon plus bas. Les veines de ses jambes se gonflent à vue d'œil. Ses veines apparaissent subitement. Elle se jette en direction de l'unique membre de « sa famille » en utilisant ses jambes comme des ressorts. Ce bond a détruit le balcon sur lequel elle s'appuyait. Elle chute du ciel comme une calamité vengeresse, prête à sévir celui qui a pris sa place.
Elle s'écrase telle une météorite sur un arbre, rasant sur son passage plusieurs d'entre eux à cause de la puissance de son atterrissage, vraisemblablement raté. Son cheval, effrayé par ce fracas, décampe à toute vitesse. Son cavalier, incapable de calmer la bête, tombe de celle-ci. Conscient de ce qui l'attend, il commence à courir, mais Miki lui attrape la chevelure et le jette face contre terre. Il se jette aussitôt à ses pieds. Il rampe tel un vers pour quémander la vie sauve tout en larmoyant. Il vide son corps de fausses écumes tout en se roulant dans la boue et la honte.
— Pitié !
— Lala… est à moi, dit Miki, en l'ignorant.
— Oui, elle est toute à toi. Je te la donne !
Elle ricane d'un ton sinistre et lui inflige un coup de pied en plein nez. Elle le lui brise illico presto.
— Lala a toujours été… à moi.
La bouche présente sur sa paume grossit. Un rictus satisfait s'y dessine alors que l'acolyte plante ses crocs dans sa peau de bambin. Il les enfonce doucement puis il se met à mordiller cette chair qu'il trouve particulièrement tendre. Il profite de ses cris d'agonie. Elle n'éprouve aucune pitié. Elle semble perdre son humanité à force d'avaler de la chair humaine, alors que cela aurait dû avoir l'effet inverse.
Il hurle jusqu'à n'en plus pouvoir. Il préfèrerait cent fois mourir que subir une telle torture. Mais durant cette lente délectation, l'entité décide de l'avaler. La dernière héritière, en colère, le cogne à plusieurs reprises contre le sol. Elle crée plusieurs cratères et elle ne manque pas de lui casser quelques dents pour le punir. Ses claquements mécontents retentissent, mais elle le frappe à nouveau pour le calmer.
— Si tu manges encore quelqu'un sans ma permission, je me coupe la main.
Étonné de sa capacité linguistique, elle se souvient qu'après un tel banquet sa parole a dû changer. Tant de nouveaux mots se percutent en elle. Elle découvre un amas d'expressions qui lui étaient jusque-là inconnues.
Elle grimpe le long d'une montagne présente au-dessus de ce sentier rocailleux. Elle projette de nouveau sa vision dans toutes les directions, à la recherche de sa prochaine proie. Bien qu'encore envoûtée par l'apparence de cette jeune fille, Miki ne peut se résoudre à la laisser filer. Décidée à la retrouver, elle se lance à sa recherche, en gardant à l'esprit que son sort ne dépendra que de leur prochaine discussion.
Alors qu'elle rejoint la route où se trouvait leur transport plus tôt, elle aperçoit un carrosse laissé à l'abandon. Elle s'en approche pour vérifier qu'elle n'y est pas. Elle remarque les traces de pattes d'une ribambelle d'animaux joncher la terre. Elle les suit et quelques minutes lui suffisent pour entendre des voix. Ce sont des nobles, reconnaissable à leur accoutrement, qui demandent de l'aide au beau milieu de nulle part. Elle les observe perchés tels des singes sur cet arbre.
Elle se dirige vers eux, mais la meute de loups est furieuse. Elle refuse qu'un autre prédateur veuille lui dérober son dîner. Ils l'entourent avant de s'élancer sur elle, tous en même temps. Elle attrape par la queue l'un des leurs avec sa main droite pour en repousser quelques-uns, mais ils sont trop nombreux. Très rapidement, ils recouvrent son corps. Cependant, sa main gauche pousse un hurlement si effrayant que l'alpha suivi de ses rejetons tente une évasion, mais il n'en épargne aucun. Il est trop tard pour eux. Elle attrape l'alpha par le crâne grâce à son acolyte qui a uniquement ouvert sa bouche puis on entend des ossements se briser.
