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À l’entrée de la grotte, Esther avait marqué une hésitation. Même si les larmes de ciel ne tombaient plus, le froid l’habitait toujours. À ses pieds, la chose ombre ouvrit un œil et posa sur elle un regard morne.

— Oui, les habitants des cieux le peuvent, mais l’avidité ourle leur cœur, ronronnait l’étranger.

— Qu’à cela ne tienne, je saurai m’en démettre ! Me retiendrez-vous !

Derrière elle, l’homme éclata de rire.

— Moi ? Te retenir ? Qui suis-je ? Ni ta mère ni ton père. Ton père-mère respecta ta décision, je ferai de même.

— Alors pourquoi cette chaîne que vous me passez autour du cou ?

Raide, elle ne se retournait pas, sachant que si, de nouveau, elle affrontait son regard, elle renoncerait ; dans le ciel, la lune demeurait voilée dans son cocon d’éternité.

— Il n’est de chaînes que celles que tu te forges et dont tu te pares. Pars si tel est ton souhait, je te suivrai seulement ; il y a bien longtemps que je n’appartiens plus au monde des hommes. Dans leur langue, il me nomme Stjörauga, l’œil-étoile.

Esther quitta la caverne. Autour d’elle, les épines des sapins bruissaient sous le vent glacé. Elle pouvait ouïr de temps à autre des pas que la neige étouffait, et cela la poussait à demeurer sur ses gardes. Dans son dos, elle sentait Stjörauga se glisser sur le gel, son œil levé vers les étoiles.

Elle avait traversé les bois un long moment, tentant de percevoir entre les branches touffues des conifères les étoiles lorsqu’elle pénétra dans une clairière qui dégageait le ciel.

— Menez-moi auprès de la pierre de lune, murmura-t-elle aux astres scintillants.

Et les étoiles dans les ténèbres alors se mouvèrent.

Mais alors qu’elles mouvaient, une à une, elles s’éteignaient, comme si quelques géants les soufflaient. Bientôt, la voûte ne fut plus qu’un champ de ténèbres percées de quelques points de lumière, que la lune aveugle ne pouvait vaincre, cependant qu’un vague murmure envahissait peu à peu les lieux.