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Berrättelsüet om snölandjä - Les contes du pays de la neige
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tome 1, Chapitre 5 « Fisken kunde präta – Le poisson qui pouvait parler » tome 1, Chapitre 5

Un riche commerçant,

Qui, année après année, se faisait vieillissant,

Avait trois fils.

Le premier était bon négociateur,

Le second habile vendeur,

Le dernier guère estimé mais d’une grande malice.

Soucieux alors de céder au plus méritant son commerce florissant,

Le père un jour convoqua ses trois fils :

« Mes enfants, votre vieux père est fatigué,

Et à présent, à l’un d’entre vous le fruit de toute ma vie je veux dédier,

Mais à qui ? Qui est le plus méritant ? »

L’aîné s’était avancé :

« Père, je suis votre premier né.

N’est-ce point mon devoir que de vous hériter ? »

Le père, d’un geste de la main, sa plaidoirie avait fait cesser.

« De ton talent, je ne doute,

Mais à tous, une chance égale je souhaite donner.

Alors écoutez mes enfants, écoutez.

A celui qui trouve et rapporte le bien que je lui mande,

A celui-là, le commerce reviendra.

Mon aîné, toi qui est ma première fierté,

Récolte au plus haut des monts les perles de pluie que la déesse Âsa,

Pleurant la mort de son enfant, de ses yeux laissa échapper.

Mon cadet, toi qui est ma seconde fierté,

Retrouve au plus profond des bois,

La navette que la déesse Freja,

Abandonnant son état divin, à nous autres céda.

Mon benjamin, toi qui a encore tout à prouver,

Au seigneur des océans Per va dérober,

L’un des poissons parlants qui lui tiennent compagnie. »

Tous, n’osant contre la volonté de leur père s’élever,

S’en allèrent lors, tout à fait dépités.

Le plus jeune fils, vers la mer du nord s’était dirigé

Et sur le rivage s’était installé.

Pour sûr, il savait pêcher !

Mais comment pêcher un poisson sachant parler ?

Tout le jour demeura, toute la nuit veilla,

Mais au petit matin, le malheureux désespéra.

Un poisson qui parlait, cela n’existait pas !

Et observant sa dernière proie qui dans un baquet tournait,

En venait à espérer qu’il s’exprime soudain.

Mais l’animal, indifférent à ses peines,

Tournait, tournait, toujours muet.

Sur le port, un orgue de barbarie chantait,

Attirant l’attention du malheureux pêcheur,

Un vieillard faisait tourner la manivelle,

Et d’un geste de la main, l’invitait à s’approcher.

« Petit, tu sembles bien en peine,

Confie-toi à moi, sans doute pourrai-je t’aider ?

Je ne suis point bien brillant, je l’admets,

Mais l’âge m’a appris à être futé. »

Alors le jeune homme s’autorisa à confesser,

Ses peines, ses tracas, le défi qui l’obsédait.

Le vieillard écoutait patiemment, sans rien ajouter,

Puis lorsqu’il eut fini, s’empressa de lui confier :

« Drôle est ton père, je me permets de te l’avouer,

Sans doute a-t-il cherché à vous tromper,

Pour voir lequel d’entre vous était le plus déterminé.

Mais hélas, puisque tu m’as demandé la vérité,

Il n’y a point de poisson parlant en ces flots, je puis te l’assurer. »

Le malheureux garçon, sentant en lui le chagrin pointer,

D’une voix pleine de sanglots osa demander :

« Que puis-je faire, pour honorer l’épreuve de mon père,

Si vous m’assurez qu’un poisson sachant parler n’existe point en cette mer ?

Suis-je donc condamné à rentrer bredouille,

Quand mes frères, je n’en doute, reviendront avec leurs trésors et les honneurs ? »

Le vieillard alors, lui adressant un sourire édenté,

A son oreille vint lui murmurer :

« Je puis t’apprendre à faire parler les objets,

Les animaux, les fleurs, les arbres et les forêts,

Pour peu que tu y mettes du cœur et de la détermination,

Tu ne rentreras point déshonoré en ta maison. »

Deux jours et deux nuits, le benjamin apprit,

Deux jours et deux nuits, le vieillard l’avait instruit,

Alors quittant le rivage, son poisson dans un large baquet,

Remerciant son maître, en sa contrée s’en était retourné.

Avait trouvé en la demeure de son père ses deux frères aînés,

Qui, à son image, étaient épuisés,

Et dans leur poing bagage serraient.

Leur père leur avait mandé de lui présenter,

Les biens qu’il avait auparavant exigés.

L’aîné s’avança, dévoila un petit tas de perles immaculées,

Brillantes, rondes et irisées.

« Père, tout en haut de Bergstädeä je suis monté,

Au sommet, un ermite ai-je trouvé,

Gardant les larmes de notre aimée déesse, il me céda,

Quelques perles de pluie, que vous voyiez là en petit tas. »

Le père, admiratif, devant ses yeux porta,

Une perle, puis deux, puis trois,

Et soupirant, à son fils déclara :

« Ce ne sont que des perles que tu m’as apporté là,

De superbes perles, mais hélas point celles de la déesse Âsa. »

Le second alors avait osé,

Devant son père son trésor déballer.

« Père, voici la navette de la déesse Freja,

Qui au cœur d’une forêt dense était oubliée.

Je l’ai prise alors, non sans omettre,

D’adresser à notre déesse mes respects éternels. »

La navette, pour sûr, était usée,

Le vernis était craquelé, le bois fatigué,

Et à première vue, rien n’aurait pu permettre de douter.

Mais le père, par trop méfiant peut-être,

De son ongle gratta la navette, et avec surprise découvrit,

Que l’on l’avait trompé, et qu’il ne s’agissait que d’un simple outil neuf

Qu’à l’aide de peinture et de cendres, l’on avait rendu âgé.

« Ce n’est point charitable, mon fils, d’ainsi me tromper.

Car regarde par toi-même, ta supercherie est éhontée !

Recule donc, va te cacher derrière ton aîné,

Qui lui, au moins, a eu la prétention d’essayer ! »

Le dernier, avec fierté, s’était avancé,

Posant aux pieds de son père un magnifique brochet,

Qui dans son baquet sans discontinuer tournait.

« Père, vous m’aviez demandé de vous ramener,

Le poisson parlant du dieu des océans.

Voyez, la Providence me l’a fait pêcher !

Que souhaitez-vous donc, mon père, qu’il vous conte ? »

Le père, examinant la bête, exigea alors une fable.

Et le poisson, devant ses yeux, se mit à parler.

« Mon fils, s’écria-t-il, quelle sorcellerie est-ce cela ? »

« Point de sorcellerie, ce n’est qu’un poisson qui parle, lui répondit le benjamin. »

Le père alors s’étant relevé,

Suspicieux, craignant que tricherie il n’y ait,

S’était éloigné, observait la scène,

Exigea cette fois une pastorale du pays.

Et le poisson chanta avec entrain et une voix fort jolie.

Le père, ne pouvant prouver la malice de ce tour,

Désigna alors son benjamin comme héritier,

Sans jamais savoir que ce fils, qu’il pensait si peu futé,

Sans aucune honte, l’avait berné.


Texte publié par Yukino Yuri, 5 décembre 2020 à 23h11
© tous droits réservés.
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