Il délaisse un bon nombre de carcasses à terre, car Miki n'est pas d'humeur à attendre qu'il termine de manger. Elle souhaite se rendre au plus vite à l'arbre sur lequel se trouvent ceux qu'elle a entendu. Cependant, il a ramené dans sa gueule quelques cadavres. Il se goinfre tranquillement, bien que parfois il recrache leurs poils en toussant.
Elle lève la tête vers eux. Les yeux de cette famille sont à telle point écarquillés, qu'ils pourraient tout simplement rouler dans le vide. La reine désire hurler, mais le simple fait que sa bouche s'arrondisse interpelle la rousse. Elle pose son index devant ses lèvres charnues pour lui faire signe de se taire.
— Que voulez-vous ? demande l'homme méfiant. Je suis le Roi Aquarius, souverain de Britania.
— Les Arcadia sont morts, répond Miki en s'asseyant à terre. Les deux royaumes sont à vous dorénavant.
— De quel droit me le donnez-vous ?
— Je m'appelle Arcadia Lysna Michaela, mais on m'appelle Miki. Kaelan n'était qu'un imposteur. Il a été adopté. Sa chevelure rousse n'était même pas de la même teinte. Quelle bande d'idiots.
Un moment de silence s'impose. Cependant, la reine dont la bouche forme à nouveau un ovale la montre du doigt. Il semblerait qu'elle soit illuminée par la divine providence.
— M-Miki ! Ils ont dit que vous étiez morte ! s'écrit-elle, révoltée.
— Les humains disent ce qui les arrange, répond celle-ci, tout en haussant les épaules.
Elle a assimilé tant de méthodes, de discours différents, tant de savoir, qu'elle cogite longuement avant de continuer. Elle fixe Lætitia, maintenant convaincue de son identité.
— Que voulez-vous ? ordonne le Roi.
— Lala, répond-elle en ne la quittant pas des yeux.
Il reste sans voix. Sa fille, qui a pour habitude de rester en retrait, s'affirme pour la première fois.
— J'accepte, affirme la princesse avec fermeté.
— Quoi ?! s'écrit sa mère en plein affolement.
— Me marier à un imposteur que je n'aime pas ne diffère en rien d'aller avec elle, mère.
— La moitié de l'argent dans le coffre-fort des Arcadia est mien, rajoute Miki. Vous pouvez prendre le reste.
— Marché conclu, répond le Roi, sans réfléchir une seconde de plus. Suivez-nous au château. Nous entrerons par le passage secret. Il faut vous faire prendre un bain et changer d'apparence, pour que vous puissiez partir avec elle. Votre puanteur est encore pire que celle d'un mort !
Miki ne répond rien face à ses propos, car elle sait maintenant que l'odeur qu'elle dégage sera une barrière pour discuter avec Lala.
Ils se rendent à leur demeure dans la plus grande discrétion. Ils empruntent ce fameux passage souterrain reliant l'extérieur à leur château. La reine tient fermement le bras de sa fille. Elle n'est pas du tout d'accord avec le choix qu'ils ont fait. Une femme avec une femme, c'est encore plus répugnant que voir ce monstre déchiqueter des humains. Lorsqu'ils arrivent à l'intérieur du château, Laetitia demande à sa mère de la lâcher et se dirige vers sa nouvelle propriétaire. Quant au Roi, il a des préparatifs à faire concernant leur logement et le message à véhiculer pour rassurer la population. La reine, incapable de les laisser, essaye de rester avec sa fille. Miki la regarde longuement tandis que son acolyte ne sourit plus. Laetitia, parfaitement consciente du danger que sa mère peut encourir en essayant de lui tenir tête, décide de pousser sa mère à l'extérieur de la salle de bain.
Le regard de la rousse se dirige maintenant vers Lala qui est en train de lui préparer un bain avec divers herbes parfumées. Chose faite, elle lui suggère d'y entrer tandis qu'elle va lui chercher une serviette et lui préparer des vêtements propres.
