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tome 1, Chapitre 53 « Des détails laissés en suspens (Part 2) » tome 1, Chapitre 53

Les allées se croisaient, s’entrecroisaient et n’en finissaient pas. Un temps infiniment long passa, sans qu’aucun ne fût en mesure de le mesurer. La notion ne semblait plus exister en un tel lieu. Et cela ne plaisait pas du tout à Cockatiel, qui sentait son angoisse revenir au galop. Son esprit était un vrai ascenseur émotionnel !

– Dites, vous n’avez pas l’impression que ça fait… longtemps, que nous sommes ici ?

Sytry interrompit son flot de paroles pour le regarder d’un air interrogateur.

– Cela dépend de ce que tu entends par ‘longtemps’ ; c’est assez subjectif, comme notion.

– Il est bien là, le problème, je suis incapable de dire depuis combien de temps nous sommes là ! Et vous ?

Picarel secoua la tête en signe de dénégation et Sytry haussa les épaules. Cockatiel se sentit suffoquer.

– Et ça ne vous inquiète pas plus que cela ?

– C’est le Temple de Léviathan, tu sais, c’est un peu le principe. Tout est manipulé, ici, l’espace, le temps ! Léviathan est un sacré illusionniste. Tu pourrais même porter une montre qu’elle aurait des indications foireuses.

– Tu ne nous l’avais pas dit ! glapit Cockatiel. Il faut absolument quitter cet endroit !

– Bien sûr que si, je vous l’avais dit.

– Non !

– Peut-être de manière implicite, uniquement –

– Je ne parle pas le langage implicite démoniaque !

– Nous n’avons pas un langage implicite propre.

– Où est la sortie ?

– Oh, regardez, un plan ! s’écria Picarel avec enthousiasme, trop heureux de trouver un prétexte pour couper court à cet échange stérile qui le mettait entre deux feux.

Il désignait de l’index ledit plan, présenté sur un large écran incrusté dans le mur. Cockatiel se jeta dessus avec désespoir, suivi de près par les deux autres. Alors que ces derniers arrivaient à peine à sa hauteur, il couina de désespoir avant de se laisser glisser au sol, abattu.

– Nous sommes fichus, ce plan n’indique rien du tout, gémit-il. Et c’est sans fin.

Déconcerté par ces paroles sibyllines, Picarel l’examina à son tour. En plus d’être alambiqué, mêlant les divers étages – qui allaient de trois à six, selon les endroits et les moments – il était changeant et aléatoire. Des boutiques disparaissaient, remplacées par d’autres, avant de réapparaître à une autre localisation. De plus, le plan ne se concentrait à chaque fois que sur une partie du centre commercial et balayait les différentes zones dans des flashs, sans indiquer où eux-mêmes se trouvaient. Conclure quoi que ce fût lui parut difficile.

– Peut-être ne fonctionne-t-il pas ? proposa-t-il. Nous devrions en trouver un autre.

Sytry gloussa.

– Cela ne changera rien, ils sont tous comme ça. Et je suis bien d’accord, ils ne servent strictement à rien. Ils démontrent juste ce qu’est le centre ; une structure perpétuellement en mouvement qui s’étire à l’infini et dont l’agencement change régulièrement.

– Quoi ?

– C’est le principe de l’envie ! Et pour cela, il ne faut pas que les clients prennent leurs repères, au risque de foncer uniquement dans leurs boutiques préférées. La disposition change régulièrement pour nous obliger à déambuler pour trouver ce que l’on cherche – et ce que l’on ne cherche pas forcément, aussi.

– Alors quand vous parliez de votre boutique qui risquait de partir…

– Qu’il arrive parfois que tu n’aies pas de chance, qu’elle te passe sous le nez et qu’elle ne disparaisse pour apparaître ailleurs, et donc que tu doives encore la chercher. Oui. Cela m’ait déjà arrivé, deux fois. C’est très agaçant. Mais d’autres aiment bien, ça leur fait penser à une partie de cache-cache.

Ils trainèrent Cockatiel sur quelques mètres avant qu’il ne daignât se relever, puis ils reprirent leur marche.

– Et comment trouve-t-on la sortie, dans cette chose sans fin ?

– Comme n’importe quel centre commercial, en trouvant une porte, quelle question ! Bien sûr, comme les boutiques, elles changent de place. Mais bon, il y en a plusieurs, alors tu finis bien par tomber sur l’une d’entre elles ! A la création de ce complexe, il n’y en avait qu’une, mais comme la plupart des démons n’arrivait pas à en sortir, cela a failli provoquer une guerre entre Léviathan et le reste de l’Enfer qui n’appréciait pas de voir disparaître ses subalternes, alors évidemment –

– Mais comment les trouve-t-on, dans ce cas ? geignit Cockatiel, qui se fichait de l’aspect historique, et qui se voyait déjà enfermé en ces lieux à perpétuité.

– Hey, Sytry ! Ça faisait un bail !

La démone qui venait de l’interpeller lui fit un signe de la main avant de se rapprocher. Elle était vêtue d’une robe rouge en résille et des bijoux dorés ornaient ses oreilles, ses poignets et ses cornes noires, qui tintaient au rythme de ses déhanchements. A son bras pendait un sachet en plastique.

Cockatiel se tendit. Picarel sut qu’il l’avait déjà vue, mais son nom lui échappait.

– Mahalath ?

Ah oui ! Chez Asmodée, l’amie d’Acha… Acha… Achalot ? Acharote ? Bref, il se souvenait d’elle. Il fut davantage surpris de la voir se coller à Sytry et lui voler un baiser.

– Je suis étonnée de te voir toujours en compagnie de celui-là ! gloussa la démone en pointant Picarel du doigt. C’est amusant, tu te lasses très vite, d’habitude. Tiens, et tu en balades aussi un deuxième ?

– Il est de Byleth, oui. Pouik.

– Pouik ? Quel nom absurde.

Ledit Pouik n’osa pas protester, horrifié à l’idée de provoquer une catastrophe en manifestant la moindre vexation. La démone semblait de bonne humeur mais savait-on jamais, leur race était très changeante et pas fiable le moins du monde.

– Tu es venue acheter de nouvelles menottes ? s’amusa Sytry.

– Eh non, mauvaise langue ! fit Mahalath en lui tirant la langue avant de désigner son sachet. Je suis juste venue acheter de la nourriture pour mes limaces, les pauvres, je n’avais plus rien pour elles. Je leur ai pris quelques jouets au passage.

– Des jouets ? s’étonna Cockatiel. Mais que ferait une limace d’un jouet ?

– Jouer, que veux-tu qu’elles fassent d’autre ? répliqua la démone, cynique.

Picarel se demanda quelle était la nature des jouets en question – histoire d’en prendre pour Nana, une fois qu’il l’aurait retrouvée… Cependant, il n’osa pas demander. Déjà, elle tapotait l’épaule de Sytry, avant de les quitter.

Il demanderait à Sytry, à l’occasion. Peut-être le saurait-il.


Texte publié par Ploum, 15 octobre 2022 à 15h14
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