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Merci à Nascana de nous proposer cette petite liste de mots pour me permettre de mitonner, comme une recette, ce petit texte gastronomique : montagne, oxygène, enclume, savon, laver, tigre, gare, agiter, anecdote, chaussure.

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Derrière une montagne de dossiers, dans un petit bureau encombré, M. Scrob finissait ses écritures. Bientôt, 6 heures p.m allaient sonner et il quitterait la poussière des actes notariés pour sortir prendre un peu l'air, un bon bol d'oxygène en marchant dans Regent's Park, comme chaque soir.

M. Scrob avait toujours vécu à Londres et il avait toujours travaillé comme clerc pour Wilson & Wilson. Il portait toute l'année le même costume, veste de tweed et pantalon brun. Après sa promenade rituelle, il passerait au pub boire une bière en bonne compagnie, comme d'habitude, avant de rentrer chez lui.

Ce soir-là, Bob, Garry et John se racontaient des anecdotes croustillantes autour d'une petite table, ils riaient bien et M. Scrob commanda une double-stout et se joignit à eux.

- Bob ! Raconte-nous l'histoire de ta cuisinière française ! Tu veux bien...allez !

Bob fit quelques mimiques comiques, il recula un peu sa chaise afin d'être à l'aise pour raconter et d' accompagner son récit de toute une gestuelle, comme il le faisait toujours.

- Eh bien, ma femme Abby et moi, il y a quelques années nous avons eu l'opportunité de rencontrer Constance Friand lors d'un séjour en Bourgogne. Elle tenait des chambres d'hôtes fort agréables et assurait les repas du midi, un vrai régal, mes amis !

Ceux-ci s'amusaient déjà de l'histoire qu'ils connaissaient bien, mais racontée par Bob , on ne s'en lassait jamais. Celui-ci reprit :

Elle nous écrivit un jour qu'elle venait de divorcer et qu'elle aurait aimé vivre à Londres, près de sa fille, nous demandant si nous avions des adresses pour l'aider à trouver un emploi.

- " Oh ! la la !" dit-il en se frottant les mains, entre Abby et moi, un seul regard a suffi : Constance serait notre cuisinière ! Bonjour la France ! Les sautés de veau, les blanquettes et les coqs au vin ! Chaque repas serait une fête, vite, nous avons répondu à sa lettre, lui offrant un bon salaire et une chambre dans notre cottage, si elle le désirait.

L'affaire fut conclue et Constance arrivant à King's Cross, le premier du mois de mars, je devais aller la chercher en voiture, au train de 5 h 32 p.m. Il ne fut pas difficile de la repérer dans la foule des voyageurs vu son imposante stature, la largeur impressionnante de ses hanches et son ample poitrine. Elle portait deux grosses valises dont je m'empressais de la décharger, mais j'eus toutes les peines du monde à les emmener jusqu'au coffre de la voiture, tant elles étaient lourdes ! Diable, on aurait dit qu'elle avait mit quatre ou cinq enclumes, dans chacune !

Et le conteur mimait la scène, ses bras touchaient quasiment le carrelage gris du pub, pour donner une impression d'extrême pesanteur.

Constance s'installa dans une de nos chambres. Le bus de la route 74 lui permettant aisément de rejoindre Chelsea, le quartier où habitait sa fille. Ensuite, elle ré-installa une partie de la cuisine, expliquant qu'il lui fallait avoir " tout sous la main" pour cuisiner correctement. Elle acheta des ingrédients dont ni Abby, ni moi ne connaissions les doux noms : coriandre, origan, tapioca, maïzena ! Tandis que les placards se remplissaient, elle récurait au savon de Marseille des cocottes en fonte et autres nouveaux plats à mijoter, indispensables à ses préparations...

Abby et moi étions ravis. C'était comme la répétition d'un grand spectacle, les décors s'organisaient, les rôles étaient distribués et nous n'attendions que le moment où les odeurs de la Bonne Cuisine Française feraient leur apparition, dans notre maison !

L'auditoire, dont M Scrob, était accroché aux lèvres de Bob et les bouches commençaient à saliver en imaginant les mets recherchés et les succulents diners.

Après deux ou trois jours de ces préparatifs, elle nous demanda ce que nous souhaitions manger. Trop contents des talents de Constance à notre service, nous n'avions même pas envisagé un menu particulier. De toute façon, tout ce qu'elle cuisinait était un enchantement ! Ayant carte blanche, elle confectionna un velouté d'asperges, des escalopes panées avec jardinière de petits légumes et une tarte-tatin avec sa crème fouettée et sa boule de glace vanille. Il n'y a que pour les fromages que Constance s'exaspérait ... Aucun commerce londonien ne proposait le moindre fromage décent.

- "...ça ne fait rien Constance, disais-je en léchant mon assiette à dessert, tout cela est parfait, croyez-moi et j'ai si bien mangé que je n'aurais pas eu de place, pour faire honneur à un plateau de fromages !

Elle repartait en cuisine avec tous les plats vides car elle refusait de s'asseoir à notre table :

- " J'ai bien trop à faire ! Surveiller la cuisson ! Que ma crème reste légère et que la glace ne fonde pas ! Pensez ! Je n'ai guère le loisir de me prélasser à table ! Mais soyez sans crainte, je me suis réservé ma petite part.

Ah, Constance ! C'est comme dans un rêve que grâce à vous, nous dînions maintenant ! Toute la journée, je me réjouissais de rentrer pour ce petit bonheur du soir et je repensais avec tendresse au poulet basquaise, au gratin dauphinois, aux profiteroles de la veille...

Constance était un cordon bleu et en plus, elle était discrète et souriante ne perturbant en rien l'ambiance paisible de notre maison et y ajoutant les saveurs et les plaisirs de la Haute Gastronomie. Par contre aux heures des repas, il ne fallait pas entrer dans la cuisine . Même pas pour se laver les mains ou prendre une boisson dans le frigo, elle ne supportait aucune intrusion. C'est un tigre, toutes griffes dehors, qui vous recevait ! Gare aux rugissements de la cuisinière en colère et elle nous reconduisait prestement loin de ses fourneaux :

- " Vous allez me faire rater mon soufflet ! Mais ne me dérangez pas quand je bats les oeufs en neige, voyons !"

Alors, penauds, Abby et moi, battions en retraite. Chère Constance, elle était devenue la "Reine de notre cuisine", c'est vrai, mais nous lui devions tant de plats somptueux pour nous deux ou pour tous les invités que nous avons régalés, pendant des années.

Les amis, contents de cette récréation culinaire, finissaient leurs verres et on but à la santé de Constance et à la France !

Comme l'histoire était finie, M. Scrob salua la compagnie, à travers la vitrine du pub, il ne manqua pas d'agiter la main pour dire à nouveau "au revoir " , " à demain" et en repensant à cette jolie anecdote gastronomique, il prit le chemin du retour, en passant par Euston Road selon son habitude, afin de monter jusqu'à son studio, pour poser sa veste au porte-manteau de l'entrée, jeter ses chaussures sous le tabouret et se laisser tomber dans son canapé devant la télé, avant d'ouvrir une boîte de sardines, un paquet de chips, un yaourt et une compote. Puis, il regarda sa cuisine et n'imagina même pas un instant, qu'elle pourrait être envahie par une cuisinière. Et dans un sourire satisfait, il se servit une bière.

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Merci d'avoir lu ce petit récit et merci pour les mots que, si vous le souhaitez, vous pouvez me donner ....


Texte publié par Lisa D., 4 février 2020 à 21h40
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