Pendant ce temps, Miki prend un bain nécessaire à l'éradication de cette odeur de cadavre qui lui colle à la peau depuis des années. Cette fraîcheur qui recouvre sa peau l'enchante à tel point qu'elle a l'impression d'avoir blanchi. Alors que son acolyte peste lorsque Laetitia revient avec une serviette.
— Arrête de te plaindre. Je n'ai plus besoin de toi maintenant et tu le sais, grommelle Miki froidement.
Surprise de voir son bras – pourtant si agité durant tout le trajet – être accalmie avec autant d'aisance, Laetitia ne peut rester silencieuse plus longtemps.
— Qu'est-ce que c'est ?
— Une malédiction de la gardienne de la forêt maudite. J'ai mangé des champignons qui lui appartenaient.
Miki la fixe de nouveau avec ferveur. Elle lui demande de s'approcher. Laetitia obéit, sans émettre une quelconque crainte. Elle lui prend la main tout en éloignant son acolyte au maximum de la princesse.
— Qu'est-ce que vous faites ? demande la jeune fille, sceptique.
— Tutoie-moi. Je vérifie que ta main est toujours aussi douce.
— Pardon ?
Miki soupire et lui ordonne de sortir de la salle de bain. Elle est exaspérée d'avoir été à ce point oublié. Elle se regarde dans la glace, délaissant au passé l'ancienne image qu'elle avait d'elle-même. Elle remarque la longueur de ses cheveux et elle décide de les couper. Elle saisit une lame de rasoir et en découpe la moitié. Elle sort nue, laissant la noble bouche bée face à son manque de pudeur.
Elle demande à Laetitia de la diriger vers sa chambre puis elle se met à fouiller son armoire. Elle ne prend pas le temps de lui demander la permission, elle agit comme bon lui semble. La princesse avait bien essayé de lui trouver des vêtements, mais il n'y a rien à sa taille. Quant à Miki, elle n'y voit que des robes, trop longues pour elle. Elle entend sa main ricaner à cause de sa petite taille.
Laetitia la regarde dévisager ses robes avec dédain puis elle lui montre une autre armoire. Celle-ci possède un cadenas. La princesse cherche la clé. Elle lui explique qu'à l'intérieur se trouve des vêtements qu'elle portait lorsqu'elle était encore une adolescente et qu'ils devraient lui aller. Son acolyte se moque à nouveau d'elle, mais Miki, exacerbée, le fait taire en le fracassant contre la serrure du coffre. Elle attrape la première pièce à sa portée. C'est une robe d'un blanc immaculé, presque identique à celle qu'elle avait. Simple et pourtant sublime. Laetitia la contemple avec un air abasourdi.
— Tu es belle comme ça.
Le sujet de ces compliments se met à rougir.
— Joyeux anniversaire, ajoute Miki.
— Comment le sais-tu ?
— Nous sommes nées le même jour.
— Nous nous connaissons ?
— Depuis longtemps, oui.
Laetitia se terre dans le silence. Elle revoit l'image de l'enfant aux cheveux roux qui est toujours présent dans ses rêves. Tous les jours lorsqu'elle s'endort, ce même songe revient comme un cauchemar, dans un cycle sans fin. Dans ce rêve, elle s'amuse avec un petit garçon et au moment où ils s'embrassent, il se fait aspirer sous terre par des mains.
— Quand tu étais petite… avais-tu les cheveux courts ?
Miki affiche le même sourire que celui du petit garçon et hoche la tête. Les souvenirs de la princesse reviennent du tombeau dans lequel ils ont été scellés. Toutes ses cendres sont aspergées par ses larmes. Elle sait maintenant que cette malédiction est à cause du baiser qu'elle voulait à tout prix partager avec le « prince » qui n'était autre qu'une princesse. Elle s'effondre à terre, larmoyant dans un boucan assourdissant. Elle est submergée par la culpabilité. Toute sa fierté de jeune fille bien élevée et raffinée se brise. Miki l'observe pendant un long moment, en attendant qu'elle se calme.
— Pourquoi est-ce que tu me gardes en vie ?! C'est de ma faute tout ça.
— En sortant de la forêt, j'avais prévu de te tuer, dit Miki avec franchise.
— Fais-le !
