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Paranoïa

Assise sur un banc, je n’ose pas regarder autour de moi. Les ténèbres me lacèrent de frissons, des pieds à la nuque, et de la nuque aux pieds. L’abri de bus me regarde, malveillant au possible. Je sens ses mains fermes se poser sur mes épaules, et tenter de m’étouffer discrètement. S’il réussit ? Y’aura-t-il quelqu’un pour me sauver ? Non. Même la lune est cachée derrière les nuages ce soir. Le piano joue un air que je connais bien, je ne me rappelle plus très bien lequel, mais je le connais. Soudain une lumière apparait, elle semble lointaine, mais je sais pertinemment qu’elle se rapproche. Et plus le temps passe, plus elle s’approche et me dévisage. Je suis pétrifiée, pourquoi je suis toujours putain de pétrifiée ! Je ne peux pas bouger, le vent m’attrape dans ses longs bras terrifiants et m’empêche de bouger. Pendant ce temps-là les mains sur mes épaules me prennent par le cou. Bordel elle vont me tuer ! Il faut que je sorte de là le plus vite possible. Je vais crever, je vais crever, je vais crever ! Cette musique ! Mais oui ! Je m’en souviens maintenant. La lumière se rapproche, se rapproche, elle me colle. C’est comme on le dit ! La lumière au bout du tunnel ! Arg ! je ne peux plus respirer, s’en est fini ! Cette musique ! c’est la dernière que j’entendrais… Je savais bien qu’elle me disait quelque chose…

Le bus s’arrête, je reprends mon souffle, et m’assoie aux plus près du conducteur. Le bus est-il vide ?

L’abri bus ne risque plus de me tuer, le conducteur est là, il l’en empêchera. Le son du moteur qui ronronne me rassure, mais je sais qu’il veut me dire quelque chose… Il le répète en boucle. Dé… Dé-toi ? Non, je dois halluciner. Le siège m’enveloppe et me réchauffe. Une odeur perce mes narines, une odeur de sang, acide et triste. On dirait… On dirait un cadavre pourri ! Bordel mais non… Je ne veux plus, laissez-moi en paix ! Je n’ai rien demandé, je ne veux plus ! Ce n’est plus amusant. Le moteur semble parler maintenant plus clairement que jamais ! Derrière toi ! derrière toi derrière toi ! Je ne veux pas me retourner, mais je sens plus que jamais un sourire malveillant me lécher le dos. Le siège me prends dans ces bras pour me réconforter… Mais il me serre fort… Très fort… Trop fort ! Nan merde, j’étouffe ! Je crève ! Je crève ! Je ne me retourne pas, je veux mourir dans l’ignorance de ce qui me tue. A l’aide ! Le putain de chauffeur ne m’aide pas ! Viens là pauvre con ! Oh il se retourne ! « Dernier arrêt M’dame ». La siège me lâche d’un coup… Je regarde derrière moi, mais mon agresseur n’est pas là. Il n’y a que ce fichu sandwich au bacon moisit.

Je prends mon sac, et m’empresse de sortir, la boule au ventre.

La rue est sombre, elle me fixe du regard. Qu’ont-ils tous à me regarder ce soir ? Laissez-moi en paix ! Je croise un homme dans la rue, il est 2h du matin. Je n’ai pas peur de lui, je le regarde, il passe son chemin. Mais je sens qu’il se retourne, hésite, et repars. J’arrive enfin devant la porte de mon appartement. Que vais-je y trouver ? Un cadavre peut être ? Cet autre homme que j’ai vu dans la rue ? Puis dans un hôtel, puis dans son lit ? Il le sait. J’ai peur, la porte m’a déjà attrapé, je ne peux plus repartir. L’amour est-il si fort et intense qu’il en fait couler le sang ? L’amour est aussi bleu que le ciel, mais faut-il toujours que mon corps soit aussi bleu que l’amer ? J’étouffe bordel, encore, j’étouffe. Je veux crever, et je sais qu’il me suffit seulement de passer cette porte pour me retrouver aux enfers. Il me tarde d’y être, apaisée, l’esprit calme et reposé. La poignée est plus froide encore que la mort. Comment le sais-je ? Car j’étouffe.

Mon mari se jette sur moi, et un couteau près de mon visage, il arbore un large sourire.

Merlin de Broceliande, 2021


Texte publié par Les Contes de Papy, 22 janvier 2021 à 14h18
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