— J'ai changé d'avis.
— Mais… pourquoi ?
— Relève toi, ordonne la rousse, fatiguée de ses questions.
Elle obéit, mais à cause de la petite taille de son interlocutrice, elle doit finalement s'asseoir sur le lit, car celle-ci n'apprécie guère de devoir lever la tête pour lui parler. Miki approche son visage du sien, ne laissant que quelques centimètres les séparer. Leurs lèvres rentrent timidement en collision, mais la rousse s'écarte subitement.
— J'ai également ma part de responsabilité dans tout cela. Je suis tombée amoureuse de toi. Cependant, tu as aimé le prince et non la princesse, avoue Miki en abaissant la tête.
Attristée face au silence de Laetitia, elle sort de la chambre. Des larmes coulent le long de ses joues. Cela fait si longtemps que Miki n'a plus pleuré qu'elle en a presque oublié la douleur qui accompagne ces marées d'écumes.
Les jours qui suivirent cette boucherie, le Roi fit parvenir aux habitants que la créature de la forêt maudite a été neutralisé. Cependant, elle a emporté avec elle sa fille bien-aimée durant cette soirée.
Ce tissu de mensonge qu'il a mis en place sert à calmer ses habitants, tandis que sa fille a complètement disparu aux yeux du peuple.
Elles vivent toutes les deux dans une maison assez petite bien qu'aux couleurs apaisantes. Les tons rose pastel se mêlant à la perfection avec un bleu clair permettent de créer une atmosphère relaxante pour Miki. Elle a été construite par le Roi dans une parcelle de son royaume. Elle se trouve aux alentours de son château. Bien qu'il ne le dise pas, il veut garder sa fille le plus proche possible de lui, quitte à devoir faire surveiller cette bâtisse. Après tout, elle séjourne avec une créature capable d'anéantir sa garde personnelle.
Deux fois par semaine, il envoie des vivres à ces deux-là. À chaque réception, elles énumèrent ce dont elles ont besoin pour la prochaine fois et il s'occupe de remplir leur besoin.
Elles dorment toujours dans deux chambres séparées à la demande de Miki qui n'a jamais expliqué la raison de ce choix. Elles ne se parlent presque pas. Elles ne partagent rien. Elles vivent comme deux ombres distinctes qui fuient au moindre effleurement avec son semblable. Miki sait qu'elle fait perdre son temps à la princesse et qu'elles ne pourront jamais vivre comme tout le monde. Un monstre n'a pas droit à l'amour et pourtant elle s'est voué à nourrir un amour à sens unique pour Laetitia qui – selon elle – ne l'aimera probablement jamais. Malgré cela, elle se refuse d'accepter la solitude. Quitte à priver cette jeune fille d'un quelconque futur, d'un mariage et d'avoir des enfants. Elle ne veut plus supporter cette solitude. Elle a besoin de sa présence, même si elle tout n'est que mensonge.
Parfois, elle observe la brune, tapis dans l'ombre. Elle contemple ses moments où elle lit durant des heures. Elle admire ses instants où elle essaye de cuisiner bien qu'il n'en résulte qu'un amas de fumée et de condiments brûlés. Puis, elle regrette ses nombreuses fois où elle a soupiré.
Aujourd'hui, Laetitia décide de se rendre dans la chambre de Miki. Elle porte encore sa chemisette de nuit. Lorsqu'elle pénètre dans la pièce, il n'y a aucun rayon de soleil qui traverse celle-ci. La plus petite dort sous le lit, tapis dans l'ombre comme une bête apeurée par la lumière du jour. Elle s'abaisse pour l'appeler, mais tout ce qu'elle a comme pour réponse ce sont les claquements de dents de cette entité qui lui ricane au nez.
— Miki ! hurle la princesse, affolée.
Elle se réveille en sursaut, ne manquant pas de se cogner la tête au lit. Elle se laisse glisser vers le côté pour rejoindre la princesse.
— Pardonne-moi de t'avoir réveillé… il m'a fait vraiment peur.
— C'est pour cela qu'on dort dans une chambre séparée, Lætitia. Qu'est-ce que tu fais là à une heure pareille ?
— Je voulais te parler.
— Que veux tu ? grommelle la rousse, irritée.
Intimidée par son humeur, elle s'enfuit de la chambre. Après un long soupir, la plus petite part à sa poursuite. Cependant, la princesse s'enferme dans la salle de bains.
— Ouvre. Je n'ai pas envie de casser une porte.
Elle l'ouvre en tremblant. Elle part aussitôt se réfugier contre la baignoire tout en resserrant ses genoux contre sa poitrine imposante.
— Pourquoi as-tu fui ? demande Miki, sceptique.
— Tu m'as vraiment fait peur.
Miki abaisse la tête, car elle se rend compte que tout ce qu'elle est capable de faire c'est de l'effrayer. Elle s'approche lentement et s'assoit à ses côtés.
— De quoi voulais-tu parler ?
— Du baiser, répond Laetitia en tournant la tête vers elle.
— Q-Quel baiser ? bégaye la rousse, gênée d'aborder ce sujet.
— Pourrais-tu m'embrasser encore une fois ?
Elle écarquille les yeux. Miki est entièrement paralysée durant quelques secondes par cette demande. Lorsqu'elle reprend ses esprits, elle refuse catégoriquement.
— Ma malédiction est dangereuse. On ne peut pas se permettre ce genre de rapprochement.
— On le peut, assure la princesse. Tends-moi ta main.
Miki obéit, bien qu'elle soit réticente aux premiers abords. Cependant, elle est incapable de refuser une telle demande à Laetitia qui la fixe intensément. L'entité en question ne cesse de faire des pitreries en tirant sa langue de façon grossière et très suggestive. La princesse lui prend la main, déterminée, alors qu'il s'apprête d'ores et déjà à la mordre. Dans un élan de folie et de naïveté, elle dépose ses lèvres au coin des siennes. Il stoppe tout mouvement, déconfit d'un tel geste.
— Pourrais-tu nous laisser tranquilles ? S'il te plaît.
Il lui sourit avec tendresse, mais sa forme change subitement. Il a la gueule ouverte, prêt à l'avaler. Miki toujours munie d'un couteau « au cas où » se sectionne la main en poussant un hurlement de douleur. Un jet de sang émane de cette blessure et gicle directement sur le visage de Laetitia.
Le glouton se convulse à terre. Il se remue avec hargne. Il désire vivre et dévorer, mais la rousse plante sa lame en plein milieu de ce parasite pour l'achever. Laetitia part en courant, terriblement affectée par ce qui vient d'arriver. Elle est en plein désarroi. Elle reprend son souffle puis elle se ressaisit. Elle y retourne. Elle ramasse dans cette débandade de quoi arrêter les saignements de Miki. Elle se rue vers la salle de bain pour désinfecter la blessure. Elle lui effectue d'un mouvement fébrile un bandage imparfait, pendant que des sanglots la submergent.
— Pourquoi est-ce que tu pleures ? demande Miki. J'avais déjà décidé d'agir au moindre écart. Cela faisait des jours qu'il n'arrivait plus à se contenir. Il avait besoin de chair humaine et c'était hors de question qu'il…
— C'est encore de ma faute, balbutie la princesse, accablée. Tu ne devrais pas m'aimer, je ne t'apporte que du malheur!
La rousse esquisse un sourire, rassurée de la voir aussi inquiète.
— Lala ? demande la plus petite, faiblement.
Lorsque celle-ci relève la tête suite à son appel, Miki dépose ses lèvres sur les siennes. Elles se remuent aussitôt à l'unisson. La bouche entrouverte de la brune permet à Miki de s'y faufiler. Sa langue serpente jusqu'à elle, l'entraînant dans cet échange salivaire. Elles se perdent et se retrouvent dans cette valse empourprant leurs joues. Leurs corps redécouvrant mutuellement l'effervescence d'une telle liaison.
— Et maintenant, on peut établir un lien… pas vrai ? demande Lala en lui souriant avec affection.
— Oui.
Elles s'embrassent de nouveau, profitant de l'extase de ce moment tant rêvé par l'une et pour le moins imprévisible pour l'autre.
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